Texte intégral
Q - Revenons tout de suite bien sûr sur ces attentats qui ont été commis à Londres. D'abord, confirmez-vous que deux Françaises ont été blessées dans ces attentats ? Et partagez-vous les chiffres qui ont été donnés par le Premier ministre australien, qui sont de 52 morts au total ?
R - Ce que je peux vous dire, c'est qu'immédiatement, le Quai d'Orsay a demandé aux ressortissants français susceptibles de se trouver à Londres d'appeler leurs proches, dans la mesure où ils étaient sains et saufs, pour que l'on puisse répondre à tous ceux qui appelaient la cellule de crise du ministère des Affaires étrangères. Nous avons plusieurs milliers d'appels. Nous avons aujourd'hui la certitude que quatre jeunes femmes françaises ont été blessées durant ces attentats, que l'une est déjà sortie de l'hôpital et que les trois autres sont dans un état satisfaisant, non-critique. Elles ont été soignées à l'University College, le grand hôpital londonien et leur état de santé est aujourd'hui non-critique et rassurant.
Q - Sur le nombre des morts, le Premier ministre australien parlait de 52...
R - Nous écoutons ce que nous disent nos amis britanniques, nous n'avons rien de plus à ajouter. Permettez-moi quand même de dire notre solidarité la plus profonde avec nos amis britanniques. Evidemment nos pensées vont aux familles des victimes.
Il faut éradiquer le terrorisme. Il faut être d'une totale, d'une indéfectible solidarité contre la terreur, la haine, l'inhumanité que représente le terrorisme. Et le fait que le G8 ait pu continuer est un signe fort des Occidentaux qui montre qu'il n'y aura pas de déstabilisation politique par le terrorisme, parce qu'il s'agit d'une atteinte aux démocraties. Regardez ce qui s'est passé à Madrid, trois jours avant une élection ; regardez ce qui se passe là, au moment où le G8 s'ouvre.
Q - Concernant l'autre réponse, qui est la réponse sécuritaire et policière, n'a-t-on pas le sentiment que, d'une certaine manière, c'est un échec des services britanniques, voire des services occidentaux qui, peut-être, ont baissé la garde, ou en tout cas qui ont été déjoués ?
R - Je rentre des Etats-Unis où j'ai passé 48 heures à Washington et à Chicago et où je me suis entretenu avec Condoleezza Rice, mon homologue américaine. Nous avons beaucoup parlé de la lutte contre le terrorisme. Le "Washington Post", il y a trois jours, faisait sa "une" sur la qualité des services français de lutte contre le terrorisme. En réalité, nous travaillons tous ensemble, il y a une coopération nécessaire.
Q - Mais cela veut dire qu'il y a une impuissance, ou au moins une difficulté ?
R - Il y a surtout une nécessité de traquer en permanence le terrorisme. Lorsque quelqu'un met une bombe dans un endroit comme un bus, la question est de savoir comment remonter la filière - c'est ce que nous faisons en permanence. Je n'ai absolument aucune indication sur les auteurs de ces attentats, mais il est évident que l'idée de mettre en place un système de visas biométriques au niveau de tous les consulats, de travailler avec une plus grande précision sur les personnes qui rentrent dans nos pays occidentaux, est certainement une piste majeure pour savoir qui peut ou qui ne peut pas rentrer dans les pays.
Q - Dans une revendication, qui n'a pas encore été vérifiée, de possibles auteurs de ces attentats disent répondre à la présence de troupes en Irak et en Afghanistan. La France va renforcer son dispositif - Michèle Alliot-Marie le disait récemment - en Afghanistan. Est-ce que Paris est une cible ?
R - Personne ne peut dire aujourd'hui qu'il n'est pas une cible. Ce qui est aujourd'hui le plus important, à mon avis, c'est de sentir qu'il y a une coordination, une coopération entre les services de renseignement, pour évidemment lutter contre le terrorisme, et surtout une volonté politique sans faille. La réaction des Londoniens, ce matin, dans le métro de Londres, qui continuent à vivre comme avant, est la meilleure des réponses.
Q - Le passage à l'alerte rouge du dispositif Vigipirate est-il une réponse au terrorisme, ou est-ce une manière de rassurer l'opinion ?
R - Lorsqu'une capitale, à quelques kilomètres de la nôtre, est en proie aux attentats, il est tout à fait normal de réagir immédiatement. On ne sait pas s'il y aura une série ou s'il n'y aura pas une série, on ne sait pas où cela peut frapper. C'est donc un signe qui nous fait dire : "Attention". Donc immédiatement, le Premier ministre a décidé, en quelques minutes, de passer au Vigipirate rouge, et également a demandé aux ministres de l'Intérieur et de la Défense de lui faire des propositions.
