Texte intégral
Q- Merci d'être avec nous, au lendemain du retour historique du patronal à l'assurance maladie. Après trois ans d'absence, c'est la fin de la chaise vide pour le patronat. C'est à marquer d'une pierre blanche, ce retour du Medef et de la CGPME ?
R-Oui, tout à fait. Je crois que nous avions, après les entretiens que nous avions eu en avril et mai avec monsieur Douste-Blazy, nous avions bien vu qu'il voulait faire une réforme structurelle de cet organisme et donc, dans ces conditions, nous avions donné notre accord pour revenir.
Q- Un rappel : vous étiez partis, vous aviez claqué la porte il y a trois ans pour protester contre la mise à contribution de la Sécu au financement des 35 heures - on va y revenir. Est-ce que vous pensez que là, on entre quand même dans une nouvelle ère de gouvernance avec le projet Douste-Blazy ; est-ce que cela veut aussi que vous partagez le point de vue du Medef qui explique qu'il revient non pas pour gérer mais pour appuyer la réforme ; vous aussi ?
R-Cela dépend. Il faut peut-être s'entendre sur les mots. Je crois que l'on est là quand même pour s'assurer que la réforme, qui a été votée le 13 août 2004 soit respectée, que toutes les dispositions soient respectées. Alors, on peut parler de gestion ou non gestion. Je crois qu'il y a un directeur général qui sera chargé de diriger la maison, c'est monsieur Van Roekeghem, en lequel nous avons toute confiance. Et nous serons à côté pour l'aider, et vérifier que toutes les dispositions qui ont été prévues, soient prises pour sauver cet instrument qu'est la Sécurité sociale.
Q- Mais est-ce que ce n'est pas un peu hypocrite ? Est-ce que vous avez l'impression que l'on va entendre la voix des employeurs dans ce nouveau système ? Parce que c'est vrai que le directeur général du nouveau système, qui est l'ancien directeur de cabinet de P. Douste- Blazy, aura globalement tout pouvoir.
R- Il aura tout pouvoir et c'est une demande que nous avions faite. Mais il faut bien savoir aussi que, j'espère que nous n'entendrons pas trop parler de nous, parce que cela voudrait dire que ça ne pas. Parce que nous serons là pour vérifier que tout se passe correctement. Et dans toutes les caisses, nous serons là - c'est comme un conseil d'administration - pour voir que tout se passe selon ce qui est prévu.
Q- On est toujours modeste à la CGPME. La Mutualité française critique le retour du patronat. Il dise que l'on n'a pas spécialement besoin du retour du patronat aux caisses de Sécu.
R-Je crois, au contraire, que l'on a besoin des patrons, parce que ce sont quand même les entreprises qui financent l'organisation de la Sécu. Alors je ne vois pas pourquoi on n'y serait pas. Nous sommes partis parce qu'on ne pouvait rien gérer ; nous revenons, parce que nous pensons pouvoir le gérer. Nous avons un vrai rôle, une vraie responsabilité, parce que ce sont nos cotisations et celles de nos salariés qui permettent de faire fonctionner l'outil Sécurité sociale.
Q- J'évoquais le Medef avec vous - c'est vrai qu'il est très présent, on parle beaucoup du Medef quand on pense au patronat -, qu'est-ce que vous pensez de la querelle récurrente qui existe entre J.-P. Raffarin et le Medef ? Vous avez vu qu'hier le Premier ministre a regretté que le Medef n'ait pas fait aimé l'entreprise. Qu'est-ce que vous en pensez et est-ce que la CGPME, elle, fait aimer les entreprises ?
R-J'espère que nous faisons aimer les entreprises et je crois que dans les statistiques que l'on a vues - on a fait des études là-dessus, que les Françaises et les Français aiment leurs PME. 75 % des hommes et des femmes interrogés au mois de juin l'avaient confirmé. Donc, je crois que nous travaillons dans ce sens-là. Mais ce n'est pas seulement notre travail, nous voulons faire aimer et respecter nos petites et moyennes entreprises qui sont dans le coeur de la vie de chaque Français, puisque nous sommes partout, sur tout le territoire. Dans le moindre bourg, nous avons de PME. Il nous faut les aimer, mais il faut aussi les défendre et les soutenir. C'est le rôle de notre confédération générale des petites et moyennes entreprises.
