Texte intégral
D I : Monsieur le ministre, Le rapport du Conseil économique et social, Vers une mondialisation plus juste, reprend votre idée, formulée au sein du rapport de Dialogue Initiative Réconcilier la France avec la mondialisation, d'Organisation mondiale de l'Environnement, quelles seraient les modalités de sa mise en oeuvre ?
Serge Lepeltier : Le renforcement de la gouvernance internationale de l'environnement apparaît désormais pour beaucoup comme une nécessité. C'est un thème que porte la France depuis de nombreuses années et auquel est très attaché le Président de la République Jacques Chirac. Celui ci a d'ailleurs, le premier, proposé en 2003 devant l'assemblée générale des Nations unies de créer une Organisation des Nations Unies pour l'Environnement à construire à partir du Programme des Nations unies pour l'environnement.
Pour faire progresser la réflexion sur ce sujet essentiel pour notre planète, la France a ainsi décidé de créer un groupe de travail informel. 26 Etats et la Commission ont accepté d'y participer. En mars 2005, le groupe a conclu les travaux menés durant un an, par l'adoption d'un texte. Celui-ci a été envoyé au Secrétaire Général des Nations Unies, et beaucoup de ses idées ont été reprises dans le rapport que celui ci finalisait pour la préparation du Sommet de septembre.
Nous sommes donc à la croisée des chemins et j'espère que l'année qui vient permettra de faire progresser et partager cette ambition.
Je ne veux pas préjuger des résultats de nos travaux futurs sur ce sujet mais L'ONUE à laquelle je pense, pourrait être constituée sous la forme d'une organisation " parapluie " à l'instar de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, offrant aux Accords multilatéraux de l'environnement (AME) existants ou encore à négocier, un cadre commun de référence et d'action, tout en préservant leur autonomie juridique. L'ONUE assurerait ainsi certaines fonctions transversales aux AME en question : services des conférences, alerte, communication, suivi de la mise en oeuvre, renforcement des capacités, etc. Elle établirait un programme de travail stratégique sur la base de priorités transversales communes aux différentes conventions. Les missions de portée globale seraient assurées par le secrétariat de l'ONUE, en concertation avec les secrétariats des AME concernés et en partenariat avec les instances compétentes des Nations Unies. Les missions de portée régionale seraient mise en oeuvre de façon décentralisée.
D I : Pensez-vous comme le suggère le CES qu'il faille créer une structure interministérielle de coordination pour gérer les questions touchant la mondialisation à l'exemple du SGCI pour les questions européennes ?
SL : Le CES a raison lorsqu'il indique que les questions de mondialisation appellent, s'agissant des administrations, des réponses interministérielles. Aucun ministère à lui seul ne détient la vérité sur ces sujets complexes et la mutualisation des compétences qu'elles relèvent de la sphère publique mais aussi d'autres univers (privé, universitaire, associatif) me paraît absolument indispensable. La méthode pour organiser la coordination interministérielle mérite d'être précisément analysée. J'observe qu'en France, sous l'égide du Premier ministre, cette coordination fonctionne plutôt bien et de façon souple en fonction de l'importance des sujets traités et m'interroge sur la nécessité de créer une nouvelle structure spécifique de coordination.
D I : En matière d'aide au développement, alors que les Objectifs du Millénaire préconisent une participation minimale à hauteur de 0,7% du PIB, quelles sources supplémentaires de financement sont envisageables ?
SL : L'augmentation de l'aide publique est nécessaire pour atteindre les Objectifs du Millénaire. Il n'est pas encore trop tard pour les atteindre si la communauté internationale s'engage dans un doublement progressif de son aide d'ici à 2015. Les pays qui n'atteignent pas encore le chiffre de 0,7 pour cent de leur PIB devraient s'engager sur un calendrier, comme le fait la France, pour y parvenir dans les meilleurs délais.
Mais cette augmentation ne sera pas suffisante pour couvrir les besoins des pays en développement de manière prévisible et stable. La France propose d'avancer simultanément dans deux directions qui exigent les efforts conjoints des Etats et des entreprises.
Première direction : la fiscalité financière internationale. Cette proposition britannique permettrait de lever sans délai des sommes très importantes sur les marchés financiers. La France y est favorable et souhaite la mise en place d'un mécanisme expérimental spécialement consacré à la vaccination, qui permettra de sauver la vie de plusieurs millions d'enfants. Nous sommes également prêts à envisager, comme le propose le Royaume-Uni, un mécanisme similaire contre le sida.
