Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Le 17 février dernier, lors d'une séance exceptionnelle du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, je vous ai présenté, avec Jean Louis BORLOO, le plan d'action santé au travail 2005-2009.
Il m'est apparu indispensable de vous réunir à nouveau avant l'été pour, quelques mois après le lancement du plan, faire un point d'étape sur chacun des grands axes de travail adoptés en février, mais aussi pour dresser un bilan de la santé au travail au cours de l'année écoulée.
Le bilan que vous avez reçu retrace la situation et les actions engagées en 2004. Il vous présente, en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles, les statistiques émanant de la CNAM portant sur la dernière année connue, soit 2003 pour les accidents du travail et 2002 pour les maladies professionnelles.
Je m'arrêterai pour commencer quelques instants sur l'évolution des accidents du travail et des maladies professionnelles en 2003 et 2002.
Sur le front des accidents du travail, 2003 est une année en demi-teinte : si les accidents sont moins fréquents, et en particulier les accidents mortels, les accidents graves ont en revanche progressé.
La fréquence des accidents du travail (41 accidents pour 1000 salariés) est en baisse de 5 % ; le nombre d'accidents avec arrêt (721 000) connaît, lui aussi, sa plus forte baisse depuis 1996. La baisse des accidents de travail avec arrêt concerne tous les secteurs et même le BTP, secteur à risques avec près de 91 accidents pour 1000 salariés, qui confirme la baisse tendancielle observée depuis plusieurs années. Le nombre de décès (661) a également diminué de 4% entre 2002 et 2003. Ce nombre reste cependant trop élevé. Comme vous, je garde en mémoire l'explosion sur un chantier de Saint Quentin qui a occasionné, la semaine dernière, le décès de 4 personnes à la suite de la rupture d'une canalisation de gaz. Il faut tirer les enseignements de ces accidents afin d'éviter que de nouveaux cas ne se reproduisent. Je rappelle qu'à chaque accident de cette nature, je demande un rapport qui est analysé au niveau de mon cabinet et que je vois personnellement.
En revanche, la hausse de 4% des accidents graves (49 000) est pour moi une réelle source de préoccupation, poursuivant la tendance observée en 2002. Les secteurs en forte hausse sont les services, le travail temporaire ou les transports. Il faut donc prévoir des actions de sensibilisation spécifiques dans ces secteurs.
Sur le front des maladies professionnelles, la situation est plus préoccupante : 42 000 maladies déclarées, constatées et reconnues ont été recensées en 2002, ce qui représente une augmentation de 16% par rapport à 2001. Les troubles musculo-squelettiques (TMS) représentent 75% de ces maladies et les affections dues à l'amiante 15%. Les TMS sont en progression de 19% par rapport à 2001 et les maladies dues à l'amiante de 15%. Les hausses de ces 2 types de maladies expliquent à elles seules celle de l'ensemble des maladies professionnelles.
Comme vous le savez, la plus grande prudence est de mise en matière d'analyse des statistiques relatives aux maladies professionnelles. En effet, le nombre de maladies d'origine professionnelle n'est pas, de l'avis de tous, connu de manière exhaustive, et je compte beaucoup à cet égard sur les progrès que la convention d'objectifs et de gestion nous permettra de faire. D'autre part, l'augmentation du nombre de pathologies reconnues résulte pour une large part d'une meilleure reconnaissance juridique des droits des travailleurs et ne reflète donc pas mécaniquement une dégradation de la santé des travailleurs.
Cela dit, je suis très sensible à la progression forte des TMS, qui tient à l'ouverture de nouveaux tableaux médicaux, mais aussi à l'évolution de certaines conditions de travail. J'entends donc poursuivre le travail de mobilisation engagé sur les TMS, que l'on peut faire évoluer par une meilleure organisation du travail, facilitée par le dialogue social. Il faut que tous les acteurs de la prévention en santé au travail unissent leurs efforts si nous souhaitons obtenir des résultats significatifs.