Q- C'est facile de se faire entendre, quand on est à la CGPME, par rapport à la toute puissance du Medef ?
R-Oui, je crois que c'est relativement facile. Par contre, c'est peut-être vous qui confondez les termes CGPME/Medef. Et quand on a pris des dispositions, quand on rencontre des hommes politiques, c'est souvent traduit par "le Medef a". Non, c'est la CGPME souvent. Alors soyez gentils : donnez nous au moins ce qui nous revient !
Q- Nous les médias devons aussi vous dire que par exemple, c'est le Medef que l'on a entendu plus spécialement sur la réforme des licenciements. Le coup de gueule qui est venu quand le Gouvernement a reculé, il est venu du Medef, pas spécialement de la CGPME. Est-ce que vous avez une petite idée sur la reculade du Gouvernement ? Et puis, plus généralement, que pensez-vous de cette stratégie du Medef de combattre pied à pied, de ne jamais laisser (sic) prise ?
R-Je voudrais d'abord répondre sur le problème où vous nous avez moins entendu que le Medef, sur le problème de la réforme du licenciement économique. Mais pas du tout ! J'ai crié aussi fort, il y avait peut-être moins de micros pour m'entendre ! Ca, c'est une chose. Deuxièmement, je peux vous dire, et vous le savez très bien : j'ai dit au Premier ministre tout à fait de que je pensais, que j'étais en profond désaccord sur la façon de s'y prendre. Parce que nous avions eu un accord tacite sur des
réunions de travail avec monsieur le ministre Larcher, et quelques jours après, ce texte a été modifié sur plusieurs points. C'est plus sur la forme que sur le fond. Sur la forme, on a eu l'impression d'être bernés. Alors maintenant, il faut revenir sur le problème de la définition du licenciement économique, de la raison des licenciements économiques. Eh bien là, nous n'étions pas d'accord, parce que nous pensons que la sauvegarde de la compétitivité est quelque chose d'essentiel pour nos entreprises. Mais tout cela va dans le sens de l'emploi. Nous demandons, nous, plus de flexibilité pour obtenir plus d'employabilité dans nos entreprises. Tout ce que l'on va mettre en contrainte va être exactement l'effet contraire.
Q- Mais la notion de sauvegarde de la compétitivité, qui était la mesure phare du projet du Gouvernement sur la réforme des licenciements, c'est quelque chose de très important pour les PME ? Pas seulement celles qui exportent, pas seulement celles qui sont soumises à la délocalisation, cette sauvegarde de la compétitivité, c'est quelque chose, qui, concrètement, est primordiale pour les PME ?
R-C'est peut-être encore plus important. Prenez une PME de cent personnes, dont un client qui représente 30 % de son chiffre d'affaires rompt le contrat brusquement. Vous avez quelques mois pour réagir, pour trouver d'autres marchés bien sûr, et pour ramener la dimension de l'entreprise au chiffre d'affaires nouveau qui va être amputé de 30 %. Donc, c'est essentiel que l'on puisse conserver la sauvegarde de cette compétitivité. Si on attend d'être dans le rouge, la société va fermer définitivement.
Q- Mais comment une PME aurait pu quantifié cette sauvegarde de la compétitivité pour invoquer le licenciement ? C'est possible cela ?
R-C'est tout à fait facile, parce que lorsque vous perdez un client qui représente 30 % du chiffre d'affaires, vous pouvez très bien le mettre sur le papier, en parler avec votre comité d'entreprise ; c'est parfaitement clair. Et à partir de ce moment-là, quand on constate le fait, on doit pouvoir prendre immédiatement des mesures de sauvegarde pour l'entreprise.
Q- Vous avez rencontré le Premier ministre la semaine dernière, vous avez évoqué cette histoire des restructurations, du licenciement, et sur les 35 heures. Là aussi, le Gouvernement tergiverse sur les assouplissements. Qu'est-ce que vous voulez précisément ? Est-ce que vous voulez des heures supplémentaires supplémentaires pour les PME ?
