Interview de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et président de l'UMP, à France-Info, depuis Londres, le 10 octobre 2005, sur la préparation du projet de loi contre le terrorisme et la coopération policière franco-britannique.

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Média : France Info

Texte intégral

Q - Bonsoir Nicolas SARKOZY.
R - Bonsoir, merci de m'inviter.
Q - Oui, en direct et en duplex de Londres avec un petit décalage satellite. Vous avez rencontré à Londres votre homologue ministre de l'Intérieur, Charles CLARKE, pour parler terrorisme. Comment, Nicolas SARKOZY, harmoniser les législations entre les deux pays comme vous dites ce soir vouloir le faire ?
R - On n'a pas simplement parlé, on a décidé d'agir. On va le faire de plusieurs façons. La première c'est que nous allons échanger nos différents projets de loi contre le terrorisme entre ceux que vont faire passer les Anglais dans quelques semaines et celui que je présenterai avant la fin du mois d'octobre en France de manière à harmoniser nos positions. Ce que nous voulons également c'est intensifier les échanges de renseignements entre eux et nous, renforcer notre collaboration opérationnelle. Le terrorisme ne connaît pas de frontières et les démocraties doivent se défendre, la montre des Anglais et des Français dans la lutte contre le terrorisme marque exactement la même heure.
Q - Nicolas SARKOZY, vous allez vous échanger les textes, dites-vous, mais la Grande-Bretagne, par exemple, a une garde à vue en matière de terrorisme qui est de 15 jours. Est-ce que cela veut dire que dans votre projet de loi d'ici la semaine prochaine il y aura six jours au lieu de quatre comme aujourd'hui, peut-être plus ?
R - Mieux que ça, la Grande-Bretagne a une garde à vue de 15 jours et ils envisagent de la porter à trois mois. Mais enfin il faut être honnête, la Grande-Bretagne ne connaît pas la détention provisoire, donc les comparaisons ne peuvent pas en rester à ce seul niveau. Mais enfin, dans la proposition que j'accepterai de porter la garde à vue de quatre jours à six jours pour avoir davantage de temps pour les magistrats de la lutte anti-terrorisme lorsqu'il y a des mouvements financiers internationaux, je me suis clairement inspiré d'un certain nombre de méthodes britanniques.
Q - Donc ce sera dans le texte de la semaine prochaine du projet de loi ?
R - Pareil pour la vidéosurveillance, la façon dont les Britanniques ont découvert les coupables de ces attentats monstrueux qui ont frappé Londres est tout à fait exceptionnelle, la vidéosurveillance y a joué un rôle considérable et il faut qu'en France nous puissions mettre la vidéosurveillance au service de la sécurité des Français et de la défense de nos libertés.
Q - Nicolas SARKOZY, après les attentats de Londres que vous évoquez, quel état réel de la menace pour la Grande-Bretagne, pour la France ?
R - L'état de la menace est extrêmement sérieuse si j'en veux pour preuve les dernières arrestations réalisées grâce au travail des policiers français, les dernières équipes qui ont été interpellées, un certain de gens ont été mis sous écrou, c'est-à-dire en prison, montraient clairement qu'il y avait des velléités de préparation d'un attentat futur en France.
Q - A propos de ces arrestations, la DST semble s'interroger sur une plante trouvée chez l'un d'eux, plante qui pourrait empoisonner au contact de la peau. Faut-il être inquiet de cette découverte ?
R - Oh, ce qui est inquiétant ce n'est pas tant telle ou telle découverte que je ne peux pas confirmer par ailleurs, ce qui est inquiétant c'est que nous avons démantelé une cellule dont les objectifs étaient clairement à terme d'organiser, de préparer un attentat en France. Et par conséquent notre vigilance est totale et complète et la collaboration entre les différents services de police en Europe doit être quotidienne. Je ne dis d'ailleurs pas simplement en Europe, c'est exactement ce que nous faisons avec un certain nombre d'autres pays, grandes démocraties, au pays du Maghreb.
Q - Un instant encore sur ces arrestations, Nicolas SARKOZY, que vous annonciez dans une émission télévisée enregistrée quelques jours avant la dite rafle, et vous le savez, certains vous reprochent d'utiliser cette lutte contre le terrorisme pour votre communication ?
R - Oui, enfin tout ceci est parfaitement ridicule, les arrestations ont lieu, elles ont eu lieu à temps, il n'y a plus aucune, d'ailleurs il n'y a que des polémiques un peu méprisables, vous savez, on ne joue pas avec la lutte contre le terrorisme, je suis en charge de la sécurité des Français, c'est un travail extrêmement difficile, et grâce à l'efficacité des services de police et des services de renseignements, on obtient tous les jours des résultats. C'est la seule chose qui importe et je crois que le moins que l'on puisse faire c'est de féliciter tous les services et l'action de la police française.
