Texte intégral
Cher(e)s Camarades,
C'est un honneur pour le Premier secrétaire du Parti socialiste que de venir dans les Cotes d'Armor parce que, s'il y a une terre socialiste et républicaine, c'est bien celle-là.
Vous avez voulu mettre l'accent sur les questions de l'emploi. Je voudrais vous dire, avant, que je viens souvent dans les Cotes d'Armor. J'y étais venu le 1er mai 1997, la dissolution venait d'être prononcée par Jacques Chirac. Nous ne savions pas véritablement où nous allions nous engager, parce que nous prêtons toujours plus à J. Chirac qu'il ne peut donner et nous pensions que s'il avait fait la dissolution, c'était pour son bien. Une chose est sûre : c'était pour le bien des Français puisque nous avons pu obtenir la majorité de l'Assemblée nationale. Mais, je me souviens d'une grande manifestation qui, déjà, annonçait nos succès.
Je suis revenu plusieurs fois, et notamment à Lamballe -il y a plus d'un an au moment des élections régionales. Il y avait du monde. Cette réunion m'avait convaincu, avant même que les électrices et les électeurs ne se soient prononcés.
À vous voir aussi nombreux aujourd'hui, je veux y voir un présage. À mon avis, on va gagner les élections en 2007.
Les Français sont inquiets pour de multiples raisons : pour accéder au logement, pour donner un avenir à leurs enfants, pour leurs services publics qui sont menacés. Mais, leur première inquiétude, leur première angoisse, c'est d'abord pour leur propre emploi. Vous avez voulu consacrer votre journée à l'alternative qui doit être la nôtre sur la question de l'emploi. En effet, s'il y a un échec majeur des gouvernements depuis 2002, c'est bien sur la question du chômage et de l'emploi.
Nous ne sommes pas dupes des chiffres qui sont publiés depuis plusieurs mois et qui laisseraient penser qu'il y aurait une diminution du nombre de demandeurs d'emploi, quand tout indique -hélas- à travers les annonces de plans sociaux, de licenciements, que la situation de l'emploi se dégrade. Comment sont-ils parvenus à diminuer les statistiques ? Ils ont trouvé une méthode : pour supprimer le chômage, il suffit de supprimer les chômeurs. On fait des radiations, on contrôle les chômeurs, on les décourage, on les stigmatise, on les accuse même ; s'il y a du chômage, c'est de leur faute ! Parce qu'ils ne trouvent pas de travail, parce qu'ils ne veulent pas travailler ! Donc, la meilleure des façons est de ne plus les considérer comme des demandeurs d'emploi.
On a aussi trouvé une méthode qui consiste à fournir des contrats aidés, ceux-là mêmes que nous avions supprimés dès 2002, mais pas pour 5 ans, pas pour un travail à temps plein, non, pour du temps partiel payé bien en dessous du SMIC et pour deux ans à peine. Tiens, pourquoi deux ans ? Parce qu'il y aurait des élections en 2007 et qu'il serait peut-être intéressant de faire baisser statistiquement le chômage !
Il y a deux réalités incontestables en matière de chômage et d'emploi :
Aujourd'hui le nombre d'emplois dans notre pays est exactement le même que celui qui existait en 2002. Cette majorité, ces gouvernements n'ont pas créé un seul emploi supplémentaire depuis 2002. Il y a eu autant d'emplois créés que d'emplois détruits. De 1997 à 2002, lorsque nous étions en responsabilité avec Lionel Jospin, nous avions créé 2 millions d'emplois. Il ne nous reste plus qu'à faire les comptes : 2 millions d'un côté, rien de l'autre. Et, pendant ce temps-là, 150 000 à 200 000 personnes qui arrivent chaque année sur le marché du travail -des jeunes, des moins jeunes, des femmes qui veulent retourner au travail après avoir éduqué leurs enfants- attendent en vain un emploi. Voilà pourquoi le chômage ne cesse de progresser depuis deux ans et demi.
Aujourd'hui, le nombre d'heures travaillées, en France, est inférieur à ce qu'il était en 2002. Cela veut dire que l'on a procédé à une réduction de la durée du travail à travers une montée du chômage. Cela veut dire qu'il y a des Français qui voudraient travailler, mais qui ne le peuvent pas et qui travaillaient lorsque nous étions au gouvernement. A droite, ils voudraient nous faire croire qu'ils valorisent le travail, qu'ils réhabilitent l'effort, qu'ils récompensent la réussite ! Mais, quand on ne donne pas le droit à l'emploi, on décourage le travail, on abîme l'effort et l'on ne récompense pas la réussite.
Quand on fait ce constat, on a des raisons de s'inquiéter. On s'inquiète parce que ce sont les plus jeunes qui sont victimes de cette politique-là. Un jeune sur quatre est au chômage. Et ce sont aussi les plus âgés qui en sont victimes. Car, au-delà de 50 ans déjà, on est considéré comme aillant rendu service dans l'entreprise, n'étant plus comme assez productif, alors même qu'on a allongé la durée de cotisation et supprimé -en définitive- le droit au départ à 60 ans. Mais, ce sont aussi les femmes qui sont les premières victimes de cette exclusion sociale. Et la précarité, elle, ne cesse de s'élargir. 70 % aujourd'hui des créations d'emplois se font en contrat à durée déterminée ou en intérim ! Et nous parle maintenant du succès du Contrat Nouvelle Embauche ; ce contrat qui permet à l'employeur de se séparer de son salarié dans le délai de deux ans juste en lui envoyant une lettre !
Il y a tout à craindre de ce succès car, que signifie-t-il ? Aujourd'hui, pour un employeur de moins de 20 salariés, le CNE sera en effet la seule forme de recrutement. Pourquoi recourir à un CDI ou un CDD avec leurs contraintes, et même à l'intérim qui suppose de payer un certain nombre de surcoûts ? Là, il s'agit d'employer quelqu'un juste pour le temps d'une activité, sans avoir à verser la moindre indemnité, sans avoir à supporter la moindre contrainte, la moindre obligation. Voilà pourquoi la précarité est devenue la règle et la sécurité du travail l'exception.
Cette politique a un coût pour celles et ceux qui en sont victimes, mais elle a aussi un coût pour la Nation. Ce résultat-là n'est pas le produit du hasard, d'une conjoncture malheureuse, de la hausse du prix du pétrole qui frappe tous les pays du monde. C'est une politique qui a été voulue, décidée par les gouvernements successifs et qui, aujourd'hui, aboutit à ce que la croissance soit l'une des plus faibles d'Europe, à ce que le pouvoir d'achat soit altéré, à ce que la compétitivité des entreprises soit dégradée faute d'investissement, les déficits creusés, à ce que le déficit du commerce atteigne des niveaux records, la dette publique qui va atteindre -elle aussi- 70 % de la richesse nationale. Et l'on va verser en service d'intérêt de la dette autant que nos impôts sur le revenu ou ce qu'il en restera dans quelques années ! Voilà le résultat de cette politique fondée sur des choix qui ont commencé par supprimer les 35 heures -ce fut la première loi Fillon en 2002, puis supprimer les emplois jeunes, puis diminuer le nombre de contrats aidés qui permettaient à tant de ceux qui étaient éloignés de l'emploi de pouvoir un moment y revenir. On a bien sûr réduit le nombre de fonctionnaires, abrogé la loi de modernisation sociale qui permettait quand même -votée en 2001- d'avoir sur les plans sociaux quelques contraintes sur les entreprises qui faisaient beaucoup de bénéfices tout en se séparant de leur personnel.
Quand on voit aujourd'hui le Premier ministre prétendre, muni de son épée de bois, qu'il va retirer des aides à Hewlett Packard, alors même qu'il n'y a eu aucune aide versée à cette entreprise ! Quand on l'entend affirmer qu'il va y avoir des contrôles, alors même que le jour où il prononçait cette menace il supprimait la Commission qui justement avait été chargée de la vérification des aides publiques aux entreprises et même l'organisme qui était chargé de préparer les restructurations et de suivre les salariés victimes de ces plans sociaux Double langage. Il n'y a plus aucune organisation aujourd'hui, aucune structure permettant d'aider les territoires frappés par les plans sociaux.
Nous avons aussi ce démantèlement de tous les moyens de l'Etat. Chaque fois qu'il est possible d'empêcher l'intervention de l'Etat, les Libéraux s'emploient effectivement à liquider tout mécanisme de contrôle des entreprises, de pression sur les employeurs. Et le résultat est là.