Quant aux affections liées à l'amiante, leur augmentation est, hélas, le reflet d'expositions anciennes. Même s'il faut rester très vigilant avec l'amiante résiduel dans les bâtiments, les enjeux aujourd'hui vis-à-vis de l'amiante portent essentiellement sur les conditions de la réparation des victimes. Des réflexions sont engagées sur ces points par le Gouvernement. Xavier Bertrand et moi-même avons demandé à l'IGAS un rapport qui devrait nous être remis à l'automne.
Comme le montrent les principales actions qui ont été conduites, 2004 a été une année charnière pour la prévention.
L'année 2004 a vu la poursuite de la réforme de la médecine du travail. La circulaire du 7 avril 2005 est venue parachever cette construction, en apportant des explications complémentaires nécessaires à l'application de la "nouvelle donne" réglementaire. Il importera désormais aux acteurs de faire vivre cette réforme articulée autour de 3 volets (la modernisation des structures, la pluridisciplinarité, la ressource médicale) et comprenant 2 axes complémentaires : la prévention en milieu du travail et la surveillance médicale individuelle des salariés, modulée en fonction de leur exposition à des risques. Nous serons attentifs aux observations concrètes qui nous reviendront du " Terrain "
L'année 2004 aura été marquée, bien sûr, par les arrêts rendus par le Conseil d'Etat sur le dossier de l'amiante. Ces arrêts, à la suite des arrêts de la Cour de cassation sur "l'obligation de résultat du chef d'entreprise" rappellent quelles sont les responsabilités de l'Etat, comme celles les employeurs en ce qui concerne la sauvegarde de l'intégrité des travailleurs.
Je retiens enfin de l'année 2004 l'adoption de la loi de Santé publique, qui fait une large place aux questions de santé en milieu professionnel. L'InVS se voit en particulier chargé de mettre en uvre un outil statistique permettant la centralisation et l'analyse des statistiques sur les maladies professionnelles.
C'est dans ce contexte que j'ai demandé à la direction des relations du travail d'élaborer, en 2004, le Plan santé au travail afin de donner à la prévention une impulsion réelle, qui soit à la hauteur des enjeux.
La mise en uvre du plan santé au travail constitue l'enjeu majeur de l'année 2005.
Ce plan s'organise, vous le savez, autour de 4 axes structurants : la connaissance, le contrôle, la gouvernance et la culture de prévention. Sur chacun de ces points, nous avons déjà progressé.
Sur le front de la connaissance des risques, l'intégration de la santé au travail dans le dispositif public des agences de sécurité sanitaire est désormais presque chose faite. Les compétences de l'agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) vont être étendues au domaine de la santé au travail. Ceci se traduit par une véritable " refondation " de l'agence et de ses instances de pilotage. J'ai veillé à garantir la pleine association des partenaires sociaux, par leur représentation au conseil d'administration et par leur faculté de saisine de la future agence.
Par anticipation, le recrutement de 10 ingénieurs de haut niveau est déjà en cours à l'AFSSET, ce qui permettra de préfigurer le département santé au travail avant même la sortie des textes statutaires en septembre. J'ai par ailleurs veillé à la mise en uvre rapide des expertises prioritaires pour lesquelles nous avons obtenu 5,7 millions d'euros de crédits dans le budget 2005.
Une première convention passée entre l'AFSSET et la DRT vient d'être à cette fin signée. D'un montant de 1,7 M , elle prévoit le recrutement de ces 10 ingénieurs et détermine un cadre d'études et d'expertise prioritaires en matière de santé au travail.
Une seconde convention passée avec l'INRS a été signée pour un montant de 1,3 M . Elle fait une large place à l'étude d'une question clef pour la santé au travail, celle de la substitution des produits chimiques dangereux. A cet égard, je me félicite que l'INRS - organisme paritaire- ait été le premier à conclure une convention d'études complémentaires. Cela montre à mes yeux que notre démarche est partagée.
Une troisième convention avec l'InVS devrait être conclue pour le 1er juillet.
Par ailleurs, j'ai décidé de réserver une somme de 800 000 , pour aider à la création de pôles scientifiques régionaux par le ministère de la recherche. J'ai d'ailleurs participé, fin mars, à un séminaire de prospective scientifique en vue de dégager les thèmes de la recherche en santé au travail.
