Déclaration de M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur la promotion de la consommation de viande, sur le renforcement de la compétitivité de cette filière de production, la défense des industries de la viande dans un monde de concurrence, Paris le 27 septembre 2005.

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Circonstance : Assemblée générale du Syndicat national de l'Industrie des Viandes à Paris le 27 septembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de participer à votre assemblée générale et vous remercie de votre invitation. Je salue le rôle majeur joué par vos entreprises dans l'économie et l'emploi de notre pays puisqu'elles représentent aujourd'hui le tiers des industries agroalimentaires (IAA) de France. Je vous remercie, aussi, pour votre rôle très actif dans l'élaboration du Partenariat national pour le développement des IAA (PNDIAA). Il apporte un certain nombre de réponses à vos préoccupations et doit entrer désormais dans une phase opérationnelle.
Votre profession tient une place décisive au sein de la filière agricole d'élevage. Vous participez directement à la valorisation et à la transformation de la production agricole, et détenez, pour partie, les clés de la culture du plaisir associée à l'alimentation chez nos compatriotes.
Votre filière a connu des périodes plus difficiles. Le temps des grandes crises sanitaires n'est plus d'actualité et nous devons nous en réjouir. Des signes positifs sont perceptibles pour l'avenir de votre filière :
- le marché tout d'abord s'est redressé retrouvant les niveaux de 2000/2001, grâce aux efforts de tous et notamment d'INTERBEV. Pourtant, sur le long terme, elle connaît une lente érosion. Il en résulte une situation délicate, en particulier pour le milieu de la filière, pris sous la pression de la distribution et celle de la baisse des volumes ;
- l'action du Gouvernement permet d'assurer un approvisionnement compétitif grâce aux soutiens couplés garantissant une offre satisfaisante. Les aides liées au plan bâtiments soutiennent aussi cette offre. Au total, les aides pour les viandes de boucherie, représentent ¼ de l'ensemble des aides publiques aux investissements accordées aux IAA ;
- enfin, le Partenariat national pour le développement des industries agroalimentaires apporte des moyens pour rendre attractifs l'emploi dans vos entreprises, priorité du Gouvernement, et vous accompagner à l'export.
J'aborderai trois défis que nous devons relever ensemble :
- notre action nécessaire et conjointe pour soutenir la consommation ;
- les éléments sur lesquels nous devons agir pour renforcer la compétitivité de votre filière ;
- notre ambition partagée de créer de l'emploi et de s'inscrire sans faiblesse dans un monde de concurrence.
I - L'action de l'interprofession est essentielle pour soutenir la consommation de viande et nécessaire pour la promotion d'une alimentation variée et équilibrée
I - 1 L'organisation économique constitue un des enjeux pour développer votre marché et viser des actions ciblées en direction des consommateurs
L'interprofession reste un outil irremplaçable et je souhaite saluer en particulier le travail réalisé par INTERBEV comme par INAPORC. La future loi d'orientation agricole renforce leurs missions. Elles seront étendues notamment en direction de la gestion des crises conjoncturelles, de la veille anticipative des marchés ou encore de la recherche de nouveaux débouchés. L'organisation des filières et le développement de relations commerciales contractualisées permettront une relation plus équilibrée entre l'amont et l'aval. Il appartiendra à chaque filière de préciser, autour de ces principes généraux, les mesures spécifiques qui lui sont propres.
La consolidation du dialogue et du partenariat entre l'amont et l'aval de la filière est un enjeu décisif pour l'avenir de votre secteur. Elle contribuera à une meilleure appréhension des marchés et à une promotion concertée et efficace des produits sur les marchés intérieur et extérieur. L'interprofession détient aussi la reconnaissance institutionnelle et la compétence technique pour renforcer la contractualisation entre les partenaires de la filière.
Par ailleurs, j'avais signé les dispositions encourageant l'amont et l'aval à mieux travailler ensemble : " les projets filières ". Cet outil a reçu un franc succès ; il témoigne du développement de démarches de structuration et de contractualisation nécessaires pour mieux valoriser les produits de la viande.