Aujourd'hui, il faut être sévère dans nos critiques et ferme dans notre position. Protester, résister, contester face à un gouvernement qui échoue n'est pas le plus dur à faire, c'est à la portée d'une grande famille politique comme la nôtre. Mais nous pouvons faire mieux. Ce qui est attendu de nous, c'est de faire des propositions, d'ouvrir une perspective, de lever l'espoir, d'offrir un projet.
Nous avons évoqué l'emploi, mais que dire que la protection sociale qui est elle aussi atteinte, où aujourd'hui avec le déficit de la sécurité sociale, il va y avoir de nouveaux déremboursements de médicaments, où il va y avoir sur la retraite la perspective de lever de nouvelles cotisations, parce qu'il y a crise du régime de répartition.
Il y aussi la politique fiscale. Ce sera sûrement un sujet majeur de clivage entre la droite et la gauche. Nous avons eu les annonces -par le gouvernement Villepin- d'une grande réforme de l'impôt sur le revenu et même de l'impôt sur les successions avec une double manipulation :
La première consiste à nous dire que nous allons avoir une baisse d'impôt, mais en 2007. Ah ! en 2007 ! Il faut peut-être les informer du fait qu'ils ne seront plus au pouvoir en 2007, enfin si les électeurs décident de nous mettre à leur place ! Car, tout de même, il y a une élection présidentielle prévue en 2007 ainsi que des élections législatives ; ils pensent peut-être être élus à vie ! Ils ont donc oublié qu'en France il y a des élections. Ils font donc des promesses pour un temps où ils ne seraient plus nécessairement aux responsabilités. C'est la première manipulation. Mais, de ce point de vue, l'école chiraquienne a fait visiblement des petits !
La deuxième est de dire qu'ils vont faire une réforme fiscale pour les classes moyennes. Comme tout le monde se considère, même s'il fait partie des classes défavorisées, dans les classes moyennes, chacun espère peut-être avoir sa part d'impôt sur le revenu -pas en tout cas ceux qui le ne payent plus ou ne le payent pas, la moitié de nos concitoyens. Mais, pire encore, les promesses d'impôt qui sont prévues -pour 2007 sans doute- vont bénéficier non pas aux catégories moyennes, mais aux classes les plus favorisées. Nous avons fait le calcul : c'est à partir de 10 000 euros par mois que la baisse d'impôt devient significative. Et, quand on ne gagne que 1000 euros par mois, rien n'est prévu, ou alors 70 euros peut-être, si les calculs tombent juste ! 100 fois plus pour les autres ! Voilà la politique fiscale !
Mais, cela va plus loin, ils ont trouvé un système pour alléger l'impôt sur la fortune. Cela s'appelle le plafonnement. Cette réforme est faite pour 9 000 contribuables et pas parmi les plus déshérités, au contraire ! Parmi les plus favorisés. C'est cela la manuvre : l'allègement, voire la suppression de l'impôt sur la fortune. Pour ces catégories-là, cela ne pouvait pas attendre 2007 ; 2007, c'est déjà trop tard ! Ils ont même peut-être imaginé que nous serions là en 2007 et que ce projet d'allègement voire de suppression n'aboutirait donc pas ! L'idée qui est la leur est de verser dès à présent la restitution de l'impôt sur la fortune en 2006. Pour les plus riches, cela ne peut attendre ; mais pour les autres, pour tous les autres Allez donc demander le rétablissement de la TIPP flottante à travers la hausse des prix des carburants et la TVA que prend l'Etat au passage ! On nous répond qu'il n'y a pas d'argent pour cela. C'est trop cher ! De la même manière, si l'on peut distribuer un peu pour apaiser le sort des transporteurs routiers, des pêcheurs, des agriculteurs, en revanche, pour les salariés qui doivent être une catégorie professionnelle qui ne prend jamais son automobile, ce n'est pas possible de faire le moindre effort de baisse du prélèvement. Rien donc pour les concitoyens qui vont, en plus, avoir une hausse de leurs impôts locaux compte tenu des transferts de charges, de responsabilités qui sont effectués sur les collectivités locales par l'Etat.
C'est donc une politique dure pour le plus grand nombre et accommodante pour les plus favorisés. On a même peine à y croire. Ils ont ajouté dans le projet de loi de finances qui va être discuté à l'automne la suppression, à terme, de l'impôt sur les successions payé par 20 % des contribuables seulement. Pour ceux-là, avec un système de donation tous les six ans, ils pourront -s'ils s'organisent bien, avec un bon notaire, de bons conseillers fiscaux- ne plus payer du tout d'impôt sur les successions.
Quand on est face à une politique de classe à ce point, nous devons être dans la contestation et la protestation, bien sûr, mais surtout dans la responsabilité, car cela ne peut plus attendre et qu'il faut prévoir l'alternance, la vraie. La droite sait qu'elle a échoué ; la meilleure preuve, c'est qu'elle veut maintenant se mettre sur le terrain du changement dans la continuité. Pour les plus anciens, cela rappelle quelque chose, c'est un trait majeur de la Vè République. La droite essaye de faire en sorte d'être sa propre remplaçante ; elle échoue et trouve en son sein une perspective de changement. Aujourd'hui, le scénario proposé par la droite est Villepin par rapport à Sarkozy, le dauphin par rapport au rival, le grand chambellan par rapport au vizir. Nous aurions là perspective de changement ; il y en a un qui voudrait être dans la rupture et l'autre davantage dans la continuité avec un peu plus de changement, dans le style au moins, de génération sûrement, de prestance aussi par rapport à l'autre -ce qui doit être fort désagréable tout de même pour Sarkozy.
À partir de là, il y a de quoi sourire ; mais nous pouvons faire le clair sur ce qu'ils sont. Sarkozy, c'est la politique de Balladur avec la méthode de Chirac et Villepin, c'est la politique de Chirac avec la méthode de Balladur. Vous voyez bien qu'il n'y a pas de différence. Ils poursuivent les mêmes objectifs, ils sont formés aux mêmes écoles du pouvoir, ils ont les mêmes pratiques et partagent le même libéralisme. Ils voudraient nous faire croire qu'il y aurait des différences en leur sein, que l'un serait plus ceci et l'autre plus cela !C'est là encore une ultime manuvre de la droite. Cette même droite, profondément libérale, est unie sur l'essentiel : la fiscalité, l'abandon des services publics, le démantèlement de la protection sociale. Elle est même d'accord pour faire de nombreux appels à l'électorat d'extrême droite : entre le karcher de Nicolas Sarkozy et l'invitation des dirigeants d'extrême droite à Matignon ainsi que l'utilisation de De Villiers pour rabattre, si cela est possible, les électeurs de Le Pen vers la droite au second tour de l'élection présidentielle.
Quand on voit l'échec majeur de ces gouvernements depuis 2002, quand on voit la désespérance d'une grande partie de nos concitoyens et quand on voit les manuvres au sommet de la droite, quelle responsabilité pèse sur nous ! Quel devoir nous avons à accomplir !
Il y a une crise démocratique dans notre pays. On le voit élection après élection, on le voit avec cette succession d'alternance. Il y a aussi beaucoup de scepticisme. Si nous ne jouons pas pleinement notre rôle, pas simplement de critique ou de bénéficier du rejet qu'inspirera la droite, mais notre rôle politique d'offrir du sens, une vision, un cap, une perspective, une espérance, qui le fera. On parle très peu de l'extrême droite, sinon pour en voir parfois la récupération de son électorat, mais elle n'a pas disparu, ses thèmes s'installent et elle-même peut espérer de nouveau brouiller le jeu.
C'est pourquoi j'ai voulu, à travers notre congrès du mois de novembre, que nous puissions avoir un large débat non pas sur nous-mêmes car nous n'intéressons personne, non pas sur les différences qui peuvent exister entre nous car elles paraissent subalternes aux yeux des Français, non pas sur les ambitions légitimes de tel ou tel ; j'ai voulu qu'il y ait un débat entre socialistes pour que nous soyons utiles aux Français. Ce débat de congrès doit donc porter sur le projet que nous proposerons au pays le moment venu. Ce congrès, s'il doit être utile aux socialistes, s'il doit être utile à la gauche, il doit surtout être un facteur d'intérêt pour les Français.
