Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de poursuivre la tradition qui veut que, chaque année, au mois d'avril, le ministre de l'industrie présente l'état de la situation énergétique de la France au vu des résultats les plus récents. Cet exercice revêt pour moi une importance particulière cette année, au moment où les prix du pétrole atteignent des records et où le Parlement examine en deuxième lecture le projet de Loi d'orientation sur l'énergie qui vise à apporter des réponses nationales à cette situation.
Le paradoxe, c'est que le contexte économique mondial a été nettement mieux orienté en 2004 qu'en 2003, avec notamment une forte croissance en Asie et en Amérique Latine ; or, c'est justement cette amélioration de la conjoncture qui conduit à une demande accrue d'énergie et entretient la croissance des prix, avec des records historiques, en dollars courants, pour le pétrole.
Pour autant, je veux tout de suite vous rassurer, il n'y a pas de crainte de rupture d'approvisionnement, contrairement aux années 1970.
Je veux saisir l'occasion de ce bilan énergétique de la France en 2004 pour vous présenter quelques éléments saillants de notre politique énergétique. Vous trouverez dans le dossier qui vous est remis des données plus détaillées.
1. Tout d'abord, la hausse du prix du pétrole conduit à une forte hausse de la facture énergétique
[T1] Notre facture énergétique fait un bond de +24 %, après une hausse de +5,4 % en 2003 qui avait succédé à deux années de baisse. Elle représente 1,8 % du produit intérieur brut, ce qui demeure en net retrait par rapport aux 5 % connus au début des années 80. Cette hausse de la facture tient principalement à celle des cours internationaux des énergies fossiles mais aussi, pour une moindre part, à la hausse des importations en volume [T2]. À l'inverse, trois éléments contribuent à atténuer la hausse de la facture : la baisse du cours du dollar par rapport à l'euro, des déstockages importants et une progression de la production d'électricité nucléaire.
Fort heureusement, notre politique d'indépendance énergétique a donc atténué les effets de la hausse des prix du pétrole pour le consommateur.
A la consommation, les prix moyens annuels de l'énergie ont augmenté de +5 %, par rapport à une inflation d'ensemble de +2,2 %. Les produits pétroliers ont particulièrement pesé avec une hausse de +8,7 %.
Face à cette hausse des prix de l'énergie, il nous faut assurément travailler avec nos partenaires européens et étrangers sur l'offre de produits pétroliers. Nous devons en particulier promouvoir les investissements, y compris par la mise en place de partenariats entre les compagnies internationales, d'une part, et les pays producteurs ou les compagnies nationales, d'autre part.
Nous devons également améliorer la transparence des marchés pétroliers pour réduire la volatilité des cours et les spéculations. Une meilleure information sur les données relatives à la production, aux stocks, à la consommation mais aussi aux réserves pourrait améliorer substantiellement le fonctionnement du marché pétrolier.
Mais à l'évidence, nous ne pouvons pas nous contenter de cette action sur l'offre internationale de produits pétroliers. C'est pourquoi le projet de loi d'orientation sur l'énergie a fixé trois axes importants pour la politique énergétique :
- premièrement, maîtriser la demande d'énergie ;
- ensuite, diversifier notre bouquet énergétique ;
- et, enfin, renforcer la recherche sur les nouvelles technologies de l'énergie.
2. S'agissant de la maîtrise de la demande : l'efficacité énergétique de notre économie est en nette amélioration [T3]
La consommation totale d'énergie primaire, qui avait été stable en 2003, croît de +0,7 %, à comparer à une croissance du PIB de +2,3 %. Par beaucoup d'aspects, la situation énergétique de la France se rapproche de la normale après deux années exceptionnelles.
Cette croissance modérée de la consommation est de moitié inférieure à la tendance connue depuis 1990, soit +1,4 % par an.
Si on considère l'énergie finale, c'est-à-dire celle qui arrive directement au consommateur, après déduction des pertes et consommations internes au secteur énergétique, la croissance de la consommation est de +0,4 %.
