Déclaration de M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, sur la mise en valeur du patrimoine de proximité et la protection du patrimoine architectural, Paris le 23 mai 2005.

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Circonstance : Remise des prix "Concours un patrimoine pour demain" à Paris le 23 mai 2005

Texte intégral

Monsieur le Directeur (Arnaud Broustet, Directeur de Pèlerin),
Monsieur le Président d'honneur du jury (Dominique Ponnau, conservateur général du patrimoine),
Monsieur le Directeur de la rédaction (René Poujol),
Monsieur le Directeur du Musée Carnavalet (Jean-Marc Leri, conservateur général du patrimoine),
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je vous remercie de m'avoir convié à cette remise des prix du concours national " un patrimoine pour demain ". Je voudrais avant toute chose vous féliciter de cette initiative poursuivie par votre hebdomadaire depuis 1990.
Votre intervention a ainsi pris sa place au cur même de la politique du patrimoine qui fonde l'action du Ministère de la culture.
Cette politique aborde aujourd'hui des perspectives nouvelles.
Nous sommes tous bien sûr profondément attachés aux éléments d'architecture qui ont formé, au cours des générations, le paysage des territoires de la France. Mais il apparaît que l'opinion publique se sensibilise aujourd'hui chaque jour davantage, au-delà des seuls archétypes traditionnellement identifiés et protégés par la réglementation issue de la loi de 1913, à la mise en valeur du patrimoine de proximité, c'est-à-dire de ce patrimoine modeste dont l'abondance et la diversité façonnent la réalité de notre cadre de vie.
Or, ce patrimoine de proximité est, comme jamais, menacé par les mutations de l'activité économique, par la déprise agricole, par la banalisation qui accompagne l'urbanisation des espaces libérés en raison du déclin des activités traditionnelles.
Comme tous les partenaires engagés dans ce combat, vous êtes conscients de ces enjeux fondamentaux : c'est un combat pour la qualité de notre environnement, c'est un combat pour notre mémoire, pour notre histoire, c'est un combat pour l'emploi qualifié et pour le maintien de la qualité des techniques et des interventions de restauration.
Mais je ne voudrais pas pour autant donner à penser qu'il s'agit de l'expression, même légitime, d'une nostalgie. La richesse de notre patrimoine constitue avant tout, je ne crains pas de vous le dire, comme je le dis aux nombreux interlocuteurs, aux personnes et aux institutions que je rencontre, un élément fondamental de notre richesse économique.
Car la faculté de rayonnement et d'accueil de la France réside, au-delà du seul tourisme qui constitue pourtant, je le rappelle, sa principale industrie, dans sa richesse et sa diversité culturelle et patrimoniale. Celle-ci est son atout majeur pour le développement des activités économiques dans un monde ouvert à la concurrence internationale. Elle se retrouve dans la variété de ses paysages, depuis si longtemps habités et façonnés par les hommes, et qui demeure pour une large part préservée. Notre patrimoine est présent partout en France, sur l'ensemble de notre territoire, par des monuments conservés en tant que tels, mais aussi par des traces, des détails, des fragments, des ensembles bâtis ou ornés qui en font l'exceptionnelle qualité.
Soyons donc persuadés et faisons savoir que le combat pour le patrimoine est aussi un combat pour l'activité économique et le développement de nos capacités !
Le patrimoine, c'est le gage de notre identité, dans le cadre d'une ouverture, généreuse et confiante, à une identité européenne qui puise dans ses racines sans les amoindrir, dans l'échange et le dialogue.
Je considère que les Français sont prêts à entendre votre plaidoyer en faveur du patrimoine et je vous félicite de votre engagement.
La mobilisation exceptionnelle que j'ai pu constater, lors des différents événements culturels organisés ces derniers mois, nous indique à quel point nos compatriotes sont réceptifs lorsqu'on nourrit leur curiosité et leur goût pour la découverte : un million de visiteurs viennent de participer à la nouvelle " nuit des musées ", organisée pour la première fois le 14 mai. Un nombre plus important encore découvriront le patrimoine des parcs et jardins lors des prochains " rendez-vous aux jardins " organisés les 3 et 4 juin.
Ce goût, cet engouement des Français, s'affiche de plus en plus. C'est pourquoi, j'ai décidé d'attribuer à la prochaine édition des journées européennes du patrimoine le titre " j'aime mon patrimoine ".
Je souhaite à cette occasion et par cette formule, mobiliser les initiatives de l'Etat et des collectivités publiques, celles des associations comme celles des entreprises auxquelles sont désormais proposées des moyens nouveaux de mécénat fiscal, celles des professionnels, des amateurs et des bénévoles. Loin d'envisager un quelconque désengagement de l'Etat, c'est au contraire à une conjonction des efforts que j'appelle. Une mobilisation sans précédent pourra seule nous permettre de dépasser les difficultés actuelles, nées principalement de la faiblesse de nos moyens par rapport à l'ampleur du champ d'intervention que nous souhaitons pour cette politique du patrimoine.
Tel est le vu que je forme, en faveur d'une prise de conscience et d'un engagement de tous dans l'intérêt du développement de nos capacités, de notre activité et de notre rayonnement. Tels sont les facteurs déterminants d'une politique du " patrimoine pour demain ", à mettre en uvre dès aujourd'hui.
Votre magazine, permettez-moi de vous le dire, fait figure de précurseur. Je tiens à vous féliciter. Depuis 15 années, vous uvrez, par votre initiative, à la préservation dynamique de l'infinie richesse de notre territoire.
Je suis sensible à l'approche territoriale que vous avez su adopter pour définir ces prix. Les catégories que vous avez mises en place en témoignent. Elles rendent compte de la diversité du patrimoine et de la diversité des métiers auxquels il a recours.
Voilà beaucoup de raisons pour vous remercier, et pour féliciter très chaleureusement tous les lauréats.
Vive notre patrimoine !
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 24 mai 2005)