Texte intégral
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Le projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbains, qui vous est présenté aujourd'hui par Jean-Claude GAYSSOT, Louis BESSON et moi-même, est le troisième volet de la politique urbaine du gouvernement. Celui-ci s'inscrit en effet après les lois sur l'agglomération et l'intercommunalité présentées par Dominique VOYNET et Jean-Pierre CHEVENEMENT, et après le comité interministériel des villes présidé par le Premier ministre le 14 décembre dernier.
Le sens de ce texte est de proposer aux élus et acteurs locaux de nouveaux outils pour penser et faire nos villes de demain. Quelles villes voulons-nous pour le XXIème siècle, vers quel modèle urbain voulons-nous tendre ? Telles sont les deux interrogations principales auxquelles il nous faut apporter des réponses.
Avant d'engager ce débat avec vous, Mesdames et Messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord m'attarder sur la place de la ville dans notre société contemporaine. Plus précisément, je voudrais tordre le coup à l'idée que nous ne parlons pas de tous les habitants de notre pays, mais seulement de 80% d'entre eux, ceux qui vivent en ville.
Vous le savez, nombreux sont aujourd'hui les discours qui opposent l'espace rural et l'espace urbain. A l'issue du rapport HYEST - CARRAZ ou dans le cadre de la réforme du service public hospitalier, nous avons vu renaître cette opposition dans le débat politique. A chaque fois, nous avons entendu un discours qui vise à séparer les Français en deux catégories : les urbains et les ruraux. Oui, dans ce pays où nous proclamons tous haut et fort que la république est une et indivisible, nous continuons à entretenir des murailles à la porte de nos villes.
Je réfute plus que jamais ces oppositions stériles entre ville et campagne. L'avenir de nos territoires urbains et ruraux concerne tout le monde, car les enjeux qui s'y posent sont liés. Comment ne pas voir de similitudes entre ce qu'on qualifie en France de " violences urbaines " et la révolte parfois excessive des agriculteurs ou des chasseurs ? Comment ne pas se rendre compte que la sécurité de nos villes et celle de nos villages sont intimement liées ? Comment ignorer encore que les modèles dominants qui émergent dans nos villes se retrouvent partout en France en raison de la puissance des moyens de télécommunications ? Mais surtout, comment ne pas voir que nos concitoyens aspirent autant à la ville qu'à la ruralité, sans doute à des moments différents ?
L'enjeu n'est plus d'opposer deux catégories de Français, mais bien de donner à tous le droit à la ville, mais aussi le droit de s'en libérer. L'homme de demain ne sera ni urbain, ni rural, il sera les deux à la fois, à condition cependant qu'il en ait les moyens. Et c'est là que se situe le défi d'une nouvelle politique d'aménagement des territoires.
Nos villes concernent donc tout le monde. Poser la question de leur avenir au siècle prochain est un enjeu national. Dans ce débat, la première conférence des villes organisée par les trois grandes associations de maires que sont l'AMGVF, la FMVM et l'AMVBF, a été une initiative forte au cours de laquelle le Premier ministre a pu rappeler toute sa détermination à conduire une politique urbaine ambitieuse. Le gouvernement est prêt à relever le défi urbain.
En terme de vision politique, je ne fais pas mienne l'idée libérale qui consiste à croire que l'équilibre de nos villes va de soi. Pour moi, la main invisible du marché n'a jamais régulé la volonté des hommes de vivre ensemble. En l'occurrence, ce qui fait la richesse de la ville, sa densité, en fait aussi sa faiblesse, le rejet de l'autre. L'anonymat qui caractérise la ville et qui permet de s'y sentir vraiment libre, peut aussi engendrer l'exclusion. La cohésion sociale dans nos villes n'est donc pas garantie, surtout dans un contexte de croissance qui, s'il ne profitait pas à tous, pourrait renforcer le sentiment d'une partie des habitants de ne pas être des citoyens comme les autres.
Une ville solidaire, sans ghetto, où chacun peut se déplacer librement parce que tout le monde se sent inséré pleinement dans la société, est un modèle qu'il nous faut défendre au quotidien. Tel est le sens que je donne à mon travail au sein du gouvernement.
Pour ce faire, la politique de la ville portée par Lionel JOSPIN repose sur deux ambitions.
La première est de redonner à nos quartiers les plus défavorisés, les plus rejetés socialement et urbanistiquement, une réalité sociale et une image renouvelées, car le premier souci des habitants de nos quartiers est bien de vivre une vie normale.
