Déclaration de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur les priorités budgétaires pour 2006 et le pacte de stabilité et de croissance européen , à l'Assemblée nationale le 5 juillet 2005.

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Circonstance : Débat d'orientation budgétaire pour 2006 à l'Assemblée nationale Paris le 5 juillet 2005

Texte intégral

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, Jean-François Copé et moi-même sommes très heureux d'être ici, ce soir, pour introduire ce débat d'orientation budgétaire pour 2006 qui s'annonce particulièrement riche. Ce débat revêt cette année un caractère tout à fait exceptionnel puisqu'il s'agit du premier débat d'orientation budgétaire au format LOLF.
Le projet de loi de finances pour 2006 sera en effet le premier à être soumis à la pleine application de la loi organique du 1er août 2001 qui consacre notamment l'existence de ce débat d'orientation, permettant de mieux associer la représentation nationale aux choix budgétaires, ce dont je me félicite pour ce premier budget que Jean-François Copé et moi-même avons à la fois la charge - difficile - et l'honneur de construire.
Je voudrais d'abord vous livrer le diagnostic que je tire aujourd'hui du contexte économique qui est le nôtre. Après une année 2004 globalement satisfaisante pour l'économie française, où la croissance s'est stabilisée à 2,1 % contre seulement 1,7 % pour la zone euro, nous avons connu un premier trimestre 2005 décevant, avec 0,3 % de croissance, reflétant un ralentissement prononcé de l'activité industrielle, alors que les secteurs du bâtiment et des services ont continué de très bien se tenir.
L'économie française a d'abord pris de plein fouet l'impact de l'appréciation de l'euro autour de 1,30 dollar depuis la mi-2004. L'atonie de la demande intérieure chez nos deux principaux partenaires, l'Allemagne et l'Italie, ainsi que le ralentissement de l'économie britannique ont également pesé sur le dynamisme de nos exportations, qui ont même reculé en volume au premier trimestre pour la première fois depuis près de deux ans. Par ailleurs, la hausse prononcée du prix du pétrole, à près de 50 dollars le baril au premier trimestre, nous a fortement pénalisés. Ainsi que je l'avais indiqué devant la commission des finances, cette hausse a d'ailleurs incité les entreprises à déstocker plutôt qu'à produire, ce qui s'est traduit dans la consommation et la croissance du premier trimestre.
Je pense cependant que le pire est aujourd'hui derrière nous. D'abord, la dépréciation de l'euro, sous la barre de 1,20 dollar aujourd'hui - niveau nettement plus acceptable - devrait apporter un soutien bienvenu à nos exportations. Ensuite, les cycles des stocks et de l'électronique devraient rapidement s'inverser, réalimentant la demande mondiale. Enfin, grâce à la restauration de leur situation financière, les entreprises semblent aujourd'hui prêtes à investir. Ainsi, les entreprises industrielles interrogées par l'INSEE en avril continuaient de prévoir une croissance de leurs investissements de 4 % pour cette année, ce qui est plutôt encourageant par rapport à ce qui s'est produit au trimestre et même au semestre derniers.
Les signaux les plus récents montrent d'ailleurs qu'un rebond est déjà amorcé : la production industrielle en avril a progressé de 0,5 % et les enquêtes de conjoncture auprès des chefs d'entreprise se sont redressées en mai et juin. Je note par exemple que, sur la base de ces enquêtes, la Banque de France estime que la croissance au deuxième trimestre s'est élevée à 0,5 %.
La croissance devrait en tout cas retrouver son rythme annuel de 2 % ou 2,5 % au second semestre. Au total, sur l'année complète, le Gouvernement respectera son calendrier habituel et ne communiquera de nouvelles prévisions officielles qu'à la rentrée. Mais mon sentiment aujourd'hui est que nous pouvons encore espérer nous rapprocher de 2 % de croissance annuelle en 2005, si le cours du pétrole se replie, même si, comme j'ai eu l'occasion de vous le dire maintes fois, ce chiffre est plutôt devenu le haut de la fourchette de croissance envisagée.
Je reste toutefois très vigilant sur l'ampleur du " ciseau " à l'uvre entre le prix du baril et le cours de l'euro, c'est-à-dire l'effet amplificateur de la dépréciation de l'euro sur l'augmentation du prix du pétrole libellé en euros. Le marché pétrolier reste caractérisé par une forte croissance de la demande, une faiblesse record des capacités inemployées et un manque total de visibilité sur les perspectives de croissance de l'offre mondiale à court terme.