Enfin, l'enjeu majeur de l'année 2005 dans le champ de la connaissance concerne le projet de règlement européen REACH sur les substances dangereuses dont les travaux progressent et devraient se terminer à la fin de cette année. L'objectif, je le rappelle, c'est de combler, d'ici 2005, les lacunes scientifiques sur les connaissances des dangers et risques de milliers de substances chimiques mises sur le marché aujourd'hui.
S'agissant du renforcement de l'effectivité du contrôle, je réaffirme devant vous la nécessité d'une présence accrue des inspecteurs et contrôleurs du travail sur le terrain. D'ores et déjà, les services déconcentrés des ministères ont procédé à une trentaine de recrutements afin de constituer les cellules d'appui pluridisciplinaires des DDTEFP dans les 7 premières régions. La direction des relations du travail a préparé une instruction destinée aux services précisant l'organisation et la mission de ces cellules. La réforme en cours de l'inspection du travail nous permettra d'amplifier ces efforts.
S'agissant des instances de concertation en santé au travail, nous saisirons, Monsieur le Président, le Conseil d'Etat - sans doute en septembre - d'un projet de décret, visant à mettre en place les Comités régionaux des risques professionnels et à moderniser le Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels. Celui-ci demeure, par nature, l'instance nationale de concertation et de pilotage de la prévention des risques professionnels, placé directement auprès de moi. J'attache à sa double fonction, consultative et participative, une attention toute particulière, dans le souci du dialogue social que j'ai toujours à l'esprit.
S'agissant du développement de la culture de prévention en entreprise, plusieurs chantiers prévus par le PST ont démarré. Je pense notamment à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Une mission d'appui aux partenaires sociaux a été confiée à M. BRAS, membre de l'IGAS afin d'explorer utilement toutes les pistes possibles dans ce domaine. D'autres groupes de travail vont être constitués en septembre : l'un sur l'aptitude et le maintien dans l'emploi, l'autre sur le financement des services de santé au travail, un autre enfin sur le rôle des CHSCT au sein des PME.
Ainsi, le Plan de Santé au Travail, qui est désormais "la feuille de route" des services de l'Etat, trace un cap clair que tous les services s'attachent à suivre. J'ai, dans cet esprit, demandé à mon directeur de cabinet de mettre en place, avec la DRT, un comité de suivi de la mise en uvre du PST qui dressera périodiquement des bilans et ajustera les actions à mener.
Les actions partenariales ou contractuelles associant l'Etat et d'autres organismes vont par ailleurs se multiplier. Je pense en particulier aux actions prévues par le contrat de progrès avec l'OPPBTP, pour la branche du bâtiment et des travaux publics. J'y attache une importance toute particulière dans ce secteur où les risques demeurent importants. J'y vois un instrument utile pour faire progresser les " bonnes pratiques ", notamment dans les plus petites entreprises.
Enfin, la politique de santé et sécurité au travail ne peut ignorer les aspects européens et internationaux.
Le besoin de protection économique et sociale des peuples européens est évident. L'Europe des conditions de travail forme aujourd'hui une part importante du socle de l'Europe sociale.
Nous devons donc plus que jamais rester engagés dans les nombreux travaux européens qui nous attendent en 2005 : j'ai parlé précédemment de REACH, mais de nouvelles directives sont en cours d'élaboration sur les machines, les rayonnements optiques ou les valeurs limites d'exposition.
Dans ce domaine très vaste, je voudrais mettre en exergue la question de l'évaluation des directives qui ont été adoptées dans le champ qui nous préoccupe : 6 directives au total sont concernées. Vous serez associés à cette évaluation. Le rapport qui sera transmis à la Commission européenne prendra en considération vos remarques et observations.
Mais aujourd'hui, vous le savez, la question de la sécurité de la santé au travail se pose aussi dans un cadre mondial. La toute dernière Conférence internationale du travail, à Genève - à laquelle j'ai participé - y a consacré une part importante de ses travaux et le débat a été particulièrement approfondi sur ce point. Je me réjouis, que l'OIT s'oriente vers une convention et une recommandation nouvelles, établissant un cadre pour la promotion de la santé et de la sécurité au travail. J'y vois de fortes analogies avec la démarche que nous avons adoptée dans le Plan de santé au travail.
