Déclaration de M. François Hollande, premier secrétaire du PS, sur le résultat négatif au référendum sur la Constitution européenne et ses conséquences pour le gouvernement et le parti socialiste, Paris le 29 mai 2005.

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Circonstance : Déclaration après la publication des résultats electoraux du référendum du 29 mai 2005

Texte intégral


La France vient de dire " Non " au Traité constitutionnel.
Le résultat est d'autant plus net que nos concitoyens ont participé massivement à cette consultation.
C'est une décision politique majeure, et elle nous engagera pour longtemps. Elle est grave pour l'Europe qui risque d'être privée, pour longtemps, du cadre institutionnel nécessaire à son fonctionnement et à son élargissement.
Mais ce vote traduit surtout l'ampleur de la crise profonde que traverse notre pays.
Les Français ont, en effet, exprimé une nouvelle fois à cette occasion -même si ce n'était pas le moment, à nos yeux, de le faire, ils l'ont fait- leur colère et leur exaspération à l'égard d'un Chef de l'Etat qui non seulement a froissé tous ses engagements, mais a refusé d'entendre les messages qui lui avaient été adressés -notamment lors des élections régionales, cantonales et européennes du printemps dernier. Exaspération et colère aussi à l'égard d'un Premier ministre dont la politique est une suite d'échecs et dont l'intervention dans le cadre de la campagne référendaire a été une suite de contre vérités et de contre production.
Le rejet du Traité, c'est donc d'abord le rejet du pouvoir. Les Français ont traduit, à travers ce vote que je regrette mais qui est là, leur insatisfaction par rapport à la situation économique et sociale, le chômage qui ne cesse de progresser, le pouvoir d'achat qui ne cesse de se réduire. Ils ont exprimé leur inquiétude par rapport à l'avenir, dont l'Europe a été injustement considérée comme responsable.
Les socialistes, et j'en suis fier, au nom de leurs engagements européens, de leur solidarité avec l'ensemble de la gauche européenne et surtout du vote que leurs adhérents avaient exprimé dans une consultation interne, ont fait le choix de la vérité sur le Traité constitutionnel, de la cohérence, de la sincérité, en dissociant le texte du Traité du contexte de politique intérieure. Ils n'ont pas à le regretter ; ils ont simplement à tenir compte d'un vote qui est intervenu et qui traduit le malaise profond que vit notre pays.
Les socialistes ont eu d'autant plus de mal -je le reconnais- à se faire entendre que leur Parti s'est divisé, certains s'affranchissant de la règle commune.
Il faut donc tirer toutes les conclusions de ce qui vient de se produire :
La droite est aujourd'hui incapable d'offrir une perspective au pays. Sa politique a échoué. Il n'y a pas d'inflexion à attendre du discours de Jacques Chirac ce soir. Il y aura un changement de gouvernement, mais nous n'avons aucune illusion sur le gouvernement qui succèdera à celui de Jean-Pierre Raffarin. Il poursuivra la même politique, hélas, avec les mêmes résultats. Il n'y a rien à attendre non plus de la déclaration de candidature de Nicolas Sarkozy. C'est la même politique que celle de J.-P. Raffarin, même si elle s'appelle celle de N. Sarkozy. C'est à la gauche donc, à celle qui a voté " Oui " comme à celle qui a voté " Non ", de se retrouver sur un projet crédible et mobilisateur ; c'est à la gauche de se préparer pour le changement, le vrai changement, le seul possible.
Les socialistes qui ont tenu courageusement le cap sur leur conviction doivent se rassembler, désormais, sur les orientations qui sont les leurs et sur une stratégie qui évite le double discours, les désillusions et les incantations sans lendemain. Leurs adhérents doivent avoir leur dernier mot sur les choix à venir ; et j'en prends ici l'engagement.
Enfin, il y a l'Europe. Elle ne doit pas être victime du désordre intérieur français, de la droite française et du malaise profond de notre pays. Elle doit redevenir une espérance pour les peuples et non une source de méfiance. Là encore, c'est aux socialistes -socialistes français, socialistes européens- d'être au rendez-vous de ce grand défi du continent, aux socialistes français d'être là pour leur pays pour lui donner une perspective, un sens, une direction, un espoir et de faire, demain, gagner la gauche sur un projet qui devra être crédible, mobilisateur et sincère.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 30 mai 2005)