R-Oui, nous voulons un quota d'heures supplémentaires supplémentaire, comme vous le dites. Nous voulons un quota d'au moins 240 heures au total. Actuellement, nous avons globalement 180 heures supplémentaires dans l'année. Il nous faut plus d'heures supplémentaires, même si on ne les utilise pas dans toutes les entreprises. Il faut que l'entreprise qui en a besoin puisse les utiliser. Je crois que nous avons trouvé un bon principe qui devrait trouver un accord. Les 40 heures supplémentaires entre 180 et 220 pourraient être mutualisées au niveau de l'entreprise et ensuite réalisé en accord avec les salariés. Ce qui veut dire que le salarié qui n'a pas envie de travailler plus ne le ferait pas. C'est ce qui se passe actuellement dans les PME, ou ce qui se passait avant la loi des 35 heures. Ceux qui voulaient faire des heures supplémentaires les faisaient. Ceux qui n'en voulaient pas ne les faisaient pas.
Q- Vous savez très bien, et des patrons l'ont dit et l'on reconnu - c'est peut-être plus vrai dans les grandes entreprises - que les entreprises, dans le contexte actuel n'ont pas forcément besoin de plus d'heures supplémentaires.
R-Vous avez totalement raison, je partage cet avis. Seulement, si dans six mois ou dans trois mois, vous avez des marchés importants et que vous avez besoin de les faire ? Et si la loi vous contraint à ne pas pouvoir les faire ? Vous perdez des parts de marché. N'oubliez pas que nous sommes en concurrence avec l'Europe et avec le monde ! Donc, c'est simplement d'une souplesse dont nous avons besoin, éventuellement. Et même si seulement aujourd'hui 10 ou 20 % des entreprises ont besoin d'un quota d'heures supplémentaires, il faut qu'elles puissent les avoir.
Q- Un petit mot sur la taxe professionnelle ; on sait que c'est quelque chose de très important pour les PME. Le Gouvernement prépare sa réforme, pas forcément dans le sens que vous souhaiteriez ?
R-Le problème est très compliqué. Je vais essayer de résumer, si vous voulez : le problème de la réforme de la taxe professionnelle que nous avions demandé, c'est pour les entreprises industrielles qui sont pénalisées sur leurs investissements. Le problème que nous rencontrons aujourd'hui, toutes les expériences que l'on fait dans cette commission Fouquet à laquelle je suis, mettent en avant la valeur ajoutée ; on va calculer sur la valeur ajoutée. Le problème, c'est que la valeur ajoutée inclut la main d'uvre et les salaires, que nous n'avions plus dans les sociétés de services dans la base d'assiette de la taxe professionnelle. Donc, il est très important que si l'on favorise l'industrie, que l'on ne pénalise surtout pas les entreprises de service et du commerce, qui, en fait, sont celles, qui, actuellement, emploient, créent de l'emploi, et créent des entreprises.
Q- Que pensez-vous plus généralement de la politique du Gouvernement en faveur de PME ? Vous savez qu'il y a un projet loi en faveur des PME qui doit aboutir avant la fin de l'année [...]. On en a finalement assez peu entendu parler. Qu'est-ce que vous en pensez ? Pourtant, J.-P. Raffarin devrait aimer les PME !
R-Vous en avez entendu peu parlé, peut-être mais nous travaillons depuis six mois avec C. Jacob sur ce sujet, puisque le projet de loi doit arriver à la fin de l'année pour être voté dans le courant du premier semestre.
Q- Comment vous le sentez ?
R-Je crois qu'il y a beaucoup de bonnes choses, c'est la suite de Initiative économique de R. Dutreil. C'est exactement dans cette suite. Il y a beaucoup de bonnes choses qui sont essentiellement sur le financement des entreprises mais non seulement sur la création, parce que les financements ont été mis en place, sur la reprise d'entreprise et sur réussir des projets de croissance des entreprises, avec des créations de caisses de garantie qui permettent d'aller directement dans la caisse de garantie, et avec cette garantie, aller voir la banque pour obtenir le financement.
Q- Un mot pour conclure très rapidement sur le moral des industriels qui est toujours au plus haut, malgré le pétrole, et malgré l'euro. Le moral des petits patrons est aussi au plus haut ?