Deuxième direction : il faut trouver le moyen de rembourser ces emprunts sans diminuer l'assistance internationale ou grever les budgets en les adossant à de nouvelles ressources : taxes, prélèvements internationaux ou bien contributions volontaires.
Plusieurs assiettes pour ces nouvelles ressources sont envisageables :
- une contribution sur les transactions financières internationales ;
- un prélèvement sur les flux de capitaux étrangers sortants et entrants du territoire des pays qui maintiennent un secret bancaire ;
- une contribution sur le carburant utilisé par le transport aérien ou maritime ;
- un faible prélèvement sur les trois milliards de billets d'avion vendus chaque année dans le monde.
Ce qui est frappant, dans tous ces exemples, c'est la disproportion entre la modestie de l'effort nécessaire pour les populations des pays développés et les bénéfices qui en résulteraient pour tous.
D I : Pour vous quel est le rôle de l'Europe dans le développement durable et une mondialisation maîtrisée ?
SL : L'Europe joue un rôle-clé pour l'amélioration de l'environnement et la promotion du développement durable.
Dans le domaine de l'environnement, sa politique ambitieuse s'est traduit par l'élaboration de programmes d'action environnementaux dont le 6ème est actuellement oeuvre. Ces programmes ont eu un fort effet d'entraînement dans les Etats membres, qui se placent de ce fait aux premiers rangs mondiaux pour la protection de l'environnement. Les citoyens européens sont les premiers bénéficiaires de ces progrès, qui ont apporté d'importantes améliorations à leurs conditions de vie. Ces progrès ont notamment porté sur la qualité de l'air, la qualité de l'eau potable, la réduction des pollutions dangereuses et des risques technologiques, le maintien de la biodiversité ou encore le contrôle des OGM.
Sur la scène internationale, l'Europe est aussi en pointe pour lutter contre des phénomènes globaux qui menacent tout citoyen et qu'un seul Etat ne pourrait traiter efficacement: les changements climatiques et le déclin de la biodiversité en sont deux exemples.
Mais l'ambition de l'Europe va au delà puisqu'elle s'attache aujourd'hui à élaborer une véritable stratégie européenne de développement durable intégrant les trois piliers économique, social et environnemental. Dans ce domaine également l'Europe est novatrice et peut servir de référence à d'autres régions du monde.
(Source http://www.dialogue-initiative.com, le 23 mai 2005)
Serge Lepeltier : Le renforcement de la gouvernance internationale de l'environnement apparaît désormais pour beaucoup comme une nécessité. C'est un thème que porte la France depuis de nombreuses années et auquel est très attaché le Président de la République Jacques Chirac. Celui ci a d'ailleurs, le premier, proposé en 2003 devant l'assemblée générale des Nations unies de créer une Organisation des Nations Unies pour l'Environnement à construire à partir du Programme des Nations unies pour l'environnement.
Pour faire progresser la réflexion sur ce sujet essentiel pour notre planète, la France a ainsi décidé de créer un groupe de travail informel. 26 Etats et la Commission ont accepté d'y participer. En mars 2005, le groupe a conclu les travaux menés durant un an, par l'adoption d'un texte. Celui-ci a été envoyé au Secrétaire Général des Nations Unies, et beaucoup de ses idées ont été reprises dans le rapport que celui ci finalisait pour la préparation du Sommet de septembre.
Nous sommes donc à la croisée des chemins et j'espère que l'année qui vient permettra de faire progresser et partager cette ambition.
Je ne veux pas préjuger des résultats de nos travaux futurs sur ce sujet mais L'ONUE à laquelle je pense, pourrait être constituée sous la forme d'une organisation " parapluie " à l'instar de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, offrant aux Accords multilatéraux de l'environnement (AME) existants ou encore à négocier, un cadre commun de référence et d'action, tout en préservant leur autonomie juridique. L'ONUE assurerait ainsi certaines fonctions transversales aux AME en question : services des conférences, alerte, communication, suivi de la mise en oeuvre, renforcement des capacités, etc. Elle établirait un programme de travail stratégique sur la base de priorités transversales communes aux différentes conventions. Les missions de portée globale seraient assurées par le secrétariat de l'ONUE, en concertation avec les secrétariats des AME concernés et en partenariat avec les instances compétentes des Nations Unies. Les missions de portée régionale seraient mise en oeuvre de façon décentralisée.