Si nous voulons réussir notre congrès, nous devons respecter trois principes :
Le Premier est le principe d'unité : unité des socialistes, c'est bien le moins. Et si nous voulons être conformes à ce principe, lequel finalement 100 ans après demeure plus actuel que jamais, il ne peut y avoir de victoire s'il n'y a pas un parti socialiste fort. Et il ne peut y avoir de parti socialiste fort, attractif, convaincant que si les socialistes eux-mêmes sont fédérés par le même idéal. Jean Jaurès et Jules Guesde, après bien des controverses, bien des confrontations en étaient arrivés à cette voie-là, à ce chemin de l'unité. Cela n'a jamais été facile depuis 100 ans, nous nous sommes séparés ou ils se sont séparés des communistes et les communistes de nous. Il y a eu ensuite d'autres scissions, d'autres dissidences et nous en payons à chaque fois le prix. Mais, chaque fois que nous avons pu -et notamment depuis Epinay en 1971- nous retrouver ensemble dans le même parti, nous avons pu redonner confiance à la gauche. Nous sommes un grand parti capable de nourrir entre nous tous les débats, toutes les délibérations -et nous en avons eu un dernièrement sur le traité constitutionnel sur lequel nous avons organisé un référendum interne avant celui organisé dans le pays pour savoir quel devait être notre choix. Nous avons adopté une position, la France en a adopté une autre. C'est derrière nous. J'en ai assez que l'on puisse dire qu'il y a au PS des socialistes du " oui " et des socialistes du " non ". Pour moi, au PS, il n'y a que des socialistes. Et si l'on reste, par une espèce d'obstination, figé sur ce débat d'hier on oubliera l'essentiel. Je vous appelle donc, au-delà de vos sensibilités, à vous unir sur ce qui est maintenant le seul objectif : le mois de mai 2007, et peut-être d'ailleurs le 10 mai 2007.
Il y en a bien sûr parmi nous qui voudrons y revenir en nous disant que nous n'avons pas entendu le message des Français. Nous l'avons entendu : c'est le rejet du libéralisme, c'est la volonté d'avoir une Europe plus démocratique, c'est aussi le refus du gouvernement de Raffarin. Si nous voulons aujourd'hui traduire ce message que nous avons entendu, c'est dans un projet qui n'est pas seulement européen, qui doit d'abord être celui de notre pays, et avant d'être celui de notre pays, celui de la gauche. Pour cela, il faut affirmer clairement notre identité de socialistes. J'en entends qui s'interrogent sur eux-mêmes, qui se veulent sociaux ceci ou sociaux cela, qui voudraient être plus ou moins à gauche. Soyons nous-mêmes, socialistes, y compris lorsque nous cherchons à fédérer la gauche car le rassemblement de la gauche doit être négocié avec tous ceux qui voudront gouverner avec nous sur la base d'un contrat. C'est ainsi que nous avons toujours fait. Non pas en cherchant à imiter les autres, mais tout simplement en les invitant à venir avec nous -sur la base de notre propre projet, de notre propre ligne- discuter d'un contrat de gouvernement. Comment faisons-nous dans les communes, les départements et les régions ? Cela fonctionne et plutôt bien, notamment depuis 2004. Nous faisons un contrat avant de parvenir aux responsabilités, nous négocions les propositions, nous nous retrouvons ensemble sur les mêmes engagements. Il n'y aura de rassemblement de la gauche que sur la base d'un contrat de gouvernement. Faut-il que nos partenaires veuillent gouverner avec nous ! Ils le voudront si nous sommes forts. Rappelez-vous, ce n'était pas si simple de convaincre le Parti communiste quand François Mitterrand était Premier secrétaire du Parti et s'acheminait vers la belle victoire de 1981 ! On disait, à l'époque, que l'union était un combat -d'un certain point de vue, cela n'a pas changé. Croyez-vous qu'il est simple de convaincre des amis écologistes et Verts d'aller aux responsabilités du pays ? Ils l'ont fait une première fois, ils veulent recommencer avec nous. C'est cela le sens de la bataille que nous devons engager : rassembler, forcer au rassemblement, être unitaire pour tous, mais sur le même principe de gouverner, de diriger. Non pas pour occuper des places, mais pour changer profondément notre pays. Certains disent que ce n'est pas bien de gouverner, ils vont même jusqu'à contester cette idée même de gouvernement, de pouvoir. Il faut cependant le revendiquer car s'il n'y avait pas eu de socialistes, dans notre histoire séculaire, en 1936, au lendemain de la guerre, en 1981 ou en 1997 avec Lionel Jospin, où en serait le pays ? Heureusement qu'il y a eu des socialistes avec la gauche qui ont " remonté leurs manches " pour transformer notre pays.
Je sais qu'il y en a parmi nous qui souhaitent courir après l'extrême gauche. Bon courage ! Car même s'ils courent vite, ils ne la rattraperont jamais. J'ai du respect pour les camarades d'extrême gauche qui, avec nous, peuvent protester, contester, critiquer et manifester. Mais, et c'est leur droit, ils ne veulent pas gouverner. Alors qu'ils ne nous en empêchent pas. Car, au moment où il va falloir choisir entre la droite et la gauche en 2007, il ne faudra pas se tromper de bulletin lors de l'élection si nous sommes au second tour. Ceux qui prendront la responsabilité de ne pas choisir la gauche au second tour devront dire qu'ils choisissent la droite. Que se passe-t-il en ce moment en Allemagne ? Sans avoir jamais été un adepte de la politique de G. Schröder, je respecte son choix qui n'est pas le nôtre. À côté, s'est créé un parti plus à gauche qui ne veut pas gouverner avec Schröder. Quel est le résultat ? Les Allemands ont rejeté le libéralisme et pour autant ils vont peut-être avoir une politique à droite. C'est vraiment une attitude à proscrire ; pour vouloir avoir plus à gauche, toujours plus à gauche, on finit par avoir plus à droite. On aurait dû les prévenir, les Allemands, car nous avons déjà donné le 21 avril 2002. Ceux qui voulaient envoyer des avertissements, ceux qui voulaient envoyer des messages Pour finir nous avons eu trois ans et demi de droite et c'est comme cela jusqu'en 2007. Car ne croyez pas que Chirac partira avant. Chirac ne part jamais. Il s'accroche au pouvoir ; il n'entend plus, il ne voit plus mais il reste et jusqu'au bout. Certains disaient qu'il allait dissoudre l'Assemblée nationale ! Il ne le fera plus jamais, il a déjà donné lui aussi. Il faut vivre avec cette droite jusqu'en 2007 ; c'est dur. Il ne faut donc pas se tromper lorsqu'on a l'occasion de voter ; c'est trop grave, trop important. D'abord, il faut voter et ensuite voter pour le PS dès le premier tour, sans volonté d'hégémonie à l'égard de nos partenaires. Car s'il n'y a pas un parti socialiste fort au premier tour de l'élection, il ne sera pas capable d'emmener ses partenaires au second tour sur la base d'un contrat qui permet le rassemblement de tous.
Le deuxième principe est celui de la volonté : il va falloir en avoir de la volonté si l'on veut changer profondément notre pays. De la volonté pour remettre l'emploi comme première priorité, pour redonner du pouvoir d'achat, pour créer des reclassements lorsqu'il y a des plans sociaux, pour permettre des formations, des qualifications qui donnent à chaque jeune ou moins jeune, à chaque femme à chaque homme, la possibilité d'accéder à un meilleur emploi. Il va falloir de la volonté si l'on veut faire de l'Education nationale la première priorité, si l'on veut mettre l'école publique en situation de répondre aux défis qui sont les siens, parce que quand même quand on entend un Ministre de l'Education qui veut nous faire croire que l'école privée et l'école publique c'est la même chose Non. La seule école de la République, c'est l'école publique. Il va en falloir de la volonté pour mettre nos universités en situation de pôles d'excellence et aussi de démocratie. Les inégalités devant le savoir, l'école, l'université -y compris devant l'accès aux grandes écoles- se sont depuis 20 ans creusées et il est de plus en plus difficile pour des catégories moyennes et populaires de permettre à leurs enfants de suivre leurs études dans les meilleures conditions. Il va falloir de la volonté pour rééquilibrer les territoires, redonner sa place à la décentralisation. Il va falloir de la volonté si l'on veut faire une réforme fiscale. Les socialistes sont les champions de la réforme fiscale dans l'opposition mais bien plus frileux lorsqu'ils sont au pouvoir. J'aimerais que nous ne soyons pas simplement dans la proclamation au sein des motions, mais dans l'engagement réel. Et cela ne sera pas simple d'expliquer qu'il va falloir que certains payent plus quand d'autres vont payer moins et qu'il peut même arriver qu'il y ait des électeurs socialistes qui seront amenés à payer plus. On ne peut pas non plus se mettre en dehors de la solidarité.