R- Il n'est pas au plus haut, il est plutôt meilleur. Ce n'est pas tout à fait pareil. Donc, je crois qu'il faut continuer dans ce sens-là, mais cela veut dire qu'il faut faire attention à toutes les mesures qui pourraient aller dans le sens contraire. Et lorsque l'on voit les licenciements économiques, je crois qu'il faut faire très attention parce que cela pourrait être contre l'emploi.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 2 novembre 2004)
R-Oui, tout à fait. Je crois que nous avions, après les entretiens que nous avions eu en avril et mai avec monsieur Douste-Blazy, nous avions bien vu qu'il voulait faire une réforme structurelle de cet organisme et donc, dans ces conditions, nous avions donné notre accord pour revenir.
Q- Un rappel : vous étiez partis, vous aviez claqué la porte il y a trois ans pour protester contre la mise à contribution de la Sécu au financement des 35 heures - on va y revenir. Est-ce que vous pensez que là, on entre quand même dans une nouvelle ère de gouvernance avec le projet Douste-Blazy ; est-ce que cela veut aussi que vous partagez le point de vue du Medef qui explique qu'il revient non pas pour gérer mais pour appuyer la réforme ; vous aussi ?
R-Cela dépend. Il faut peut-être s'entendre sur les mots. Je crois que l'on est là quand même pour s'assurer que la réforme, qui a été votée le 13 août 2004 soit respectée, que toutes les dispositions soient respectées. Alors, on peut parler de gestion ou non gestion. Je crois qu'il y a un directeur général qui sera chargé de diriger la maison, c'est monsieur Van Roekeghem, en lequel nous avons toute confiance. Et nous serons à côté pour l'aider, et vérifier que toutes les dispositions qui ont été prévues, soient prises pour sauver cet instrument qu'est la Sécurité sociale.
Q- Mais est-ce que ce n'est pas un peu hypocrite ? Est-ce que vous avez l'impression que l'on va entendre la voix des employeurs dans ce nouveau système ? Parce que c'est vrai que le directeur général du nouveau système, qui est l'ancien directeur de cabinet de P. Douste- Blazy, aura globalement tout pouvoir.
R- Il aura tout pouvoir et c'est une demande que nous avions faite. Mais il faut bien savoir aussi que, j'espère que nous n'entendrons pas trop parler de nous, parce que cela voudrait dire que ça ne pas. Parce que nous serons là pour vérifier que tout se passe correctement. Et dans toutes les caisses, nous serons là - c'est comme un conseil d'administration - pour voir que tout se passe selon ce qui est prévu.
Q- On est toujours modeste à la CGPME. La Mutualité française critique le retour du patronat. Il dise que l'on n'a pas spécialement besoin du retour du patronat aux caisses de Sécu.
R-Je crois, au contraire, que l'on a besoin des patrons, parce que ce sont quand même les entreprises qui financent l'organisation de la Sécu. Alors je ne vois pas pourquoi on n'y serait pas. Nous sommes partis parce qu'on ne pouvait rien gérer ; nous revenons, parce que nous pensons pouvoir le gérer. Nous avons un vrai rôle, une vraie responsabilité, parce que ce sont nos cotisations et celles de nos salariés qui permettent de faire fonctionner l'outil Sécurité sociale.
Q- J'évoquais le Medef avec vous - c'est vrai qu'il est très présent, on parle beaucoup du Medef quand on pense au patronat -, qu'est-ce que vous pensez de la querelle récurrente qui existe entre J.-P. Raffarin et le Medef ? Vous avez vu qu'hier le Premier ministre a regretté que le Medef n'ait pas fait aimé l'entreprise. Qu'est-ce que vous en pensez et est-ce que la CGPME, elle, fait aimer les entreprises ?
R-J'espère que nous faisons aimer les entreprises et je crois que dans les statistiques que l'on a vues - on a fait des études là-dessus, que les Françaises et les Français aiment leurs PME. 75 % des hommes et des femmes interrogés au mois de juin l'avaient confirmé. Donc, je crois que nous travaillons dans ce sens-là. Mais ce n'est pas seulement notre travail, nous voulons faire aimer et respecter nos petites et moyennes entreprises qui sont dans le coeur de la vie de chaque Français, puisque nous sommes partout, sur tout le territoire. Dans le moindre bourg, nous avons de PME. Il nous faut les aimer, mais il faut aussi les défendre et les soutenir. C'est le rôle de notre confédération générale des petites et moyennes entreprises.
Q- C'est facile de se faire entendre, quand on est à la CGPME, par rapport à la toute puissance du Medef ?