Q - Précisément, vous vous êtes retrouvés hier, avec le ministre de la Défense et le ministre de l'Intérieur, au cours d'une réunion. Nicolas Sarkozy parlait de dispositions nouvelles qui allaient intervenir dans les jours qui viennent. Avez-vous des informations à nous donner sur ce sujet ?
R - C'est le Premier ministre qui arbitrera ces différentes propositions. Ce qui est sûr, c'est qu'il faut montrer un dispositif sans faille, il faut montrer que nous sommes au cur de la problématique de la démocratie. Personne n'a le droit de déstabiliser une démocratie. Il s'agit donc là, en effet, d'une manière de vivre notre engagement politique. Le Premier ministre a réagi immédiatement, vous l'avez vu. Et on continuera.
Q - Réponse policière, refus de se laisser déstabiliser. N'y a-t-il pas aussi une troisième voie qui est, quand on regarde les terrains sur lesquels prospère le terrorisme, la stabilisation de ces terrains ou la neutralisation, avec la pauvreté, avec les situations de crises que l'on voit, en Irak, en Afghanistan ?
R - C'est le grand sujet ; c'est un sujet sur lequel le président de la République a donné sa vision, il y a une dizaine d'années, puisqu'il a été le premier à proposer cela.
Il n'est pas possible que l'on continue à voir tous les pays du Sud touchés par un fléau aussi important que le sida, qui est en train de tuer toutes les élites ! Et nous, continuer à fêter notre dix millième centenaire. Il y a un problème majeur qui va se passer. Ne pas le voir est égoïste et c'est surtout très bête ! Il est donc absolument fondamental, non seulement de jouer sur la dette, ce qui a été décidé au G8, mais, plus que sur la dette, il faut essayer de voir comment il peut y avoir une relation entre un modèle social, un système social dans un pays et le terrorisme. J'en ai parlé l'autre jour aux cinq pays du Sud Méditerranée, c'est-à-dire la Libye, la Mauritanie, l'Algérie, la Tunisie, le Maroc. Nous avons eu une discussion sans fard, sans collaborateurs, sans journalistes, comme cela, pendant deux heures. Je suis sûr qu'il y a là une manière pour nous, les Occidentaux, de travailler intelligemment, ne serait-ce qu'au niveau de l'OMC, ne serait-ce que de faire rentrer peu à peu ces pays dans le commerce international. Cela paraît peut-être idéaliste, mais c'est la solution, la seule solution.
Q - L'autre aspect, c'est essayer de pacifier un certain nombre de terrains déstabilisés, je pense à l'Irak, à l'Afghanistan, au Proche-Orient. Vous étiez aux Etats-Unis il y a encore 24 heures, vous avez rencontré Condoleezza Rice. Avez-vous le sentiment qu'il existe toujours un divorce très important entre l'approche américaine et l'approche française, ou est-ce qu'il des rapprochements ?
R - Il y a des rapprochements importants. J'en veux pour preuve, le discours que Condoleezza Rice a prononcé au Caire récemment dans lequel elle a parlé du respect des cultures, du respect des civilisations, et du fait qu'un pays peut être transformé progressivement vers la démocratie.
C'est un nouveau discours, c'est un discours sur lequel nous travaillons beaucoup ensemble, lorsque l'on parle du Liban par exemple, où la vision du président de la République est en train de s'imposer. Qui aurait dit, il y a un an, qu'il y aurait des élections libres au Liban ? Qui aurait dit qu'un Parlement, tranquillement, allait se prononcer pour un futur Premier ministre ? Nous avons parlé également de la Syrie, qui doit évidemment appliquer la résolution 1559. Il n'est pas question qu'un pays étranger, fût-ce la Syrie, puisse rentrer dans la vie politique du Liban ! Il n'est pas normal qu'il y ait des services de renseignement syriens au Liban ! Cela, c'est une fermeté de la France, mais c'est aussi une manière de concevoir le Moyen-Orient élargi. Et je trouve que les Américains sont en train de parler de plus en plus, comme nous, au niveau du Moyen-Orient élargi.
Q - Pas sur l'Irak ?
R - Sur l'Irak, nous avons aujourd'hui un état de fait. Mon homologue irakien souhaite, évidemment, avoir encore des troupes américaines pour l'instant. Mais il est bien évident qu'il y a un jour où ces troupes américaines vont quitter l'Irak, et c'est là le sujet. Je crois qu'il faut travailler sur la région et pas uniquement sur un pays. Nous, nous voulons que l'Irak reste souverain et que toutes les forces politiques soient capables, ensemble, de présenter une nouvelle Constitution.