Je rappelle aussi que l'OFIVAL demeure un acteur essentiel pour favoriser la concertation entre professionnels et services de l'Etat pour faire émerger des solutions positives. Nous y sommes, comme vous, très attachés.
I - 2 Positionner les industries de la viande dans le cadre de la politique de l'alimentation
Nos concitoyens sont sensibles à leur nutrition, au bénéfice d'une alimentation saine et diversifiée, et à la présentation des modèles alimentaires traditionnels qui font la réputation de notre gastronomie.
La politique de l'alimentation que je souhaite mener a pour objectif de répondre davantage aux attentes et besoins du citoyen. Mais offrir une production saine, sûre et tracée, est l'affaire de tous : pouvoirs publics et professionnels.
Le dispositif de la qualité actuellement en vigueur doit pouvoir évoluer. Le projet de loi d'orientation agricole prévoit de simplifier les signes officiels de la qualité afin d'en améliorer la lisibilité et la crédibilité. Pour les industriels, cette démarche en accroîtra aussi l'accessibilité. Je partage votre souci de simplification et de lisibilité pour le consommateur ; j'étudierai avec mon collègue Renaud DUTREIL, responsable en matière de consommation, vos propositions concernant l'étiquetage.
Les filières " viande " sont des filières qui disposent en France de nombreux atouts pour s'inscrire dans de telles démarches de segmentation du marché. La traçabilité a été notablement améliorée au cours des dernières années. Votre secteur a été pionnier en la matière et est toujours cité en exemple. Cet effort, parfois lourd, est pourtant le garant de la confiance du consommateur dans vos produits. A cet égard, vous avez évoqué la décision du Royaume-Uni de réintroduire les bovins âgés de moins de 30 mois dans la chaîne alimentaire à partir du 7 novembre prochain. Je souligne que la commercialisation de ces produits sur le reste du territoire de l'Union européenne reste encore soumise à restriction. Je puis vous assurer que je suis particulièrement attentif à l'évolution de ce dossier.
Enfin, s'agissant du Paquet hygiène, dont l'entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2006, je serai attentif à se simplification et à sa lisibilité. J'ai veillé à ce qu'il n'ajoute aucune contrainte supplémentaire par rapport à la réglementation communautaire.
La variété des produits des filières viandes, transformés ou pour servir de base à des plats porteurs de la tradition gastronomique de notre pays dessine, en outre, une véritable carte des goûts de nos régions.
Ce sont des territoires et des hommes qui s'expriment et ont permis l'émergence et la valorisation de produits très spécifiques et reconnus. Renforcer ces démarches est de la responsabilité de chacun et je souhaite resserrer les liens entre les différents acteurs, y compris avec les consommateurs, dans un esprit de concertation et de responsabilisation de chacun.
La distribution joue un rôle important dans la valorisation des produits ainsi que dans la diffusion de messages à destination des consommateurs. Des travaux de formalisation d'un partenariat avec la grande distribution seront prochainement engagés : celui-ci pourrait prendre la forme d'un accord cadre, permettant de promouvoir nos produits en mettant en exergue la formation des agents, les relations clients - fournisseurs, entre l'amont des filière agricoles et alimentaires et la commercialisation des produits. L'ensemble de vos filières seront pleinement associées à l'élaboration de ce partenariat.
Monsieur le Président, vous avez évoqué la question de la viande hachée.
Sur l'étiquetage des critères de qualité, la France a obtenu de la Commission qu'elle propose leur maintien à titre transitoire ; ensuite, un nouveau texte sur l'étiquetage pourrait les pérenniser. Vous, les professionnels de la viande, avez largement contribué à cette évolution favorable, défendant ainsi à la fois la qualité des aliments et la protection du consommateur. Cette proposition n'a toutefois pas pu être adoptée le 23 septembre, en raison de l'opposition de 8 Etats membres. De nouvelles discussions interviendront en octobre et je vous engage à continuer à faire entendre vos arguments au niveau tant de la Commission que de vos partenaires dans les autres Etats-membres. Je ferai preuve de détermination sur ces discussions.
II - Mon action vise à renforcer la compétitivité de la filière, élément clé de son développement
II - 1 L'allègement des charges est une priorité
L'importance de votre filière en terme d'emplois, son rôle pour la valorisation des produits de l'élevage français et sa place dans l'économie de la nation rendent préoccupante la dégradation des comptes de vos entreprises.