R-Oui, je crois que c'est relativement facile. Par contre, c'est peut-être vous qui confondez les termes CGPME/Medef. Et quand on a pris des dispositions, quand on rencontre des hommes politiques, c'est souvent traduit par "le Medef a". Non, c'est la CGPME souvent. Alors soyez gentils : donnez nous au moins ce qui nous revient !
Q- Nous les médias devons aussi vous dire que par exemple, c'est le Medef que l'on a entendu plus spécialement sur la réforme des licenciements. Le coup de gueule qui est venu quand le Gouvernement a reculé, il est venu du Medef, pas spécialement de la CGPME. Est-ce que vous avez une petite idée sur la reculade du Gouvernement ? Et puis, plus généralement, que pensez-vous de cette stratégie du Medef de combattre pied à pied, de ne jamais laisser (sic) prise ?
R-Je voudrais d'abord répondre sur le problème où vous nous avez moins entendu que le Medef, sur le problème de la réforme du licenciement économique. Mais pas du tout ! J'ai crié aussi fort, il y avait peut-être moins de micros pour m'entendre ! Ca, c'est une chose. Deuxièmement, je peux vous dire, et vous le savez très bien : j'ai dit au Premier ministre tout à fait de que je pensais, que j'étais en profond désaccord sur la façon de s'y prendre. Parce que nous avions eu un accord tacite sur des
réunions de travail avec monsieur le ministre Larcher, et quelques jours après, ce texte a été modifié sur plusieurs points. C'est plus sur la forme que sur le fond. Sur la forme, on a eu l'impression d'être bernés. Alors maintenant, il faut revenir sur le problème de la définition du licenciement économique, de la raison des licenciements économiques. Eh bien là, nous n'étions pas d'accord, parce que nous pensons que la sauvegarde de la compétitivité est quelque chose d'essentiel pour nos entreprises. Mais tout cela va dans le sens de l'emploi. Nous demandons, nous, plus de flexibilité pour obtenir plus d'employabilité dans nos entreprises. Tout ce que l'on va mettre en contrainte va être exactement l'effet contraire.
Q- Mais la notion de sauvegarde de la compétitivité, qui était la mesure phare du projet du Gouvernement sur la réforme des licenciements, c'est quelque chose de très important pour les PME ? Pas seulement celles qui exportent, pas seulement celles qui sont soumises à la délocalisation, cette sauvegarde de la compétitivité, c'est quelque chose, qui, concrètement, est primordiale pour les PME ?
R-C'est peut-être encore plus important. Prenez une PME de cent personnes, dont un client qui représente 30 % de son chiffre d'affaires rompt le contrat brusquement. Vous avez quelques mois pour réagir, pour trouver d'autres marchés bien sûr, et pour ramener la dimension de l'entreprise au chiffre d'affaires nouveau qui va être amputé de 30 %. Donc, c'est essentiel que l'on puisse conserver la sauvegarde de cette compétitivité. Si on attend d'être dans le rouge, la société va fermer définitivement.
Q- Mais comment une PME aurait pu quantifié cette sauvegarde de la compétitivité pour invoquer le licenciement ? C'est possible cela ?
R-C'est tout à fait facile, parce que lorsque vous perdez un client qui représente 30 % du chiffre d'affaires, vous pouvez très bien le mettre sur le papier, en parler avec votre comité d'entreprise ; c'est parfaitement clair. Et à partir de ce moment-là, quand on constate le fait, on doit pouvoir prendre immédiatement des mesures de sauvegarde pour l'entreprise.
Q- Vous avez rencontré le Premier ministre la semaine dernière, vous avez évoqué cette histoire des restructurations, du licenciement, et sur les 35 heures. Là aussi, le Gouvernement tergiverse sur les assouplissements. Qu'est-ce que vous voulez précisément ? Est-ce que vous voulez des heures supplémentaires supplémentaires pour les PME ?