Voilà, mesdames et messieurs les députés, le diagnostic conjoncturel que je voulais partager avec vous aujourd'hui.
J'en viens ainsi naturellement à la situation de nos finances publiques. Après un déficit public de 4,2 points de PIB en 2003, puis de 3,6 points en 2004, le Gouvernement s'est donné l'an dernier l'objectif de revenir sous la barre des trois points cette année. Je veux ce soir faire le point devant vous sur l'exécution 2005 et sur notre capacité à atteindre cet objectif ambitieux qui reste le nôtre. Dans un contexte difficile, je ne le cache pas, nous devons nous battre et tout faire pour y parvenir.
Nous recevons ces jours-ci les toutes dernières informations concernant l'exécution du budget de l'État - recettes comme dépenses - jusqu'au mois de mai. Nos services sont en train de les retraiter et de les agréger pour parvenir à des résultats synthétiques jeudi.
Mais je crois pouvoir vous dire dès aujourd'hui que la situation mensuelle budgétaire à la fin mai devrait se révéler quelque peu décevante, le ralentissement conjoncturel récent, quoique passager, imprimant notamment sa marque sur ce début d'année. Pour autant, nous n'en sommes même pas à la moitié de l'année, et le rebond conjoncturel qui s'est déjà amorcé devrait se traduire par un regain de recettes fiscales au second semestre. De son côté, l'État fera sur le restant de l'année le maximum d'efforts pour maîtriser la dépense et traduire la volonté du Gouvernement de respecter ses engagements. Dans cet esprit, avec Jean-François Copé, j'ai proposé au Premier ministre, qui l'a accepté, de mettre en uvre une réserve de précaution supplémentaire de 1 milliard d'euros.
S'agissant d'abord des recettes, vous savez qu'elles sont pour partie directement liées à l'activité de l'année précédente. Or, comme je le signalais au début de mon intervention, il apparaît aujourd'hui que la croissance de l'année 2004 a été moins bonne que prévu et qu'il existe un aléa négatif sur ces recettes à " assiette décalée ", notamment celles de l'impôt sur les sociétés. Nous y sommes bien évidemment très attentifs, même s'il est encore trop tôt pour avoir une appréciation exacte de ces risques. Concernant l'impôt sur les sociétés, très volatil par nature, nous en saurons plus lorsque le montant de l'acompte de juin sera connu. Ce que je peux dire en revanche à ce stade, et Jean-François Copé y reviendra dans un instant, c'est que les recettes de TVA s'avèrent robustes, reflétant la bonne tenue de la consommation.
Dans ce contexte d'aléas sur les recettes fiscales, le Gouvernement porte une attention plus grande que jamais à la maîtrise des dépenses.
Les dépenses de l'État en 2005 doivent être exécutées " à l'euro près ", conformément à l'autorisation parlementaire, ce qui veut dire aussi en respectant la " norme zéro ".
Pour s'en assurer, le Gouvernement avait déjà constitué une réserve de précaution de 4 milliards d'euros dès le début de l'année, à laquelle s'ajoutera le milliard d'euros supplémentaire que je viens d'évoquer.
Par ailleurs, concernant les dépenses sociales, le comité d'alerte de l'assurance maladie vient de rendre un premier avis indiquant que les dépenses devraient pouvoir tenir l'objectif voté de ralentissement. C'est un signe encourageant, mais nous devons rester attentifs aux évolutions financières d'autres organismes sociaux qui pourraient grever nos finances publiques. Je pense bien entendu à la situation financière de l'UNEDIC, qui risque de payer le retard de la reprise de l'emploi sur le montant des cotisations perçues comme sur celui des prestations versées. Je pense également au Fonds de solidarité vieillesse et au Fonds des prestations sociales agricoles.
Je le redis avec force, nous devrons enfin surveiller attentivement l'évolution des finances locales, déficitaires l'an dernier pour la première fois depuis 1993.
J'en viens à ce qui nous occupe ce soir, à savoir les orientations du budget pour 2006.
Les priorités budgétaires traduisent on ne peut plus clairement les axes de la stratégie économique du Gouvernement.
Tout d'abord, l'emploi est au cur du budget pour 2006. Je suis convaincu qu'il n'y aura pas de retour durable de la confiance, donc de la croissance, sans une amélioration décisive sur le front de l'emploi.