C'est pourquoi j'ai fait de la baisse des charges l'une de mes priorités ; elle conditionne la pérennité de la filière viande français tout entière.
A cet égard, je voudrais dire que nous avons fait des progrès significatifs sur le dossier de l'équarrissage qui constitue l'un de vos sujets de préoccupation majeure.
Le volet charge ne doit pas masquer celui des prix.
Concernant la loi Dutreil et les prix de détail, j'ai noté votre demande d'inclure les viandes dans la liste des "produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production" pour lesquels la mise en place de remises, rabais et ristournes suppose un contrat écrit entre le fournisseur et le distributeur. Mes services travailleront dès maintenant à cette évolution en liaison avec ceux du Ministère des Finances.
II - 2 Après de longues négociations, le cadre général de l'équarrissage français et de son financement est construit
Au 1er octobre prochain, l'élimination des déchets des abattoirs relèvera désormais de relations contractuelles commerciales entre les équarrisseurs et vos entreprises.
La taxe sur les déchets finançant cette partie du service public d'équarrissage disparaîtra le 1er octobre prochain. Cette disposition contribue aussi à l'allègement des charges de vos entreprises. Néanmoins, le coût d'enlèvement des déchets existera toujours au 1er octobre. C'est pourquoi je veillerai, auprès de la distribution, à ce que le principe de répercussion de cette charge sur l'aval de la filière ne soit pas remis en cause. Le niveau de la taxe d'abattage sera fixé en 2006 une fois que nous connaîtrons les résultats des marchés publics. Même si j'espère que des évolutions positives pourront être enregistrées, la charge globale du service public d'équarrissage ne sera donc connue qu'à cette date.
Par conséquent, au 1er octobre, ce dernier sera recentré sur l'enlèvement des cadavres des seuls animaux de rente et des cadavres dont l'élimination relève de l'intérêt général. J'ai signé les décrets de libéralisation de déchets à l'abattoir.
Par la suite, au 1er janvier prochain, le périmètre sera réduit aux seuls animaux trouvés morts en exploitation et à l'intérêt général. Le lancement d'un appel d'offre de marchés publics concrétisera ce changement dans les prochaines semaines. Cette procédure, qui retient mon attention, doit se traduire par une diminution des coûts de collecte et d'élimination.
Je pense donc que nous sommes sur la bonne voie sur ce dossier difficile. L'équilibre entre la nécessité de maintenir le niveau de sécurité sanitaire et un financement supportable et équitable a été trouvé.
Parallèlement, mes services ont uvré pour réduire les écarts entre les réglementations nationale et communautaire concernant les valorisations des sous-produits animaux.
A ma demande, l'AFSSA vient de rendre un avis favorable à la valorisation des farines de ruminants dans l'alimentation des carnivores domestiques. Le cadre réglementaire sera actualisé en conséquence à brève échéance. Toujours dans cette perspective d'un rapprochement des règlementations, l'AFSSA examine d'autres dossiers relevant de l'application du règlement 999/2001 sur les EST, par exemple la valorisation de ces farines en fertilisants
L'entretien des stocks et l'élimination des farines animales entreposées depuis les années 2000 constitue également une priorité en raison de son coût très élevé pour l'Etat. J'ai chargé Jacques Brulhet, vice-président du Conseil général vétérinaire, d'une mission d'analyse et de proposition pour réduire dans les meilleures conditions cette charge pour l'Etat. Je ne manquerai pas de vous faire part des conclusions de cette expertise avant la fin de l'année.
La hausse des cours de l'énergie ouvre des possibilités de valorisation du stock de 700.000 tonnes de farines disponibles.
Le dispositif fiscal de soutien aux biocarburants végétaux peut inspirer cette démarche.
Le coordonnateur interministériel chargé de la valorisation de la biomasse devra faire des propositions en ce sens. Il pourra notamment examiner vos propositions concernant les huiles et graisses issues des sous-produits animaux et ne trouvant pas de débouchés dans la chimie ou l'alimentation.
