Texte intégral
J. Wittenberg - Un mot du chiffre du jour, la baisse du chômage : 1,4 %. C'est significatif, cela va sans doute faire plaisir à D. de Villepin et pourtant, il n'y est pas forcément pour grand-chose car ces chiffres parlent du mois de juin, et il est arrivé le 1er juin. Qu'en pensez-vous ?
R - D'abord, c'est une bonne nouvelle pour ceux qui sont concernés, c'est-à-dire pour les 35.000 personnes qui ont retrouvé du travail et pour leur famille. C'est quand même une bonne nouvelle pour le Premier ministre. On sait bien que si le chômage avait augmenté, cela aurait été de sa faute ! Donc, comme il baisse, c'est tant mieux pour le Gouvernement, pour les entreprises françaises. Je crois que c'est le résultat d'une mobilisation générale, à la fois, bien sûr, des administrations, des politiques publiques. Dans mon domaine du bâtiment, des travaux publics, du tourisme, il y a un effort de mobilisation et je sais que c'est le cas partout ailleurs. C'est tant mieux si l'on va dans la bonne direction.
Q - Mais le plan pour l'emploi de D. de Villepin n'entre en vigueur qu'en septembre, il n'a pas d'effet pour l'instant...
R - Ce plan-là non, mais par exemple les mesures Borloo qui avaient été décidées il y a un certain nombre de mois qui, effectivement, avait mis un peu de temps à commencer à s'enclencher sur le terrain, à obtenir les signatures de contrats d'aide aux jeunes etc. commencent à donner leur effet. Je pense qu'il y a, dans un certain nombre de secteurs, une situation économique qui est positive. Je connais bien deux secteurs économiques qui aujourd'hui se portent bien, le bâtiment et les travaux publics d'une part et le secteur aéronautique. Dans ces deux domaines, les choses vont bien, les entreprises avancent, font des résultats et ont tendance à embaucher.
Q - Ce week-end, des millions d'automobilistes vont se retrouver sur les routes et les autoroutes. Avez-vous un message à leur transmettre, en tant que ministre des Transports ?
R - Oui, je voudrais dire, avec un peu de gravité et de solennité, aux automobilistes d'être prudents. Le début du mois de juillet n'a pas été bon. Il y a eu beaucoup d'accidents, et il pour ce chassé-croisé, qui est le vrai mauvais moment de l'été, avec beaucoup d'accidents, il faut tout faire pour que cela se passe bien. Il faut bien sur respecter les limites de vitesse. Les vitesses vont être très contrôlées. Il faut que les gens sachent que nous avons mis le paquet pour que sur toutes les routes importantes et les autoroutes, il y ait ces contrôles radar. Il y a actuellement 700 radars en place...
Q - Précisément, cela justifie une mise au point, puisque dans un premier temps, vous aviez parlé d'une pause dans l'installation des radars...
R - Non, je n'ai jamais parlé de "pause". J'ai dit que lorsqu'on en aurait 1.000, on verrait ce que l'on fait. Finalement, après les 1.000, on a décidé d'en mettre en place 500.
Q - Il y en aura plus ?
R - Là, il y en a beaucoup plus cet été que l'an dernier. En radars mobiles, on est passé de 30 à 300. Il y a 300 mobiles et 400 fixes. Donc, les vitesses seront vraiment très contrôlées. Il n'y a pas que cela : hier, j'étais sur les autoroutes en Seine-et-Marne, et j'ai observé le comportement de certains conducteurs sur le non respect de l'espacement avec la voiture qui précède, des gens qui font des zigzag, enfin tous ces comportements qui ne vont pas. Et puis, le fait de dire que quand on est fatigué, on ne prend pas le volant.
Q - Vous aviez donc dit qu'au-delà de 1.000, il faudrait voir. Cela veut dire que vous pensez qu'il y a quand même un seuil au-delà duquel il y a un ras-le-bol des automobilistes ?
R - Non, ce n'est pas un problème de ras-le-bol, c'est d'abord un problème d'efficacité du dispositif, de mise en place. Et donc, au-delà des 1.000, on est engagé maintenant pour 2006 sur 500 supplémentaires. Nous n'avons pas encore déterminé quelle sera la répartition à l'intérieur de ces 500 entre les radars mobiles et les radars fixes ; on en décidera rapidement, en particulier, avec le ministre de l'Intérieur, pour compléter. Qu'est-ce qui se passe ? On a gagne du terrain, incontestablement, on a fait baisser le nombre d'accidents et de morts sur les autoroutes et les très grandes routes. Il faut maintenant faire baisser les accidents sur les routes plus petites, les routes départementales.
Q - Vous disiez que les chiffres de juillet n'étaient pas très bons...
R - Les chiffres de début juillet n'étaient pas très bons, au constat des grands accidents que l'on a observé les uns et les autres. J'espère que la fin du mois sera meilleure. Cela veut dire qu'il faut être vigilant. En cette période de juillet-août qui n'est jamais bonne, il faut faire un effort parce que c'est là qu'il y a le plus d'accidents.
Q - Cela veut dire que l'on n'est pas sûr de passer sous le cap des 5.000 morts cette année sur les routes ?
R - On n'en est pas sûr. Cela reste un objectif pour nous, et cela reste un peu notre aiguillon pour aller plus loin et pour être encore plus fermes et encore plu vigilants.
Q - Restons dans le domaine routier pour parler d'une polémique qui monte depuis quelques jours, qui concerne la privatisation des autoroutes. F. Bayrou vous en veut beaucoup...