Vient ensuite l'investissement dans la recherche et le développement, car je crois sincèrement que les priorités immédiates ne doivent pas nous empêcher de préparer l'avenir.
Enfin, la dernière priorité de ce budget est l'assainissement de nos comptes publics. Je commencerai par là, persuadé qu'il s'agit d'un facteur clé du retour de la confiance dans notre pays.
Nous n'avons pas d'autre choix, en effet, que celui de poursuivre l'amélioration de nos finances publiques, dans le but d'amorcer dès que possible la baisse de notre ratio d'endettement. Comme l'a indiqué le Premier ministre, nous présenterons dans le projet de budget pour 2006, pour la quatrième année consécutive, des dépenses qui n'évolueront pas plus vite que l'inflation : c'est le " zéro volume ". Nous devons faire de gros efforts pour respecter nos engagements externes, mais surtout pour assainir notre situation financière interne - je parle du niveau inadmissible de notre dette publique.
La dette publique représente actuellement 1 067 milliards d'euros. De 20 % du PIB en 1980, elle est passée à 64,7 % en 2004. Ceci résulte essentiellement de l'augmentation de la dette de l'État, qui atteint aujourd'hui plus de 51 % du PIB, soit 840 milliards d'euros.
Ces chiffres atteignent de tels montants qu'ils finissent par devenir abstraits pour nos concitoyens. Ce n'est pas normal, car il s'agit d'un problème majeur pour le pays. Mesdames et messieurs les députés, nous avons collectivement un devoir de pédagogie. La dette atteint aujourd'hui plus de 17 000 euros pour chaque Française et chaque Français. Plus frappant encore : la charge annuelle du seul paiement des intérêts représente quasiment le produit de l'impôt sur le revenu. Contrainte de payer le poids croissant du passé, la société française se prive progressivement des moyens d'investir dans l'avenir.
Nous devons d'urgence inverser cette logique. Cela suppose d'agir dans deux directions : réduire année après année notre déficit public, mais aussi retrouver le chemin de la croissance en déverrouillant notre économie et en travaillant plus.
Je souhaite pour ma part que la dette publique soit l'objet d'un grand débat national, approfondi et transparent. Chacun de nos concitoyens doit comprendre la situation actuelle et surtout évaluer les moyens de la gérer. C'est essentiel pour la confiance collective, donc pour la croissance.
C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à Michel Pébereau de conduire une mission pour éclairer l'opinion ainsi que les responsables politiques sur l'ensemble des questions soulevées par la dette publique. Je souhaite que cette mission puisse mettre en évidence les conditions dans lesquelles la dette publique actuelle s'est constituée et identifier les bonnes et les mauvaises pratiques, de manière à mieux nous guider à l'avenir.
La mission me remettra son rapport à l'automne et je ne manquerai pas de venir en discuter les conclusions avec vous.
Mesdames et messieurs les députés, une certaine rigueur de gestion budgétaire ne signifie pas pour autant l'immobilisme budgétaire, bien au contraire ! Le projet que nous vous soumettons ce soir, Jean-François Copé et moi-même, ménage les priorités du Gouvernement.
Notre priorité première est naturellement l'emploi : toutes les marges de manuvre qui seront dégagées dans le projet de budget pour 2006, c'est-à-dire 4,5 milliards d'euros, lui seront consacrées.
Je voudrais insister sur trois paquets de mesures dont le Gouvernement attend plus particulièrement des résultats rapides sur l'emploi.
Il s'agit d'abord de poursuivre la baisse des charges sur les entreprises.
Les allégements de charges sociales sur les bas salaires seront préservés afin de garantir aux entreprises la stabilité des règles du jeu, ce qui représente pour l'État un manque à gagner de recettes supplémentaires de l'ordre de 2 milliards d'euros.
Je suis très attaché à cette stabilisation, chère au rapporteur général. L'instabilité est en effet un facteur d'insécurité pour les entreprises et les dissuade d'embaucher.
À cet effort important s'ajoute celui fait sur les charges financières pour lisser l'effet de seuil de dix salariés. Ce seuil m'est toujours apparu comme l'archétype du seuil artificiel et il est très pénalisant financièrement pour la croissance de la petite entreprise. Le lissage financier de cet effet de seuil entre dix et vingt salariés est une mesure à laquelle je crois profondément et qui était attendue par des dizaines de milliers d'entreprises. C'est pour Jean-François Copé et moi-même le type même de la démarche pragmatique que nous devons développer dans notre approche des blocages du marché du travail.