Dans cette perspective, les contrats de ville ont d'abord été relancés, puis renforcés. En terme de méthode, une place plus grande a été donnée aux élus locaux, et la solidarité intercommunale et la démocratie locale ont été approfondies. En terme de moyens, les contrats de ville ont été très largement dotés. Ceux-ci bénéficieront en effet pour les sept prochaines années de moyens en hausse de 70% avec 17,7 milliards de francs de crédits, dont 8,9 pour le seul ministère de la ville au lieu de 3,5 au cours du plan précédent. Tout confondu, l'effort public annuel global en faveur de la politique de la ville est passé de 21 milliards de francs en 1997 à 35 milliards de francs prévus en 2000.
A cet effort viendra s'ajouter en outre la nouvelle ambition du plan de rénovation urbaine et de solidarité, annoncé par le Premier ministre lors du comité interministériel des villes du 14 décembre dernier. Un programme national de renouvellement urbain, centré autour de 50 Grands Projets de Ville, a notamment été lancé. Il permettra de redonner à chacun de nos quartiers une perspective d'avenir, mais aussi des moyens renforcés en terme de gestion quotidienne. Sur la base de projets élaborés par les acteurs locaux, avec les habitants, de vastes opérations de construction / démolition et de transformation urbaine seront engagées. Ainsi, pour démolir ces barres et ces tours qui ont été construites dans les années 60 en vue de répondre à la nécessité d'accueillir une main d'uvre abondante pour nos industries, 10.000 à 12.000 démolitions de logements HLM sont prévues annuellement contre 5.000 actuellement. Ces démolitions doivent être compensées par les 20.000 reconstructions que permet ce projet de loi, des reconstructions de logements sociaux mieux réparties sur l'agglomération et mieux adaptées à la demande de la population.
Ce grand programme de renouvellement urbain permettra par ailleurs de faire face aux problèmes d'un certain nombre de nos copropriétés les plus en difficulté. Soyons clairs, pour une partie d'entre elles, des démolitions / reconstructions s'imposent également. Mais d'une manière générale, il convient de répondre à ces situations par des actions ciblées, qu'elles soient préventives ou réparatrices. Lors du dernier comité interministériel des villes, le gouvernement s'est déjà engagé. Le dispositif du plan de sauvegarde, qui n'apportait aucune solution financière aux acteurs locaux, a été doté d'un véritable contenu : une prime à l'amélioration de l'habitat pour les parties communes, la possibilité de mobiliser l'enveloppe de 3 milliards de fonds propres de la caisse des dépôts et consignations pour assurer des avances aux syndicats de copropriétaires. Ce projet de loi propose d'aller plus loin encore dans ce sens, par exemple en mobilisant effectivement le fonds de solidarité logement en faveur des copropriétaires les plus en difficulté dans le cadre des plans de sauvegarde. Il propose par ailleurs toute une série de mesures préventives qui visent à éviter les situations dramatiques que nous connaissons aujourd'hui pour certaines copropriétés.
Redonner une attractivité à nos quartiers suppose également de mettre en place une politique volontariste de développement économique. En effet, combien de fois n'ai-je pas vu lors de mes déplacements sur le terrain ces grands ensembles monofonctionnels, dans lesquels la vie économique n'existait pas, dans lesquels les habitants du reste de la ville ne venaient plus ?
A l'Assemblée nationale, j'ai déjà eu l'occasion d'aborder ce sujet en proposant deux amendements qui ont obtenu l'unanimité. J'aurai l'occasion à nouveau au cours de ce débat de revenir sur ce thème qui me tient à cur. Je vous proposerai notamment la création de sociétés d'investissement régionales capables d'investir dans nos quartiers à des taux de rentabilité inférieurs à ceux du marché. Je vous proposerai également la création d'un fonds d'aide au maintien du commerce et à l'investissement dans nos quartiers.
La première ambition de la politique de la ville voulue par Lionel JOSPIN est donc bien la redynamisation de nos quartiers qui vont mal et dont l'image est la plus dévalorisée aux yeux de l'ensemble de la population.
Mais cela ne suffit pas, car si nous ne répondons pas en même temps aux processus d'exclusion urbaine qui sont à l'uvre à l'échelle de nos agglomérations, nous reproduirons à l'avenir les mêmes dynamiques de ségrégation. C'est la ville dans sa globalité qu'il faut repenser, car la société et l'économie ont évolué.