R - Je ne sais pas si c'est personnel...
Q - Non, pas à vous personnellement, mais au Gouvernement. Il dit qu'en privatisant les autoroutes, je le cite, "on vend les bijoux de famille pour assurer le court terme" ; que lui répondez-vous ?
R - La formule est franchement éculée et vraiment pas adaptée...
Q - Cela va tout de même rapporter 11 milliards d'euros.
R - Heureusement ! De quoi s'agit-il ? Il s'agit de tout mobiliser pour l'emploi et pour la croissance économique. Les Français ont besoin d'emploi, ont besoin de croissance, ont besoin d'investissements. C'est la volonté du Premier ministre, c'est cette mobilisation dont on parlait tout à l'heure. Donc, l'Etat vend ses participations dans les sociétés concessionnaires des autoroutes. Qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que quand la concession autoroutière est terminée, c'est-à-dire dans vingt-six à trente ans, les autoroutes reviennent à l'Etat. Ces autoroutes restent dans le domaine public. Simplement, l'Etat, aujourd'hui, est actionnaire des sociétés qui les gèrent ; l'Etat vend ses actions, pour autant l'Etat reste celui qui détermine, à travers le contrat de concessions, les règles de fonctionnement. Et quand la concession est finie, bien sûr, l'autoroute revient à l'Etat. Donc, ce n'est pas un bien qui, tout à coup, disparaît et sort du pays.
Q - Puisque c'est le privé qui va gérer, qu'est-ce qui garantit, par exemple, que les péages ne vont pas augmenter ?
R - Ce qui garantit cela, c'est que les règles de gestion sont définies par les conventions de concession, qui sont signées, qui existent, et qui prévoient en particulier les règles d'évolution des tarifs. Donc, le fait que l'Etat vende ses actions dans ces sociétés n'aura aucun effet sur le tarif payé par les automobilistes.
Q - Vous pouvez vous y engager ?
R - Je le dis très solennellement aujourd'hui.
Q - Il y a un autre domaine sur lequel on attend un peu des décisions, c'est les passages dans les Alpes. On sait que le tunnel du Fréjus est fermé depuis deux mois à la suite d'un accident. On parlait de sa réouverture avant la fin du mois d'août, cela intéresse beaucoup de routiers, parce que le tunnel du Mont-Blanc, aujourd'hui, est totalement saturé. Une décision a-t-elle été prise ?
R - Bien sûr. Il y a trois passages entre la France et l'Italie : il y a Vintimille, près de Nice, il y a le tunnel du Fréjus qui est fermé depuis début juin, puisqu'il y a eu un accident, et puis il y a le tunnel du Mont-Blanc. Il est évident que quand l'un des trois est fermé, c'est très difficile pour les autres. Je suis en train, en ce moment, ce week-end, de discuter avec mon collègue italien pour fixer les conditions de sécurité qui seront définies pour la réouverture ...
Q - Quand interviendra la réouverture du Fréjus ?
R - Le plus tôt possible. Il faut que l'on termine la mise au point de ces règles de sécurité, parce que je veux que la sécurité soit meilleure au moment de la réouverture qu'elle n'était, évidemment, au moment de l'accident. Nous en discutons actuellement avec mon collègue italien, nous en discuterons aussi avec les ingénieurs, parce qu'il y a des éléments techniques. On avait pensé ouvrir fin août, je pense que l'on pourra ouvrir avant fin août, donc, le plus tôt possible, pour soulager les autres points de passage, en particulier le Mont-Blanc.
Q - Parlons rapidement des mauvais chiffres du tourisme : la baisse de fréquentation est un peu générale par rapport à 2004 ; comment l'expliquez-vous ?
R - Ce dont je dispose, ce sont des réponses aux questionnaires qui sont envoyés aux professionnels. Juin se présentait bien, il semble que juillet, en dehors du sud de la France soit moins bon et qu'il y ait, en particulier, une baisse d'arrivée de touristes, d'un certain nombre de pays, en particulier de pays d'Europe du Nord. Il faut évidemment attendre que l'été soit terminé et que l'on ait les chiffres définitifs. Mais ce que je compte faire avec L. Bertrand, qui est ministre du Tourisme auprès de moi, c'est qu'au vu de ce bilan touristique de cet été, il faudra que l'on regarde, avec les professionnels, comment on peut mieux mobiliser les forces pour que notre pays reste ce fantastique pays touristiques, capable d'attirer des touristes, et donc, capable d'attirer des emplois - on y revient toujours !
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 4 août 2005)
J.-M. Dhuez - Trente-sept morts de plus sur les routes de France le mois dernier, par rapport à juillet de l'an passé, cela fait 566 morts, une hausse de 7 %. Dans le même temps, il y a eu moins d'accidents et un peu moins de blessés. Cela veut-il dire que les accidents qui se sont produits étaient plus graves ?