Q - Vous avez évoqué l'Iran avec Condoleezza Rice. Là, sur l'Iran, n'y a-t-il pas une divergence de vues ? On a bien compris que les Etats-Unis ne trouvaient pas très légitime la manière dont s'était faite l'élection du nouveau président iranien. Vous, passez-vous outre les difficultés de cette élection et pensez-vous qu'il faut considérer comme légitime ce président ?
R - J'ai dit clairement que je regrette que tous les candidats n'aient pas pu se présenter. Je dis simplement que M. Ahmadinejad a été élu avec 62 % des voix.
Q - Et la question du nucléaire ?
R - C'est fondamental, c'est le problème de la prolifération nucléaire militaire. Donc, il y a là deux solutions : ou on ne parle pas avec eux, ou on essaie de négocier pour qu'ils ne construisent pas de bombe nucléaire. C'est ce que la France, les diplomaties française, mais aussi allemande et anglaise, ont décidé de faire. Donc, la diplomatie européenne est en avance là-dessus. Nous allons faire des propositions, nous allons négocier, parler diplomatiquement avec l'Iran, en leur demandant de suspendre toute activité nucléaire militaire. Après la proposition que nous ferons fin juillet début août - et j'y jouerai un rôle, bien sûr -, alors nous verrons ce que l'Iran nous dira. J'espère que l'Iran suspendra toute activité nucléaire militaire. C'est fondamental que, dans cette région-là, l'Iran, qui a signé le Traité de non-prolifération, puisse tenir sa parole.
Q - Vous voilà ministre des Affaires étrangères depuis un peu plus d'un mois, après avoir été ministre notamment de la Santé et de la Sécurité sociale, et d'autres choses qui n'avaient rien à voir avec les Affaires étrangères. Apprend-on vite ce nouveau métier ?
R - En tout cas, la seule chose qui compte ce sont les dossiers, c'est de travailler les dossiers. Et puis, bien sûr, c'est passionnant parce que, on le voit bien tous les jours, un pays n'est pas seul, n'est pas isolé ; un pays ne peut exister que par une vision politique qu'il peut bien évidemment partager avec d'autres. C'est cela les Affaires étrangères.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 juillet 2005)
R - Ce que je peux vous dire, c'est qu'immédiatement, le Quai d'Orsay a demandé aux ressortissants français susceptibles de se trouver à Londres d'appeler leurs proches, dans la mesure où ils étaient sains et saufs, pour que l'on puisse répondre à tous ceux qui appelaient la cellule de crise du ministère des Affaires étrangères. Nous avons plusieurs milliers d'appels. Nous avons aujourd'hui la certitude que quatre jeunes femmes françaises ont été blessées durant ces attentats, que l'une est déjà sortie de l'hôpital et que les trois autres sont dans un état satisfaisant, non-critique. Elles ont été soignées à l'University College, le grand hôpital londonien et leur état de santé est aujourd'hui non-critique et rassurant.
Q - Sur le nombre des morts, le Premier ministre australien parlait de 52...
R - Nous écoutons ce que nous disent nos amis britanniques, nous n'avons rien de plus à ajouter. Permettez-moi quand même de dire notre solidarité la plus profonde avec nos amis britanniques. Evidemment nos pensées vont aux familles des victimes.
Il faut éradiquer le terrorisme. Il faut être d'une totale, d'une indéfectible solidarité contre la terreur, la haine, l'inhumanité que représente le terrorisme. Et le fait que le G8 ait pu continuer est un signe fort des Occidentaux qui montre qu'il n'y aura pas de déstabilisation politique par le terrorisme, parce qu'il s'agit d'une atteinte aux démocraties. Regardez ce qui s'est passé à Madrid, trois jours avant une élection ; regardez ce qui se passe là, au moment où le G8 s'ouvre.
Q - Concernant l'autre réponse, qui est la réponse sécuritaire et policière, n'a-t-on pas le sentiment que, d'une certaine manière, c'est un échec des services britanniques, voire des services occidentaux qui, peut-être, ont baissé la garde, ou en tout cas qui ont été déjoués ?
R - Je rentre des Etats-Unis où j'ai passé 48 heures à Washington et à Chicago et où je me suis entretenu avec Condoleezza Rice, mon homologue américaine. Nous avons beaucoup parlé de la lutte contre le terrorisme. Le "Washington Post", il y a trois jours, faisait sa "une" sur la qualité des services français de lutte contre le terrorisme. En réalité, nous travaillons tous ensemble, il y a une coopération nécessaire.