Cette nette amélioration de l'efficacité énergétique finale de l'économie française s'explique, en partie, par la reprise économique qui suscite des économies d'échelle en phase de reprise économique. Néanmoins, l'accélération connue depuis deux ans révèle aussi un mouvement plus profond sur les comportements des agents économiques. On observe en particulier, des progrès dans le domaine des transports, qui peuvent être portés au crédit de la politique du Gouvernement, notamment en matière de sécurité routière. Certes, la hausse des prix des énergies aide, mais force est de constater que notre politique porte ses fruits. Le débat national sur les énergies en 2003, les campagnes nationales d'information en 2004, les travaux législatifs et réglementaires ont conduit nos concitoyens à mieux prendre en compte les préoccupations d'économie d'énergie.
Le projet de loi d'orientation sur l'énergie, avec par exemple le crédit d'impôt pour les équipements économes en énergie et la mise en place d'un marché de certificats d'économie d'énergie, doit nous permettre d'aller encore plus loin dans ce sens. Notre objectif est d'améliorer l'efficacité énergétique de 2 % par an à l'horizon 2015.
3. La demande d'énergie doit être analysée selon les formes d'énergie et selon les secteurs d'activité ainsi que les axes de politique énergétique qui en découlent
a) Si on examine les évolutions par forme d'énergie, on observe les points suivants [T4] :
o Le charbon recule sensiblement. A l'avenir quelles que soient les évolutions technologies relatives à cette énergie, ce charbon sera importé puisque l'année 2004 a été marquée par la fermeture, en avril, de la dernière mine de charbon en France, la Houve, à Creutzwald, en Lorraine.
o Le pétrole stagne. L'activité des 13 raffineries françaises a été particulièrement intense. Malgré les prix élevés, les importations de pétrole brut ne baissent que très peu (-0,4 %). Le solde importateur de produits raffinés est tout aussi stable. Néanmoins, les volumes en cause sont croissants en raison de l'écart grandissant de structure entre l'offre des raffineries françaises et le marché intérieur. C'est pourquoi, il nous faut nous préoccuper des investissements dans ce secteur.
o Le gaz, en croissance de +1,4 %, contre une baisse de -1,3 % en 2003, reste loin de sa tendance à la hausse de +3,1 % par an depuis 1990. Par ailleurs, l'année 2004 a été marquée par l'ouverture du marché des professionnels à la concurrence au 1er juillet. Cela représente 350 milliards de kilowattheures et 530.000 sites. Les évolutions tarifaires resteront cependant largement liées à l'évolution du coût de la matière première qui doit autant que possible, être déconnectée, à terme, du prix du pétrole.
o La consommation intérieure d'électricité, est en hausse de +1,4 %, un rythme sensiblement inférieur à la moyenne observée depuis 1990, qui est de +2,2 % par an. Par ailleurs, l'année 2004 a été marquée par l'ouverture totale du marché des professionnels à la concurrence au 1er juillet. Elle représente 300 milliards de kilowattheures et 3,5 millions de sites.
La politique du Gouvernement, avec le lancement de l'EPR et la préparation d'une nouvelle programmation pluriannuelle des investissements, va dans le sens d'une évolution maîtrisée des prix de l'électricité.
o Les énergies renouvelables thermiques restent stables. [T5] Je reviendrai plus tard sur les autres énergies renouvelables mais je veux noter d'ores et déjà que la France est le premier producteur d'énergies renouvelables de l'Union européenne.
b) J'en viens maintenant à la déclinaison de la consommation par secteur d'activité économique [T6]
o Dans l'industrie, hormis les usages non énergétiques tels que la pétrochimie, la consommation croît de +0,8 %. Cette légère hausse doit être mise en perspective avec la hausse de 2,7 % de la production manufacturière. L'efficacité énergétique de l'industrie française est en progrès constant ! C'est une orientation qu'il nous faut poursuivre avec notamment la mise en place des certificats d'économie d'énergie prévus par le projet de LOE et le développement de la recherche et de l'innovation.
o Dans le résidentiel et le tertiaire, la hausse est seulement de +0,3 %, à comparer à une hausse tendancielle de +1,2 % par an depuis 1990. Les prix élevés, la progression limitée du pouvoir d'achat des ménages, la morosité de l'activité de certaines branches du tertiaire concourent à stabiliser les consommations. L'évolution positive du comportement des ménages, dont témoignent les résultats du baromètre d'opinion sur l'énergie établi par le CREDOC et l'Observatoire de l'énergie, y contribue également.
o Les transports, qui avaient connu une baisse en 2003, sont de nouveau orientés à la hausse, avec +0,7 %. Cela reste bien inférieur à la hausse tendancielle, qui est de +1,4 % depuis 1990. La plus forte hausse concerne les carburéacteurs, qui retrouvent leur niveau de 2000, avec un bond de +5,1 %. Les carburants routiers sont stables à +0,2 %. Mais, derrière cette stabilité globale, on observe que le gazole croît de +2,3 % alors que l'essence chute de -4,9 %.