Au moment même où, grâce aux lois CHEVENEMENT et VOYNET, ce nouveau territoire de solidarité qu'est l'agglomération est en train d'émerger, nous devons dépasser les égoïsmes communaux en terme de réalisation de logements sociaux. Il faut faire apparaître les non-dits, il faut que le débat sur le logement à destination de nos concitoyens les plus modestes ait lieu ouvertement. Car, lorsque le débat de fond a lieu, la mauvaise foi ne tient pas longtemps. Dans ce débat, certains élus ont cru en effet abuser leur population en prétendant que le gouvernement voulait construire des barres et des tours dans leur ville, en allant chercher je ne sais quel fantasme sur le logement social. Et que s'est-il passé ? Nos concitoyens ont compris que le logement social moderne, c'était du petit collectif ou de la maison individuelle bien intégré à la ville. Nos concitoyens ont également compris que leurs enfants ou eux-mêmes auraient peut-être un jour le besoin d'occuper un logement social, comme un Français sur trois le fait un jour dans sa vie. Et donc, près de 80% des français ont approuvé la nécessité qu'il y ait au moins 20% de logements sociaux dans chaque commune.
Ce chiffre est éloquent. Il illustre l'adhésion des Français au logement social, au droit au logement pour tous dans des conditions décentes. Il illustre le rejet des villes du ghetto, produits d'un libéralisme débridé. C'est un message politique que nous devons tous reconnaître.
Mais il ne suffit pas simplement de reconnaître qu'on est " pour la mixité sociale et contre les ghettos ", il faut agir. La loi d'orientation pour la ville, défendue par Michel DELEBARRE en 1991, se voulait déjà pédagogique. Au bilan, elle aura montré que, derrière le discours national, il est facile pour certains élus de continuer le non-dit au niveau local.
Alors, Mesdames et Messieurs les sénateurs de l'opposition, si vous êtes " pour la mixité sociale et contre les ghettos ", il vous faut approuver les dispositions de ce texte dans leur esprit actuel. Personne ne sera dupe. Dénaturer le texte signifiera très clairement que vos actes ne sont pas à la hauteur de vos paroles. Ce gouvernement a fait sienne la devise : " dire ce que l'on fait et faire ce que l'on dit ", je vous invite à en faire autant lors de ces débats que j'attends donc riches et constructifs.
Merci pour votre attention.
(source http://www.ville.gouv.fr, le 5 mai 2000)
Le projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbains, qui vous est présenté aujourd'hui par Jean-Claude GAYSSOT, Louis BESSON et moi-même, est le troisième volet de la politique urbaine du gouvernement. Celui-ci s'inscrit en effet après les lois sur l'agglomération et l'intercommunalité présentées par Dominique VOYNET et Jean-Pierre CHEVENEMENT, et après le comité interministériel des villes présidé par le Premier ministre le 14 décembre dernier.
Le sens de ce texte est de proposer aux élus et acteurs locaux de nouveaux outils pour penser et faire nos villes de demain. Quelles villes voulons-nous pour le XXIème siècle, vers quel modèle urbain voulons-nous tendre ? Telles sont les deux interrogations principales auxquelles il nous faut apporter des réponses.
Avant d'engager ce débat avec vous, Mesdames et Messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord m'attarder sur la place de la ville dans notre société contemporaine. Plus précisément, je voudrais tordre le coup à l'idée que nous ne parlons pas de tous les habitants de notre pays, mais seulement de 80% d'entre eux, ceux qui vivent en ville.
Vous le savez, nombreux sont aujourd'hui les discours qui opposent l'espace rural et l'espace urbain. A l'issue du rapport HYEST - CARRAZ ou dans le cadre de la réforme du service public hospitalier, nous avons vu renaître cette opposition dans le débat politique. A chaque fois, nous avons entendu un discours qui vise à séparer les Français en deux catégories : les urbains et les ruraux. Oui, dans ce pays où nous proclamons tous haut et fort que la république est une et indivisible, nous continuons à entretenir des murailles à la porte de nos villes.
Je réfute plus que jamais ces oppositions stériles entre ville et campagne. L'avenir de nos territoires urbains et ruraux concerne tout le monde, car les enjeux qui s'y posent sont liés. Comment ne pas voir de similitudes entre ce qu'on qualifie en France de " violences urbaines " et la révolte parfois excessive des agriculteurs ou des chasseurs ? Comment ne pas se rendre compte que la sécurité de nos villes et celle de nos villages sont intimement liées ? Comment ignorer encore que les modèles dominants qui émergent dans nos villes se retrouvent partout en France en raison de la puissance des moyens de télécommunications ? Mais surtout, comment ne pas voir que nos concitoyens aspirent autant à la ville qu'à la ruralité, sans doute à des moments différents ?
