Déclarations de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères, lors de points de presse conjoints avec M. Boris Tadic, président de Serbie, et Vuk Draskovic, ministre des affaires étrangères de Serbie-et-Monténégro, sur les relations entre la France et la Serbie-et-Monténégro et la situation au Kosovo, Belgrade le 23 juillet 2004.

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Circonstance : Voyage de Michel Barnier en Serbie-et-Monténégro les 22 et 23 juillet 2004

Texte intégral

(Déclaration de Michel Barnier lors du point de presse conjoint avec Boris Tadic, président de Serbie, à Belgrade le 23 juillet 2004) :
Merci, Monsieur le Président.
Mes premiers mots seront pour dire que cette rencontre que nous venons d'avoir avec Boris Tadic a été pour moi, représentant du gouvernement français lui apportant un message très cordial et très sincère du président de la République française, Jacques Chirac, un moment très important de cette première visite que j'accomplis dans les Balkans et en Serbie comme ministre français des Affaires étrangères.
C'est peu de dire qu'il y a entre le peuple serbe et le peuple français des relations anciennes, amicales, de proximité culturelle et donc c'est important que vous sachiez que l'élection de Boris Tadic a été reçue par l'ensemble de la société française, par le président de la République, par toutes les forces politiques, comme une formidable nouvelle et la preuve que ce pays ami, même si nous avons eu dans les années passées des désaccords, a choisi la voie du progrès démocratique, de la croissance et de la perspective européenne.
La France est très attentive et très heureuse de la détermination qu'elle mesure ici chez le président de la Serbie, le gouvernement, avec le président de la Serbie-et-Monténégro pour une vraie coopération efficace avec le Tribunal Pénal International. Nous sommes très attentifs et nous sommes heureux de la disponibilité de la Serbie pour participer concrètement au dialogue sur les progrès qui doivent être maintenant accomplis au Kosovo, et notamment en s'appuyant sur les idées que vous soutenez en matière de décentralisation et de protection des minorités.
Nous sommes heureux de la démarche européenne de la Serbie et nous allons la soutenir. Nous sommes dans le projet européen depuis plus de 50 ans et, pour autant, nous n'avons jamais abandonné notre patriotisme, notre identité, notre différence en tant que Français, ni notre langue. Nous sommes plus forts parce que nous sommes avec les autres pour affronter les problèmes de la société et du monde d'aujourd'hui. Et dès l'instant où la Serbie a fait le choix de la stabilité démocratique, de la stabilité politique, de la croissance, nous allons aider sa démarche européenne.
Enfin, mon dernier mot sera pour dire que, dans cette approche européenne qui est la perspective pour tous les pays de cette région des Balkans, et en respectant l'identité de chacun, s'agissant de la Serbie et de la France, je serai très attentif à donner une dimension humaine et citoyenne concrète à la coopération bilatérale que nous allons relancer entre nos deux pays. Cela passe par des projets concrets, je pense à l'aide que nous apportons pour la réalisation du cadastre et l'approche satellitaire, je pense au réseau d'eau potable de Belgrade, je pense à des entreprises françaises qui vont venir créer des partenariats ici avec des entreprises serbes. Je pense aussi aux jeunes Serbes, jeunes Français, à l'éducation, aux échanges universitaires.
Je vais personnellement être très attentif à cette dimension humaine et citoyenne qui intéresse les Serbes et notamment les jeunes de votre pays dans leur vie quotidienne.
Merci beaucoup.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 juillet 2004)
(Déclaration de Michel Barnier lors d'un point de presse conjoint avec Vuk Draskovic, ministre des affaires étrangères de Serbie-et-Monténégro, à Belgrade le 23 juillet 2004) :
Bonjour à chacune et chacun d'entre vous et merci d'être là, merci cher Vuk de tout ce que vous venez de dire et de la cordialité de votre accueil au cours de nos deux entretiens à l'instant et hier soir auquel j'ai été particulièrement sensible.
Dans ce grand espace européen, vous me permettrez d'avoir une pensée au début de cette conférence de presse pour les victimes de la tragédie qui vient de se produire en Turquie, d'exprimer au nom du gouvernement français nos condoléances aux familles qui ont été touchées et d'exprimer à l'égard de ce peuple ami et voisin notre solidarité.
Mesdames, Messieurs, j'ai eu depuis mon arrivée à Belgrade une série d'entretiens extrêmement intéressants et amicaux avec les dirigeants de la Serbie-et-Monténégro, et par votre intermédiaire, je voudrais dire le salut très cordial, très sincère, des Français aux citoyens de Serbie-et-Monténégro, et notamment des jeunes qui ont envie maintenant de regarder davantage devant eux que derrière eux.
J'ai rencontré dans cet esprit très cordial le président Marovic, président de la communauté étatique de Serbie-et-Monténégro. Nous avons évoqué notamment l'avenir et les difficultés concrètes de cette communauté. J'ai rencontré, cela a été un moment très important pour moi, le président Tadic. Son élection récente a été reçue dans nos pays par toute la société, tous les hommes politiques, comme un grand événement, comme la marque d'un espoir de l'évolution durable maintenant de la Serbie vers la démocratie, dans la démocratie, et vers l'Europe.