Les consommations unitaires des véhicules particuliers, exprimées en litres pour 100 kms, poursuivent leur baisse soutenue, avec -1,5 %. Comme en 2003, la diésélisation du parc y contribue, ainsi que le meilleur respect des vitesses limites par les conducteurs.
4. La diversification de la production d'énergie est une réponse efficace
[T7] La production primaire d'énergies fossiles, charbon pétrole et gaz, est en baisse constante, accentuée en 2004 par l'arrêt de l'extraction du charbon. Néanmoins, les investissements de production et développement pétroliers ont plus que doublé entre 2003 et 2004, ce qui est prometteur pour les prochaines années.
Malgré cette pauvreté en ressources énergétiques fossiles, grâce au nucléaire, à l'hydraulique et aux autres énergies renouvelables, la France réussit à limiter ses importations d'énergie à la moitié de sa consommation.
La production totale brute d'électricité croît de +0,9 %, contre une moyenne de +2,2 % par an depuis 1990. Cette production électrique est à 78 % d'origine nucléaire, à 12 % d'origine renouvelable et à 10 % d'origine thermique classique.
Les principaux déterminants de l'évolution de l'offre d'électricité sont les suivants :
o La production brute des centrales nucléaires augmente de +1,6 %. EDF a augmenté sa production par une meilleure gestion des centrales. En témoigne le couplage simultané au réseau, en décembre 2004, de l'ensemble des 58 réacteurs, avec un nouveau record de puissance établi à 62.000 mégawatts.
o L'hydraulique reste à un niveau modeste, traduisant la mauvaise hydraulicité de ces deux dernières années.
o [T8] L'électricité éolienne progresse vigoureusement, de +47 %, en production et de +61 % en puissance installée.
o L'électricité produite à partir d'énergies renouvelables thermiques, essentiellement à partir de déchets urbains, de déchets de bois et de biogaz, progresse également.
o Au total, toutes énergies renouvelables confondues, la part de l'électricité d'origine renouvelable dans la consommation intérieure brute d'électricité, calculée pour la seule métropole, est stable, à 12,9 %.
o Le thermique classique à partir de combustible fossile (charbon, gaz, fioul) s'inscrit en baisse de -5,2 %. Il reste à un niveau élevé puisque, en dehors de 2003, il faut remonter à 1991 pour retrouver un niveau supérieur !
Cependant le solde exportateur d'électricité recule pour la deuxième année, de -6,6 %. La nécessité de nouvelles capacités de production d'électricité devient donc clairement un sujet d'actualité.
Comme vous le voyez notre bouquet énergétique est bien diversifié et le projet de loi d'orientation sur l'énergie encouragera cette diversification. Je vous rappelle ainsi quelques uns des objectifs fixés :
- une production intérieure d'électricité d'origine renouvelable à hauteur de 21% de la consommation en 2010 ;
- le développement des énergies renouvelables thermiques pour permettre d'ici 2010 une hausse de 50 % de la production de chaleur d'origine renouvelable ;
- l'incorporation de biocarburants à hauteur de 2 % d'ici au 31 décembre 2005 et de 5,75 % d'ici au 31 décembre 2010.
Enfin, le projet de loi d'orientation sur l'énergie prévoit d'accentuer cette tendance par un renforcement de la recherche sur les nouvelles technologies de l'énergie : séquestration du dioxyde de carbone, piles à combustibles ou encore solaire photovoltaïque. Ces nouvelles technologies seront nécessaires pour assurer notre sécurité d'approvisionnement à un prix compétitif tout en atteignant les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés dans la lutte contre l'effet de serre. Je vous rappelle que le projet de loi prévoit une division par quatre de nos émissions d'ici 2050 !