Le troisième principe est celui de la vérité : on ne gagne pas une élection sur l'illusion ; on ne gagne pas une élection sur un mensonge ; on ne gagne pas une élection simplement sur la peur de l'autre. Il faut dire la vérité quand on a affirmé ce que l'on pouvait être capable de changer. Il faut dire la vérité pour dire " pas tout de suite, ce n'est pas vrai ", car on ne pourra pas additionner toutes les revendications et le faire dans un délai de deux ans. Car c'est un piège dans lequel la gauche est souvent tombée : laisser croire qu'elle pouvait faire en deux ans ce que d'autres mettront 20 ans à réaliser, mais surtout quelques mois à défaire. Il faut dire que la gauche doit gagner une élection, mais aussi une deuxième si elle veut transformer ; il faut dire que le but de la gauche n'est pas de venir le temps d'une législature et de laisser la place. Il va falloir rester plus d'une législature si l'on veut transformer durablement notre pays. Pour cela, il faut savoir rythmer le changement, donner des objectifs et les atteindre, en redonner d'autres, ne jamais céder, mais ne jamais tomber dans l'illusion que l'on pourra faire tout tout de suite. De la même manière, il faudra dire à nos concitoyens qu'ils n'auront rien sans effort, sans lutte, sans mobilisation et que ce n'est pas forcément de l'Etat que tout doit venir. Il va falloir aussi dire que la démocratie sociale, cela existe, que les syndicats sont nécessaires, que les associations doivent être mobilisées, que les citoyens doivent s'investir, sinon on connaîtra d'autres échecs !
CONCLUSION
Je sais que certains ont peur de notre Congrès, pas du résultat, mais de ce qu'il peut générer. Cependant, nous sommes une grande organisation démocratique. C'est l'honneur des socialistes d'être capables de débattre entre eux.
J'aurais pu considérer, au lendemain du 29 mai, que le congrès pouvait être maintenu à la date prévue, c'est-à-dire au mois de mai 2006. Mais, qu'aurait-on fait jusqu'au mois de mai ? On se serait regardé les uns les autres ? Il y a suffisamment de candidatures pour ne pas attendre le mois de mai. On aurait eu un congrès qui aurait désigné tel ou tel. Ce n'était pas le moment. J'ai voulu qu'il y ait un congrès pour que nous discutions de l'essentiel, c'est-à-dire des idées, des propositions. Il faut donc revendiquer ce grand débat que nous aurons entre nous.
On parle de division des socialistes au regard du nombre de motions : 5. Il pourrait y en avoir moins, mais s'il n'y en avait qu'une, que dirait-on de nous ? Ils sont tous pour le même premier secrétaire, pour la même direction, ils pensent tous la même chose ! Ce n'est pas le Parti socialiste. On sait bien que dans l'histoire du Parti socialiste, il y a toujours eu plusieurs motions. Faut-il encore être capables de savoir ce qui nous rassemble et ce qui nous sépare. Quand je lis les motions ou les contributions, je vois beaucoup de convergences sur l'emploi, sur l'Education, sur le logement et heureusement ! Nous sommes tous socialistes. Et s'il doit y avoir des points de débat, assumons les et voyons ce qui peut être surmonté, ce qui peut être source de compromis fructueux. Mais, en tout cas, évitons les caricatures entre nous.
En général, dans un congrès, on veut toujours être plus à gauche. Cessons de laisser penser qu'il y aurait deux catégories de socialistes : les socialistes mous d'un côté et les socialistes durs, intransigeants. Je ne connais que des socialistes d'accord entre eux pour avoir le même discours dans l'opposition et au pouvoir, c'est cela être socialiste, c'est d'avoir la constance et la cohérence nécessaires. Et puis, il faut éviter les postures. J'évoquais tout à l'heure l'élection présidentielle. Nous avons beaucoup de talents au sein du parti socialiste, je ne m'en plains pas. Mais, là aussi, ce n'est pas le moment. Qu'il y ait beaucoup de talents femme comme homme, c'est plutôt bien ; qu'il y ait des personnalités qui pourraient le moment venu nous représenter, j'en suis plutôt fier comme Premier secrétaire du parti socialiste, mais ce moment n'est pas venu.
Et le congrès du mois de novembre doit être un congrès sur nos propositions et pas sur la désignation de notre candidate ou de notre candidat à l'élection présidentielle. Cela viendra et je proposerai même un calendrier tout simple qui serait le suivant : on bâtit notre projet au Mans, on se rassemble autour de lui, ensuite on fait le contrat de gouvernement avec nos partenaires de la gauche ; on désigne nos candidats aux élections législatives au printemps ou à l'été 2006 et, à la fin de l'année 2006, on choisit notre candidate ou notre candidat.
Certains disent que c'est trop tard. J'ai le souvenir de ce qu'avait fait François Mitterrand pour l'élection de 1981 -ce n'est tout de même pas une mauvaise référence. Il s'était fait désigner en novembre 1980. J'ai repris à peu près le même calendrier. Cela ne lui avait pas porté tort pour 1981.
Voilà ce que doit être notre congrès. N'en n'ayez pas peur. Investissez vous dans ce débat. Faites en sorte qu'il soit la meilleure image pour le parti socialiste et faisons aussi effort entre nous de nous respecter. Et, la meilleure façon de nous respecter, c'est de respecter le vote des militants. Parce que, dans un parti démocratique comme le nôtre, quand les militants ont voté, c'est la règle commune. Cela aurait dû l'être après notre référendum interne, cela ne l'a pas été et je l'ai regretté. Cela doit l'être pour notre congrès et pour la désignation de notre candidat ou de notre candidate à l'élection présidentielle. C'est pourquoi, je souhaite que dans le congrès du Mans il y ait une motion -vous choisirez laquelle- qui rentre majoritaire au congrès, comme cela à la Commission des résolutions, la nuit, il n'y aura pas de petits arrangements ou de grands compromis. Chacun saura à l'ouverture du congrès qui dirigera le Parti socialiste, sur quelle orientation et avec quelle stratégie. C'est aussi cela la démocratie. Ce que je sais, c'est que quelle que soit la ligne qui sera choisie par les militants, je serai à ma place comme socialiste derrière la ligne du parti socialiste. La ligne majoritaire du parti socialiste doit être la ligne de tout le parti socialiste. C'est comme cela que l'on pourra rassembler les socialistes et rassembler la gauche.
Il nous reste peu de temps, 18 mois à peine, pour forger nos propositions, peu de temps pour rassembler la gauche ; mais il nous en reste suffisamment pour être conscients aussi de nos exigences.
J'ai confiance en vous. Je sais que les socialistes comprennent l'attente qui est portée sur eux. Nos concitoyens nous demandent d'être au rendez-vous de 2007. Ils savent que vous allez décider, car c'est vous qui allez décider, là, au mois de novembre prochain, ce que doit être la stratégie du parti socialiste. Vous ferez ce choix non pas en fonction de vos amitiés ou de vos impressions de militants, mais en citoyen. Ce que vous déciderez au congrès du Mans va également décider de la configuration de la gauche et de la capacité de la gauche à gagner 2007.
Faites en sorte, par votre vote, votre implication, votre militantisme, de donner au parti socialiste la force nécessaire. Faites en sorte que la gauche puisse se rassembler au printemps 2006. Faites en sorte que, le moment venu, nous désignions notre candidate ou notre candidat avec un projet capable de convaincre les Français, et alors vous aurez fait votre devoir de socialistes et vous aurez donné à notre pays l'espérance qui lui manque aujourd'hui.
