Texte intégral
Monsieur le ministre, Monsieur le Préfet, Monsieur le Vice-Président du Conseil régional, Monsieur le Président du Conseil Général, Messieurs les parlementaires, Mesdames et messieurs les élus, Monseigneur, Monsieur le Grand Rabbin, Monsieur le Président de l'association de la maison d'Izieu, Mesdames et messieurs les présidents d'associations, Mesdames et messieurs,
" Ici, le 6 avril 1944 la Gestapo arrêta et déporta 44 enfants et 7 adultes, parce que nés juifs. Cinquante furent exterminés à Auschwitz et Reval "
Le souvenir de ce moment terrible de notre histoire est gravé ici, sur une stèle qui rappelle les persécutions racistes et antisémites commises entre 1940 et 1944.
Ici, la barbarie s'est affrontée au dévouement le plus absolu.
Ici, grâce à Miron ZLATIN, qui mourut fusillé en juillet 1944, et à son épouse Sabine, des enfants furent accueillis. Ici, grâce au dévouement de la population locale, d'hommes et de femmes exceptionnels, tel Pierre Marcel Wiltzer le sous-préfet de Belley, ces enfants purent vivre des moments de réconfort et d'une vie toute simple.
Mais ici aussi s'acheva, en ce jour terrible du 6 avril 1944, un moment d'enfance et d'innocence.
La maison d'Izieu est aujourd'hui vouée à leur mémoire.
En inaugurant la nouvelle exposition du Pavillon français du musée mémorial d'Auschwitz, le 27 janvier prochain, le Président de la République aura l'occasion de rappeler, à travers la personne de Georgy HALPERN, la mémoire de ces enfants odieusement assassinés. Arrêté à Izieu, Georgy mourut gazé, dès son arrivée à Auschwitz, le 18 avril 1944, à l'âge de 9 ans.
En visitant cette maison, en voyant les souvenirs rassemblés de ces vies brisées, j'ai profondément ressenti l'obligation du témoignage. Non pas d'un témoignage culpabilisant mais d'un témoignage pour la vie.
Le dialogue que je viens d'avoir avec Samuel PINTEL qui fut rescapé de ces journées terribles, avec Edith MOSKOVIC enfant cachée qui vécut des moments combien douloureux durant cette période m'ont renforcé dans cette conviction
Rappeler ces moments, rappeler cette souffrance, rappeler cette horreur, c'est aussi rappeler qu'au delà de la nuit, des valeurs intangibles demeurent dans notre pays.
Le département de l'Ain, l'a d'ailleurs magnifiquement montré pendant la seconde guerre mondiale.
L'Ain est une terre de résistance.
Le Général de Gaulle le rappela dans ses mémoires de guerre en évoquant la journée du 11 novembre 1943 durant laquelle le colonel ROMANS-PETIT, après avoir occupé OYONNAX, passa ses troupes en revue devant le monument aux morts, les faisant défiler à travers toute la ville au milieu de l'émotion populaire. Ce département compte trois villes médaillées de la résistance française et dix huit communes qui ont fait l'objet d'une citation et sont titulaires de la croix de guerre pour faits de résistance.
Faire vivre la République, c'est rappeler que certaines valeurs sont imprescriptibles.
Au centre de toute société doit être placé le principe d'humanité. Celui-ci implique nécessairement une politique active de défense de la liberté et de recherche de la fraternité, fondée sur le respect de la vie et de la personne.
Ici, à Izieu, je veux simplement dire que ces idées doivent vivre tous les jours dans notre société.
Izieu fut d'abord une école. Lors de l'inauguration de cette maison, le Président de la République, François MITTERRAND formait le vu qu'elle devienne une école de vie.
Rappeler aujourd'hui la mémoire de ceux qui ont uvré pour que la maison d'Izieu vive, rappeler la mémoire des martyrs de cette maison, c'est contribuer à la vie de notre pays.
Une société sans passé est une société morte. Une société sans valeurs est une société morte. Une société repliée sur ses égoïsmes est une société morte.
La France, aujourd'hui comme hier, est une nation vivante, accueillante. Notre pays à une longue tradition d'ouverture, d'accueil, dans le respect de son histoire et de ses traditions. Il nous appartient de faire vivre cette tradition.
Mesdames, messieurs,
Depuis quelques années, des actes et manifestations de cet antisémitisme que l'on croyait éradiqué, sont réapparus.
L'antisémitisme est une déviance de l'esprit humain, il insulte les valeurs de notre République. C'est bien pourquoi depuis près de trois ans, mon gouvernement a pris de multiples mesures afin de lutter contre la résurgence de cette hydre.
Au-delà des indispensables mesures de répression des auteurs d'actes antisémites et de sécurisation des établissements de la communauté juive, c'est surtout le travail éducatif qui doit être privilégie. Dans nos sociétés, la transmission de la mémoire est un enjeu majeur.