5. Je veux souligner que la politique énergétique de la France lui donne une place privilégiée dans la lutte contre l'effet de serre.
[T9] Selon une première estimation, les émissions de CO2 restent quasiment inchangées par rapport à 2003.
Le moindre recours aux centrales électriques thermiques classiques, notamment au charbon, a compensé la petite hausse des émissions dues aux transports. Le résidentiel tertiaire et l'industrie évoluent peu. Si on fait abstraction des " puits de carbone " et des autres gaz à effet de serre, le niveau des émissions de la France en 2004 est de 3,1 % au-dessus du niveau de 1990 et de -23 % en dessous de celui de 1980 ! [T10]
Ainsi la France se situe parmi les pays de l'OCDE qui émettent le moins de CO2 par habitant. [T11] Ce bon score tient en partie à la place accordée au nucléaire. Cette option est considérée comme avantageuse par une majorité de nos concitoyens. Je ne doute pas que la discussion en 2006 d'un projet de loi visant à définir des solutions de gestion sûres et pérennes pour tous les déchets radioactifs devrait renforcer encore cette opinion.
6. En conclusion, je veux souligner les défis que doit relever notre politique énergétique, dont ce bilan témoigne.
L'approvisionnement énergétique contribue de façon décisive au développement économique. Il doit donc être assuré aux meilleures conditions possibles, en termes de fiabilité, de coût et de qualité. La crise actuelle des prix des énergies fossiles handicape la croissance économique des pays importateurs comme la France. Elle confirme toute la pertinence des choix faits par notre pays en faveur des énergies renouvelables, du nucléaire et des économies d'énergie.
Ces choix sont aussi confortés par la montée des exigences en matière de lutte contre l'effet de serre. Le projet de loi d'orientation sur l'énergie que le Gouvernement a préparé et qui sera examiné en seconde lecture au sénat la semaine prochaine permettra de répondre de manière ambitieuse et efficace à l'ensemble de ces problématiques.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 27 avril 2005)
Je suis heureux de poursuivre la tradition qui veut que, chaque année, au mois d'avril, le ministre de l'industrie présente l'état de la situation énergétique de la France au vu des résultats les plus récents. Cet exercice revêt pour moi une importance particulière cette année, au moment où les prix du pétrole atteignent des records et où le Parlement examine en deuxième lecture le projet de Loi d'orientation sur l'énergie qui vise à apporter des réponses nationales à cette situation.
Le paradoxe, c'est que le contexte économique mondial a été nettement mieux orienté en 2004 qu'en 2003, avec notamment une forte croissance en Asie et en Amérique Latine ; or, c'est justement cette amélioration de la conjoncture qui conduit à une demande accrue d'énergie et entretient la croissance des prix, avec des records historiques, en dollars courants, pour le pétrole.
Pour autant, je veux tout de suite vous rassurer, il n'y a pas de crainte de rupture d'approvisionnement, contrairement aux années 1970.
Je veux saisir l'occasion de ce bilan énergétique de la France en 2004 pour vous présenter quelques éléments saillants de notre politique énergétique. Vous trouverez dans le dossier qui vous est remis des données plus détaillées.
1. Tout d'abord, la hausse du prix du pétrole conduit à une forte hausse de la facture énergétique
[T1] Notre facture énergétique fait un bond de +24 %, après une hausse de +5,4 % en 2003 qui avait succédé à deux années de baisse. Elle représente 1,8 % du produit intérieur brut, ce qui demeure en net retrait par rapport aux 5 % connus au début des années 80. Cette hausse de la facture tient principalement à celle des cours internationaux des énergies fossiles mais aussi, pour une moindre part, à la hausse des importations en volume [T2]. À l'inverse, trois éléments contribuent à atténuer la hausse de la facture : la baisse du cours du dollar par rapport à l'euro, des déstockages importants et une progression de la production d'électricité nucléaire.
Fort heureusement, notre politique d'indépendance énergétique a donc atténué les effets de la hausse des prix du pétrole pour le consommateur.