Voilà Mesdames et Messieurs, l'essentiel de ce que je voulais souligner devant vous ce matin, sans revenir sur l'ensemble des mesures dont vous avez débattu en commission permanente. Soyez convaincus que la prévention des risques professionnels est, plus que jamais, une de mes priorités. Les statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles que je vous ai présentées ce matin sont là pour nous rappeler de ne surtout pas baisser la garde dans ce domaine.
C'est pourquoi, Jean Louis BORLOO comme moi-même défendrons dans un contexte budgétaire contraint le financement des mesures contenues dans le PST qui, j'y insiste, est un plan quinquennal. Il est en effet essentiel de poursuivre, dans la durée, nos efforts en matière de développement des connaissances et des expositions, comme en matière de contrôle, de gouvernance et d'amélioration de la culture de prévention.
Preuve de mon intérêt pour la santé au travail, je vous informe que je vous quitterai tout à l'heure pour aller visiter en Picardie une entreprise de 100 salariés, dont on m'a dit qu'elle met en uvre très concrètement et efficacement une politique de prévention des risques professionnels et plus largement pour rencontrer des acteurs régionaux de la santé au travail. Grâce à l'aide de l'ARACT et de l'AGEFOS-PME, cette entreprise a réalisé son document unique d'évaluation des risques et mène une action innovante pour substituer les agents CMR qu'elle utilise. En outre, la Picardie grâce à l'élan impulsé par les assises régionales de santé au travail qui se sont tenues en avril dernier devrait être la première région de France à se doter d'un comité régional de risques professionnels à la rentrée qui sera chargé de bâtir un plan régional santé au travail.
Vous le voyez, le plan santé au travail vit, se concrétise progressivement. Vous pouvez compter sur toute ma détermination pour le mettre en uvre comme je m'y suis engagé devant vous en février 2005. Je compte sur vous pour vous l'approprier et le décliner suivant vos responsabilités et les spécificités de vos secteurs.
Je vous remercie de votre attention et ouvre notre échange.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 23 juin 2005)
Mesdames et Messieurs,
Le 17 février dernier, lors d'une séance exceptionnelle du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, je vous ai présenté, avec Jean Louis BORLOO, le plan d'action santé au travail 2005-2009.
Il m'est apparu indispensable de vous réunir à nouveau avant l'été pour, quelques mois après le lancement du plan, faire un point d'étape sur chacun des grands axes de travail adoptés en février, mais aussi pour dresser un bilan de la santé au travail au cours de l'année écoulée.
Le bilan que vous avez reçu retrace la situation et les actions engagées en 2004. Il vous présente, en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles, les statistiques émanant de la CNAM portant sur la dernière année connue, soit 2003 pour les accidents du travail et 2002 pour les maladies professionnelles.
Je m'arrêterai pour commencer quelques instants sur l'évolution des accidents du travail et des maladies professionnelles en 2003 et 2002.
Sur le front des accidents du travail, 2003 est une année en demi-teinte : si les accidents sont moins fréquents, et en particulier les accidents mortels, les accidents graves ont en revanche progressé.
La fréquence des accidents du travail (41 accidents pour 1000 salariés) est en baisse de 5 % ; le nombre d'accidents avec arrêt (721 000) connaît, lui aussi, sa plus forte baisse depuis 1996. La baisse des accidents de travail avec arrêt concerne tous les secteurs et même le BTP, secteur à risques avec près de 91 accidents pour 1000 salariés, qui confirme la baisse tendancielle observée depuis plusieurs années. Le nombre de décès (661) a également diminué de 4% entre 2002 et 2003. Ce nombre reste cependant trop élevé. Comme vous, je garde en mémoire l'explosion sur un chantier de Saint Quentin qui a occasionné, la semaine dernière, le décès de 4 personnes à la suite de la rupture d'une canalisation de gaz. Il faut tirer les enseignements de ces accidents afin d'éviter que de nouveaux cas ne se reproduisent. Je rappelle qu'à chaque accident de cette nature, je demande un rapport qui est analysé au niveau de mon cabinet et que je vois personnellement.