A l'heure où les images satellitaires et le réseau Internet diffusent indistinctement toutes sortes d'images et de messages à un rythme accéléré, la capacité à comprendre les informations passe d'abord par une connaissance réelle de son environnement et de son histoire.
Notre responsabilité, à nous adultes, est de faire prendre conscience aux jeunes générations que le travail de mémoire n'est pas un exercice passéiste mais une nécessité pour vivre pleinement dans une société libre.
La communauté éducative est évidemment en première ligne dans ce combat et le département de l'Ain, qui compte le seul lycée civil médaillé de la résistance, y est évidemment très sensibilisé.
Je sais le dévouement, la patience et la pédagogie de tous les enseignants qui oeuvrent en ce sens. Je sais le rôle que les enseignants, particulièrement, en histoire, jouent en ce domaine. Il me paraît indispensable que ce travail soit poursuivi avec constance.
C'est l'enjeu de l'enseignement sur la Shoah dont l'impérieuse nécessité est plus que jamais évidente.
La barbarie se nourrit d'abord de l'ignorance.
Dans un autre ordre d'idées, l'enseignement du fait religieux me paraît également indispensable. L'ignorance est en effet, à la base de bien des déviances.
Il ne s'agit évidemment pas dans mon esprit d'instaurer je ne sais trop quel enseignement du catéchisme dans l'école publique. Il s'agit de permettre aux jeunes de notre pays, bien souvent coupés de leurs racines historiques, de mieux les maîtriser. C'est pourquoi le gouvernement met actuellement en oeuvre les préconisations du rapport remis par Régis DEBRAY.
Je suis frappé lorsque je rencontre des représentants des différents cultes de notre pays de les sentir angoissés par la montée de l'inculture religieuse.
On le voit bien, dans tous ces domaines, l'enjeu est de permettre aux citoyens de demain d'avoir les moyens de faire vivre une société authentiquement fraternelle : " La force de la Cité est dans le caractère de ses citoyens " disait Thucydide. Vingt-cinq siècles plus tard, l'adage est plus que jamais d'actualité.
Mesdames, messieurs,
Honorer la mémoire de ceux qui ont vécu à Izieu, ont souffert et sont morts dans les camps de concentration, c'est honorer la mémoire d'une société vivante.
Dans son discours du CHAMBON-SUR-LIGNON, le Président de la République nous invitait tous à rappeler à nos enfants que " l'histoire de la Nation française est jalonnée de combats qui ont inscrit la tolérance et la protection du plus faible au premier rang de nos principes ".
Puisse la mémoire des enfants d'IZIEU nous inspirer dans le travail que nous effectuons quotidiennement pour que vivent les valeurs de la République.
Je vous remercie.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 25 janvier 2005)
" Ici, le 6 avril 1944 la Gestapo arrêta et déporta 44 enfants et 7 adultes, parce que nés juifs. Cinquante furent exterminés à Auschwitz et Reval "
Le souvenir de ce moment terrible de notre histoire est gravé ici, sur une stèle qui rappelle les persécutions racistes et antisémites commises entre 1940 et 1944.
Ici, la barbarie s'est affrontée au dévouement le plus absolu.
Ici, grâce à Miron ZLATIN, qui mourut fusillé en juillet 1944, et à son épouse Sabine, des enfants furent accueillis. Ici, grâce au dévouement de la population locale, d'hommes et de femmes exceptionnels, tel Pierre Marcel Wiltzer le sous-préfet de Belley, ces enfants purent vivre des moments de réconfort et d'une vie toute simple.
Mais ici aussi s'acheva, en ce jour terrible du 6 avril 1944, un moment d'enfance et d'innocence.
La maison d'Izieu est aujourd'hui vouée à leur mémoire.
En inaugurant la nouvelle exposition du Pavillon français du musée mémorial d'Auschwitz, le 27 janvier prochain, le Président de la République aura l'occasion de rappeler, à travers la personne de Georgy HALPERN, la mémoire de ces enfants odieusement assassinés. Arrêté à Izieu, Georgy mourut gazé, dès son arrivée à Auschwitz, le 18 avril 1944, à l'âge de 9 ans.
En visitant cette maison, en voyant les souvenirs rassemblés de ces vies brisées, j'ai profondément ressenti l'obligation du témoignage. Non pas d'un témoignage culpabilisant mais d'un témoignage pour la vie.
Le dialogue que je viens d'avoir avec Samuel PINTEL qui fut rescapé de ces journées terribles, avec Edith MOSKOVIC enfant cachée qui vécut des moments combien douloureux durant cette période m'ont renforcé dans cette conviction
Rappeler ces moments, rappeler cette souffrance, rappeler cette horreur, c'est aussi rappeler qu'au delà de la nuit, des valeurs intangibles demeurent dans notre pays.
Le département de l'Ain, l'a d'ailleurs magnifiquement montré pendant la seconde guerre mondiale.
L'Ain est une terre de résistance.
