Interview de Mme Nicole Ameline, ministre de la parité et de l'égalité professionnelle, à BFM le 23 février 2005, sur le bilan de l'application de la loi sur la parité politique.

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Média : BFM

Texte intégral

Q- Tout à l'heure, vous présenterez le rapport sur le bilan de l'application de la loi du 6 juin 2000 sur la parité politique. C'est une loi qui a presque cinq ans, sur une parité politique nécessaire pour encourager le fragile progrès des candidatures féminines, encore trop faibles. Quel bilan faites-vous de cette loi après plus de quatre ans ?
R- Précisément, je serais tentée de dire sur votre antenne, qu'au moment où les entreprises s'engagent résolument sur l'égalité professionnelle, il est important que l'égalité républicaine progresse dans notre vie publique. La loi produit des effets au caractère très positif. Je prendrais deux exemples : le Parlement européen où nous sommes au 4ème rang européen pour la parité, avec 43 % de femmes, et puis, la décentralisation, puisque les scrutins de liste locaux, dans les communes notamment, ont permis l'émergence d'une génération terrain. Ca, c'est formidable. Ce qui l'est moins, ce sont nos assemblées. Le Parlement national n'est pas du tout à la hauteur de l'Europe aujourd'hui, et nous avons des efforts à faire sur ce point.
Q- Combien y a-t-il de femmes à l'Assemblée nationale ?
R- 12 % de femmes à l'Assemblée et 17 % au Sénat ; ce n'est pas bien, parce que nous sommes dans une Europe moderne, qui évolue et je souhaite, au moment où la France porte très fort et très haut des valeurs de modernité et d'égalité, que nous puissions progresser naturellement sur ce point.
Q- En appelez-vous à la vigilance des partis ?
R- Oui, vous avez tout à fait raison : c'est d'abord de l'initiative et de la responsabilité des partis politiques que relève ce progrès de la démocratie. Pourquoi ? D'abord, parce que la Constitution les y amène. Et dans un esprit qui a fait ses preuves dans le cadre du dialogue social, je dois dire que je souhaite engager une concertation avec eux, au cours de l'année, qui pourrait jeter les bases d'une charte de l'égalité. Je crois que ce serait tout à fait utile et ce serait un très beau signal vis-à-vis des femmes de France, mais aussi de la démocratie plus généralement, que les partis politiques accomplissent un pas nouveau sur ce terrain qui est tout a fait essentiel.
Q- Quels sont les partis les plus réticents ? Par exemple, l'UMP, votre parti, ne montre pas forcément toujours le bon exemple.
R- Il n'y a pas de bons ou de mauvais élèves. Il y a, d'une manière générale, des résistances qui sont d'abord plus d'ordre culturel que politique. Car les partis sont engagés dans la modernité et je crois que N. Sarkozy a annoncé, avec beaucoup de force, son intention de faire progresser l'UMP sur ce terrain. Mais j'observe, et c'est un bon exemple, que l'UMP s'est engagé aux européennes à présenter des têtes de listes paritaires ; c'était une belle initiative. Donc, il faut poursuivre et essayer de voir comment, effectivement, au plan plus général de la démocratie, nous pouvons susciter aussi un intérêt, une adhésion encore plus forte des femmes. Elles ont, là comme ailleurs, tous les talents pour réussir.
Q- Voilà pour l'égalité politique ; l'égalité professionnelle, l'égalité salariale : c'est l'un des mots d'ordre de J. Chirac dans ses voeux aux Français au mois de janvier. Où en est-on du projet de loi sur l'égalité salariale ? On parle d'un Conseil des ministres le 9 mars ?
R- Ce sera sans doute un tout petit peu plus tard. Nous sommes en train de finaliser précisément ave les partenaires sociaux, car vous savez que ce projet de loi, comme tout ce que nous avons fait dans ce ministère, est le produit du dialogue social. Il en renforce totalement les dispositions, puisque l'égalité salariale était déjà à l'ordre du jour de l'accord interprofessionnel conclu il y a juste un an - c'est presque un anniversaire. Et nous allons, avec les partenaires sociaux, cadrer cette loi pour que elle soit une loi de confiance vis-à-vis des entreprises, mais aussi une loi qui s'inscrive dans une logique de résultat, car c'est de l'intérêt de tous, aujourd'hui, que l'égalité soit la vitrine de la modernité française et de ses entreprises en particulier.
Q- C'est une loi qui doit prévoir à l'embauche une rémunération égale pour un diplôme égal. Pour ce qui concerne les travailleurs à temps partiel, 30 % des femmes, qu'est-il prévu ?
R- C'est vrai que l'une des règles majeures, c'est effectivement de ne pas faire de discrimination à l'embauche. Mais ce qui est surtout très important, c'est de veiller dans une entreprise à ce que les critères de l'évolution des carrières soient bien égaux. Or, nous constatons que l'environnement des femmes, les contraintes qui sont les leurs, font que très souvent, les conditions ne sont pas remplies dans l'entreprise mais aussi à l'extérieur. Je pense au mode de garde, à toute une série de conditions. Donc, nous allons travailler avec les entreprises, les accompagner pour que cette dynamique de l'emploi, à travers les carrières et les salaires, puisse servir la performance, qu'elle soit masculine ou féminine. Nous en avons besoin, les entreprises en ont besoin. Je crois que la France à tout intérêt à démontrer, sur ce terrain, son exemplarité en Europe. Donc, cette loi va être, pour l'ensemble des conditions de travail, un progrès, un progrès social. Et nous le souhaitons, parce que nous sommes tout à fait convaincus - et le label égalité va dans ce sens - que c'est un atout de productivité pour le monde des entreprises.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 23 février 2005)