En revanche, la hausse de 4% des accidents graves (49 000) est pour moi une réelle source de préoccupation, poursuivant la tendance observée en 2002. Les secteurs en forte hausse sont les services, le travail temporaire ou les transports. Il faut donc prévoir des actions de sensibilisation spécifiques dans ces secteurs.
Sur le front des maladies professionnelles, la situation est plus préoccupante : 42 000 maladies déclarées, constatées et reconnues ont été recensées en 2002, ce qui représente une augmentation de 16% par rapport à 2001. Les troubles musculo-squelettiques (TMS) représentent 75% de ces maladies et les affections dues à l'amiante 15%. Les TMS sont en progression de 19% par rapport à 2001 et les maladies dues à l'amiante de 15%. Les hausses de ces 2 types de maladies expliquent à elles seules celle de l'ensemble des maladies professionnelles.
Comme vous le savez, la plus grande prudence est de mise en matière d'analyse des statistiques relatives aux maladies professionnelles. En effet, le nombre de maladies d'origine professionnelle n'est pas, de l'avis de tous, connu de manière exhaustive, et je compte beaucoup à cet égard sur les progrès que la convention d'objectifs et de gestion nous permettra de faire. D'autre part, l'augmentation du nombre de pathologies reconnues résulte pour une large part d'une meilleure reconnaissance juridique des droits des travailleurs et ne reflète donc pas mécaniquement une dégradation de la santé des travailleurs.
Cela dit, je suis très sensible à la progression forte des TMS, qui tient à l'ouverture de nouveaux tableaux médicaux, mais aussi à l'évolution de certaines conditions de travail. J'entends donc poursuivre le travail de mobilisation engagé sur les TMS, que l'on peut faire évoluer par une meilleure organisation du travail, facilitée par le dialogue social. Il faut que tous les acteurs de la prévention en santé au travail unissent leurs efforts si nous souhaitons obtenir des résultats significatifs.
Quant aux affections liées à l'amiante, leur augmentation est, hélas, le reflet d'expositions anciennes. Même s'il faut rester très vigilant avec l'amiante résiduel dans les bâtiments, les enjeux aujourd'hui vis-à-vis de l'amiante portent essentiellement sur les conditions de la réparation des victimes. Des réflexions sont engagées sur ces points par le Gouvernement. Xavier Bertrand et moi-même avons demandé à l'IGAS un rapport qui devrait nous être remis à l'automne.
Comme le montrent les principales actions qui ont été conduites, 2004 a été une année charnière pour la prévention.
L'année 2004 a vu la poursuite de la réforme de la médecine du travail. La circulaire du 7 avril 2005 est venue parachever cette construction, en apportant des explications complémentaires nécessaires à l'application de la "nouvelle donne" réglementaire. Il importera désormais aux acteurs de faire vivre cette réforme articulée autour de 3 volets (la modernisation des structures, la pluridisciplinarité, la ressource médicale) et comprenant 2 axes complémentaires : la prévention en milieu du travail et la surveillance médicale individuelle des salariés, modulée en fonction de leur exposition à des risques. Nous serons attentifs aux observations concrètes qui nous reviendront du " Terrain "
L'année 2004 aura été marquée, bien sûr, par les arrêts rendus par le Conseil d'Etat sur le dossier de l'amiante. Ces arrêts, à la suite des arrêts de la Cour de cassation sur "l'obligation de résultat du chef d'entreprise" rappellent quelles sont les responsabilités de l'Etat, comme celles les employeurs en ce qui concerne la sauvegarde de l'intégrité des travailleurs.
Je retiens enfin de l'année 2004 l'adoption de la loi de Santé publique, qui fait une large place aux questions de santé en milieu professionnel. L'InVS se voit en particulier chargé de mettre en uvre un outil statistique permettant la centralisation et l'analyse des statistiques sur les maladies professionnelles.
C'est dans ce contexte que j'ai demandé à la direction des relations du travail d'élaborer, en 2004, le Plan santé au travail afin de donner à la prévention une impulsion réelle, qui soit à la hauteur des enjeux.
La mise en uvre du plan santé au travail constitue l'enjeu majeur de l'année 2005.