Soyons au rendez-vous de 2007 parce que si nous ne demandons pas la lune à travers notre programme, nous voulons une terre différente, une Europe différente, une France différente et c'est vous, les socialistes, qui avez la réponse.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 30 septembre 2005)
C'est un honneur pour le Premier secrétaire du Parti socialiste que de venir dans les Cotes d'Armor parce que, s'il y a une terre socialiste et républicaine, c'est bien celle-là.
Vous avez voulu mettre l'accent sur les questions de l'emploi. Je voudrais vous dire, avant, que je viens souvent dans les Cotes d'Armor. J'y étais venu le 1er mai 1997, la dissolution venait d'être prononcée par Jacques Chirac. Nous ne savions pas véritablement où nous allions nous engager, parce que nous prêtons toujours plus à J. Chirac qu'il ne peut donner et nous pensions que s'il avait fait la dissolution, c'était pour son bien. Une chose est sûre : c'était pour le bien des Français puisque nous avons pu obtenir la majorité de l'Assemblée nationale. Mais, je me souviens d'une grande manifestation qui, déjà, annonçait nos succès.
Je suis revenu plusieurs fois, et notamment à Lamballe -il y a plus d'un an au moment des élections régionales. Il y avait du monde. Cette réunion m'avait convaincu, avant même que les électrices et les électeurs ne se soient prononcés.
À vous voir aussi nombreux aujourd'hui, je veux y voir un présage. À mon avis, on va gagner les élections en 2007.
Les Français sont inquiets pour de multiples raisons : pour accéder au logement, pour donner un avenir à leurs enfants, pour leurs services publics qui sont menacés. Mais, leur première inquiétude, leur première angoisse, c'est d'abord pour leur propre emploi. Vous avez voulu consacrer votre journée à l'alternative qui doit être la nôtre sur la question de l'emploi. En effet, s'il y a un échec majeur des gouvernements depuis 2002, c'est bien sur la question du chômage et de l'emploi.
Nous ne sommes pas dupes des chiffres qui sont publiés depuis plusieurs mois et qui laisseraient penser qu'il y aurait une diminution du nombre de demandeurs d'emploi, quand tout indique -hélas- à travers les annonces de plans sociaux, de licenciements, que la situation de l'emploi se dégrade. Comment sont-ils parvenus à diminuer les statistiques ? Ils ont trouvé une méthode : pour supprimer le chômage, il suffit de supprimer les chômeurs. On fait des radiations, on contrôle les chômeurs, on les décourage, on les stigmatise, on les accuse même ; s'il y a du chômage, c'est de leur faute ! Parce qu'ils ne trouvent pas de travail, parce qu'ils ne veulent pas travailler ! Donc, la meilleure des façons est de ne plus les considérer comme des demandeurs d'emploi.
On a aussi trouvé une méthode qui consiste à fournir des contrats aidés, ceux-là mêmes que nous avions supprimés dès 2002, mais pas pour 5 ans, pas pour un travail à temps plein, non, pour du temps partiel payé bien en dessous du SMIC et pour deux ans à peine. Tiens, pourquoi deux ans ? Parce qu'il y aurait des élections en 2007 et qu'il serait peut-être intéressant de faire baisser statistiquement le chômage !
Il y a deux réalités incontestables en matière de chômage et d'emploi :
Aujourd'hui le nombre d'emplois dans notre pays est exactement le même que celui qui existait en 2002. Cette majorité, ces gouvernements n'ont pas créé un seul emploi supplémentaire depuis 2002. Il y a eu autant d'emplois créés que d'emplois détruits. De 1997 à 2002, lorsque nous étions en responsabilité avec Lionel Jospin, nous avions créé 2 millions d'emplois. Il ne nous reste plus qu'à faire les comptes : 2 millions d'un côté, rien de l'autre. Et, pendant ce temps-là, 150 000 à 200 000 personnes qui arrivent chaque année sur le marché du travail -des jeunes, des moins jeunes, des femmes qui veulent retourner au travail après avoir éduqué leurs enfants- attendent en vain un emploi. Voilà pourquoi le chômage ne cesse de progresser depuis deux ans et demi.
Aujourd'hui, le nombre d'heures travaillées, en France, est inférieur à ce qu'il était en 2002. Cela veut dire que l'on a procédé à une réduction de la durée du travail à travers une montée du chômage. Cela veut dire qu'il y a des Français qui voudraient travailler, mais qui ne le peuvent pas et qui travaillaient lorsque nous étions au gouvernement. A droite, ils voudraient nous faire croire qu'ils valorisent le travail, qu'ils réhabilitent l'effort, qu'ils récompensent la réussite ! Mais, quand on ne donne pas le droit à l'emploi, on décourage le travail, on abîme l'effort et l'on ne récompense pas la réussite.
Quand on fait ce constat, on a des raisons de s'inquiéter. On s'inquiète parce que ce sont les plus jeunes qui sont victimes de cette politique-là. Un jeune sur quatre est au chômage. Et ce sont aussi les plus âgés qui en sont victimes. Car, au-delà de 50 ans déjà, on est considéré comme aillant rendu service dans l'entreprise, n'étant plus comme assez productif, alors même qu'on a allongé la durée de cotisation et supprimé -en définitive- le droit au départ à 60 ans. Mais, ce sont aussi les femmes qui sont les premières victimes de cette exclusion sociale. Et la précarité, elle, ne cesse de s'élargir. 70 % aujourd'hui des créations d'emplois se font en contrat à durée déterminée ou en intérim ! Et nous parle maintenant du succès du Contrat Nouvelle Embauche ; ce contrat qui permet à l'employeur de se séparer de son salarié dans le délai de deux ans juste en lui envoyant une lettre !
Il y a tout à craindre de ce succès car, que signifie-t-il ? Aujourd'hui, pour un employeur de moins de 20 salariés, le CNE sera en effet la seule forme de recrutement. Pourquoi recourir à un CDI ou un CDD avec leurs contraintes, et même à l'intérim qui suppose de payer un certain nombre de surcoûts ? Là, il s'agit d'employer quelqu'un juste pour le temps d'une activité, sans avoir à verser la moindre indemnité, sans avoir à supporter la moindre contrainte, la moindre obligation. Voilà pourquoi la précarité est devenue la règle et la sécurité du travail l'exception.
Cette politique a un coût pour celles et ceux qui en sont victimes, mais elle a aussi un coût pour la Nation. Ce résultat-là n'est pas le produit du hasard, d'une conjoncture malheureuse, de la hausse du prix du pétrole qui frappe tous les pays du monde. C'est une politique qui a été voulue, décidée par les gouvernements successifs et qui, aujourd'hui, aboutit à ce que la croissance soit l'une des plus faibles d'Europe, à ce que le pouvoir d'achat soit altéré, à ce que la compétitivité des entreprises soit dégradée faute d'investissement, les déficits creusés, à ce que le déficit du commerce atteigne des niveaux records, la dette publique qui va atteindre -elle aussi- 70 % de la richesse nationale. Et l'on va verser en service d'intérêt de la dette autant que nos impôts sur le revenu ou ce qu'il en restera dans quelques années ! Voilà le résultat de cette politique fondée sur des choix qui ont commencé par supprimer les 35 heures -ce fut la première loi Fillon en 2002, puis supprimer les emplois jeunes, puis diminuer le nombre de contrats aidés qui permettaient à tant de ceux qui étaient éloignés de l'emploi de pouvoir un moment y revenir. On a bien sûr réduit le nombre de fonctionnaires, abrogé la loi de modernisation sociale qui permettait quand même -votée en 2001- d'avoir sur les plans sociaux quelques contraintes sur les entreprises qui faisaient beaucoup de bénéfices tout en se séparant de leur personnel.
Quand on voit aujourd'hui le Premier ministre prétendre, muni de son épée de bois, qu'il va retirer des aides à Hewlett Packard, alors même qu'il n'y a eu aucune aide versée à cette entreprise ! Quand on l'entend affirmer qu'il va y avoir des contrôles, alors même que le jour où il prononçait cette menace il supprimait la Commission qui justement avait été chargée de la vérification des aides publiques aux entreprises et même l'organisme qui était chargé de préparer les restructurations et de suivre les salariés victimes de ces plans sociaux Double langage. Il n'y a plus aucune organisation aujourd'hui, aucune structure permettant d'aider les territoires frappés par les plans sociaux.
Nous avons aussi ce démantèlement de tous les moyens de l'Etat. Chaque fois qu'il est possible d'empêcher l'intervention de l'Etat, les Libéraux s'emploient effectivement à liquider tout mécanisme de contrôle des entreprises, de pression sur les employeurs. Et le résultat est là.