D I : Pensez-vous comme le suggère le CES qu'il faille créer une structure interministérielle de coordination pour gérer les questions touchant la mondialisation à l'exemple du SGCI pour les questions européennes ?
SL : Le CES a raison lorsqu'il indique que les questions de mondialisation appellent, s'agissant des administrations, des réponses interministérielles. Aucun ministère à lui seul ne détient la vérité sur ces sujets complexes et la mutualisation des compétences qu'elles relèvent de la sphère publique mais aussi d'autres univers (privé, universitaire, associatif) me paraît absolument indispensable. La méthode pour organiser la coordination interministérielle mérite d'être précisément analysée. J'observe qu'en France, sous l'égide du Premier ministre, cette coordination fonctionne plutôt bien et de façon souple en fonction de l'importance des sujets traités et m'interroge sur la nécessité de créer une nouvelle structure spécifique de coordination.
D I : En matière d'aide au développement, alors que les Objectifs du Millénaire préconisent une participation minimale à hauteur de 0,7% du PIB, quelles sources supplémentaires de financement sont envisageables ?
SL : L'augmentation de l'aide publique est nécessaire pour atteindre les Objectifs du Millénaire. Il n'est pas encore trop tard pour les atteindre si la communauté internationale s'engage dans un doublement progressif de son aide d'ici à 2015. Les pays qui n'atteignent pas encore le chiffre de 0,7 pour cent de leur PIB devraient s'engager sur un calendrier, comme le fait la France, pour y parvenir dans les meilleurs délais.
Mais cette augmentation ne sera pas suffisante pour couvrir les besoins des pays en développement de manière prévisible et stable. La France propose d'avancer simultanément dans deux directions qui exigent les efforts conjoints des Etats et des entreprises.
Première direction : la fiscalité financière internationale. Cette proposition britannique permettrait de lever sans délai des sommes très importantes sur les marchés financiers. La France y est favorable et souhaite la mise en place d'un mécanisme expérimental spécialement consacré à la vaccination, qui permettra de sauver la vie de plusieurs millions d'enfants. Nous sommes également prêts à envisager, comme le propose le Royaume-Uni, un mécanisme similaire contre le sida.
Deuxième direction : il faut trouver le moyen de rembourser ces emprunts sans diminuer l'assistance internationale ou grever les budgets en les adossant à de nouvelles ressources : taxes, prélèvements internationaux ou bien contributions volontaires.
Plusieurs assiettes pour ces nouvelles ressources sont envisageables :
- une contribution sur les transactions financières internationales ;
- un prélèvement sur les flux de capitaux étrangers sortants et entrants du territoire des pays qui maintiennent un secret bancaire ;
- une contribution sur le carburant utilisé par le transport aérien ou maritime ;
- un faible prélèvement sur les trois milliards de billets d'avion vendus chaque année dans le monde.
Ce qui est frappant, dans tous ces exemples, c'est la disproportion entre la modestie de l'effort nécessaire pour les populations des pays développés et les bénéfices qui en résulteraient pour tous.
D I : Pour vous quel est le rôle de l'Europe dans le développement durable et une mondialisation maîtrisée ?
SL : L'Europe joue un rôle-clé pour l'amélioration de l'environnement et la promotion du développement durable.
Dans le domaine de l'environnement, sa politique ambitieuse s'est traduit par l'élaboration de programmes d'action environnementaux dont le 6ème est actuellement oeuvre. Ces programmes ont eu un fort effet d'entraînement dans les Etats membres, qui se placent de ce fait aux premiers rangs mondiaux pour la protection de l'environnement. Les citoyens européens sont les premiers bénéficiaires de ces progrès, qui ont apporté d'importantes améliorations à leurs conditions de vie. Ces progrès ont notamment porté sur la qualité de l'air, la qualité de l'eau potable, la réduction des pollutions dangereuses et des risques technologiques, le maintien de la biodiversité ou encore le contrôle des OGM.
Sur la scène internationale, l'Europe est aussi en pointe pour lutter contre des phénomènes globaux qui menacent tout citoyen et qu'un seul Etat ne pourrait traiter efficacement: les changements climatiques et le déclin de la biodiversité en sont deux exemples.
Mais l'ambition de l'Europe va au delà puisqu'elle s'attache aujourd'hui à élaborer une véritable stratégie européenne de développement durable intégrant les trois piliers économique, social et environnemental. Dans ce domaine également l'Europe est novatrice et peut servir de référence à d'autres régions du monde.
(Source http://www.dialogue-initiative.com, le 23 mai 2005)