R-Oui, nous voulons un quota d'heures supplémentaires supplémentaire, comme vous le dites. Nous voulons un quota d'au moins 240 heures au total. Actuellement, nous avons globalement 180 heures supplémentaires dans l'année. Il nous faut plus d'heures supplémentaires, même si on ne les utilise pas dans toutes les entreprises. Il faut que l'entreprise qui en a besoin puisse les utiliser. Je crois que nous avons trouvé un bon principe qui devrait trouver un accord. Les 40 heures supplémentaires entre 180 et 220 pourraient être mutualisées au niveau de l'entreprise et ensuite réalisé en accord avec les salariés. Ce qui veut dire que le salarié qui n'a pas envie de travailler plus ne le ferait pas. C'est ce qui se passe actuellement dans les PME, ou ce qui se passait avant la loi des 35 heures. Ceux qui voulaient faire des heures supplémentaires les faisaient. Ceux qui n'en voulaient pas ne les faisaient pas.
Q- Vous savez très bien, et des patrons l'ont dit et l'on reconnu - c'est peut-être plus vrai dans les grandes entreprises - que les entreprises, dans le contexte actuel n'ont pas forcément besoin de plus d'heures supplémentaires.
R-Vous avez totalement raison, je partage cet avis. Seulement, si dans six mois ou dans trois mois, vous avez des marchés importants et que vous avez besoin de les faire ? Et si la loi vous contraint à ne pas pouvoir les faire ? Vous perdez des parts de marché. N'oubliez pas que nous sommes en concurrence avec l'Europe et avec le monde ! Donc, c'est simplement d'une souplesse dont nous avons besoin, éventuellement. Et même si seulement aujourd'hui 10 ou 20 % des entreprises ont besoin d'un quota d'heures supplémentaires, il faut qu'elles puissent les avoir.
Q- Un petit mot sur la taxe professionnelle ; on sait que c'est quelque chose de très important pour les PME. Le Gouvernement prépare sa réforme, pas forcément dans le sens que vous souhaiteriez ?
R-Le problème est très compliqué. Je vais essayer de résumer, si vous voulez : le problème de la réforme de la taxe professionnelle que nous avions demandé, c'est pour les entreprises industrielles qui sont pénalisées sur leurs investissements. Le problème que nous rencontrons aujourd'hui, toutes les expériences que l'on fait dans cette commission Fouquet à laquelle je suis, mettent en avant la valeur ajoutée ; on va calculer sur la valeur ajoutée. Le problème, c'est que la valeur ajoutée inclut la main d'uvre et les salaires, que nous n'avions plus dans les sociétés de services dans la base d'assiette de la taxe professionnelle. Donc, il est très important que si l'on favorise l'industrie, que l'on ne pénalise surtout pas les entreprises de service et du commerce, qui, en fait, sont celles, qui, actuellement, emploient, créent de l'emploi, et créent des entreprises.
Q- Que pensez-vous plus généralement de la politique du Gouvernement en faveur de PME ? Vous savez qu'il y a un projet loi en faveur des PME qui doit aboutir avant la fin de l'année [...]. On en a finalement assez peu entendu parler. Qu'est-ce que vous en pensez ? Pourtant, J.-P. Raffarin devrait aimer les PME !
R-Vous en avez entendu peu parlé, peut-être mais nous travaillons depuis six mois avec C. Jacob sur ce sujet, puisque le projet de loi doit arriver à la fin de l'année pour être voté dans le courant du premier semestre.
Q- Comment vous le sentez ?
R-Je crois qu'il y a beaucoup de bonnes choses, c'est la suite de Initiative économique de R. Dutreil. C'est exactement dans cette suite. Il y a beaucoup de bonnes choses qui sont essentiellement sur le financement des entreprises mais non seulement sur la création, parce que les financements ont été mis en place, sur la reprise d'entreprise et sur réussir des projets de croissance des entreprises, avec des créations de caisses de garantie qui permettent d'aller directement dans la caisse de garantie, et avec cette garantie, aller voir la banque pour obtenir le financement.
Q- Un mot pour conclure très rapidement sur le moral des industriels qui est toujours au plus haut, malgré le pétrole, et malgré l'euro. Le moral des petits patrons est aussi au plus haut ?
R- Il n'est pas au plus haut, il est plutôt meilleur. Ce n'est pas tout à fait pareil. Donc, je crois qu'il faut continuer dans ce sens-là, mais cela veut dire qu'il faut faire attention à toutes les mesures qui pourraient aller dans le sens contraire. Et lorsque l'on voit les licenciements économiques, je crois qu'il faut faire très attention parce que cela pourrait être contre l'emploi.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 2 novembre 2004)