R - Oui, c'est évidemment ce que cela signifie. Ce sont des chiffres, globalement, qui ne sont pas satisfaisants et je l'ai dit dès que je les ai connus. Nous nous en doutions, car on voyait les chiffres évoluer tout au cours du mois de juillet. C'est la raison pour laquelle, avec N. Sarkozy, nous avons envoyé une instruction la semaine dernière aux préfets, en leur demandant de redoubler de vigilance et d'être extrêmement ferme dans le contrôle et dans les sanctions. Pour autant, je pense aussi aux drames humains que cela représente, et en particulier, il y a eu beaucoup d'accidents de jeunes. Cela représente évidemment une somme de drames familiaux, de drames humains. Je veux redire, à l'occasion de ces chiffres, qu'il nous faut impérativement corriger dans les prochaines semaines, combien chacun doit être responsable et penser aux conséquences de mauvais comportements. Car il n'y a pas que la vitesse, il y a aussi un certain nombre de comportements absolument anormaux. D'abord, l'alcool, la drogue au volant, il y a le refus de stop. On se souvient des quelques accidents dont on a beaucoup parlé au mois de juillet avec cinq garçons et filles très jeunes, en Charente-Maritime, qui n'avaient pas respecté une règle de circulation. Tout cela doit être vraiment à l'esprit de chacun.
Q - Comment vous expliquez ce relâchement effectivement des comportements ?
R - Relâchement des comportements qui aboutissent effectivement à des accidents très graves. Vous avez rappelé vous-même tout à l'heure que le nombre d'accidents continuait à baisser - ça, c'est le bon côté - et que, par contre, sur des accidents moins nombreux, il y a effectivement une gravité plus grande. Donc, il nous faut être, pour ce qui nous concerne, plus vigilants peut-être dans la surveillance de comportements à risques. Je pense en particuliers aux fameuses sorties du samedi soir. Je crois qu'il nous faut vraiment développer...
Q - Cela veut dire encore plus de gendarmes, plus de policiers le samedi soir ?
R - Plus de gendarmes à ce moment-là, plus de policiers à ce moment-là ; cela me paraît absolument indispensable. C'est le sens des instructions que j'ai envoyées aux préfets la semaine dernière.
Q - G. Jurgensen, la porte-parole de la Ligue contre la violence routière, elle, parle de "responsabilités politiques". En clair, elle dit que la politique de sécurité routière était meilleure avec le gouvernement Raffarin ; qu'en pensez-vous et que répondez-vous à cela ?
R - Je pense qu'il y a de l'émotion dans la réaction de madame Jurgensen, et je respecte cette émotion. Je pense qu'il ne faut pas rentrer dans des analyses un peu rapides. Vous-même, comme moi, nous soulignons la situation un petit peu paradoxale de ce mois de juillet où il y a moins d'accidents mais où il y a plus de tués. En mars dernier, il y avait déjà eu un petit décrochage des chiffres. Tout cela veut dire quoi ? Cela veut dire qu'on n'a jamais gagné définitivement la partie et que les choses sont de plus en plus difficiles. Puisque, heureusement, on a fait baisser d'un peu plus de 8.000 morts par an, en rythme à un peu plus ou un peu moins de 5.000 maintenant.
Q - Un petit peu plus : on est à 5.181 morts sur un an.
R - Pour l'instant, en glissement annuel, on est au-dessus de 5.000. J'espère qu'en fin d'année on sera en dessous.
Q - L'objectif, c'était quoi ? 5.000, c'est toujours l'objectif ?
R - Oui, l'objectif c'est toujours celui-là. Cela veut dire que plus on descend, plus c'est difficile - c'est cela aussi que ça veut dire - et qu'il faut donc une détermination au moins égale à celle qui existait précédemment. Je veux redire à votre antenne que la détermination du gouvernement de D. de Villepin est tout à fait grande et ma vigilance personnelle est extrême.
Q - Madame Jurgensen, qui dit pas mal de choses, pense aussi que vos déclarations de juin, sur une pause dans l'installation des radars, ont conduit à un relâchement des automobilistes qui ont pu croire que c'était terminé ; qu'en pensez-vous ?
R - Je pense que les automobilistes ont dû constater qu'il y avait trente radars mobiles l'année dernière, qu'il y en avait trois cents cette année, donc dix fois plus. Quant aux radars dont on parlait il y a quelques semaines, c'était ceux de 2006, donc je crois que là, on n'est plus tout à fait dans une analyse objective des faits.
Q - Donc, on poursuit effectivement l'installation des radars et l'objectif de moins de 5.000 morts sur les routes de France...
R - ...Reste évidemment notre objectif. Je veux dire aujourd'hui et j'aurai l'occasion de le redire dans la semaine, que c'est la mobilisation générale.
Q - Et la justice ? Pour vous, ancien garde des Sceaux, est-ce qu'il ne faut pas qu'elle soit plus sévère et peut-être plus rapide aussi ?
R - Je crois qu'elle a été très sévère depuis deux ou trois ans, depuis une certaine prise de conscience. Un certain nombre de textes ont été modifiés à l'époque, à mon initiative. Je fais tout à fait confiance à la justice pour traiter des cas les plus graves. Mais il ne faut pas non plus tout judiciariser. Je crois que les sanctions qui passent par le système automatique, par les retraits de points, par les amendes, vont aussi dans le bon sens et permettent de traiter l'énorme masse de non-respect des règles qui ne peuvent pas et qui ne doivent pas aller directement, bien sûr, dans les tribunaux, même si les cas les plus graves doivent être traités, bien sûr, par les juges.
Q - Vous parliez des jeunes tout à l'heure, mais on a l'impression qu'ils sont moins sensibles, voire pas tout réceptifs aux messages institutionnels concernant la sécurité routière ; comment les sensibiliser ?
R - Vous avez raison de dire que nous avons là un nouveau chantier à développer davantage sur la pédagogie, la sensibilisation, passer peut-être par d'autres méthodes...
