Courrier de M. Alain Bocquet, président du Groupe des députés communistes et républicains de l'Assemblée nationale, au Premier ministre, M. jean-Pierre Raffarin, sur la situation du service public ferroviaire, Paris le 7 décembre 2004.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Monsieur le Premier Ministre,
La situation préoccupante du service public ferroviaire dans notre pays m'amène à solliciter de votre part l'organisation, au plus vite, d'un débat à l'Assemblée nationale sur le développement du rail. Après une première manifestation des cheminots pour l'emploi le 25 octobre dernier, le mouvement de protestation des personnels contre la menace d'une privatisation de l'activité TGV, ce 6 décembre, témoigne de la profondeur d'un mécontentement dont les motivations dépassent la seule défense d'une profession.
Selon les estimations les moins alarmistes, les transports terrestres verront leur trafic augmenter de 40 % pour les marchandises et de 60% pour les voyageurs d'ici à 2020. Comment faire face à cette demande sans augmenter la pollution ni dégrader l'environnement ? Comment garantir à nos citoyens et à nos entreprises, sur l'ensemble du territoire, des acheminements et des déplacements sûrs, réguliers et de qualité ?
La seule réponse de votre gouvernement et des directions de la SNCF et de RFF consiste à restreindre les capacités et le champ du service public ferroviaire. Cette politique de désengagement de l'Etat s'accompagne d'une pression accrue de la concurrence et d'une ouverture graduelle aux intérêts financiers privés. La mise en vente du secteur messagerie (SERNAM), la filialisation de branches d'activité à l'image de la création de iDTGV, le recours massif à la sous-traitance comme pour l'entretien des infrastructures ou l'approvisionnement, l'abandon progressif du fret, toutes ces orientations participent d'un démantèlement accéléré de l'entreprise nationale intégrée SNCF.
Le président de la SNCF a beau se réfugier derrière les engagements de sa charte du service public, la réalité est moins angélique. Les pratiques tarifaires prédatrices et inégalitaires se multiplient. Les usagers subissent une dégradation du service rendu comme en témoigne l'accroissement de la part du réseau affectée par des ralentissements de circulation faute de maintenance suffisante des voies (plus de 1.500 km désormais concernés). Les régions, quant à elles, sont confrontées au chantage d'une réduction du trafic sur de grandes lignes Corail transversales.
Plutôt que de s'attaquer résolument au poids de la dette qui étouffe le secteur public du rail, au lieu de dégager les moyens financiers permettant son essor, votre gouvernement poursuit une stratégie de retrait de l'Etat, de repli industriel et de rigueur budgétaire qui se traduit par la disparition de 8.000 emplois à la SNCF entre 2002 et 2004 et une cure d'austérité salariale impitoyable pour les agents.
Les députés communistes et républicains sont résolus à faire prévaloir d'autres choix pour donner au service public du rail une vigueur nouvelle. La représentation nationale doit être saisie de ce dossier majeur. Aussi, Monsieur le Premier ministre, je vous demande de bien vouloir, sans attendre, inscrire un débat sur le sujet à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
Dans l'attente d'une réponse à ce courrier, je vous prie de croire, Monsieur le Premier ministre, en mes sentiments les meilleurs.

(Source http://www.groupe-communiste.assemblee-nationale.fr, le 8 décembre 2004)