Q - Mais cela veut dire qu'il y a une impuissance, ou au moins une difficulté ?
R - Il y a surtout une nécessité de traquer en permanence le terrorisme. Lorsque quelqu'un met une bombe dans un endroit comme un bus, la question est de savoir comment remonter la filière - c'est ce que nous faisons en permanence. Je n'ai absolument aucune indication sur les auteurs de ces attentats, mais il est évident que l'idée de mettre en place un système de visas biométriques au niveau de tous les consulats, de travailler avec une plus grande précision sur les personnes qui rentrent dans nos pays occidentaux, est certainement une piste majeure pour savoir qui peut ou qui ne peut pas rentrer dans les pays.
Q - Dans une revendication, qui n'a pas encore été vérifiée, de possibles auteurs de ces attentats disent répondre à la présence de troupes en Irak et en Afghanistan. La France va renforcer son dispositif - Michèle Alliot-Marie le disait récemment - en Afghanistan. Est-ce que Paris est une cible ?
R - Personne ne peut dire aujourd'hui qu'il n'est pas une cible. Ce qui est aujourd'hui le plus important, à mon avis, c'est de sentir qu'il y a une coordination, une coopération entre les services de renseignement, pour évidemment lutter contre le terrorisme, et surtout une volonté politique sans faille. La réaction des Londoniens, ce matin, dans le métro de Londres, qui continuent à vivre comme avant, est la meilleure des réponses.
Q - Le passage à l'alerte rouge du dispositif Vigipirate est-il une réponse au terrorisme, ou est-ce une manière de rassurer l'opinion ?
R - Lorsqu'une capitale, à quelques kilomètres de la nôtre, est en proie aux attentats, il est tout à fait normal de réagir immédiatement. On ne sait pas s'il y aura une série ou s'il n'y aura pas une série, on ne sait pas où cela peut frapper. C'est donc un signe qui nous fait dire : "Attention". Donc immédiatement, le Premier ministre a décidé, en quelques minutes, de passer au Vigipirate rouge, et également a demandé aux ministres de l'Intérieur et de la Défense de lui faire des propositions.
Q - Précisément, vous vous êtes retrouvés hier, avec le ministre de la Défense et le ministre de l'Intérieur, au cours d'une réunion. Nicolas Sarkozy parlait de dispositions nouvelles qui allaient intervenir dans les jours qui viennent. Avez-vous des informations à nous donner sur ce sujet ?
R - C'est le Premier ministre qui arbitrera ces différentes propositions. Ce qui est sûr, c'est qu'il faut montrer un dispositif sans faille, il faut montrer que nous sommes au cur de la problématique de la démocratie. Personne n'a le droit de déstabiliser une démocratie. Il s'agit donc là, en effet, d'une manière de vivre notre engagement politique. Le Premier ministre a réagi immédiatement, vous l'avez vu. Et on continuera.
Q - Réponse policière, refus de se laisser déstabiliser. N'y a-t-il pas aussi une troisième voie qui est, quand on regarde les terrains sur lesquels prospère le terrorisme, la stabilisation de ces terrains ou la neutralisation, avec la pauvreté, avec les situations de crises que l'on voit, en Irak, en Afghanistan ?
R - C'est le grand sujet ; c'est un sujet sur lequel le président de la République a donné sa vision, il y a une dizaine d'années, puisqu'il a été le premier à proposer cela.
Il n'est pas possible que l'on continue à voir tous les pays du Sud touchés par un fléau aussi important que le sida, qui est en train de tuer toutes les élites ! Et nous, continuer à fêter notre dix millième centenaire. Il y a un problème majeur qui va se passer. Ne pas le voir est égoïste et c'est surtout très bête ! Il est donc absolument fondamental, non seulement de jouer sur la dette, ce qui a été décidé au G8, mais, plus que sur la dette, il faut essayer de voir comment il peut y avoir une relation entre un modèle social, un système social dans un pays et le terrorisme. J'en ai parlé l'autre jour aux cinq pays du Sud Méditerranée, c'est-à-dire la Libye, la Mauritanie, l'Algérie, la Tunisie, le Maroc. Nous avons eu une discussion sans fard, sans collaborateurs, sans journalistes, comme cela, pendant deux heures. Je suis sûr qu'il y a là une manière pour nous, les Occidentaux, de travailler intelligemment, ne serait-ce qu'au niveau de l'OMC, ne serait-ce que de faire rentrer peu à peu ces pays dans le commerce international. Cela paraît peut-être idéaliste, mais c'est la solution, la seule solution.