Ce plan s'organise, vous le savez, autour de 4 axes structurants : la connaissance, le contrôle, la gouvernance et la culture de prévention. Sur chacun de ces points, nous avons déjà progressé.
Sur le front de la connaissance des risques, l'intégration de la santé au travail dans le dispositif public des agences de sécurité sanitaire est désormais presque chose faite. Les compétences de l'agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) vont être étendues au domaine de la santé au travail. Ceci se traduit par une véritable " refondation " de l'agence et de ses instances de pilotage. J'ai veillé à garantir la pleine association des partenaires sociaux, par leur représentation au conseil d'administration et par leur faculté de saisine de la future agence.
Par anticipation, le recrutement de 10 ingénieurs de haut niveau est déjà en cours à l'AFSSET, ce qui permettra de préfigurer le département santé au travail avant même la sortie des textes statutaires en septembre. J'ai par ailleurs veillé à la mise en uvre rapide des expertises prioritaires pour lesquelles nous avons obtenu 5,7 millions d'euros de crédits dans le budget 2005.
Une première convention passée entre l'AFSSET et la DRT vient d'être à cette fin signée. D'un montant de 1,7 M , elle prévoit le recrutement de ces 10 ingénieurs et détermine un cadre d'études et d'expertise prioritaires en matière de santé au travail.
Une seconde convention passée avec l'INRS a été signée pour un montant de 1,3 M . Elle fait une large place à l'étude d'une question clef pour la santé au travail, celle de la substitution des produits chimiques dangereux. A cet égard, je me félicite que l'INRS - organisme paritaire- ait été le premier à conclure une convention d'études complémentaires. Cela montre à mes yeux que notre démarche est partagée.
Une troisième convention avec l'InVS devrait être conclue pour le 1er juillet.
Par ailleurs, j'ai décidé de réserver une somme de 800 000 , pour aider à la création de pôles scientifiques régionaux par le ministère de la recherche. J'ai d'ailleurs participé, fin mars, à un séminaire de prospective scientifique en vue de dégager les thèmes de la recherche en santé au travail.
Enfin, l'enjeu majeur de l'année 2005 dans le champ de la connaissance concerne le projet de règlement européen REACH sur les substances dangereuses dont les travaux progressent et devraient se terminer à la fin de cette année. L'objectif, je le rappelle, c'est de combler, d'ici 2005, les lacunes scientifiques sur les connaissances des dangers et risques de milliers de substances chimiques mises sur le marché aujourd'hui.
S'agissant du renforcement de l'effectivité du contrôle, je réaffirme devant vous la nécessité d'une présence accrue des inspecteurs et contrôleurs du travail sur le terrain. D'ores et déjà, les services déconcentrés des ministères ont procédé à une trentaine de recrutements afin de constituer les cellules d'appui pluridisciplinaires des DDTEFP dans les 7 premières régions. La direction des relations du travail a préparé une instruction destinée aux services précisant l'organisation et la mission de ces cellules. La réforme en cours de l'inspection du travail nous permettra d'amplifier ces efforts.
S'agissant des instances de concertation en santé au travail, nous saisirons, Monsieur le Président, le Conseil d'Etat - sans doute en septembre - d'un projet de décret, visant à mettre en place les Comités régionaux des risques professionnels et à moderniser le Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels. Celui-ci demeure, par nature, l'instance nationale de concertation et de pilotage de la prévention des risques professionnels, placé directement auprès de moi. J'attache à sa double fonction, consultative et participative, une attention toute particulière, dans le souci du dialogue social que j'ai toujours à l'esprit.
S'agissant du développement de la culture de prévention en entreprise, plusieurs chantiers prévus par le PST ont démarré. Je pense notamment à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Une mission d'appui aux partenaires sociaux a été confiée à M. BRAS, membre de l'IGAS afin d'explorer utilement toutes les pistes possibles dans ce domaine. D'autres groupes de travail vont être constitués en septembre : l'un sur l'aptitude et le maintien dans l'emploi, l'autre sur le financement des services de santé au travail, un autre enfin sur le rôle des CHSCT au sein des PME.