Q - Comment ? Lesquelles ?
R - Par exemple, impliquer - un certain nombre de collectivités le font et je trouve cela très intéressant -, organiser des journées de prévention routière, aller vers les jeunes, travailler davantage encore à l'école pour que le réflexe du jeune ne soit pas une espèce de réflexe de transgression de la règle - phénomène psychologique que l'on connaît bien à certains âges -, mais au contraire, ce sur quoi on peut mobiliser les jeunes, qui le respect de la vie de l'autre, une attitude de générosité, une attitude de respect d'une manière générale. Je crois qu'il nous faut, dans ce domaine, développer vraiment une action forte. Parce que je suis vraiment très marqué par la part que les jeunes apportent à ces drames, à ces tués, à ces blessés de ces mois d'été.
Q - Dans l'accident de Toronto, l'Airbus A 340 d'Air France qui est sorti de piste la semaine dernière, il y a plusieurs informations. Cette nuit, notamment selon les enquêteurs canadiens, l'avion s'est présenté trop haut et il se confirme qu'il s'est posé trop loin aussi sur la piste, et peut-être se serait-il posé à une vitesse légèrement supérieure à ce qui est prévu. Comment expliquer ce qui s'est passé ? Y a-t-il eu erreur humaine, en l'état actuel des informations ?
R - Dans l'état actuel des choses, il est tout à fait impossible de parler d'erreur humaine ou de quelque explication définitive, il faut attendre que les boîtes noires aient été exploitées. Le Bureau enquête accident, que j'ai envoyé sur place dès l'annonce de l'accident, travaille avec les responsables canadiens de ces questions. Il faut que l'on ait l'ensemble des données. La seule chose que l'on sache de façon certaine, c'est que les conditions météorologiques étaient absolument détestables. Maintenant, il faut en savoir plus sur la façon dont l'avion s'est posé et ce qui s'est passé entre le moment où il a touché le sol, où il a touché la piste et cette arrivée dans le ravin. Mais aujourd'hui, il est tout à fait prématuré de tirer des conclusions définitives.
Q - Dans un tout autre domaine, qui concerne évidemment encore les transports, grosse colère, en ce moment, des élus de plusieurs régions de l'Ouest, colère aussi des syndicats : c'est le projet de la SNCF de réduire le nombre de trains sur trois lignes Corail interrégionales. Depuis la confirmation, la semaine dernière, par la SNCF de ce projet, on n'a pas entendu encore l'Etat, donc on aimerait avoir votre point de vue ; que va faire l'État dans ces discussions ?
R - D'abord, on est là dans le rôle normal de la SNCF. De quoi s'agit-il ? Il s'agit pour elle, bien sûr, de préparer ses horaires d'hiver, ceux qui sont en place à partir du mois de novembre, et dans le cadre de cette préparation, la société a évidemment le souci du nombre de trains qu'elle fait rouler dans les cas où ceux-ci sont très déficitaires. Je vous dis par exemple à l'antenne que certains trains, les plus déficitaires d'entre eux, sont déficitaires à 80 %. C'est-à-dire que la vente des billets ne couvre que 20 % du coût du train en question.
Q - Donc, il faut arrêter ces trains ?
R - Donc, il est bien évident que la SNCF doit avoir ce souci de réduire un certain nombre de déficits. Cela étant, des groupes de travail avaient été mis en place avec les régions concernées par ces réductions du nombre de trains - il ne s'agit pas de supprimer les navettes, il s'agit d'en réduire le nombre - et je souhaite que les discussions reprennent, en particulier avec les deux ou trois régions les plus concernées, pour qu'on essaye de trouver des solutions. J'aurai l'occasion d'en discuter, tant avec le président de la SNCF qu'avec les responsables, élus locaux concernés. L'objectif de la SNCF, dans ce projet 2005-2006, était de diminuer son déficit sur ce type de ligne de 10 %, c'est-à-dire d'essayer de récupérer 10 à 11 millions de déficit sur un total de déficit de 100 millions sur ce type de ligne. Cet objectif n'est pas scandaleux en lui-même, il faut voir maintenant, comment, dans le concret, quelles conséquences cela peut avoir pour la vie des personnes concernées, qui, malheureusement, sont peu nombreuses, puisque par définition ces trains déficitaires n'ont pas suffisamment de voyageurs...
Q - Mais qui ont besoin quand même de ces trains pour circuler.
R - ...Et voir comment les choses se passent... je crois que la SNCF, dans cette affaire, est toute prête à regarder très concrètement comment réduire le déficit, mais en même temps, tenir compte des contraintes des gens qui habitent ces régions.
Q - Mais que répondez-vous justement à ces personnes dont les trains vont être supprimés et qui vont se retrouver confrontées à une absence de train ou qui vont devoir attendre... ?
R - Ce sont des réductions de nombre de trains, ce ne sont pas des suppressions de trains.
Q - Pour vous aussi, service public ne doit pas rimer avec déficit ?
R - Non, cela ne doit pas rimer avec déficit. En même temps, le service public peut justifier le maintien de certaines lignes déficitaires. Là-dessus, je crois qu'il faut avoir une attitude tout à fait pragmatique, mais il faut aussi constater la réalité : s'il n'y a pas suffisamment de gens qui montent dans un train, c'est qu'il y a un petit problème, soit un problème d'horaire, soit un problème d'utilisation et d'utilité effective de ce train. Je crois qu'on ne peut pas avoir une théorie générale, je crois qu'il faut rentrer vraiment dans le concret. Je souhaite que les discussions avec les régions puissent être concrètes et déboucher sur des propositions concrètes.