Q - L'autre aspect, c'est essayer de pacifier un certain nombre de terrains déstabilisés, je pense à l'Irak, à l'Afghanistan, au Proche-Orient. Vous étiez aux Etats-Unis il y a encore 24 heures, vous avez rencontré Condoleezza Rice. Avez-vous le sentiment qu'il existe toujours un divorce très important entre l'approche américaine et l'approche française, ou est-ce qu'il des rapprochements ?
R - Il y a des rapprochements importants. J'en veux pour preuve, le discours que Condoleezza Rice a prononcé au Caire récemment dans lequel elle a parlé du respect des cultures, du respect des civilisations, et du fait qu'un pays peut être transformé progressivement vers la démocratie.
C'est un nouveau discours, c'est un discours sur lequel nous travaillons beaucoup ensemble, lorsque l'on parle du Liban par exemple, où la vision du président de la République est en train de s'imposer. Qui aurait dit, il y a un an, qu'il y aurait des élections libres au Liban ? Qui aurait dit qu'un Parlement, tranquillement, allait se prononcer pour un futur Premier ministre ? Nous avons parlé également de la Syrie, qui doit évidemment appliquer la résolution 1559. Il n'est pas question qu'un pays étranger, fût-ce la Syrie, puisse rentrer dans la vie politique du Liban ! Il n'est pas normal qu'il y ait des services de renseignement syriens au Liban ! Cela, c'est une fermeté de la France, mais c'est aussi une manière de concevoir le Moyen-Orient élargi. Et je trouve que les Américains sont en train de parler de plus en plus, comme nous, au niveau du Moyen-Orient élargi.
Q - Pas sur l'Irak ?
R - Sur l'Irak, nous avons aujourd'hui un état de fait. Mon homologue irakien souhaite, évidemment, avoir encore des troupes américaines pour l'instant. Mais il est bien évident qu'il y a un jour où ces troupes américaines vont quitter l'Irak, et c'est là le sujet. Je crois qu'il faut travailler sur la région et pas uniquement sur un pays. Nous, nous voulons que l'Irak reste souverain et que toutes les forces politiques soient capables, ensemble, de présenter une nouvelle Constitution.
Q - Vous avez évoqué l'Iran avec Condoleezza Rice. Là, sur l'Iran, n'y a-t-il pas une divergence de vues ? On a bien compris que les Etats-Unis ne trouvaient pas très légitime la manière dont s'était faite l'élection du nouveau président iranien. Vous, passez-vous outre les difficultés de cette élection et pensez-vous qu'il faut considérer comme légitime ce président ?
R - J'ai dit clairement que je regrette que tous les candidats n'aient pas pu se présenter. Je dis simplement que M. Ahmadinejad a été élu avec 62 % des voix.
Q - Et la question du nucléaire ?
R - C'est fondamental, c'est le problème de la prolifération nucléaire militaire. Donc, il y a là deux solutions : ou on ne parle pas avec eux, ou on essaie de négocier pour qu'ils ne construisent pas de bombe nucléaire. C'est ce que la France, les diplomaties française, mais aussi allemande et anglaise, ont décidé de faire. Donc, la diplomatie européenne est en avance là-dessus. Nous allons faire des propositions, nous allons négocier, parler diplomatiquement avec l'Iran, en leur demandant de suspendre toute activité nucléaire militaire. Après la proposition que nous ferons fin juillet début août - et j'y jouerai un rôle, bien sûr -, alors nous verrons ce que l'Iran nous dira. J'espère que l'Iran suspendra toute activité nucléaire militaire. C'est fondamental que, dans cette région-là, l'Iran, qui a signé le Traité de non-prolifération, puisse tenir sa parole.
Q - Vous voilà ministre des Affaires étrangères depuis un peu plus d'un mois, après avoir été ministre notamment de la Santé et de la Sécurité sociale, et d'autres choses qui n'avaient rien à voir avec les Affaires étrangères. Apprend-on vite ce nouveau métier ?
R - En tout cas, la seule chose qui compte ce sont les dossiers, c'est de travailler les dossiers. Et puis, bien sûr, c'est passionnant parce que, on le voit bien tous les jours, un pays n'est pas seul, n'est pas isolé ; un pays ne peut exister que par une vision politique qu'il peut bien évidemment partager avec d'autres. C'est cela les Affaires étrangères.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 juillet 2005)