Texte intégral
Q - La CFDT lance 40 nouveaux débats pour " écrire la suite ensemble ". De quoi s'agit-il ?
R - Des rencontres militantes que nous avons eues depuis l'épisode des retraites, nous avons tiré au moins deux enseignements essentiels. D'une part, nous avons pris plaisir à débattre. C'est une tendance presque " génétique " à la CFDT : nous sommes nés il y a quarante ans d'un débat très intense sur notre évolution, puis notre histoire a été jalonnée de confrontations parfois difficiles, que ce soit au moment de notre recentrage syndical à la fin des années 70, de la réforme Juppé de 1995, de la réforme des retraites ou du conflit des intermittents. Mais au final, à chaque fois, le débat nous a renforcés. C'est la conclusion à laquelle nous sommes arrivés, collectivement, au Conseil national d'octobre 2004.
D'autre part, nous avons lancé des pistes de réflexion pendant cette année d'échanges. Ces pistes, il nous faut les approfondir. Que ce soit sur l'amélioration de notre fonctionnement participatif, sur la conception du syndicalisme que nous incarnons, ou sur le nouveau souffle revendicatif que nous souhaitons porter sur la question centrale du travail. S'arrêter là, c'était rester sur notre faim. C'est pourquoi nous lançons cette nouvelle invitation à nos militants : poursuivons sur notre lancée. Tentons, ensemble, de formuler une nouvelle critique du capitalisme pour aboutir à une refondation de notre projet syndical. Écrivons ensemble, avec ces 40 nouveaux débats, la suite de notre histoire et de notre action quotidienne.
Q - Avec le congrès confédéral de 2006 en ligne de mire ?
R - Oui, mais pas seulement. Les 40 débats permettront un travail préparatoire aux réflexions qui conduiront au congrès de Grenoble. Mais les réflexions qui en sortiront auront une " durée de vie " bien supérieure. Elles irrigueront notre organisation bien au-delà de cette échéance.
Q - Parmi les axes de réflexion proposés au débat, le fonctionnement démocratique de la CFDT est interrogé.
R - J'ai entendu de la part des militants cet appel : " Il faut introduire davantage de participation dans notre démocratie représentative. " Cette idée, qui évite à la fois la démocratie directe et la technocratie, doit être creusée. Les " 40 débats " seront l'occasion d'étudier des pistes d'amélioration du processus de prise de décision : mieux impliquer les syndicats, revaloriser le rôle du Conseil national, réfléchir aux modalités du travail du Bureau national, notamment quand il doit se prononcer sur des négociations interprofessionnelles. Et aussi, réformer notre communication interne.
Q - Autre interrogation : la conception CFDT du syndicalisme, confrontée à celle des autres organisations syndicales...
R - L'épisode des retraites a été marquant à ce sujet : nos militants ont besoin de tous les éléments de décryptage des différentes approches syndicales. Les choix et les positionnements des uns et des autres s'analysent et s'expliquent par des conceptions différentes du rôle du syndicalisme. Il nous faut à présent proclamer clairement ce qui nous différencie comme ce qui nous rapproche des autres organisations syndicales. Pour notre part, nous sommes ouverts à toutes les convergences, avec les autres organisations syndicales ou associatives, sur des bases claires et en vue d'obtenir des résultats sur nos propres objectifs. C'est cette démarche qui nous a conduits à proposer une intersyndicale pour contrer les projets gouvernementaux sur les 35 heures, ou pour les trente ans de la loi Veil. C'est elle aussi qui nous a amenés à travailler avec la Mutualité pour peser sur la réforme de l'Assurance-maladie, ou avec les associations de solidarité sur un plan d'action contre l'exclusion.
Q - Comment doit se traduire le " souffle nouveau donné à l'action revendicative CFDT sur la question centrale du travail " ?
R - L'idée est de faire de la question du travail un identifiant fédérateur pour la CFDT, qui rende notre action plus visible. Ce qui implique une meilleure articulation de l'action confédérale avec l'expérience de terrain. Les questions de société ne sont pas abandonnées, mais analysées à l'aune de la question du travail.
Q - Le travail, justement. Les projets gouvernementaux sur les 35 heures font partie des grands dossiers de ce début d'année.
R - Nous les refusons. Le Bureau national de décembre l'a clairement affirmé. Le gouvernement fait des choix désastreux. Celui du chômage, en encourageant les heures supplémentaires plutôt que l'embauche, alors que la RTT a remis au travail 400 000 personnes. Celui des inégalités. Entre les salariés couverts par un accord 35 heures, dans les grandes entreprises en particulier, et qui le resteront, au moins provisoirement. Et ceux, majoritairement dans les TPE-PME, qui seront maintenus aux 39 heures - voire davantage - faute notamment de représentation syndicale. La situation risque encore de s'aggraver, du fait de la place concédée, dans les projets gouvernementaux, aux accords d'entreprise, et même au " gré à gré ", au détriment des accords de branche. Le gouvernement fait aussi le choix de l'intensification du travail. Pendant ce temps, le Medef traîne des pieds pour ouvrir les négociations sur la pénibilité, que nous demandons depuis longtemps. Le gouvernement répond enfin de la pire manière qui soit à la question salariale : par la tromperie. Dire qu'on peut gagner plus en travaillant plus est un leurre. Jamais un employeur ne laissera le choix aux salariés de leurs horaires de travail. En revanche, de vraies négociations salariales doivent être lancées. En un mot, les priorités CFDT - emploi, lutte contre les inégalités, vie au travail, pouvoir d'achat - sont percutées de plein fouet. Il faut nous préparer à prendre l'initiative.