II - 3 Engager l'avenir : la recherche et les pôles de compétitivité
La loi d'orientation agricole prévoit la révision de la loi sur l'élevage de 1966. C'est un enjeu important pour lequel la recherche, bien entendu la génétique animale, est engagée.
Les innovations issues de la recherche peuvent, en effet, offrir des solutions originales à certaines de vos questions. Je pense, notamment à l'alourdissement des carcasses qui handicape votre activité. La génétique peut fournir un élément de réponse.
Les pôles de compétitivité Viandes et produits carnés (Auvergne) et Aliments de demain (Bretagne) constituent une opportunité remarquable pour le développement de votre filière et je m'en réjouis. La politique du gouvernement illustre le rôle de facilitateur de l'Etat qui met en synergie la recherche et les producteurs pour innover et impulser une nouvelle dynamique de croissance.

III - Répondre aux défis de l'avenir : l'emploi et un contexte international nouveau
III - 1 Gagner la bataille de l'emploi est l'affaire de tous. Mais, au-delà de la compétitivité qui en est la condition, nous devons aussi valoriser l'emploi dans vos filières, travailler à son attractivité
Les industries des viandes ont déjà du mal à recruter du personnel qualifié malgré des efforts en matière de formation.
Le PNDIAA vise précisément à valoriser le gisement d'emplois dans l'agroalimentaire. Promouvoir les métiers et améliorer leur image auprès des jeunes constitue l'un de ses objectifs.
Dans cette perspective, une série de spots sur les métiers de l'agroalimentaire a été diffusée de façon à susciter de nouvelles vocations auprès des jeunes de 15 à 24 ans.
Nous nous mobilisons également avec différents partenaires et la profession pour attirer des jeunes et des demandeurs d'emploi en proposant des contrats d'apprentissage, des contrats issus de la loi de cohésion sociale ainsi que les contrats " nouvelles embauches ".
Le PNDIAA cherche aussi à renforcer l'adaptation des formations aux besoins des entreprises et à améliorer les conditions de travail et d'emploi.
Nous devons mieux préparer les salariés aux mutations économiques. C'est pourquoi une attention particulière sera portée à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ainsi qu'à la formation. Une convention sera signée avant la fin de l'année.
III - 2 La négociation à l'OMC est difficile mais nous sommes déterminés à défendre nos intérêts en rappelant à la Commission son mandat quand c'est nécessaire
Monsieur le Président, vous évoquez ma rencontre le 30 septembre avec la Commissaire européenne, Madame FISCHER-BOEL. Ce sera l'occasion de renouveler le fondement du mandat confié : les représentants européens ne doivent pas sortir des clous de la réforme de la PAC qui est notre contribution à la négociation.
Par ailleurs, l'Union européenne a obtenu, par l'accord conclu à Genève en août 2004, la possibilité d'un traitement particulier pour les produits sensibles : les réductions de droits à l'importation seront moindres que celles qui seront imposées au titre de la formule générale, mais des contingents tarifaires devront être ouverts en contrepartie pour ces mêmes produits. Le nombre de produits sensibles sera limité. Le bétail vif en première analyse, semble présenter moins de sensibilités à la baisse des droits que les découpes fraîches ou congelées.
J'ajoute que, dans ce contexte mondial, nous devons tout faire au niveau européen pour préserver les courants traditionnels d'échange et, en l'occurrence, la vocation exportatrice de l'Union européenne et de la France. Le renforcement des conditions sanitaires et des contraintes environnementales associées à la mise en place de la traçabilité accroissent les coûts de production. Nous devons valoriser ces atouts sur les marchés internationaux.
CONCLUSION
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,
Votre activité est essentielle pour valoriser la production de l'ensemble de la filière. Je souhaite que vous puissiez prendre toute votre part dans la mise en uvre du PNDIAA, notamment grâce aux outils disponibles pour l'exportation. Il en va du dynamisme de l'ensemble des producteurs mais aussi de l'emploi auquel vous contribuez particulièrement sur l'ensemble du territoire. Vos entreprises sont également concernées par les dispositions plus générales en faveur de l'emploi et du développement économique mis en uvre par le Gouvernement.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 28 septembre 2005)