A la consommation, les prix moyens annuels de l'énergie ont augmenté de +5 %, par rapport à une inflation d'ensemble de +2,2 %. Les produits pétroliers ont particulièrement pesé avec une hausse de +8,7 %.
Face à cette hausse des prix de l'énergie, il nous faut assurément travailler avec nos partenaires européens et étrangers sur l'offre de produits pétroliers. Nous devons en particulier promouvoir les investissements, y compris par la mise en place de partenariats entre les compagnies internationales, d'une part, et les pays producteurs ou les compagnies nationales, d'autre part.
Nous devons également améliorer la transparence des marchés pétroliers pour réduire la volatilité des cours et les spéculations. Une meilleure information sur les données relatives à la production, aux stocks, à la consommation mais aussi aux réserves pourrait améliorer substantiellement le fonctionnement du marché pétrolier.
Mais à l'évidence, nous ne pouvons pas nous contenter de cette action sur l'offre internationale de produits pétroliers. C'est pourquoi le projet de loi d'orientation sur l'énergie a fixé trois axes importants pour la politique énergétique :
- premièrement, maîtriser la demande d'énergie ;
- ensuite, diversifier notre bouquet énergétique ;
- et, enfin, renforcer la recherche sur les nouvelles technologies de l'énergie.
2. S'agissant de la maîtrise de la demande : l'efficacité énergétique de notre économie est en nette amélioration [T3]
La consommation totale d'énergie primaire, qui avait été stable en 2003, croît de +0,7 %, à comparer à une croissance du PIB de +2,3 %. Par beaucoup d'aspects, la situation énergétique de la France se rapproche de la normale après deux années exceptionnelles.
Cette croissance modérée de la consommation est de moitié inférieure à la tendance connue depuis 1990, soit +1,4 % par an.
Si on considère l'énergie finale, c'est-à-dire celle qui arrive directement au consommateur, après déduction des pertes et consommations internes au secteur énergétique, la croissance de la consommation est de +0,4 %.
Cette nette amélioration de l'efficacité énergétique finale de l'économie française s'explique, en partie, par la reprise économique qui suscite des économies d'échelle en phase de reprise économique. Néanmoins, l'accélération connue depuis deux ans révèle aussi un mouvement plus profond sur les comportements des agents économiques. On observe en particulier, des progrès dans le domaine des transports, qui peuvent être portés au crédit de la politique du Gouvernement, notamment en matière de sécurité routière. Certes, la hausse des prix des énergies aide, mais force est de constater que notre politique porte ses fruits. Le débat national sur les énergies en 2003, les campagnes nationales d'information en 2004, les travaux législatifs et réglementaires ont conduit nos concitoyens à mieux prendre en compte les préoccupations d'économie d'énergie.
Le projet de loi d'orientation sur l'énergie, avec par exemple le crédit d'impôt pour les équipements économes en énergie et la mise en place d'un marché de certificats d'économie d'énergie, doit nous permettre d'aller encore plus loin dans ce sens. Notre objectif est d'améliorer l'efficacité énergétique de 2 % par an à l'horizon 2015.
3. La demande d'énergie doit être analysée selon les formes d'énergie et selon les secteurs d'activité ainsi que les axes de politique énergétique qui en découlent
a) Si on examine les évolutions par forme d'énergie, on observe les points suivants [T4] :
o Le charbon recule sensiblement. A l'avenir quelles que soient les évolutions technologies relatives à cette énergie, ce charbon sera importé puisque l'année 2004 a été marquée par la fermeture, en avril, de la dernière mine de charbon en France, la Houve, à Creutzwald, en Lorraine.
o Le pétrole stagne. L'activité des 13 raffineries françaises a été particulièrement intense. Malgré les prix élevés, les importations de pétrole brut ne baissent que très peu (-0,4 %). Le solde importateur de produits raffinés est tout aussi stable. Néanmoins, les volumes en cause sont croissants en raison de l'écart grandissant de structure entre l'offre des raffineries françaises et le marché intérieur. C'est pourquoi, il nous faut nous préoccuper des investissements dans ce secteur.