Q - Alors il y a une polémique qui dure depuis 10 ans entre la France et la Grande-Bretagne. Vous aviez demandé, enfin le gouvernement a demandé à plusieurs reprises l'extradition de Rachid RAMDA soupçonné dans les attentats de 95 à Paris, détenu en Grande-Bretagne depuis 10 ans. Est-ce que vous avez espoir, dans le nouveaux contexte britannique évidemment, de voir cette extradition intervenir rapidement ?
R - Nous avons parlé du cas de Rachid RAMDA avec le ministre de l'Intérieur anglais qui est extrêmement coopératif mais qui est soumis aux règles de droit en Angleterre. Une décision doit être prise par la cour d'appel anglaise dans quelques jours et en fonction de cette décision Rachid RAMDA pourra revenir ou pas en France. J'espère de tout cur qu'il pourra revenir pour rendre compte de ce qu'il a fait, être puni et être condamné.
Q - Mais vous êtes confiant sur cette décision ?
R - Je sais d'expérience qu'il vaut mieux attendre les décisions des cours de justice.
Q - Nicolas SARKOZY, vous deviez voir Tony BLAIR, la rencontre est reportée à ce soir, sans doute pas au 10 Downing Street, vous savez pourquoi ?
R - Non, non, mais je vois Tony BLAIR bien sûr, j'ai d'ailleurs eu Tony BLAIR au téléphone pas plus tard que samedi matin et je le rencontrerai ce soir. Le Premier ministre britannique souhaitait qu'on puisse se voir, je le connais bien, nous partageons beaucoup ensemble, c'est quelqu'un pour qui j'ai beaucoup de considération, et nous nous verrons donc. Il a souhaité donner un caractère plus amical et plus privé à cette rencontre, c'est plutôt sympathique.
Q - Peut-être aussi que les autorités britanniques essayent d'éviter de vous laisser endosser un habit de présidentiable ? Dans cette visite, certains disaient que vous soigniez votre image de présidentiable
R - Si vous considérez que je la soigne, écoutez, c'est votre responsabilité de commentateur. En ce qui concerne le Premier ministre britannique, je le connais bien comme je connais bien le chancelier de l'Echiquier avec qui j'ai parlé des différents enjeux économiques en Europe. Il est tout à fait normal qu'un responsable politique français souhaite savoir ce qui se passe dans le vaste monde et plus particulièrement en Europe. Il faut regarder aussi un certain nombre de pays qui réussissent. Et en ce qui concerne l'Angleterre, on est en situation de plein emploi, ils connaissent la croissance depuis 10 ans, ça ne veut pas dire qu'il faut faire exactement comme ils font, ça ne veut pas dire qu'un modèle est " plaquable " sur une autre réalité identitaire, en l'occurrence la réalité française. Mais peut-être qu'on peut être interpellé par le fait qu'ils connaissent le plein emploi.
Q - Alors justement, parlons de l'Europe en un mot avant d'aborder la France. Comment vous voyez la coalition droite/gauche finalement en Allemagne dirigée par la conservatrice Angela MERKEL ?
R - Je veux féliciter chaleureusement Angela MERKEL que j'ai eue au téléphone la semaine dernière parce que je crois que c'est une grande victoire pour elle, elle va être la première chancelière en Allemagne et elle porte beaucoup d'espoir, elle aura une responsabilité très lourde puisqu'elle se retrouvera à la tête d'une coalition. Enfin, je rappelle qu'à une ou deux exceptions près, depuis la guerre, l'Allemagne n'a jamais connu autre chose qu'un gouvernement de coalition, même s'il est vrai que cette coalition ira de la gauche à la droite. Mais je fais toute confiance à Angela MERKEL pour conduire les changements nécessaires en Allemagne et je lui adresse mes vux d'encouragement, l'UMP lui adresse son soutien, et à titre personnel je lui dis toute mon amitié.
Q - Nicolas SARKOZY, en France, c'est toujours le blocage à la SNCM. Va-t-on enfin sortir de cette crise ? Comment ?
R - Ecoutez, franchement, le gouvernement a proposé un plan de reprise qui est un plan de reprise de grande qualité et qui

Q - Il vous satisfait ce plan ?
R - Oui, il me satisfait parce que comme je l'avais proposé dès le premier jour, il pourrait y avoir une minorité de blocage entre l'Etat et les salariés, c'est exactement ce que je souhaitais, il n'y aura pas de licenciement sec, un certain nombre de garanties ont été prises. Alors il faut savoir maintenant si on veut sauver l'entreprise ou pas. Le gouvernement veux sauver cette entreprise, c'est à un certain nombre de leaders syndicaux de dire si oui ou non ils l'accepteront. Aujourd'hui, la position du pire elle conduira à la disparition de l'entreprise que tout le monde regrettera.
Q - Merci Nicolas SARKOZY.


(Source http://www.u-m-p.org, le 12 octobre 2005)