Aujourd'hui, il faut être sévère dans nos critiques et ferme dans notre position. Protester, résister, contester face à un gouvernement qui échoue n'est pas le plus dur à faire, c'est à la portée d'une grande famille politique comme la nôtre. Mais nous pouvons faire mieux. Ce qui est attendu de nous, c'est de faire des propositions, d'ouvrir une perspective, de lever l'espoir, d'offrir un projet.
Nous avons évoqué l'emploi, mais que dire que la protection sociale qui est elle aussi atteinte, où aujourd'hui avec le déficit de la sécurité sociale, il va y avoir de nouveaux déremboursements de médicaments, où il va y avoir sur la retraite la perspective de lever de nouvelles cotisations, parce qu'il y a crise du régime de répartition.
Il y aussi la politique fiscale. Ce sera sûrement un sujet majeur de clivage entre la droite et la gauche. Nous avons eu les annonces -par le gouvernement Villepin- d'une grande réforme de l'impôt sur le revenu et même de l'impôt sur les successions avec une double manipulation :
La première consiste à nous dire que nous allons avoir une baisse d'impôt, mais en 2007. Ah ! en 2007 ! Il faut peut-être les informer du fait qu'ils ne seront plus au pouvoir en 2007, enfin si les électeurs décident de nous mettre à leur place ! Car, tout de même, il y a une élection présidentielle prévue en 2007 ainsi que des élections législatives ; ils pensent peut-être être élus à vie ! Ils ont donc oublié qu'en France il y a des élections. Ils font donc des promesses pour un temps où ils ne seraient plus nécessairement aux responsabilités. C'est la première manipulation. Mais, de ce point de vue, l'école chiraquienne a fait visiblement des petits !
La deuxième est de dire qu'ils vont faire une réforme fiscale pour les classes moyennes. Comme tout le monde se considère, même s'il fait partie des classes défavorisées, dans les classes moyennes, chacun espère peut-être avoir sa part d'impôt sur le revenu -pas en tout cas ceux qui le ne payent plus ou ne le payent pas, la moitié de nos concitoyens. Mais, pire encore, les promesses d'impôt qui sont prévues -pour 2007 sans doute- vont bénéficier non pas aux catégories moyennes, mais aux classes les plus favorisées. Nous avons fait le calcul : c'est à partir de 10 000 euros par mois que la baisse d'impôt devient significative. Et, quand on ne gagne que 1000 euros par mois, rien n'est prévu, ou alors 70 euros peut-être, si les calculs tombent juste ! 100 fois plus pour les autres ! Voilà la politique fiscale !
Mais, cela va plus loin, ils ont trouvé un système pour alléger l'impôt sur la fortune. Cela s'appelle le plafonnement. Cette réforme est faite pour 9 000 contribuables et pas parmi les plus déshérités, au contraire ! Parmi les plus favorisés. C'est cela la manuvre : l'allègement, voire la suppression de l'impôt sur la fortune. Pour ces catégories-là, cela ne pouvait pas attendre 2007 ; 2007, c'est déjà trop tard ! Ils ont même peut-être imaginé que nous serions là en 2007 et que ce projet d'allègement voire de suppression n'aboutirait donc pas ! L'idée qui est la leur est de verser dès à présent la restitution de l'impôt sur la fortune en 2006. Pour les plus riches, cela ne peut attendre ; mais pour les autres, pour tous les autres Allez donc demander le rétablissement de la TIPP flottante à travers la hausse des prix des carburants et la TVA que prend l'Etat au passage ! On nous répond qu'il n'y a pas d'argent pour cela. C'est trop cher ! De la même manière, si l'on peut distribuer un peu pour apaiser le sort des transporteurs routiers, des pêcheurs, des agriculteurs, en revanche, pour les salariés qui doivent être une catégorie professionnelle qui ne prend jamais son automobile, ce n'est pas possible de faire le moindre effort de baisse du prélèvement. Rien donc pour les concitoyens qui vont, en plus, avoir une hausse de leurs impôts locaux compte tenu des transferts de charges, de responsabilités qui sont effectués sur les collectivités locales par l'Etat.
C'est donc une politique dure pour le plus grand nombre et accommodante pour les plus favorisés. On a même peine à y croire. Ils ont ajouté dans le projet de loi de finances qui va être discuté à l'automne la suppression, à terme, de l'impôt sur les successions payé par 20 % des contribuables seulement. Pour ceux-là, avec un système de donation tous les six ans, ils pourront -s'ils s'organisent bien, avec un bon notaire, de bons conseillers fiscaux- ne plus payer du tout d'impôt sur les successions.
Quand on est face à une politique de classe à ce point, nous devons être dans la contestation et la protestation, bien sûr, mais surtout dans la responsabilité, car cela ne peut plus attendre et qu'il faut prévoir l'alternance, la vraie. La droite sait qu'elle a échoué ; la meilleure preuve, c'est qu'elle veut maintenant se mettre sur le terrain du changement dans la continuité. Pour les plus anciens, cela rappelle quelque chose, c'est un trait majeur de la Vè République. La droite essaye de faire en sorte d'être sa propre remplaçante ; elle échoue et trouve en son sein une perspective de changement. Aujourd'hui, le scénario proposé par la droite est Villepin par rapport à Sarkozy, le dauphin par rapport au rival, le grand chambellan par rapport au vizir. Nous aurions là perspective de changement ; il y en a un qui voudrait être dans la rupture et l'autre davantage dans la continuité avec un peu plus de changement, dans le style au moins, de génération sûrement, de prestance aussi par rapport à l'autre -ce qui doit être fort désagréable tout de même pour Sarkozy.
À partir de là, il y a de quoi sourire ; mais nous pouvons faire le clair sur ce qu'ils sont. Sarkozy, c'est la politique de Balladur avec la méthode de Chirac et Villepin, c'est la politique de Chirac avec la méthode de Balladur. Vous voyez bien qu'il n'y a pas de différence. Ils poursuivent les mêmes objectifs, ils sont formés aux mêmes écoles du pouvoir, ils ont les mêmes pratiques et partagent le même libéralisme. Ils voudraient nous faire croire qu'il y aurait des différences en leur sein, que l'un serait plus ceci et l'autre plus cela !C'est là encore une ultime manuvre de la droite. Cette même droite, profondément libérale, est unie sur l'essentiel : la fiscalité, l'abandon des services publics, le démantèlement de la protection sociale. Elle est même d'accord pour faire de nombreux appels à l'électorat d'extrême droite : entre le karcher de Nicolas Sarkozy et l'invitation des dirigeants d'extrême droite à Matignon ainsi que l'utilisation de De Villiers pour rabattre, si cela est possible, les électeurs de Le Pen vers la droite au second tour de l'élection présidentielle.
Quand on voit l'échec majeur de ces gouvernements depuis 2002, quand on voit la désespérance d'une grande partie de nos concitoyens et quand on voit les manuvres au sommet de la droite, quelle responsabilité pèse sur nous ! Quel devoir nous avons à accomplir !
Il y a une crise démocratique dans notre pays. On le voit élection après élection, on le voit avec cette succession d'alternance. Il y a aussi beaucoup de scepticisme. Si nous ne jouons pas pleinement notre rôle, pas simplement de critique ou de bénéficier du rejet qu'inspirera la droite, mais notre rôle politique d'offrir du sens, une vision, un cap, une perspective, une espérance, qui le fera. On parle très peu de l'extrême droite, sinon pour en voir parfois la récupération de son électorat, mais elle n'a pas disparu, ses thèmes s'installent et elle-même peut espérer de nouveau brouiller le jeu.
C'est pourquoi j'ai voulu, à travers notre congrès du mois de novembre, que nous puissions avoir un large débat non pas sur nous-mêmes car nous n'intéressons personne, non pas sur les différences qui peuvent exister entre nous car elles paraissent subalternes aux yeux des Français, non pas sur les ambitions légitimes de tel ou tel ; j'ai voulu qu'il y ait un débat entre socialistes pour que nous soyons utiles aux Français. Ce débat de congrès doit donc porter sur le projet que nous proposerons au pays le moment venu. Ce congrès, s'il doit être utile aux socialistes, s'il doit être utile à la gauche, il doit surtout être un facteur d'intérêt pour les Français.
