Texte intégral
Pierre Luc SEGUILLON - Il y a une critique qui est formulée à l'encontre de cette Constitution, et qui vous touche particulièrement en tant que ministre de la Défense, c'est un texte de cette Constitution qui dit : l'OTAN, je cite, vous le connaissez bien, c'est l'article 1.41, l'OTAN reste pour les états qui en sont membres, presque tous, le fondement de leur défense collective et l'instance de sa mise en uvre. Autrement dit, beaucoup de ceux qui contestent la Constitution disent : cet article est contradictoire avec l'idée d'une défense européenne indépendante.
Michèle Alliot-Marie - C'est tout à fait faux. La preuve, c'est que l'Europe de la défense qui, il y a dix ans était une utopie, il y a cinq ans un projet lointain, est aujourd'hui devenue une réalité et s'accorde d'une façon complémentaire à l'OTAN. Très souvent, on ne sait pas, ou l'on oublie, quels sont le but et la réalité de l'OTAN. L'OTAN est l'alliance conclue après la deuxième guerre mondiale, entre un certain nombre de pays européens, les Etats-Unis et le Canada, pour protéger chacun de ces pays, c'est-à-dire les pays européens, mais aussi bien le Canada et les Etats-Unis contre une éventuelle attaque de l'ex-Union soviétique. Cela a fonctionné et nous a effectivement permis d'être protégés contre ce risque pendant cinquante ans. Ce risque a aujourd'hui disparu, mais d'autres risques sont apparus. S'il y avait un risque majeur qui apparaissait un jour, il est évident qu'il faudrait que nous soyons tous ensemble. C'est ce que veut dire ce texte : nous ne rejetons pas cette alliance qui nous a protégés pendant cinquante ans ; nous la gardons comme ultime protection s'il y avait une attaque majeure contre l'un de ces pays. Point à la ligne. Cela n'empêche surtout pas, et je dirais presque au contraire, l'Europe de s'organiser pour être capable de se protéger dans la plupart des cas, mais également d'intervenir sur la scène internationale dans un certain nombre de crises ou de conflits, soit pour protéger ses ressortissants et ses intérêts, soit tout simplement pour venir défendre ses principes de paix et d'équilibre dans le monde et ce, bien évidemment, toujours dans le cadre des décisions de l'ONU.
Q - Alors parlons un instant et rapidement de l'Afrique, d'abord le Togo ; est-ce que de votre point de vue aujourd'hui le président Faure Gnassingbe est le président légitimement élu du Togo ; élection qui est contestée par certains de ses opposants ?
R - Ce n'est pas à moi de dire ce qu'il en est.
Q - Non, mais dans le rapport que la France a avec le Togo
R - Il y a un certain nombre d'instances, y compris d'instances judiciaires, puisque le Togo a des institutions qui ressemblent aux nôtres et qui sont destinées à se prononcer sur ce point. Il existe d'autre part des instances africaines beaucoup plus proches et dont c'est d'ailleurs le rôle, qui peuvent se prononcer. En ce qui concerne la France, je me demande d'ailleurs si ce n'était pas ici [lors d'une précédente interview] que j'ai été la première à m'exprimer et à dire, après la prise de pouvoir immédiatement après la mort du précédent président par son fils et avec le soutien de l'armée, que la France ne saurait admettre des coups d'Etat militaires. J'ai même été un peu brocardée dans certains journaux humoristiques à cause de cela. Ils pensaient que finalement les choses ne se passeraient pas comme cela. En réalité, et grâce notamment à la pression de l'Union africaine,
Q - Vu cette élection
R - Monsieur Faure Gnassingbe a en effet été amené à renoncer à cette position préalable et à organiser des élections. Nous restons donc dans ce cadre et l'Union africaine a très bien joué son rôle. Nous souhaitons que cela continue ainsi. Ce n'est pas nous qui ferons de l'ingérence dans le fonctionnement du Togo. Cette période est terminée et il faut bien qu'on le comprenne.
Q - Oui, mais alors précisément vous dites il n'y a pas d'ingérence. Aujourd'hui dans le Canard Enchaîné, il y a un entrefilet disant, alors vous me direz si c'est vrai ou si ce n'est pas vrai, qu'une équipe de la DGSE est présente au Togo pour essayer de récupérer un certain nombre de documents attestant de la collaboration très intense qu'il y a eu entre les gouvernements français et le président défunt qui a régné pendant trente-huit ans ?
R - J'ai effectivement découvert cet écho ce matin avec énormément de surprise. Je ne sais pas du tout ce qu'il en est, ni d'où viendrait cette initiative.
