Déclaration de M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie, sur le soutien de la France à "L'initiative sur la transparence des industries extractives" (EITI), à Londres le 17 mars 2005.

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Circonstance : Conférence sur l'initiative pour la transparence des industries extractives (EITI), à Londres (Royaume-Uni) le 17 mars 2005

Texte intégral

Messieurs les Premiers ministres,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Délégués,
Permettez-moi tout d'abord de féliciter notre collègue britannique, M. Hilary Benn, pour la tenue de cette conférence. C'est grâce aux efforts fournis tout au long de ces derniers mois que nous sommes tous réunis ici, pour représenter les gouvernements du Nord et du Sud, le secteur privé et la société civile.
Notre rencontre d'aujourd'hui a pour objectif de répondre à une préoccupation collective. Nous voulons assurer une gestion plus transparente des revenus tirés des industries extractives, afin de favoriser un développement équitable et de prévenir les conflits.
C'est précisément là le but recherché par l'Initiative pour la transparence des industries extractives, EITI. Comme vous le savez, cette initiative a été promue par le Premier ministre Tony Blair lors du Sommet mondial sur le développement durable à Johannesbourg, en septembre 2002. Puis elle a été activement soutenue durant la présidence française du G8, ce qui a permis son adoption lors du Sommet d'Evian de juin 2003.
Les principes d'EITI, agréés lors de la conférence de Lancaster House en juin 2003, sont les garants d'une gestion saine - parce que transparente - des revenus tirés des industries extractives dont le volume est tel qu'il peut susciter des comportements prédateurs, qui sont contraires à l'intérêt public et font courir des risques d'instabilité politique et même de conflits armés. C'est pourquoi ils contribuent à lutter contre le fléau de la corruption ainsi qu'à renforcer l'Etat de droit et permettent, en repoussant les convoitises, de diminuer les sources d'instabilité potentielle.
La France s'est activement mobilisée dans la promotion de ces principes, comme elle le fait pour les autres instruments de lutte contre la corruption. A ce titre, elle encourage le plus grand nombre d'Etats tirant leurs recettes des industries pétrolières, gazières et minières à y adhérer.
Je veux donc rendre un hommage appuyé aux pays qui ont d'ores et déjà décidé de s'engager dans la démarche préconisée par EITI, et tout particulièrement les pays africains : le Gabon, le Congo, la Guinée Equatoriale, Saint Thomas et Prince, le Nigeria, le Ghana et, en dernier lieu le Niger, dont je salue la présence du Premier ministre parmi nous. J'espère que d'autres pays producteurs rejoindront rapidement les pays pionniers.
Au-delà de l'adhésion à l'initiative, l'heure est à la mise en oeuvre concrète, à son élargissement et à son approfondissement. C'est pour progresser dans cette voie que nous sommes réunis aujourd'hui. La France estime pour sa part que les premières expériences doivent être promues et mieux connues par la communauté internationale, notamment grâce à une diffusion élargie des documents et des statistiques relevées. Dans ce domaine en effet, il ne suffit pas de faire ; il faut aussi montrer que l'on fait.
Je suis donc heureux de saluer le travail de publication déjà effectué par les pays-pilotes eux-mêmes, mais aussi par le FMI et par la Banque mondiale, dont l'accompagnement dans ce processus est apprécié de tous.
La poursuite et l'approfondissement de ces travaux sont essentielles. L'échange d'expérience avec les Etats bien avancés dans le processus, comme le Congo, le Nigeria, le Ghana ou encore l'Azerbaïdjan, sera à cet égard un atout capital.
Mesdames et Messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs les Représentants de gouvernements de pays-pilotes, les efforts que vous avez engagés sont courageux et dignes d'éloges. Votre action illustre la détermination de tous, ici présents, à lutter contre la pauvreté par une responsabilisation accrue de tous les acteurs, qu'ils appartiennent au secteur public, au secteur privé ou à la société civile.
Par ailleurs, EITI constitue pour les pays adhérents un facteur d'attractivité du territoire national vis-à-vis des investisseurs et des bailleurs de fonds internationaux. La discipline qu'elle instaure contribue en effet à améliorer le climat de l'investissement, en mettant en place une réelle transparence à travers une communication financière vérifiable.
EITI est également un outil au service de la démocratie, dans la mesure où l'initiative associe dans un dialogue constructif l'ensemble des parties prenantes impliquées dans la gestion des ressources naturelles, dont la société civile.
Par son ambition, l'initiative EITI dépasse le strict cadre des industries extractives en répondant à une exigence collective : celle d'une bonne gouvernance dans la conduite des politiques publiques en faveur d'un développement équitable et durable. Cette bonne gouvernance est, pour tous les bailleurs de fonds, un impératif dans le partenariat que nous défendons depuis la Conférence de Monterrey sur le financement du développement en 2002.
Depuis la Déclaration du Millénaire en 2000, à New York, le développement, et en particulier celui de l'Afrique, est au coeur de l'agenda politique international. A cet égard, l'année 2005, "année du développement" est tout à fait emblématique. La communauté internationale est fortement mobilisée et de réels efforts ont été accomplis pour augmenter le volume de l'aide publique au développement et renforcer son efficacité.
Nous avons toutefois conscience que ceux-ci demeurent insuffisants. Nous savons notamment que, pour atteindre les Objectifs du Millénaire, il nous faut doubler notre aide et passer de 65 à 130 milliards de dollars par an. Nous sommes prêts à accroître encore notre aide ainsi qu'à mettre en place des mécanismes innovants de financement.
Mais ces efforts ne sauraient rester sans contreparties. Pour convaincre nos opinions publiques d'apporter leur soutien à l'augmentation des budgets de l'APD ou à l'instauration de nouvelles sources de financement, il est indispensable de démontrer que l'aide mobilisée est utilisée efficacement, qu'elle accompagne bien les efforts que mènent les pays du Sud pour mobiliser leurs ressources domestiques, et notamment les ressources du pétrole, en faveur du bien-être de leurs populations.
C'est pourquoi la mise en uvre d'initiatives telles que celle de Kimberley pour le diamant, de FLEGT pour le bois ou d'EITI pour les industries extractives est capitale. Plus largement, la mise en route de programmes permettant de progresser sur la voie de la transparence et d'une meilleure gouvernance financière, représentent également des enjeux essentiels pour maintenir et amplifier cette dynamique positive en faveur d'une plus grande solidarité entre les pays du Nord et ceux du Sud. Elles constituent pour ces derniers une très belle occasion d'assumer toute leur part de responsabilités et d'offrir une image crédible de leur développement économique et social.
Pour toutes ces raisons, soyez assurés que mon pays continuera à participer activement à la démarche d'EITI, en particulier dans le cadre du groupe consultatif international devant être constitué à la suite de cette conférence.
Messieurs les Premiers ministres, Mesdames et Messieurs les Ministres et Délégués, l'espoir en un avenir meilleur, plus solidaire et plus juste, doit se construire dès maintenant par une responsabilité sociale et financière partagée par tous les acteurs, qu'il s'agisse des Etats, des compagnies ou encore de la société civile.
L'initiative EITI, par son approche progressive et didactique, peut devenir un cadre efficace d'un partenariat public-privé exemplaire. Aussi souhaitons-nous que de nombreux nouveaux pays décident d'y adhérer d'ici la fin de cette année, et qu'à terme, l'ensemble des cinquante pays qui tirent leurs ressources des industries extractives aient choisi de le faire. Nous espérons qu'elle deviendra un standard universel pour les industries pétrolières et minières. Son succès dépend de chacun de nous ici présents et c'est tous ensemble que nous y parviendrons
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 mars 2005)