Si nous voulons réussir notre congrès, nous devons respecter trois principes :
Le Premier est le principe d'unité : unité des socialistes, c'est bien le moins. Et si nous voulons être conformes à ce principe, lequel finalement 100 ans après demeure plus actuel que jamais, il ne peut y avoir de victoire s'il n'y a pas un parti socialiste fort. Et il ne peut y avoir de parti socialiste fort, attractif, convaincant que si les socialistes eux-mêmes sont fédérés par le même idéal. Jean Jaurès et Jules Guesde, après bien des controverses, bien des confrontations en étaient arrivés à cette voie-là, à ce chemin de l'unité. Cela n'a jamais été facile depuis 100 ans, nous nous sommes séparés ou ils se sont séparés des communistes et les communistes de nous. Il y a eu ensuite d'autres scissions, d'autres dissidences et nous en payons à chaque fois le prix. Mais, chaque fois que nous avons pu -et notamment depuis Epinay en 1971- nous retrouver ensemble dans le même parti, nous avons pu redonner confiance à la gauche. Nous sommes un grand parti capable de nourrir entre nous tous les débats, toutes les délibérations -et nous en avons eu un dernièrement sur le traité constitutionnel sur lequel nous avons organisé un référendum interne avant celui organisé dans le pays pour savoir quel devait être notre choix. Nous avons adopté une position, la France en a adopté une autre. C'est derrière nous. J'en ai assez que l'on puisse dire qu'il y a au PS des socialistes du " oui " et des socialistes du " non ". Pour moi, au PS, il n'y a que des socialistes. Et si l'on reste, par une espèce d'obstination, figé sur ce débat d'hier on oubliera l'essentiel. Je vous appelle donc, au-delà de vos sensibilités, à vous unir sur ce qui est maintenant le seul objectif : le mois de mai 2007, et peut-être d'ailleurs le 10 mai 2007.
Il y en a bien sûr parmi nous qui voudrons y revenir en nous disant que nous n'avons pas entendu le message des Français. Nous l'avons entendu : c'est le rejet du libéralisme, c'est la volonté d'avoir une Europe plus démocratique, c'est aussi le refus du gouvernement de Raffarin. Si nous voulons aujourd'hui traduire ce message que nous avons entendu, c'est dans un projet qui n'est pas seulement européen, qui doit d'abord être celui de notre pays, et avant d'être celui de notre pays, celui de la gauche. Pour cela, il faut affirmer clairement notre identité de socialistes. J'en entends qui s'interrogent sur eux-mêmes, qui se veulent sociaux ceci ou sociaux cela, qui voudraient être plus ou moins à gauche. Soyons nous-mêmes, socialistes, y compris lorsque nous cherchons à fédérer la gauche car le rassemblement de la gauche doit être négocié avec tous ceux qui voudront gouverner avec nous sur la base d'un contrat. C'est ainsi que nous avons toujours fait. Non pas en cherchant à imiter les autres, mais tout simplement en les invitant à venir avec nous -sur la base de notre propre projet, de notre propre ligne- discuter d'un contrat de gouvernement. Comment faisons-nous dans les communes, les départements et les régions ? Cela fonctionne et plutôt bien, notamment depuis 2004. Nous faisons un contrat avant de parvenir aux responsabilités, nous négocions les propositions, nous nous retrouvons ensemble sur les mêmes engagements. Il n'y aura de rassemblement de la gauche que sur la base d'un contrat de gouvernement. Faut-il que nos partenaires veuillent gouverner avec nous ! Ils le voudront si nous sommes forts. Rappelez-vous, ce n'était pas si simple de convaincre le Parti communiste quand François Mitterrand était Premier secrétaire du Parti et s'acheminait vers la belle victoire de 1981 ! On disait, à l'époque, que l'union était un combat -d'un certain point de vue, cela n'a pas changé. Croyez-vous qu'il est simple de convaincre des amis écologistes et Verts d'aller aux responsabilités du pays ? Ils l'ont fait une première fois, ils veulent recommencer avec nous. C'est cela le sens de la bataille que nous devons engager : rassembler, forcer au rassemblement, être unitaire pour tous, mais sur le même principe de gouverner, de diriger. Non pas pour occuper des places, mais pour changer profondément notre pays. Certains disent que ce n'est pas bien de gouverner, ils vont même jusqu'à contester cette idée même de gouvernement, de pouvoir. Il faut cependant le revendiquer car s'il n'y avait pas eu de socialistes, dans notre histoire séculaire, en 1936, au lendemain de la guerre, en 1981 ou en 1997 avec Lionel Jospin, où en serait le pays ? Heureusement qu'il y a eu des socialistes avec la gauche qui ont " remonté leurs manches " pour transformer notre pays.
Je sais qu'il y en a parmi nous qui souhaitent courir après l'extrême gauche. Bon courage ! Car même s'ils courent vite, ils ne la rattraperont jamais. J'ai du respect pour les camarades d'extrême gauche qui, avec nous, peuvent protester, contester, critiquer et manifester. Mais, et c'est leur droit, ils ne veulent pas gouverner. Alors qu'ils ne nous en empêchent pas. Car, au moment où il va falloir choisir entre la droite et la gauche en 2007, il ne faudra pas se tromper de bulletin lors de l'élection si nous sommes au second tour. Ceux qui prendront la responsabilité de ne pas choisir la gauche au second tour devront dire qu'ils choisissent la droite. Que se passe-t-il en ce moment en Allemagne ? Sans avoir jamais été un adepte de la politique de G. Schröder, je respecte son choix qui n'est pas le nôtre. À côté, s'est créé un parti plus à gauche qui ne veut pas gouverner avec Schröder. Quel est le résultat ? Les Allemands ont rejeté le libéralisme et pour autant ils vont peut-être avoir une politique à droite. C'est vraiment une attitude à proscrire ; pour vouloir avoir plus à gauche, toujours plus à gauche, on finit par avoir plus à droite. On aurait dû les prévenir, les Allemands, car nous avons déjà donné le 21 avril 2002. Ceux qui voulaient envoyer des avertissements, ceux qui voulaient envoyer des messages Pour finir nous avons eu trois ans et demi de droite et c'est comme cela jusqu'en 2007. Car ne croyez pas que Chirac partira avant. Chirac ne part jamais. Il s'accroche au pouvoir ; il n'entend plus, il ne voit plus mais il reste et jusqu'au bout. Certains disaient qu'il allait dissoudre l'Assemblée nationale ! Il ne le fera plus jamais, il a déjà donné lui aussi. Il faut vivre avec cette droite jusqu'en 2007 ; c'est dur. Il ne faut donc pas se tromper lorsqu'on a l'occasion de voter ; c'est trop grave, trop important. D'abord, il faut voter et ensuite voter pour le PS dès le premier tour, sans volonté d'hégémonie à l'égard de nos partenaires. Car s'il n'y a pas un parti socialiste fort au premier tour de l'élection, il ne sera pas capable d'emmener ses partenaires au second tour sur la base d'un contrat qui permet le rassemblement de tous.
Le deuxième principe est celui de la volonté : il va falloir en avoir de la volonté si l'on veut changer profondément notre pays. De la volonté pour remettre l'emploi comme première priorité, pour redonner du pouvoir d'achat, pour créer des reclassements lorsqu'il y a des plans sociaux, pour permettre des formations, des qualifications qui donnent à chaque jeune ou moins jeune, à chaque femme à chaque homme, la possibilité d'accéder à un meilleur emploi. Il va falloir de la volonté si l'on veut faire de l'Education nationale la première priorité, si l'on veut mettre l'école publique en situation de répondre aux défis qui sont les siens, parce que quand même quand on entend un Ministre de l'Education qui veut nous faire croire que l'école privée et l'école publique c'est la même chose Non. La seule école de la République, c'est l'école publique. Il va en falloir de la volonté pour mettre nos universités en situation de pôles d'excellence et aussi de démocratie. Les inégalités devant le savoir, l'école, l'université -y compris devant l'accès aux grandes écoles- se sont depuis 20 ans creusées et il est de plus en plus difficile pour des catégories moyennes et populaires de permettre à leurs enfants de suivre leurs études dans les meilleures conditions. Il va falloir de la volonté pour rééquilibrer les territoires, redonner sa place à la décentralisation. Il va falloir de la volonté si l'on veut faire une réforme fiscale. Les socialistes sont les champions de la réforme fiscale dans l'opposition mais bien plus frileux lorsqu'ils sont au pouvoir. J'aimerais que nous ne soyons pas simplement dans la proclamation au sein des motions, mais dans l'engagement réel. Et cela ne sera pas simple d'expliquer qu'il va falloir que certains payent plus quand d'autres vont payer moins et qu'il peut même arriver qu'il y ait des électeurs socialistes qui seront amenés à payer plus. On ne peut pas non plus se mettre en dehors de la solidarité.