Ainsi, le Plan de Santé au Travail, qui est désormais "la feuille de route" des services de l'Etat, trace un cap clair que tous les services s'attachent à suivre. J'ai, dans cet esprit, demandé à mon directeur de cabinet de mettre en place, avec la DRT, un comité de suivi de la mise en uvre du PST qui dressera périodiquement des bilans et ajustera les actions à mener.
Les actions partenariales ou contractuelles associant l'Etat et d'autres organismes vont par ailleurs se multiplier. Je pense en particulier aux actions prévues par le contrat de progrès avec l'OPPBTP, pour la branche du bâtiment et des travaux publics. J'y attache une importance toute particulière dans ce secteur où les risques demeurent importants. J'y vois un instrument utile pour faire progresser les " bonnes pratiques ", notamment dans les plus petites entreprises.
Enfin, la politique de santé et sécurité au travail ne peut ignorer les aspects européens et internationaux.
Le besoin de protection économique et sociale des peuples européens est évident. L'Europe des conditions de travail forme aujourd'hui une part importante du socle de l'Europe sociale.
Nous devons donc plus que jamais rester engagés dans les nombreux travaux européens qui nous attendent en 2005 : j'ai parlé précédemment de REACH, mais de nouvelles directives sont en cours d'élaboration sur les machines, les rayonnements optiques ou les valeurs limites d'exposition.
Dans ce domaine très vaste, je voudrais mettre en exergue la question de l'évaluation des directives qui ont été adoptées dans le champ qui nous préoccupe : 6 directives au total sont concernées. Vous serez associés à cette évaluation. Le rapport qui sera transmis à la Commission européenne prendra en considération vos remarques et observations.
Mais aujourd'hui, vous le savez, la question de la sécurité de la santé au travail se pose aussi dans un cadre mondial. La toute dernière Conférence internationale du travail, à Genève - à laquelle j'ai participé - y a consacré une part importante de ses travaux et le débat a été particulièrement approfondi sur ce point. Je me réjouis, que l'OIT s'oriente vers une convention et une recommandation nouvelles, établissant un cadre pour la promotion de la santé et de la sécurité au travail. J'y vois de fortes analogies avec la démarche que nous avons adoptée dans le Plan de santé au travail.
Voilà Mesdames et Messieurs, l'essentiel de ce que je voulais souligner devant vous ce matin, sans revenir sur l'ensemble des mesures dont vous avez débattu en commission permanente. Soyez convaincus que la prévention des risques professionnels est, plus que jamais, une de mes priorités. Les statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles que je vous ai présentées ce matin sont là pour nous rappeler de ne surtout pas baisser la garde dans ce domaine.
C'est pourquoi, Jean Louis BORLOO comme moi-même défendrons dans un contexte budgétaire contraint le financement des mesures contenues dans le PST qui, j'y insiste, est un plan quinquennal. Il est en effet essentiel de poursuivre, dans la durée, nos efforts en matière de développement des connaissances et des expositions, comme en matière de contrôle, de gouvernance et d'amélioration de la culture de prévention.
Preuve de mon intérêt pour la santé au travail, je vous informe que je vous quitterai tout à l'heure pour aller visiter en Picardie une entreprise de 100 salariés, dont on m'a dit qu'elle met en uvre très concrètement et efficacement une politique de prévention des risques professionnels et plus largement pour rencontrer des acteurs régionaux de la santé au travail. Grâce à l'aide de l'ARACT et de l'AGEFOS-PME, cette entreprise a réalisé son document unique d'évaluation des risques et mène une action innovante pour substituer les agents CMR qu'elle utilise. En outre, la Picardie grâce à l'élan impulsé par les assises régionales de santé au travail qui se sont tenues en avril dernier devrait être la première région de France à se doter d'un comité régional de risques professionnels à la rentrée qui sera chargé de bâtir un plan régional santé au travail.
Vous le voyez, le plan santé au travail vit, se concrétise progressivement. Vous pouvez compter sur toute ma détermination pour le mettre en uvre comme je m'y suis engagé devant vous en février 2005. Je compte sur vous pour vous l'approprier et le décliner suivant vos responsabilités et les spécificités de vos secteurs.
Je vous remercie de votre attention et ouvre notre échange.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 23 juin 2005)