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 10 août 2005)
R - D'abord, c'est une bonne nouvelle pour ceux qui sont concernés, c'est-à-dire pour les 35.000 personnes qui ont retrouvé du travail et pour leur famille. C'est quand même une bonne nouvelle pour le Premier ministre. On sait bien que si le chômage avait augmenté, cela aurait été de sa faute ! Donc, comme il baisse, c'est tant mieux pour le Gouvernement, pour les entreprises françaises. Je crois que c'est le résultat d'une mobilisation générale, à la fois, bien sûr, des administrations, des politiques publiques. Dans mon domaine du bâtiment, des travaux publics, du tourisme, il y a un effort de mobilisation et je sais que c'est le cas partout ailleurs. C'est tant mieux si l'on va dans la bonne direction.
Q - Mais le plan pour l'emploi de D. de Villepin n'entre en vigueur qu'en septembre, il n'a pas d'effet pour l'instant...
R - Ce plan-là non, mais par exemple les mesures Borloo qui avaient été décidées il y a un certain nombre de mois qui, effectivement, avait mis un peu de temps à commencer à s'enclencher sur le terrain, à obtenir les signatures de contrats d'aide aux jeunes etc. commencent à donner leur effet. Je pense qu'il y a, dans un certain nombre de secteurs, une situation économique qui est positive. Je connais bien deux secteurs économiques qui aujourd'hui se portent bien, le bâtiment et les travaux publics d'une part et le secteur aéronautique. Dans ces deux domaines, les choses vont bien, les entreprises avancent, font des résultats et ont tendance à embaucher.
Q - Ce week-end, des millions d'automobilistes vont se retrouver sur les routes et les autoroutes. Avez-vous un message à leur transmettre, en tant que ministre des Transports ?
R - Oui, je voudrais dire, avec un peu de gravité et de solennité, aux automobilistes d'être prudents. Le début du mois de juillet n'a pas été bon. Il y a eu beaucoup d'accidents, et il pour ce chassé-croisé, qui est le vrai mauvais moment de l'été, avec beaucoup d'accidents, il faut tout faire pour que cela se passe bien. Il faut bien sur respecter les limites de vitesse. Les vitesses vont être très contrôlées. Il faut que les gens sachent que nous avons mis le paquet pour que sur toutes les routes importantes et les autoroutes, il y ait ces contrôles radar. Il y a actuellement 700 radars en place...
Q - Précisément, cela justifie une mise au point, puisque dans un premier temps, vous aviez parlé d'une pause dans l'installation des radars...
R - Non, je n'ai jamais parlé de "pause". J'ai dit que lorsqu'on en aurait 1.000, on verrait ce que l'on fait. Finalement, après les 1.000, on a décidé d'en mettre en place 500.
Q - Il y en aura plus ?
R - Là, il y en a beaucoup plus cet été que l'an dernier. En radars mobiles, on est passé de 30 à 300. Il y a 300 mobiles et 400 fixes. Donc, les vitesses seront vraiment très contrôlées. Il n'y a pas que cela : hier, j'étais sur les autoroutes en Seine-et-Marne, et j'ai observé le comportement de certains conducteurs sur le non respect de l'espacement avec la voiture qui précède, des gens qui font des zigzag, enfin tous ces comportements qui ne vont pas. Et puis, le fait de dire que quand on est fatigué, on ne prend pas le volant.
Q - Vous aviez donc dit qu'au-delà de 1.000, il faudrait voir. Cela veut dire que vous pensez qu'il y a quand même un seuil au-delà duquel il y a un ras-le-bol des automobilistes ?
R - Non, ce n'est pas un problème de ras-le-bol, c'est d'abord un problème d'efficacité du dispositif, de mise en place. Et donc, au-delà des 1.000, on est engagé maintenant pour 2006 sur 500 supplémentaires. Nous n'avons pas encore déterminé quelle sera la répartition à l'intérieur de ces 500 entre les radars mobiles et les radars fixes ; on en décidera rapidement, en particulier, avec le ministre de l'Intérieur, pour compléter. Qu'est-ce qui se passe ? On a gagne du terrain, incontestablement, on a fait baisser le nombre d'accidents et de morts sur les autoroutes et les très grandes routes. Il faut maintenant faire baisser les accidents sur les routes plus petites, les routes départementales.
Q - Vous disiez que les chiffres de juillet n'étaient pas très bons...
R - Les chiffres de début juillet n'étaient pas très bons, au constat des grands accidents que l'on a observé les uns et les autres. J'espère que la fin du mois sera meilleure. Cela veut dire qu'il faut être vigilant. En cette période de juillet-août qui n'est jamais bonne, il faut faire un effort parce que c'est là qu'il y a le plus d'accidents.
Q - Cela veut dire que l'on n'est pas sûr de passer sous le cap des 5.000 morts cette année sur les routes ?
R - On n'en est pas sûr. Cela reste un objectif pour nous, et cela reste un peu notre aiguillon pour aller plus loin et pour être encore plus fermes et encore plu vigilants.
Q - Restons dans le domaine routier pour parler d'une polémique qui monte depuis quelques jours, qui concerne la privatisation des autoroutes. F. Bayrou vous en veut beaucoup...
R - Je ne sais pas si c'est personnel...