J'ai eu un entretien en début de matinée avec le Premier ministre du Monténégro, M. Djukanovic, et comme je l'avais fait hier soir avec le président, nous avons évoqué les relations entre Serbie et Monténégro et le besoin de coopération. J'ai évoqué notamment cette idée à laquelle je vais travailler à Bruxelles, où j'ai été, vous le savez, commissaire européen pendant les cinq dernières années, à ce que pourrait être un programme spécial, particulier, de coopération permettant de faire avancer cette question de l'harmonisation du marché, et les projets concrets de coopération que nous pourrons engager ensemble.
Je voudrais également témoigner de la qualité des discussions que nous avons eues avec Vuk Draskovic, hier soir, avec le ministre de la Défense, M. Davinic, que j'ai eu la chance de rencontrer avec vous. Naturellement, j'attache également, vous l'imaginez, beaucoup d'importance à l'entretien que j'aurai dans quelques instants avec le Premier ministre de Serbie, M. Kostunica. Ce sera la dernière étape de cette première visite officielle ici en Serbie-et-Monténégro.
Qu'est ce que je retire de ces entretiens ? Pour être tout à fait franc avec vous, j'ai besoin de rencontrer les gens, les hommes, les femmes, pour comprendre et pouvoir agir, et pour pouvoir parler aussi, faire comprendre quel est le message de la France, en particulier aux jeunes de Serbie-et-Monténégro. J'ai compris, et je n'en suis pas surpris, qu'ici, à Belgrade, la parole française a une place et un pouvoir particulier, en raison de l'histoire, de la culture, de l'économie. Vuk, vous m'avez emmené hier soir devant ce monument au coeur de Belgrade où il y avait tant de jeunes qui se promenaient et où des paroles très fortes sont inscrites sur cette relation particulière entre le peuple français et le peuple serbe. Cette amitié ancienne, traditionnelle, qui n'a pas toujours été facile, notamment dans les dernières années, entre la France et la Serbie-et-Monténégro, je pense qu'il faut aujourd'hui lui donner un nouvel élan, en tenant compte du nouveau contexte de ce continent qui s'organise, et qui est le contexte du projet européen.
Ce projet européen, dont je suis un militant depuis le premier jour de mon engagement personnel, est un projet qu'il faut bien comprendre ici. Nos nations, nos pays ne se fusionnent pas, ils n'abandonnent pas leur identité, leurs langues, leurs traditions ou leurs différences. Simplement, pour un certain nombre de sujets, nous nous mettons ensemble, et nous sommes définitivement entre nous en paix, dans la démocratie. Nous nous attachons à créer du progrès, que nous partageons. Voilà ce qu'est le projet européen, depuis cinquante ans. Ce n'est pas un discours, ce n'est pas une promesse, c'est une réalité depuis cinquante ans, et moi je n'ai jamais cessé depuis que je suis engagé, comme tous les Français, d'être à la fois patriote, fier d'être Français et, en même temps, fier d'être Européen.
Votre pays a commencé depuis quatre ans seulement sa transition démocratique, économique, et nous allons l'accompagner pour réussir cette transition. Vous avez devant vous un mouvement nécessaire, dans plusieurs directions, que je veux indiquer, et en particulier pour les réformes à l'intérieur de la Serbie-et-Monténégro et pour adapter le droit et l'économie à ce nouveau contexte européen. Un autre mouvement nécessaire dont le ministre Vuk Draskovic a parlé tout à l'heure - je l'ai entendu de M. Draskovic comme des autres dirigeants - est celui de la coopération rapide, concrète avec le Tribunal international. C'est une coopération nécessaire et rapide.
Naturellement, cette perspective européenne doit être l'occasion aussi de faciliter, nous en avons beaucoup parlé, le problème du Kosovo. La France a été constamment attentive et restera attentive à la situation des habitants du Kosovo, de tous les habitants du Kosovo, et naturellement y compris des minorités. Notre engagement, en tant que Français, va s'accroître dans les prochaines semaines, fortement, puisque nous allons prendre le commandement de la KFOR au mois de septembre, et le moment venu, personnellement comme ministre français, avec ce souci de comprendre, de respecter, d'aider, je me rendrai au Kosovo pour écouter tout le monde, Albanais et Serbes du Kosovo. Mais ce dont je suis sûr, Mesdames et Messieurs, c'est qu'il est possible maintenant de faire avancer une solution par le dialogue, par la paix, par le progrès, à condition que chacun accepte de jouer le jeu du dialogue. C'est le message aussi que j'ai indiqué aujourd'hui, y compris sur des sujets concrets où un travail est en cours, je pense à la décentralisation avec des propositions extrêmement précises qui sont sur la table.
Dans la perspective européenne que j'évoquais, qui est une perspective de paix et de stabilité pour tous ceux qui y adhèrent, le temps est venu qu'Albanais et Serbes au Kosovo cessent de s'ignorer ou de se menacer. Ils doivent prendre le chemin du dialogue et trouver ensemble, avec notre appui, une solution digne de leur destin européen.
Enfin, j'ai dit, et je le répète devant vous, comme je l'ai fait avec le président Tadic tout à l'heure, que je suis très attaché à ce que la coopération bilatérale entre la Serbie-et-Monténégro et la France, ait aussi, au-delà de la politique, une dimension humaine, citoyenne, culturelle. Donc, je vais être très attentif à des projets concrets de coopération pour améliorer la vie quotidienne, la formation de fonctionnaires, la réalisation du cadastre, les projets d'eau et d'alimentation, de téléphone auxquels les entreprises françaises peuvent contribuer, tout ce qui touche à l'éducation, à la culture et aux échanges de jeunes.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 juillet 2004)