L'enjeu n'est plus d'opposer deux catégories de Français, mais bien de donner à tous le droit à la ville, mais aussi le droit de s'en libérer. L'homme de demain ne sera ni urbain, ni rural, il sera les deux à la fois, à condition cependant qu'il en ait les moyens. Et c'est là que se situe le défi d'une nouvelle politique d'aménagement des territoires.
Nos villes concernent donc tout le monde. Poser la question de leur avenir au siècle prochain est un enjeu national. Dans ce débat, la première conférence des villes organisée par les trois grandes associations de maires que sont l'AMGVF, la FMVM et l'AMVBF, a été une initiative forte au cours de laquelle le Premier ministre a pu rappeler toute sa détermination à conduire une politique urbaine ambitieuse. Le gouvernement est prêt à relever le défi urbain.
En terme de vision politique, je ne fais pas mienne l'idée libérale qui consiste à croire que l'équilibre de nos villes va de soi. Pour moi, la main invisible du marché n'a jamais régulé la volonté des hommes de vivre ensemble. En l'occurrence, ce qui fait la richesse de la ville, sa densité, en fait aussi sa faiblesse, le rejet de l'autre. L'anonymat qui caractérise la ville et qui permet de s'y sentir vraiment libre, peut aussi engendrer l'exclusion. La cohésion sociale dans nos villes n'est donc pas garantie, surtout dans un contexte de croissance qui, s'il ne profitait pas à tous, pourrait renforcer le sentiment d'une partie des habitants de ne pas être des citoyens comme les autres.
Une ville solidaire, sans ghetto, où chacun peut se déplacer librement parce que tout le monde se sent inséré pleinement dans la société, est un modèle qu'il nous faut défendre au quotidien. Tel est le sens que je donne à mon travail au sein du gouvernement.
Pour ce faire, la politique de la ville portée par Lionel JOSPIN repose sur deux ambitions.
La première est de redonner à nos quartiers les plus défavorisés, les plus rejetés socialement et urbanistiquement, une réalité sociale et une image renouvelées, car le premier souci des habitants de nos quartiers est bien de vivre une vie normale.
Dans cette perspective, les contrats de ville ont d'abord été relancés, puis renforcés. En terme de méthode, une place plus grande a été donnée aux élus locaux, et la solidarité intercommunale et la démocratie locale ont été approfondies. En terme de moyens, les contrats de ville ont été très largement dotés. Ceux-ci bénéficieront en effet pour les sept prochaines années de moyens en hausse de 70% avec 17,7 milliards de francs de crédits, dont 8,9 pour le seul ministère de la ville au lieu de 3,5 au cours du plan précédent. Tout confondu, l'effort public annuel global en faveur de la politique de la ville est passé de 21 milliards de francs en 1997 à 35 milliards de francs prévus en 2000.
A cet effort viendra s'ajouter en outre la nouvelle ambition du plan de rénovation urbaine et de solidarité, annoncé par le Premier ministre lors du comité interministériel des villes du 14 décembre dernier. Un programme national de renouvellement urbain, centré autour de 50 Grands Projets de Ville, a notamment été lancé. Il permettra de redonner à chacun de nos quartiers une perspective d'avenir, mais aussi des moyens renforcés en terme de gestion quotidienne. Sur la base de projets élaborés par les acteurs locaux, avec les habitants, de vastes opérations de construction / démolition et de transformation urbaine seront engagées. Ainsi, pour démolir ces barres et ces tours qui ont été construites dans les années 60 en vue de répondre à la nécessité d'accueillir une main d'uvre abondante pour nos industries, 10.000 à 12.000 démolitions de logements HLM sont prévues annuellement contre 5.000 actuellement. Ces démolitions doivent être compensées par les 20.000 reconstructions que permet ce projet de loi, des reconstructions de logements sociaux mieux réparties sur l'agglomération et mieux adaptées à la demande de la population.