Q - Non, pas à vous personnellement, mais au Gouvernement. Il dit qu'en privatisant les autoroutes, je le cite, "on vend les bijoux de famille pour assurer le court terme" ; que lui répondez-vous ?
R - La formule est franchement éculée et vraiment pas adaptée...
Q - Cela va tout de même rapporter 11 milliards d'euros.
R - Heureusement ! De quoi s'agit-il ? Il s'agit de tout mobiliser pour l'emploi et pour la croissance économique. Les Français ont besoin d'emploi, ont besoin de croissance, ont besoin d'investissements. C'est la volonté du Premier ministre, c'est cette mobilisation dont on parlait tout à l'heure. Donc, l'Etat vend ses participations dans les sociétés concessionnaires des autoroutes. Qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que quand la concession autoroutière est terminée, c'est-à-dire dans vingt-six à trente ans, les autoroutes reviennent à l'Etat. Ces autoroutes restent dans le domaine public. Simplement, l'Etat, aujourd'hui, est actionnaire des sociétés qui les gèrent ; l'Etat vend ses actions, pour autant l'Etat reste celui qui détermine, à travers le contrat de concessions, les règles de fonctionnement. Et quand la concession est finie, bien sûr, l'autoroute revient à l'Etat. Donc, ce n'est pas un bien qui, tout à coup, disparaît et sort du pays.
Q - Puisque c'est le privé qui va gérer, qu'est-ce qui garantit, par exemple, que les péages ne vont pas augmenter ?
R - Ce qui garantit cela, c'est que les règles de gestion sont définies par les conventions de concession, qui sont signées, qui existent, et qui prévoient en particulier les règles d'évolution des tarifs. Donc, le fait que l'Etat vende ses actions dans ces sociétés n'aura aucun effet sur le tarif payé par les automobilistes.
Q - Vous pouvez vous y engager ?
R - Je le dis très solennellement aujourd'hui.
Q - Il y a un autre domaine sur lequel on attend un peu des décisions, c'est les passages dans les Alpes. On sait que le tunnel du Fréjus est fermé depuis deux mois à la suite d'un accident. On parlait de sa réouverture avant la fin du mois d'août, cela intéresse beaucoup de routiers, parce que le tunnel du Mont-Blanc, aujourd'hui, est totalement saturé. Une décision a-t-elle été prise ?
R - Bien sûr. Il y a trois passages entre la France et l'Italie : il y a Vintimille, près de Nice, il y a le tunnel du Fréjus qui est fermé depuis début juin, puisqu'il y a eu un accident, et puis il y a le tunnel du Mont-Blanc. Il est évident que quand l'un des trois est fermé, c'est très difficile pour les autres. Je suis en train, en ce moment, ce week-end, de discuter avec mon collègue italien pour fixer les conditions de sécurité qui seront définies pour la réouverture ...
Q - Quand interviendra la réouverture du Fréjus ?
R - Le plus tôt possible. Il faut que l'on termine la mise au point de ces règles de sécurité, parce que je veux que la sécurité soit meilleure au moment de la réouverture qu'elle n'était, évidemment, au moment de l'accident. Nous en discutons actuellement avec mon collègue italien, nous en discuterons aussi avec les ingénieurs, parce qu'il y a des éléments techniques. On avait pensé ouvrir fin août, je pense que l'on pourra ouvrir avant fin août, donc, le plus tôt possible, pour soulager les autres points de passage, en particulier le Mont-Blanc.
Q - Parlons rapidement des mauvais chiffres du tourisme : la baisse de fréquentation est un peu générale par rapport à 2004 ; comment l'expliquez-vous ?
R - Ce dont je dispose, ce sont des réponses aux questionnaires qui sont envoyés aux professionnels. Juin se présentait bien, il semble que juillet, en dehors du sud de la France soit moins bon et qu'il y ait, en particulier, une baisse d'arrivée de touristes, d'un certain nombre de pays, en particulier de pays d'Europe du Nord. Il faut évidemment attendre que l'été soit terminé et que l'on ait les chiffres définitifs. Mais ce que je compte faire avec L. Bertrand, qui est ministre du Tourisme auprès de moi, c'est qu'au vu de ce bilan touristique de cet été, il faudra que l'on regarde, avec les professionnels, comment on peut mieux mobiliser les forces pour que notre pays reste ce fantastique pays touristiques, capable d'attirer des touristes, et donc, capable d'attirer des emplois - on y revient toujours !
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 4 août 2005)
J.-M. Dhuez - Trente-sept morts de plus sur les routes de France le mois dernier, par rapport à juillet de l'an passé, cela fait 566 morts, une hausse de 7 %. Dans le même temps, il y a eu moins d'accidents et un peu moins de blessés. Cela veut-il dire que les accidents qui se sont produits étaient plus graves ?
R - Oui, c'est évidemment ce que cela signifie. Ce sont des chiffres, globalement, qui ne sont pas satisfaisants et je l'ai dit dès que je les ai connus. Nous nous en doutions, car on voyait les chiffres évoluer tout au cours du mois de juillet. C'est la raison pour laquelle, avec N. Sarkozy, nous avons envoyé une instruction la semaine dernière aux préfets, en leur demandant de redoubler de vigilance et d'être extrêmement ferme dans le contrôle et dans les sanctions. Pour autant, je pense aussi aux drames humains que cela représente, et en particulier, il y a eu beaucoup d'accidents de jeunes. Cela représente évidemment une somme de drames familiaux, de drames humains. Je veux redire, à l'occasion de ces chiffres, qu'il nous faut impérativement corriger dans les prochaines semaines, combien chacun doit être responsable et penser aux conséquences de mauvais comportements. Car il n'y a pas que la vitesse, il y a aussi un certain nombre de comportements absolument anormaux. D'abord, l'alcool, la drogue au volant, il y a le refus de stop. On se souvient des quelques accidents dont on a beaucoup parlé au mois de juillet avec cinq garçons et filles très jeunes, en Charente-Maritime, qui n'avaient pas respecté une règle de circulation. Tout cela doit être vraiment à l'esprit de chacun.