(Source http://www.cfdt.fr, le 18 janvier 2005)
R - Des rencontres militantes que nous avons eues depuis l'épisode des retraites, nous avons tiré au moins deux enseignements essentiels. D'une part, nous avons pris plaisir à débattre. C'est une tendance presque " génétique " à la CFDT : nous sommes nés il y a quarante ans d'un débat très intense sur notre évolution, puis notre histoire a été jalonnée de confrontations parfois difficiles, que ce soit au moment de notre recentrage syndical à la fin des années 70, de la réforme Juppé de 1995, de la réforme des retraites ou du conflit des intermittents. Mais au final, à chaque fois, le débat nous a renforcés. C'est la conclusion à laquelle nous sommes arrivés, collectivement, au Conseil national d'octobre 2004.
D'autre part, nous avons lancé des pistes de réflexion pendant cette année d'échanges. Ces pistes, il nous faut les approfondir. Que ce soit sur l'amélioration de notre fonctionnement participatif, sur la conception du syndicalisme que nous incarnons, ou sur le nouveau souffle revendicatif que nous souhaitons porter sur la question centrale du travail. S'arrêter là, c'était rester sur notre faim. C'est pourquoi nous lançons cette nouvelle invitation à nos militants : poursuivons sur notre lancée. Tentons, ensemble, de formuler une nouvelle critique du capitalisme pour aboutir à une refondation de notre projet syndical. Écrivons ensemble, avec ces 40 nouveaux débats, la suite de notre histoire et de notre action quotidienne.
Q - Avec le congrès confédéral de 2006 en ligne de mire ?
R - Oui, mais pas seulement. Les 40 débats permettront un travail préparatoire aux réflexions qui conduiront au congrès de Grenoble. Mais les réflexions qui en sortiront auront une " durée de vie " bien supérieure. Elles irrigueront notre organisation bien au-delà de cette échéance.
Q - Parmi les axes de réflexion proposés au débat, le fonctionnement démocratique de la CFDT est interrogé.
R - J'ai entendu de la part des militants cet appel : " Il faut introduire davantage de participation dans notre démocratie représentative. " Cette idée, qui évite à la fois la démocratie directe et la technocratie, doit être creusée. Les " 40 débats " seront l'occasion d'étudier des pistes d'amélioration du processus de prise de décision : mieux impliquer les syndicats, revaloriser le rôle du Conseil national, réfléchir aux modalités du travail du Bureau national, notamment quand il doit se prononcer sur des négociations interprofessionnelles. Et aussi, réformer notre communication interne.
Q - Autre interrogation : la conception CFDT du syndicalisme, confrontée à celle des autres organisations syndicales...
R - L'épisode des retraites a été marquant à ce sujet : nos militants ont besoin de tous les éléments de décryptage des différentes approches syndicales. Les choix et les positionnements des uns et des autres s'analysent et s'expliquent par des conceptions différentes du rôle du syndicalisme. Il nous faut à présent proclamer clairement ce qui nous différencie comme ce qui nous rapproche des autres organisations syndicales. Pour notre part, nous sommes ouverts à toutes les convergences, avec les autres organisations syndicales ou associatives, sur des bases claires et en vue d'obtenir des résultats sur nos propres objectifs. C'est cette démarche qui nous a conduits à proposer une intersyndicale pour contrer les projets gouvernementaux sur les 35 heures, ou pour les trente ans de la loi Veil. C'est elle aussi qui nous a amenés à travailler avec la Mutualité pour peser sur la réforme de l'Assurance-maladie, ou avec les associations de solidarité sur un plan d'action contre l'exclusion.
Q - Comment doit se traduire le " souffle nouveau donné à l'action revendicative CFDT sur la question centrale du travail " ?
R - L'idée est de faire de la question du travail un identifiant fédérateur pour la CFDT, qui rende notre action plus visible. Ce qui implique une meilleure articulation de l'action confédérale avec l'expérience de terrain. Les questions de société ne sont pas abandonnées, mais analysées à l'aune de la question du travail.
Q - Le travail, justement. Les projets gouvernementaux sur les 35 heures font partie des grands dossiers de ce début d'année.
R - Nous les refusons. Le Bureau national de décembre l'a clairement affirmé. Le gouvernement fait des choix désastreux. Celui du chômage, en encourageant les heures supplémentaires plutôt que l'embauche, alors que la RTT a remis au travail 400 000 personnes. Celui des inégalités. Entre les salariés couverts par un accord 35 heures, dans les grandes entreprises en particulier, et qui le resteront, au moins provisoirement. Et ceux, majoritairement dans les TPE-PME, qui seront maintenus aux 39 heures - voire davantage - faute notamment de représentation syndicale. La situation risque encore de s'aggraver, du fait de la place concédée, dans les projets gouvernementaux, aux accords d'entreprise, et même au " gré à gré ", au détriment des accords de branche. Le gouvernement fait aussi le choix de l'intensification du travail. Pendant ce temps, le Medef traîne des pieds pour ouvrir les négociations sur la pénibilité, que nous demandons depuis longtemps. Le gouvernement répond enfin de la pire manière qui soit à la question salariale : par la tromperie. Dire qu'on peut gagner plus en travaillant plus est un leurre. Jamais un employeur ne laissera le choix aux salariés de leurs horaires de travail. En revanche, de vraies négociations salariales doivent être lancées. En un mot, les priorités CFDT - emploi, lutte contre les inégalités, vie au travail, pouvoir d'achat - sont percutées de plein fouet. Il faut nous préparer à prendre l'initiative.
(Source http://www.cfdt.fr, le 18 janvier 2005)