Interview de Mme Nicole Ameline, ministre de la parité et de l'égalité professionnelle, sur le site internet de l'ANPE le 3 mai 2005, sur l'égalité salariale entre les hommes et les femmes et le bilan de la charte de l'égalité du 8 mars 2004.

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Média : internet - www.anpe.fr

Texte intégral

Q - Quel est le principal objectif de votre ministère concernant l'égalité professionnelle ?
R - Mon ambition est de promouvoir l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, afin qu'elle soit reconnue comme un facteur de croissance économique et de dynamisme social. Car il est clair que les femmes constituent un vivier de compétences dont l'économie moderne a besoin. La France se trouve confrontée à une situation paradoxale, caractérisée par un accroissement sans précédent de l'activité féminine (80 % des Françaises participent activement à la vie économique et elles représentent 46,1 % de la population active) et la persistance d'inégalités importantes, comme celle des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.
Q - Comment expliquer la persistance de cet écart, malgré la loi ?
R - Les différences de rémunération médiane entre les femmes et les hommes sont effectivement de l'ordre de 21 % (chiffres 2002). Ceci s'explique en partie par la nature des emplois occupés par les femmes. Elles sont plus nombreuses que les hommes à occuper des emplois temporaires, comme les contrats à durée déterminée, les stages et certaines catégories d'emplois aidés, ou des emplois à temps partiel.
Par ailleurs, les femmes sont surreprésentées dans les postes peu qualifiées du tertiaire. Plus de la moitié des emplois qu'elles occupent sont concentrés dans seulement 10 des 84 familles professionnelles. Vient s'ajouter à cela un "plafond de verre" freinant l'accès des femmes aux postes à responsabilité. Un jeune homme titulaire du baccalauréat aura 17 % de chances, après 10 ans d'expérience, d'occuper un poste de cadre, contre 8 % pour une jeune fille.
Q - Où en est l'application de la Charte de l'égalité présentée le 8 mars 2004 ?
R - Cette charte fédère près d'une centaine d'acteurs, publics et privés, administrations, collectivités territoriales, acteurs du monde économique et société civile, autour de la promotion d'une démarche intégrée de l'égalité. Les départements ministériels se sont engagés pour 3 ans sur près de 280 actions de nature diverse, articulées autour de 5 axes : la parité politique et sociale et l'accès des femmes aux responsabilités ; l'égalité professionnelle ; l'égalité en droits et en dignité ; l'articulation des temps de vie ; la solidarité européenne et internationale.
Un an après, un premier bilan de l'état d'avancement des engagements pris dans le cadre de la Charte a été réalisé. Celui-ci s'avère tout à fait prometteur. Progressivement, la culture de la mixité se diffuse au sein de l'Etat. Pour conforter cette démarche au niveau local, je compte organiser, dès ce printemps, des conférences de l'égalité dans chaque région, qui traiteront, avec les acteurs de terrain, de l'ensemble des champs de l'égalité.
Q - De quels modèles intéressants dans d'autres pays européens peut-on s'inspirer ?
R - En Suède, l'employeur doit chaque année préparer un plan d'action pour l'égalité de salaires, comprenant les mesures nécessaires pour atteindre cette égalité, une analyse des coûts des mesures et un échéancier sur trois ans. La Norvège a pour sa part mis en place des mesures visant à favoriser la conciliation entre la vie familiale et professionnelle. Le partage des droits à congé entre hommes et femmes, accompagné des systèmes flexibles de compte temps partagé entre père et mère, constitue un modèle intéressant.
Q - Comment inciter les femmes à investir davantage les métiers dits "masculins" ?
R - Tout d'abord, il importe d'assurer un élargissement des choix professionnels proposés aux jeunes filles et donc, de sensibiliser l'ensemble de la communauté éducative aux questions d'égalité et de mixité. C'est l'un des axes forts de la convention interministérielle signée avec le ministère de l'Education nationale et étendue en 2002 à d'autres ministères.
Ensuite, il s'agit de promouvoir la mixité dans les branches professionnelles et les entreprises. A ce titre, des accords ont été signés au niveau national avec la fédération du Bâtiment et au niveau régional, comme en Haute-Normandie, avec les fédérations professionnelles du transport et de la logistique. Des acteurs tels l'AFPA se sont engagés depuis plusieurs années à doubler le nombre de femmes sur des métiers en tension et traditionnellement masculins, soit 5 000 femmes en 2006 dans des secteurs comme l'électricité, l'équipement, le bois, la construction, l'informatique, l'hôtellerie, la restauration et le tourisme.
Par ailleurs, la campagne d'égalité que j'ai lancée depuis le 8 mars dernier, qui montre des témoignages de femmes ayant investi des métiers masculins, contribue fortement à une culture du changement. Les labels attribués à des entreprises du secteur automobile ou aéronautique, fortement engagées dans le développement de la mixité professionnelle, en témoignent


(Source http://www.anpe.fr, le 20 mai 2005)