Q - Comment vous expliquez ce relâchement effectivement des comportements ?
R - Relâchement des comportements qui aboutissent effectivement à des accidents très graves. Vous avez rappelé vous-même tout à l'heure que le nombre d'accidents continuait à baisser - ça, c'est le bon côté - et que, par contre, sur des accidents moins nombreux, il y a effectivement une gravité plus grande. Donc, il nous faut être, pour ce qui nous concerne, plus vigilants peut-être dans la surveillance de comportements à risques. Je pense en particuliers aux fameuses sorties du samedi soir. Je crois qu'il nous faut vraiment développer...
Q - Cela veut dire encore plus de gendarmes, plus de policiers le samedi soir ?
R - Plus de gendarmes à ce moment-là, plus de policiers à ce moment-là ; cela me paraît absolument indispensable. C'est le sens des instructions que j'ai envoyées aux préfets la semaine dernière.
Q - G. Jurgensen, la porte-parole de la Ligue contre la violence routière, elle, parle de "responsabilités politiques". En clair, elle dit que la politique de sécurité routière était meilleure avec le gouvernement Raffarin ; qu'en pensez-vous et que répondez-vous à cela ?
R - Je pense qu'il y a de l'émotion dans la réaction de madame Jurgensen, et je respecte cette émotion. Je pense qu'il ne faut pas rentrer dans des analyses un peu rapides. Vous-même, comme moi, nous soulignons la situation un petit peu paradoxale de ce mois de juillet où il y a moins d'accidents mais où il y a plus de tués. En mars dernier, il y avait déjà eu un petit décrochage des chiffres. Tout cela veut dire quoi ? Cela veut dire qu'on n'a jamais gagné définitivement la partie et que les choses sont de plus en plus difficiles. Puisque, heureusement, on a fait baisser d'un peu plus de 8.000 morts par an, en rythme à un peu plus ou un peu moins de 5.000 maintenant.
Q - Un petit peu plus : on est à 5.181 morts sur un an.
R - Pour l'instant, en glissement annuel, on est au-dessus de 5.000. J'espère qu'en fin d'année on sera en dessous.
Q - L'objectif, c'était quoi ? 5.000, c'est toujours l'objectif ?
R - Oui, l'objectif c'est toujours celui-là. Cela veut dire que plus on descend, plus c'est difficile - c'est cela aussi que ça veut dire - et qu'il faut donc une détermination au moins égale à celle qui existait précédemment. Je veux redire à votre antenne que la détermination du gouvernement de D. de Villepin est tout à fait grande et ma vigilance personnelle est extrême.
Q - Madame Jurgensen, qui dit pas mal de choses, pense aussi que vos déclarations de juin, sur une pause dans l'installation des radars, ont conduit à un relâchement des automobilistes qui ont pu croire que c'était terminé ; qu'en pensez-vous ?
R - Je pense que les automobilistes ont dû constater qu'il y avait trente radars mobiles l'année dernière, qu'il y en avait trois cents cette année, donc dix fois plus. Quant aux radars dont on parlait il y a quelques semaines, c'était ceux de 2006, donc je crois que là, on n'est plus tout à fait dans une analyse objective des faits.
Q - Donc, on poursuit effectivement l'installation des radars et l'objectif de moins de 5.000 morts sur les routes de France...
R - ...Reste évidemment notre objectif. Je veux dire aujourd'hui et j'aurai l'occasion de le redire dans la semaine, que c'est la mobilisation générale.
Q - Et la justice ? Pour vous, ancien garde des Sceaux, est-ce qu'il ne faut pas qu'elle soit plus sévère et peut-être plus rapide aussi ?
R - Je crois qu'elle a été très sévère depuis deux ou trois ans, depuis une certaine prise de conscience. Un certain nombre de textes ont été modifiés à l'époque, à mon initiative. Je fais tout à fait confiance à la justice pour traiter des cas les plus graves. Mais il ne faut pas non plus tout judiciariser. Je crois que les sanctions qui passent par le système automatique, par les retraits de points, par les amendes, vont aussi dans le bon sens et permettent de traiter l'énorme masse de non-respect des règles qui ne peuvent pas et qui ne doivent pas aller directement, bien sûr, dans les tribunaux, même si les cas les plus graves doivent être traités, bien sûr, par les juges.
Q - Vous parliez des jeunes tout à l'heure, mais on a l'impression qu'ils sont moins sensibles, voire pas tout réceptifs aux messages institutionnels concernant la sécurité routière ; comment les sensibiliser ?
R - Vous avez raison de dire que nous avons là un nouveau chantier à développer davantage sur la pédagogie, la sensibilisation, passer peut-être par d'autres méthodes...
Q - Comment ? Lesquelles ?