Ensuite, les moyens alloués au ministère de l'emploi garantissent le financement des mesures annoncées par le Premier ministre, qui visent à mieux accompagner les travailleurs les plus fragiles : ils autorisent 250 000 entrées en contrat d'avenir et 120 000 entrées en contrat d'accompagnement dans l'emploi, dont 100 000 jeunes sans qualification. Un effort accru est également consenti pour l'apprentissage.
Enfin, deux primes spécifiques sont créées dans le but d'encourager à la reprise d'un emploi. La première, d'un montant de 1 000 euros, est versée aux jeunes qui entrent dans des métiers connaissant des difficultés de recrutement. Elle sera financée dans les mêmes conditions que la prime pour l'emploi, c'est-à-dire qu'elle se traduira par une moindre recette. La seconde prime sera versée aux chômeurs de longue durée bénéficiaires de minima sociaux afin de compenser les coûts du retour à l'emploi. Je rappelle qu'il y a aujourd'hui 870 000 chômeurs de longue durée. Les modalités de versement de cette prime, vous le savez, sont encore en discussion.
Je suis pour ma part très favorable à ce type d'incitation à la reprise d'activité. N'hésitons pas à envoyer un signal clair à nos concitoyens, sous forme de primes, pour leur montrer que le travail paie plus que l'assistance.
À ce titre, un autre type d'incitation à la reprise d'un emploi mérite d'être promu. La situation du marché du travail français est en effet paradoxale : un chômage de masse coexiste avec d'importantes difficultés de recrutement. Le nombre de recrutements difficiles en France est estimé à plus de 500 000, ce qui est considérable. Ce chiffre élevé est sans doute à rapprocher d'un manque de mobilité spécifiquement français : en 2000, 88 % de nos compatriotes vivaient au même endroit que dix ans plus tôt, et ce taux dépasse 90 % dans les régions où le chômage est particulièrement élevé.
C'est pourquoi, d'ici au mois de septembre, des mesures fiscales destinées à lever les obstacles matériels à la reprise d'un emploi seront proposées : le relèvement de l'avantage fiscal pour la garde des enfants, d'une part, une aide à la mobilité géographique, d'autre part. Sur ce dernier point, j'ai fait mettre à l'étude la possibilité d'une aide fiscale pour tout chômeur de longue durée ou victime d'un plan social qui reprendrait un emploi à plus de 200 kilomètres de son ancien domicile. Je ferai des propositions en ce sens au Premier ministre dans le cadre du projet de loi de finances, en accord avec Jean-François Copé.
Enfin, comme l'a annoncé le Premier ministre, un certain nombre de pistes vont être mises à l'étude, soit au sein d'instances de concertation existantes, comme pour le travail des seniors, soit dans le cadre du futur conseil d'orientation pour l'emploi, en ce qui concerne la sécurisation des parcours professionnels et les relations juridiques entre employeurs et employés. Ces propositions, qui seront étudiées sans tabou, pourraient avoir des conséquences financières et à ce titre rejoindre le projet de loi de finances pour 2006.
Les autres priorités seront détaillées par Jean-François Copé. Je les mentionne rapidement pour mémoire. Le budget s'attachera aussi à consolider l'effort de restauration de notre État régalien en ce qui concerne la défense, la sécurité et la justice. Le Gouvernement souhaite également continuer à préparer la France aux défis de demain ; c'est tout l'enjeu d'un effort accru de recherche et développement dans les entreprises privées, pour lequel l'État doit jouer un rôle central de catalyseur. Enfin, le budget pour 2006 devra concourir à maintenir la place de la France dans le monde, notamment grâce à une nouvelle progression des montants consacrés à l'APD ; ils atteindront 0,47 % du PIB en 2006, ce qui constitue une nouvelle étape vers nos objectifs de 2012.
Au-delà de la construction du budget pour 2006 et de ses priorités, je voudrais m'arrêter un instant sur le nouvel environnement de gouvernance de nos finances publiques qui caractérise ce budget.
S'agissant d'abord, au niveau européen, du pacte de stabilité et de croissance, je sais que, pour certains, la réforme sur laquelle les chefs d'État et de gouvernement se sont accordés est trop dure, tandis que d'autres la jugent trop laxiste. Pour ma part, je l'ai défendue au nom de la France, et je peux vous assurer qu'elle apporte certes une véritable souplesse à un cadre critiqué pour son uniformité et l'application mécanique de ses règles, mais qu'elle va en même temps dans le sens d'une plus grande incitation à la vertu budgétaire.