Le troisième principe est celui de la vérité : on ne gagne pas une élection sur l'illusion ; on ne gagne pas une élection sur un mensonge ; on ne gagne pas une élection simplement sur la peur de l'autre. Il faut dire la vérité quand on a affirmé ce que l'on pouvait être capable de changer. Il faut dire la vérité pour dire " pas tout de suite, ce n'est pas vrai ", car on ne pourra pas additionner toutes les revendications et le faire dans un délai de deux ans. Car c'est un piège dans lequel la gauche est souvent tombée : laisser croire qu'elle pouvait faire en deux ans ce que d'autres mettront 20 ans à réaliser, mais surtout quelques mois à défaire. Il faut dire que la gauche doit gagner une élection, mais aussi une deuxième si elle veut transformer ; il faut dire que le but de la gauche n'est pas de venir le temps d'une législature et de laisser la place. Il va falloir rester plus d'une législature si l'on veut transformer durablement notre pays. Pour cela, il faut savoir rythmer le changement, donner des objectifs et les atteindre, en redonner d'autres, ne jamais céder, mais ne jamais tomber dans l'illusion que l'on pourra faire tout tout de suite. De la même manière, il faudra dire à nos concitoyens qu'ils n'auront rien sans effort, sans lutte, sans mobilisation et que ce n'est pas forcément de l'Etat que tout doit venir. Il va falloir aussi dire que la démocratie sociale, cela existe, que les syndicats sont nécessaires, que les associations doivent être mobilisées, que les citoyens doivent s'investir, sinon on connaîtra d'autres échecs !
CONCLUSION
Je sais que certains ont peur de notre Congrès, pas du résultat, mais de ce qu'il peut générer. Cependant, nous sommes une grande organisation démocratique. C'est l'honneur des socialistes d'être capables de débattre entre eux.
J'aurais pu considérer, au lendemain du 29 mai, que le congrès pouvait être maintenu à la date prévue, c'est-à-dire au mois de mai 2006. Mais, qu'aurait-on fait jusqu'au mois de mai ? On se serait regardé les uns les autres ? Il y a suffisamment de candidatures pour ne pas attendre le mois de mai. On aurait eu un congrès qui aurait désigné tel ou tel. Ce n'était pas le moment. J'ai voulu qu'il y ait un congrès pour que nous discutions de l'essentiel, c'est-à-dire des idées, des propositions. Il faut donc revendiquer ce grand débat que nous aurons entre nous.
On parle de division des socialistes au regard du nombre de motions : 5. Il pourrait y en avoir moins, mais s'il n'y en avait qu'une, que dirait-on de nous ? Ils sont tous pour le même premier secrétaire, pour la même direction, ils pensent tous la même chose ! Ce n'est pas le Parti socialiste. On sait bien que dans l'histoire du Parti socialiste, il y a toujours eu plusieurs motions. Faut-il encore être capables de savoir ce qui nous rassemble et ce qui nous sépare. Quand je lis les motions ou les contributions, je vois beaucoup de convergences sur l'emploi, sur l'Education, sur le logement et heureusement ! Nous sommes tous socialistes. Et s'il doit y avoir des points de débat, assumons les et voyons ce qui peut être surmonté, ce qui peut être source de compromis fructueux. Mais, en tout cas, évitons les caricatures entre nous.
En général, dans un congrès, on veut toujours être plus à gauche. Cessons de laisser penser qu'il y aurait deux catégories de socialistes : les socialistes mous d'un côté et les socialistes durs, intransigeants. Je ne connais que des socialistes d'accord entre eux pour avoir le même discours dans l'opposition et au pouvoir, c'est cela être socialiste, c'est d'avoir la constance et la cohérence nécessaires. Et puis, il faut éviter les postures. J'évoquais tout à l'heure l'élection présidentielle. Nous avons beaucoup de talents au sein du parti socialiste, je ne m'en plains pas. Mais, là aussi, ce n'est pas le moment. Qu'il y ait beaucoup de talents femme comme homme, c'est plutôt bien ; qu'il y ait des personnalités qui pourraient le moment venu nous représenter, j'en suis plutôt fier comme Premier secrétaire du parti socialiste, mais ce moment n'est pas venu.
Et le congrès du mois de novembre doit être un congrès sur nos propositions et pas sur la désignation de notre candidate ou de notre candidat à l'élection présidentielle. Cela viendra et je proposerai même un calendrier tout simple qui serait le suivant : on bâtit notre projet au Mans, on se rassemble autour de lui, ensuite on fait le contrat de gouvernement avec nos partenaires de la gauche ; on désigne nos candidats aux élections législatives au printemps ou à l'été 2006 et, à la fin de l'année 2006, on choisit notre candidate ou notre candidat.
Certains disent que c'est trop tard. J'ai le souvenir de ce qu'avait fait François Mitterrand pour l'élection de 1981 -ce n'est tout de même pas une mauvaise référence. Il s'était fait désigner en novembre 1980. J'ai repris à peu près le même calendrier. Cela ne lui avait pas porté tort pour 1981.
Voilà ce que doit être notre congrès. N'en n'ayez pas peur. Investissez vous dans ce débat. Faites en sorte qu'il soit la meilleure image pour le parti socialiste et faisons aussi effort entre nous de nous respecter. Et, la meilleure façon de nous respecter, c'est de respecter le vote des militants. Parce que, dans un parti démocratique comme le nôtre, quand les militants ont voté, c'est la règle commune. Cela aurait dû l'être après notre référendum interne, cela ne l'a pas été et je l'ai regretté. Cela doit l'être pour notre congrès et pour la désignation de notre candidat ou de notre candidate à l'élection présidentielle. C'est pourquoi, je souhaite que dans le congrès du Mans il y ait une motion -vous choisirez laquelle- qui rentre majoritaire au congrès, comme cela à la Commission des résolutions, la nuit, il n'y aura pas de petits arrangements ou de grands compromis. Chacun saura à l'ouverture du congrès qui dirigera le Parti socialiste, sur quelle orientation et avec quelle stratégie. C'est aussi cela la démocratie. Ce que je sais, c'est que quelle que soit la ligne qui sera choisie par les militants, je serai à ma place comme socialiste derrière la ligne du parti socialiste. La ligne majoritaire du parti socialiste doit être la ligne de tout le parti socialiste. C'est comme cela que l'on pourra rassembler les socialistes et rassembler la gauche.
Il nous reste peu de temps, 18 mois à peine, pour forger nos propositions, peu de temps pour rassembler la gauche ; mais il nous en reste suffisamment pour être conscients aussi de nos exigences.
J'ai confiance en vous. Je sais que les socialistes comprennent l'attente qui est portée sur eux. Nos concitoyens nous demandent d'être au rendez-vous de 2007. Ils savent que vous allez décider, car c'est vous qui allez décider, là, au mois de novembre prochain, ce que doit être la stratégie du parti socialiste. Vous ferez ce choix non pas en fonction de vos amitiés ou de vos impressions de militants, mais en citoyen. Ce que vous déciderez au congrès du Mans va également décider de la configuration de la gauche et de la capacité de la gauche à gagner 2007.
Faites en sorte, par votre vote, votre implication, votre militantisme, de donner au parti socialiste la force nécessaire. Faites en sorte que la gauche puisse se rassembler au printemps 2006. Faites en sorte que, le moment venu, nous désignions notre candidate ou notre candidat avec un projet capable de convaincre les Français, et alors vous aurez fait votre devoir de socialistes et vous aurez donné à notre pays l'espérance qui lui manque aujourd'hui.
Soyons au rendez-vous de 2007 parce que si nous ne demandons pas la lune à travers notre programme, nous voulons une terre différente, une Europe différente, une France différente et c'est vous, les socialistes, qui avez la réponse.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 30 septembre 2005)