Q - La DGSE, vous devez connaître parce que c'est quand même vos services !
R - Je connais la DGSE. Ce que je peux vous dire, c'est qu'en aucun cas cet ordre n'est venu de chez moi.
Q - Très bien. Alors un mot sur la Côte d'Ivoire. Normalement arrive à terme jeudi, c'est-à-dire demain, le mandat onusien de la force Licorne qui est en Côte d'Ivoire; est-ce qu'à votre avis, il va être et il faudrait qu'il soit prolongé d'un mois encore ?
R - Ce mandat a effectivement déjà été prolongé.
Q - Une première fois
R - Et il devrait être prolongé jusqu'au début du mois de juin, le 4 juin précisément ; la nouvelle résolution n'a pas encore été adoptée par le Conseil de sécurité de l'ONU. C'est effectivement une prorogation et nous verrons quelle sera la formulation définitive de la nouvelle résolution. Ce que je constate, c'est qu'en Côte d'Ivoire, les choses semblent avancer et avancer dans le bon sens : il y a eu la fixation de la date pour les élections présidentielles au mois d'octobre de cette année.
Q - Et en toute hypothèse, en tout cas la force Licorne restera jusqu'aux élections présidentielles ?
R - Cela dépendra de la nouvelle résolution de l'ONU. Il devrait effectivement y avoir une demande des forces de l'ONUCI - c'est-à-dire les forces de l'ONU ; vous savez que la force Licorne vient soutenir ces forces de l'ONU et que l'on nous a expressément demandé de pouvoir assurer ce soutien. Mais encore une fois, je ne peux pas vous le dire aujourd'hui dans la mesure où je ne connais pas encore la rédaction qui sera retenue pour la résolution définitive.
Q - Question, un dernier mot ; quelles sont vos informations sur une éventuelle prolifération des milices et des mercenaires engagés par le gouvernement du Président Gbagbo ?
R - La mise en uvre de la résolution sur l'embargo se fait d'une façon satisfaisante, c'est-à-dire que des contrôles, effectivement, sont faits. Il y a eu de part et d'autre, un certain nombre de mercenaires ou de gens qui ont rejoint des milices, y compris parfois de très jeunes enfants qui venaient de pays voisins, ce qui est une préoccupation. Si la situation militaire est calme en Côte d'Ivoire et si la situation politique progresse, la sécurité sanitaire, elle, n'est pas bonne parce que la situation économique est très mauvaise et dans ce contexte, on voit se multiplier des actes de vandalisme, de vol, etc. Ceci est très préoccupant.
Q - Merci.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 9 mai 2005)
Michèle Alliot-Marie - C'est tout à fait faux. La preuve, c'est que l'Europe de la défense qui, il y a dix ans était une utopie, il y a cinq ans un projet lointain, est aujourd'hui devenue une réalité et s'accorde d'une façon complémentaire à l'OTAN. Très souvent, on ne sait pas, ou l'on oublie, quels sont le but et la réalité de l'OTAN. L'OTAN est l'alliance conclue après la deuxième guerre mondiale, entre un certain nombre de pays européens, les Etats-Unis et le Canada, pour protéger chacun de ces pays, c'est-à-dire les pays européens, mais aussi bien le Canada et les Etats-Unis contre une éventuelle attaque de l'ex-Union soviétique. Cela a fonctionné et nous a effectivement permis d'être protégés contre ce risque pendant cinquante ans. Ce risque a aujourd'hui disparu, mais d'autres risques sont apparus. S'il y avait un risque majeur qui apparaissait un jour, il est évident qu'il faudrait que nous soyons tous ensemble. C'est ce que veut dire ce texte : nous ne rejetons pas cette alliance qui nous a protégés pendant cinquante ans ; nous la gardons comme ultime protection s'il y avait une attaque majeure contre l'un de ces pays. Point à la ligne. Cela n'empêche surtout pas, et je dirais presque au contraire, l'Europe de s'organiser pour être capable de se protéger dans la plupart des cas, mais également d'intervenir sur la scène internationale dans un certain nombre de crises ou de conflits, soit pour protéger ses ressortissants et ses intérêts, soit tout simplement pour venir défendre ses principes de paix et d'équilibre dans le monde et ce, bien évidemment, toujours dans le cadre des décisions de l'ONU.
Q - Alors parlons un instant et rapidement de l'Afrique, d'abord le Togo ; est-ce que de votre point de vue aujourd'hui le président Faure Gnassingbe est le président légitimement élu du Togo ; élection qui est contestée par certains de ses opposants ?
R - Ce n'est pas à moi de dire ce qu'il en est.