Ce grand programme de renouvellement urbain permettra par ailleurs de faire face aux problèmes d'un certain nombre de nos copropriétés les plus en difficulté. Soyons clairs, pour une partie d'entre elles, des démolitions / reconstructions s'imposent également. Mais d'une manière générale, il convient de répondre à ces situations par des actions ciblées, qu'elles soient préventives ou réparatrices. Lors du dernier comité interministériel des villes, le gouvernement s'est déjà engagé. Le dispositif du plan de sauvegarde, qui n'apportait aucune solution financière aux acteurs locaux, a été doté d'un véritable contenu : une prime à l'amélioration de l'habitat pour les parties communes, la possibilité de mobiliser l'enveloppe de 3 milliards de fonds propres de la caisse des dépôts et consignations pour assurer des avances aux syndicats de copropriétaires. Ce projet de loi propose d'aller plus loin encore dans ce sens, par exemple en mobilisant effectivement le fonds de solidarité logement en faveur des copropriétaires les plus en difficulté dans le cadre des plans de sauvegarde. Il propose par ailleurs toute une série de mesures préventives qui visent à éviter les situations dramatiques que nous connaissons aujourd'hui pour certaines copropriétés.
Redonner une attractivité à nos quartiers suppose également de mettre en place une politique volontariste de développement économique. En effet, combien de fois n'ai-je pas vu lors de mes déplacements sur le terrain ces grands ensembles monofonctionnels, dans lesquels la vie économique n'existait pas, dans lesquels les habitants du reste de la ville ne venaient plus ?
A l'Assemblée nationale, j'ai déjà eu l'occasion d'aborder ce sujet en proposant deux amendements qui ont obtenu l'unanimité. J'aurai l'occasion à nouveau au cours de ce débat de revenir sur ce thème qui me tient à cur. Je vous proposerai notamment la création de sociétés d'investissement régionales capables d'investir dans nos quartiers à des taux de rentabilité inférieurs à ceux du marché. Je vous proposerai également la création d'un fonds d'aide au maintien du commerce et à l'investissement dans nos quartiers.
La première ambition de la politique de la ville voulue par Lionel JOSPIN est donc bien la redynamisation de nos quartiers qui vont mal et dont l'image est la plus dévalorisée aux yeux de l'ensemble de la population.
Mais cela ne suffit pas, car si nous ne répondons pas en même temps aux processus d'exclusion urbaine qui sont à l'uvre à l'échelle de nos agglomérations, nous reproduirons à l'avenir les mêmes dynamiques de ségrégation. C'est la ville dans sa globalité qu'il faut repenser, car la société et l'économie ont évolué.
Au moment même où, grâce aux lois CHEVENEMENT et VOYNET, ce nouveau territoire de solidarité qu'est l'agglomération est en train d'émerger, nous devons dépasser les égoïsmes communaux en terme de réalisation de logements sociaux. Il faut faire apparaître les non-dits, il faut que le débat sur le logement à destination de nos concitoyens les plus modestes ait lieu ouvertement. Car, lorsque le débat de fond a lieu, la mauvaise foi ne tient pas longtemps. Dans ce débat, certains élus ont cru en effet abuser leur population en prétendant que le gouvernement voulait construire des barres et des tours dans leur ville, en allant chercher je ne sais quel fantasme sur le logement social. Et que s'est-il passé ? Nos concitoyens ont compris que le logement social moderne, c'était du petit collectif ou de la maison individuelle bien intégré à la ville. Nos concitoyens ont également compris que leurs enfants ou eux-mêmes auraient peut-être un jour le besoin d'occuper un logement social, comme un Français sur trois le fait un jour dans sa vie. Et donc, près de 80% des français ont approuvé la nécessité qu'il y ait au moins 20% de logements sociaux dans chaque commune.
Ce chiffre est éloquent. Il illustre l'adhésion des Français au logement social, au droit au logement pour tous dans des conditions décentes. Il illustre le rejet des villes du ghetto, produits d'un libéralisme débridé. C'est un message politique que nous devons tous reconnaître.
Mais il ne suffit pas simplement de reconnaître qu'on est " pour la mixité sociale et contre les ghettos ", il faut agir. La loi d'orientation pour la ville, défendue par Michel DELEBARRE en 1991, se voulait déjà pédagogique. Au bilan, elle aura montré que, derrière le discours national, il est facile pour certains élus de continuer le non-dit au niveau local.
Alors, Mesdames et Messieurs les sénateurs de l'opposition, si vous êtes " pour la mixité sociale et contre les ghettos ", il vous faut approuver les dispositions de ce texte dans leur esprit actuel. Personne ne sera dupe. Dénaturer le texte signifiera très clairement que vos actes ne sont pas à la hauteur de vos paroles. Ce gouvernement a fait sienne la devise : " dire ce que l'on fait et faire ce que l'on dit ", je vous invite à en faire autant lors de ces débats que j'attends donc riches et constructifs.
Merci pour votre attention.
(source http://www.ville.gouv.fr, le 5 mai 2000)