Interview de M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, à l'Agence France Presse le 22 février 2005, sur la proposition française de créer une Agence de l'ONU pour l'environnement pour coordonner tous les accords internationaux signés sur l'environnement.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : 22ème session du Conseil d'administration - forum ministériel mondial sur l'environnement du Programme des Nations unies pour l'environnement à Nairobi (Kenya) le 22 février 2005

Média : Agence de presse

Texte intégral

Q - Pourquoi cette proposition française d'une Agence de l'ONU pour l'environnement, alors que le PNUE est déjà en place ? N'est-ce pas superflu ?
R - Pas du tout, car une Agence et un Programme ne sont pas la même chose. Il est nécessaire, aujourd'hui, de coordonner tous les accords internationaux déjà signés sur l'environnement : il y en a plus de 200, contradictoires parfois. Or, les attributions du PNUE n'incluent pas cette mission de coordination.
Il faut aussi coordonner des actions, une réflexion pour l'avenir, comme l'Organisation mondiale de la Santé, l'Organisation des Nations unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO) ou l'Organisation mondiale du Commerce (OMC). Là encore, ce n'est pas du cadre de la mission du PNUE. La santé, l'alimentation et le commerce ont leur propre Agence, dotée d'autorité et de moyens dont le PNUE ne dispose pas, et il s'agit donc de hisser l'environnement à leur niveau.
Il n'est pas question d'affaiblir le PNUE, et la France défend son renforcement, sur le plan scientifique d'abord, car les grandes décisions planétaires sur l'environnement ont besoin de bases scientifiques.
Enfin, le PNUE ne rassemble que les pays qui veulent bien y adhérer. Mais tous les pays adhérents de l'ONU font automatiquement partie de ses Agences.
Q - Le Protocole de Kyoto sur les émissions de gaz à effet de serre, qui vient d'entrer en vigueur, n'est-il pas dépassé d'emblée, dès lors que les Etats-Unis ont refusé de le signer, et que la Chine et l'Inde, qui s'industrialisent à grande vitesse, en sont exonérées ?
R - Kyoto n'est pas dépassé, c'est une première étape qu'il faut franchir. Ce protocole prévoit de réduire de 5% les émissions de gaz à effet de serre, et il est déjà admis qu'il faudra les réduire de 50% d'ici 2050.
N'oublions pas que les pays qui mettent l'accord en uvre obligent les entreprises qui travaillent chez eux à le respecter : ce sera le cas, par exemple, des entreprises américaines qui travailleront en Europe. Et des Etats fédérés des Etats-Unis cherchent déjà à réduire les émissions de CO2, comme la Californie, où la loi limite les émissions des véhicules neufs. Tout cela aura un effet d'entraînement.
Quant à l'Inde et la Chine, elles bénéficieront à terme de l'amélioration des technologies, qui va améliorer la réduction des émissions.
Q - L'Afrique se plaint d'être laissée pour compte dans l'effort mondial de protection de l'environnement. Peut-elle garder espoir ?
R - En Afrique, protection de l'environnement et développement sont intimement liés. Si nous ne savons pas accompagner l'Afrique dans son environnement, c'est son développement qui est menacé, et c'est un enjeu majeur.
Il s'agit ici d'une population à laquelle la France est attachée. Et la France considère que le monde a une dette envers l'Afrique, pour tout ce que ce continent a subi à travers les siècles./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1e mars 2005)