Le Général de Gaulle le rappela dans ses mémoires de guerre en évoquant la journée du 11 novembre 1943 durant laquelle le colonel ROMANS-PETIT, après avoir occupé OYONNAX, passa ses troupes en revue devant le monument aux morts, les faisant défiler à travers toute la ville au milieu de l'émotion populaire. Ce département compte trois villes médaillées de la résistance française et dix huit communes qui ont fait l'objet d'une citation et sont titulaires de la croix de guerre pour faits de résistance.
Faire vivre la République, c'est rappeler que certaines valeurs sont imprescriptibles.
Au centre de toute société doit être placé le principe d'humanité. Celui-ci implique nécessairement une politique active de défense de la liberté et de recherche de la fraternité, fondée sur le respect de la vie et de la personne.
Ici, à Izieu, je veux simplement dire que ces idées doivent vivre tous les jours dans notre société.
Izieu fut d'abord une école. Lors de l'inauguration de cette maison, le Président de la République, François MITTERRAND formait le vu qu'elle devienne une école de vie.
Rappeler aujourd'hui la mémoire de ceux qui ont uvré pour que la maison d'Izieu vive, rappeler la mémoire des martyrs de cette maison, c'est contribuer à la vie de notre pays.
Une société sans passé est une société morte. Une société sans valeurs est une société morte. Une société repliée sur ses égoïsmes est une société morte.
La France, aujourd'hui comme hier, est une nation vivante, accueillante. Notre pays à une longue tradition d'ouverture, d'accueil, dans le respect de son histoire et de ses traditions. Il nous appartient de faire vivre cette tradition.
Mesdames, messieurs,
Depuis quelques années, des actes et manifestations de cet antisémitisme que l'on croyait éradiqué, sont réapparus.
L'antisémitisme est une déviance de l'esprit humain, il insulte les valeurs de notre République. C'est bien pourquoi depuis près de trois ans, mon gouvernement a pris de multiples mesures afin de lutter contre la résurgence de cette hydre.
Au-delà des indispensables mesures de répression des auteurs d'actes antisémites et de sécurisation des établissements de la communauté juive, c'est surtout le travail éducatif qui doit être privilégie. Dans nos sociétés, la transmission de la mémoire est un enjeu majeur.
A l'heure où les images satellitaires et le réseau Internet diffusent indistinctement toutes sortes d'images et de messages à un rythme accéléré, la capacité à comprendre les informations passe d'abord par une connaissance réelle de son environnement et de son histoire.
Notre responsabilité, à nous adultes, est de faire prendre conscience aux jeunes générations que le travail de mémoire n'est pas un exercice passéiste mais une nécessité pour vivre pleinement dans une société libre.
La communauté éducative est évidemment en première ligne dans ce combat et le département de l'Ain, qui compte le seul lycée civil médaillé de la résistance, y est évidemment très sensibilisé.
Je sais le dévouement, la patience et la pédagogie de tous les enseignants qui oeuvrent en ce sens. Je sais le rôle que les enseignants, particulièrement, en histoire, jouent en ce domaine. Il me paraît indispensable que ce travail soit poursuivi avec constance.
C'est l'enjeu de l'enseignement sur la Shoah dont l'impérieuse nécessité est plus que jamais évidente.
La barbarie se nourrit d'abord de l'ignorance.
Dans un autre ordre d'idées, l'enseignement du fait religieux me paraît également indispensable. L'ignorance est en effet, à la base de bien des déviances.
Il ne s'agit évidemment pas dans mon esprit d'instaurer je ne sais trop quel enseignement du catéchisme dans l'école publique. Il s'agit de permettre aux jeunes de notre pays, bien souvent coupés de leurs racines historiques, de mieux les maîtriser. C'est pourquoi le gouvernement met actuellement en oeuvre les préconisations du rapport remis par Régis DEBRAY.
Je suis frappé lorsque je rencontre des représentants des différents cultes de notre pays de les sentir angoissés par la montée de l'inculture religieuse.
On le voit bien, dans tous ces domaines, l'enjeu est de permettre aux citoyens de demain d'avoir les moyens de faire vivre une société authentiquement fraternelle : " La force de la Cité est dans le caractère de ses citoyens " disait Thucydide. Vingt-cinq siècles plus tard, l'adage est plus que jamais d'actualité.
Mesdames, messieurs,
Honorer la mémoire de ceux qui ont vécu à Izieu, ont souffert et sont morts dans les camps de concentration, c'est honorer la mémoire d'une société vivante.
Dans son discours du CHAMBON-SUR-LIGNON, le Président de la République nous invitait tous à rappeler à nos enfants que " l'histoire de la Nation française est jalonnée de combats qui ont inscrit la tolérance et la protection du plus faible au premier rang de nos principes ".
Puisse la mémoire des enfants d'IZIEU nous inspirer dans le travail que nous effectuons quotidiennement pour que vivent les valeurs de la République.
Je vous remercie.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 25 janvier 2005)