o Le gaz, en croissance de +1,4 %, contre une baisse de -1,3 % en 2003, reste loin de sa tendance à la hausse de +3,1 % par an depuis 1990. Par ailleurs, l'année 2004 a été marquée par l'ouverture du marché des professionnels à la concurrence au 1er juillet. Cela représente 350 milliards de kilowattheures et 530.000 sites. Les évolutions tarifaires resteront cependant largement liées à l'évolution du coût de la matière première qui doit autant que possible, être déconnectée, à terme, du prix du pétrole.
o La consommation intérieure d'électricité, est en hausse de +1,4 %, un rythme sensiblement inférieur à la moyenne observée depuis 1990, qui est de +2,2 % par an. Par ailleurs, l'année 2004 a été marquée par l'ouverture totale du marché des professionnels à la concurrence au 1er juillet. Elle représente 300 milliards de kilowattheures et 3,5 millions de sites.
La politique du Gouvernement, avec le lancement de l'EPR et la préparation d'une nouvelle programmation pluriannuelle des investissements, va dans le sens d'une évolution maîtrisée des prix de l'électricité.
o Les énergies renouvelables thermiques restent stables. [T5] Je reviendrai plus tard sur les autres énergies renouvelables mais je veux noter d'ores et déjà que la France est le premier producteur d'énergies renouvelables de l'Union européenne.
b) J'en viens maintenant à la déclinaison de la consommation par secteur d'activité économique [T6]
o Dans l'industrie, hormis les usages non énergétiques tels que la pétrochimie, la consommation croît de +0,8 %. Cette légère hausse doit être mise en perspective avec la hausse de 2,7 % de la production manufacturière. L'efficacité énergétique de l'industrie française est en progrès constant ! C'est une orientation qu'il nous faut poursuivre avec notamment la mise en place des certificats d'économie d'énergie prévus par le projet de LOE et le développement de la recherche et de l'innovation.
o Dans le résidentiel et le tertiaire, la hausse est seulement de +0,3 %, à comparer à une hausse tendancielle de +1,2 % par an depuis 1990. Les prix élevés, la progression limitée du pouvoir d'achat des ménages, la morosité de l'activité de certaines branches du tertiaire concourent à stabiliser les consommations. L'évolution positive du comportement des ménages, dont témoignent les résultats du baromètre d'opinion sur l'énergie établi par le CREDOC et l'Observatoire de l'énergie, y contribue également.
o Les transports, qui avaient connu une baisse en 2003, sont de nouveau orientés à la hausse, avec +0,7 %. Cela reste bien inférieur à la hausse tendancielle, qui est de +1,4 % depuis 1990. La plus forte hausse concerne les carburéacteurs, qui retrouvent leur niveau de 2000, avec un bond de +5,1 %. Les carburants routiers sont stables à +0,2 %. Mais, derrière cette stabilité globale, on observe que le gazole croît de +2,3 % alors que l'essence chute de -4,9 %.
Les consommations unitaires des véhicules particuliers, exprimées en litres pour 100 kms, poursuivent leur baisse soutenue, avec -1,5 %. Comme en 2003, la diésélisation du parc y contribue, ainsi que le meilleur respect des vitesses limites par les conducteurs.
4. La diversification de la production d'énergie est une réponse efficace
[T7] La production primaire d'énergies fossiles, charbon pétrole et gaz, est en baisse constante, accentuée en 2004 par l'arrêt de l'extraction du charbon. Néanmoins, les investissements de production et développement pétroliers ont plus que doublé entre 2003 et 2004, ce qui est prometteur pour les prochaines années.
Malgré cette pauvreté en ressources énergétiques fossiles, grâce au nucléaire, à l'hydraulique et aux autres énergies renouvelables, la France réussit à limiter ses importations d'énergie à la moitié de sa consommation.
La production totale brute d'électricité croît de +0,9 %, contre une moyenne de +2,2 % par an depuis 1990. Cette production électrique est à 78 % d'origine nucléaire, à 12 % d'origine renouvelable et à 10 % d'origine thermique classique.