R - Par exemple, impliquer - un certain nombre de collectivités le font et je trouve cela très intéressant -, organiser des journées de prévention routière, aller vers les jeunes, travailler davantage encore à l'école pour que le réflexe du jeune ne soit pas une espèce de réflexe de transgression de la règle - phénomène psychologique que l'on connaît bien à certains âges -, mais au contraire, ce sur quoi on peut mobiliser les jeunes, qui le respect de la vie de l'autre, une attitude de générosité, une attitude de respect d'une manière générale. Je crois qu'il nous faut, dans ce domaine, développer vraiment une action forte. Parce que je suis vraiment très marqué par la part que les jeunes apportent à ces drames, à ces tués, à ces blessés de ces mois d'été.
Q - Dans l'accident de Toronto, l'Airbus A 340 d'Air France qui est sorti de piste la semaine dernière, il y a plusieurs informations. Cette nuit, notamment selon les enquêteurs canadiens, l'avion s'est présenté trop haut et il se confirme qu'il s'est posé trop loin aussi sur la piste, et peut-être se serait-il posé à une vitesse légèrement supérieure à ce qui est prévu. Comment expliquer ce qui s'est passé ? Y a-t-il eu erreur humaine, en l'état actuel des informations ?
R - Dans l'état actuel des choses, il est tout à fait impossible de parler d'erreur humaine ou de quelque explication définitive, il faut attendre que les boîtes noires aient été exploitées. Le Bureau enquête accident, que j'ai envoyé sur place dès l'annonce de l'accident, travaille avec les responsables canadiens de ces questions. Il faut que l'on ait l'ensemble des données. La seule chose que l'on sache de façon certaine, c'est que les conditions météorologiques étaient absolument détestables. Maintenant, il faut en savoir plus sur la façon dont l'avion s'est posé et ce qui s'est passé entre le moment où il a touché le sol, où il a touché la piste et cette arrivée dans le ravin. Mais aujourd'hui, il est tout à fait prématuré de tirer des conclusions définitives.
Q - Dans un tout autre domaine, qui concerne évidemment encore les transports, grosse colère, en ce moment, des élus de plusieurs régions de l'Ouest, colère aussi des syndicats : c'est le projet de la SNCF de réduire le nombre de trains sur trois lignes Corail interrégionales. Depuis la confirmation, la semaine dernière, par la SNCF de ce projet, on n'a pas entendu encore l'Etat, donc on aimerait avoir votre point de vue ; que va faire l'État dans ces discussions ?
R - D'abord, on est là dans le rôle normal de la SNCF. De quoi s'agit-il ? Il s'agit pour elle, bien sûr, de préparer ses horaires d'hiver, ceux qui sont en place à partir du mois de novembre, et dans le cadre de cette préparation, la société a évidemment le souci du nombre de trains qu'elle fait rouler dans les cas où ceux-ci sont très déficitaires. Je vous dis par exemple à l'antenne que certains trains, les plus déficitaires d'entre eux, sont déficitaires à 80 %. C'est-à-dire que la vente des billets ne couvre que 20 % du coût du train en question.
Q - Donc, il faut arrêter ces trains ?
R - Donc, il est bien évident que la SNCF doit avoir ce souci de réduire un certain nombre de déficits. Cela étant, des groupes de travail avaient été mis en place avec les régions concernées par ces réductions du nombre de trains - il ne s'agit pas de supprimer les navettes, il s'agit d'en réduire le nombre - et je souhaite que les discussions reprennent, en particulier avec les deux ou trois régions les plus concernées, pour qu'on essaye de trouver des solutions. J'aurai l'occasion d'en discuter, tant avec le président de la SNCF qu'avec les responsables, élus locaux concernés. L'objectif de la SNCF, dans ce projet 2005-2006, était de diminuer son déficit sur ce type de ligne de 10 %, c'est-à-dire d'essayer de récupérer 10 à 11 millions de déficit sur un total de déficit de 100 millions sur ce type de ligne. Cet objectif n'est pas scandaleux en lui-même, il faut voir maintenant, comment, dans le concret, quelles conséquences cela peut avoir pour la vie des personnes concernées, qui, malheureusement, sont peu nombreuses, puisque par définition ces trains déficitaires n'ont pas suffisamment de voyageurs...
Q - Mais qui ont besoin quand même de ces trains pour circuler.
R - ...Et voir comment les choses se passent... je crois que la SNCF, dans cette affaire, est toute prête à regarder très concrètement comment réduire le déficit, mais en même temps, tenir compte des contraintes des gens qui habitent ces régions.
Q - Mais que répondez-vous justement à ces personnes dont les trains vont être supprimés et qui vont se retrouver confrontées à une absence de train ou qui vont devoir attendre... ?
R - Ce sont des réductions de nombre de trains, ce ne sont pas des suppressions de trains.
Q - Pour vous aussi, service public ne doit pas rimer avec déficit ?
R - Non, cela ne doit pas rimer avec déficit. En même temps, le service public peut justifier le maintien de certaines lignes déficitaires. Là-dessus, je crois qu'il faut avoir une attitude tout à fait pragmatique, mais il faut aussi constater la réalité : s'il n'y a pas suffisamment de gens qui montent dans un train, c'est qu'il y a un petit problème, soit un problème d'horaire, soit un problème d'utilisation et d'utilité effective de ce train. Je crois qu'on ne peut pas avoir une théorie générale, je crois qu'il faut rentrer vraiment dans le concret. Je souhaite que les discussions avec les régions puissent être concrètes et déboucher sur des propositions concrètes.
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 10 août 2005)