Cette réforme déplace en effet l'équilibre vers plus de logique économique - ne pas ajouter aux difficultés conjoncturelles, mais inciter à faire plus quand tout va bien - et donne à ses mécanismes de surveillance un fort caractère d'incitation aux réformes de structure. Et cela sans toucher, bien entendu, aux ancrages nominaux prévus par le traité, à savoir les critères de 3 % pour le déficit et de 60 % pour la dette. Elle permet en outre de mieux prendre en compte les investissements d'avenir ou porteurs d'effets bénéfiques pour l'ensemble de la zone euro. Je n'hésite donc pas à redire que cette réforme fait le pari de l'intelligence et de la vertu budgétaire sur la bureaucratie et l'application brutale de règles.
En ce qui concerne la gouvernance économique au sein de la zone euro, permettez-moi d'ajouter qu'il nous faut aller au-delà de ce pacte rénové et travailler à une meilleure coordination entre nous - je pense notamment à la politique de change ou encore à la politique énergétique ou de recherche - de sorte à peser davantage sur notre environnement économique et financier. De ce point de vue, il est important de pouvoir renforcer l'avancée essentielle qu'a constituée, pour la représentation externe de la zone euro, l'élection pour deux ans du président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Junker.
Sur le plan interne, il y a bien sûr la LOLF. Je laisserai Jean-François Copé vous détailler cette nouvelle procédure, mais je veux insister sur son caractère extrêmement vertueux en termes de réforme de l'État. Comme vous le savez, à partir de l'année prochaine, chaque chef de mission budgétaire, c'est-à-dire chaque centre de dépenses, aura la capacité de récupérer les gains de productivité qu'il aura réalisés, au lieu de les voir rejoindre un pot commun dont il ne voit pas le retour. Plutôt que de décider en haut des réductions d'effectifs ou des économies de gestion que chacun devrait réaliser a priori, ce mécanisme constitue une puissante incitation à les réaliser a posteriori, au plus près du terrain et sans crainte de se voir spolié des économies dégagées.
C'est un virage à 180 degrés par rapport au passé, et qui, j'en suis certain, portera ses fruits.
Prenons le cas des réductions d'effectifs : elles n'ont pas nécessairement vocation à devenir des objectifs a priori ! Ce que nous recherchons avant tout, c'est un service public plus efficace. Il est préférable d'inciter les administrations à réaliser des gains de productivité, ce qui devrait naturellement les conduire à des réductions d'effectifs supplémentaires, puisque les gains budgétaires réalisés seront récupérables.
C'est notre pari pour 2006, et je vous donne rendez-vous à la fin d'exécution du budget pour faire le bilan.
Enfin, je citerai la réforme des lois de financement de la sécurité sociale, qui va leur donner plus de lisibilité et de crédibilité. Cette réforme devrait permettre de mieux articuler les décisions portant sur les finances sociales et les arbitrages globaux de finances publiques.
Dans ce contexte, la situation de gestion des collectivités locales n'apparaît que plus originale. Elles sont aujourd'hui complètement déconnectées des contraintes générales des finances publiques. Il semble donc logique d'amorcer une réflexion concernant l'impact de leurs décisions sur l'équilibre général des finances publiques.
Des instances d'information réciproque et de concertation renforcée entre État et collectivités locales doivent pouvoir répondre à ces enjeux. Je pense notamment à une conférence nationale des finances publiques qui exposerait et détaillerait, chaque automne par exemple, les principales hypothèses retenues dans le schéma pluriannuel de finances publiques, permettant ainsi à chaque acteur d'identifier les moyens à mettre en uvre pour respecter les engagements européens de la France en termes de solde budgétaire et de dette. Cette conférence réunirait les principaux acteurs des finances publiques - l'État, les collectivités territoriales, les régimes sociaux - et devrait, bien entendu, associer les parlementaires. Je serais d'ailleurs heureux de recueillir votre sentiment sur ce point.
Voilà, mesdames et messieurs les députés, ce que je voulais vous dire pour introduire ce débat d'orientation budgétaire pour 2006. Je vais maintenant laisser la parole à Jean-François Copé, qui vous présentera en détail les grandes orientations du budget. Je vous indique que je serai obligé de vous quitter vers vingt-trois heures pour me rendre au Sénat.
(Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 12 août 2005)