Les principaux déterminants de l'évolution de l'offre d'électricité sont les suivants :
o La production brute des centrales nucléaires augmente de +1,6 %. EDF a augmenté sa production par une meilleure gestion des centrales. En témoigne le couplage simultané au réseau, en décembre 2004, de l'ensemble des 58 réacteurs, avec un nouveau record de puissance établi à 62.000 mégawatts.
o L'hydraulique reste à un niveau modeste, traduisant la mauvaise hydraulicité de ces deux dernières années.
o [T8] L'électricité éolienne progresse vigoureusement, de +47 %, en production et de +61 % en puissance installée.
o L'électricité produite à partir d'énergies renouvelables thermiques, essentiellement à partir de déchets urbains, de déchets de bois et de biogaz, progresse également.
o Au total, toutes énergies renouvelables confondues, la part de l'électricité d'origine renouvelable dans la consommation intérieure brute d'électricité, calculée pour la seule métropole, est stable, à 12,9 %.
o Le thermique classique à partir de combustible fossile (charbon, gaz, fioul) s'inscrit en baisse de -5,2 %. Il reste à un niveau élevé puisque, en dehors de 2003, il faut remonter à 1991 pour retrouver un niveau supérieur !
Cependant le solde exportateur d'électricité recule pour la deuxième année, de -6,6 %. La nécessité de nouvelles capacités de production d'électricité devient donc clairement un sujet d'actualité.
Comme vous le voyez notre bouquet énergétique est bien diversifié et le projet de loi d'orientation sur l'énergie encouragera cette diversification. Je vous rappelle ainsi quelques uns des objectifs fixés :
- une production intérieure d'électricité d'origine renouvelable à hauteur de 21% de la consommation en 2010 ;
- le développement des énergies renouvelables thermiques pour permettre d'ici 2010 une hausse de 50 % de la production de chaleur d'origine renouvelable ;
- l'incorporation de biocarburants à hauteur de 2 % d'ici au 31 décembre 2005 et de 5,75 % d'ici au 31 décembre 2010.
Enfin, le projet de loi d'orientation sur l'énergie prévoit d'accentuer cette tendance par un renforcement de la recherche sur les nouvelles technologies de l'énergie : séquestration du dioxyde de carbone, piles à combustibles ou encore solaire photovoltaïque. Ces nouvelles technologies seront nécessaires pour assurer notre sécurité d'approvisionnement à un prix compétitif tout en atteignant les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés dans la lutte contre l'effet de serre. Je vous rappelle que le projet de loi prévoit une division par quatre de nos émissions d'ici 2050 !
5. Je veux souligner que la politique énergétique de la France lui donne une place privilégiée dans la lutte contre l'effet de serre.
[T9] Selon une première estimation, les émissions de CO2 restent quasiment inchangées par rapport à 2003.
Le moindre recours aux centrales électriques thermiques classiques, notamment au charbon, a compensé la petite hausse des émissions dues aux transports. Le résidentiel tertiaire et l'industrie évoluent peu. Si on fait abstraction des " puits de carbone " et des autres gaz à effet de serre, le niveau des émissions de la France en 2004 est de 3,1 % au-dessus du niveau de 1990 et de -23 % en dessous de celui de 1980 ! [T10]
Ainsi la France se situe parmi les pays de l'OCDE qui émettent le moins de CO2 par habitant. [T11] Ce bon score tient en partie à la place accordée au nucléaire. Cette option est considérée comme avantageuse par une majorité de nos concitoyens. Je ne doute pas que la discussion en 2006 d'un projet de loi visant à définir des solutions de gestion sûres et pérennes pour tous les déchets radioactifs devrait renforcer encore cette opinion.
6. En conclusion, je veux souligner les défis que doit relever notre politique énergétique, dont ce bilan témoigne.
L'approvisionnement énergétique contribue de façon décisive au développement économique. Il doit donc être assuré aux meilleures conditions possibles, en termes de fiabilité, de coût et de qualité. La crise actuelle des prix des énergies fossiles handicape la croissance économique des pays importateurs comme la France. Elle confirme toute la pertinence des choix faits par notre pays en faveur des énergies renouvelables, du nucléaire et des économies d'énergie.
Ces choix sont aussi confortés par la montée des exigences en matière de lutte contre l'effet de serre. Le projet de loi d'orientation sur l'énergie que le Gouvernement a préparé et qui sera examiné en seconde lecture au sénat la semaine prochaine permettra de répondre de manière ambitieuse et efficace à l'ensemble de ces problématiques.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 27 avril 2005)