Q - Non, mais dans le rapport que la France a avec le Togo
R - Il y a un certain nombre d'instances, y compris d'instances judiciaires, puisque le Togo a des institutions qui ressemblent aux nôtres et qui sont destinées à se prononcer sur ce point. Il existe d'autre part des instances africaines beaucoup plus proches et dont c'est d'ailleurs le rôle, qui peuvent se prononcer. En ce qui concerne la France, je me demande d'ailleurs si ce n'était pas ici [lors d'une précédente interview] que j'ai été la première à m'exprimer et à dire, après la prise de pouvoir immédiatement après la mort du précédent président par son fils et avec le soutien de l'armée, que la France ne saurait admettre des coups d'Etat militaires. J'ai même été un peu brocardée dans certains journaux humoristiques à cause de cela. Ils pensaient que finalement les choses ne se passeraient pas comme cela. En réalité, et grâce notamment à la pression de l'Union africaine,
Q - Vu cette élection
R - Monsieur Faure Gnassingbe a en effet été amené à renoncer à cette position préalable et à organiser des élections. Nous restons donc dans ce cadre et l'Union africaine a très bien joué son rôle. Nous souhaitons que cela continue ainsi. Ce n'est pas nous qui ferons de l'ingérence dans le fonctionnement du Togo. Cette période est terminée et il faut bien qu'on le comprenne.
Q - Oui, mais alors précisément vous dites il n'y a pas d'ingérence. Aujourd'hui dans le Canard Enchaîné, il y a un entrefilet disant, alors vous me direz si c'est vrai ou si ce n'est pas vrai, qu'une équipe de la DGSE est présente au Togo pour essayer de récupérer un certain nombre de documents attestant de la collaboration très intense qu'il y a eu entre les gouvernements français et le président défunt qui a régné pendant trente-huit ans ?
R - J'ai effectivement découvert cet écho ce matin avec énormément de surprise. Je ne sais pas du tout ce qu'il en est, ni d'où viendrait cette initiative.
Q - La DGSE, vous devez connaître parce que c'est quand même vos services !
R - Je connais la DGSE. Ce que je peux vous dire, c'est qu'en aucun cas cet ordre n'est venu de chez moi.
Q - Très bien. Alors un mot sur la Côte d'Ivoire. Normalement arrive à terme jeudi, c'est-à-dire demain, le mandat onusien de la force Licorne qui est en Côte d'Ivoire; est-ce qu'à votre avis, il va être et il faudrait qu'il soit prolongé d'un mois encore ?
R - Ce mandat a effectivement déjà été prolongé.
Q - Une première fois
R - Et il devrait être prolongé jusqu'au début du mois de juin, le 4 juin précisément ; la nouvelle résolution n'a pas encore été adoptée par le Conseil de sécurité de l'ONU. C'est effectivement une prorogation et nous verrons quelle sera la formulation définitive de la nouvelle résolution. Ce que je constate, c'est qu'en Côte d'Ivoire, les choses semblent avancer et avancer dans le bon sens : il y a eu la fixation de la date pour les élections présidentielles au mois d'octobre de cette année.
Q - Et en toute hypothèse, en tout cas la force Licorne restera jusqu'aux élections présidentielles ?
R - Cela dépendra de la nouvelle résolution de l'ONU. Il devrait effectivement y avoir une demande des forces de l'ONUCI - c'est-à-dire les forces de l'ONU ; vous savez que la force Licorne vient soutenir ces forces de l'ONU et que l'on nous a expressément demandé de pouvoir assurer ce soutien. Mais encore une fois, je ne peux pas vous le dire aujourd'hui dans la mesure où je ne connais pas encore la rédaction qui sera retenue pour la résolution définitive.
Q - Question, un dernier mot ; quelles sont vos informations sur une éventuelle prolifération des milices et des mercenaires engagés par le gouvernement du Président Gbagbo ?
R - La mise en uvre de la résolution sur l'embargo se fait d'une façon satisfaisante, c'est-à-dire que des contrôles, effectivement, sont faits. Il y a eu de part et d'autre, un certain nombre de mercenaires ou de gens qui ont rejoint des milices, y compris parfois de très jeunes enfants qui venaient de pays voisins, ce qui est une préoccupation. Si la situation militaire est calme en Côte d'Ivoire et si la situation politique progresse, la sécurité sanitaire, elle, n'est pas bonne parce que la situation économique est très mauvaise et dans ce contexte, on voit se multiplier des actes de vandalisme, de vol, etc. Ceci est très préoccupant.
Q - Merci.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 9 mai 2005)