Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de participer à la séance de clôture du Forum Intermed qui cette année se déroule à Bordeaux.
Vos travaux ont porté sur les médicaments anti-infectieux avec un sous-titre au programme qui me paraît parfaitement résumer la problématique actuelle de la politique du médicament dans son ensemble : "stratégie industrielle et stratégie de santé publique : cohérence ou conflit ?"
Je souhaiterais saisir l'occasion de ma présence parmi vous pour vous faire part de mes réflexions en matière de politique du médicament et les replacer dans le cadre plus général du débat sur la protection sociale que je viens de lancer.
Je voudrais avant toute chose rendre hommage à l'industrie pharmaceutique qui par sa capacité d'innovation a contribué d'une manière primordiale à l'amélioration de l'état de santé et à l'allongement de l'espérance de vie des Français.
Mais l'industrie pharmaceutique a encore bien des défis à relever. Je pense à la lutte contre les fléaux modernes que sont le SIDA et l'hépatite C. Je pense aussi à la découverte des médicaments nécessaires pour soigner les pathologies pour lesquelles il n'en existe pas encore et elles sont, hélas, très nombreuses. Je pense enfin aux perspectives immenses qui sont ouvertes par les avancées actuelles en matière de biotechnologies et à plus long terme de thérapies géniques.
Je voudrais en second lieu vous dire que j'ai pleinement conscience que l'industrie pharmaceutique traverse une période de mutation sans précédent et qu'il faut tout faire pour que la France conserve dans ce secteur stratégique une place importante.
Car, si les performances de notre industrie sont flatteuses, elles ne doivent pas cacher l'effort nécessaire de modernisation qu'il lui faudra impérativement accomplir.
La France est le quatrième marché mondial avec 6,1 % des ventes de médicaments. Notre industrie pharmaceutique c'est 100 Mds de F de chiffre d'affaire, 13 Mds de F consacrés chaque année à la recherche et 82.000 emplois.
Mais malgré ces atouts elle traverse une période de mutation douloureuse en raison notamment d'un mouvement mondial de concentration industrielle. Il n'y a pas de semaine en effet, sans que soit annoncée au niveau mondial la fusion de groupes pharmaceutiques en vue de la constitution de géants industriels, capables de supporter les investissements nécessaires au développement et à la commercialisation de molécules innovantes, les chiffres, il est vrai, sont impressionnants : il faut aujourd'hui, me dit-on, investir de 1 à 2 Mds de F pour développer une molécule qui sera commercialisée au plan international.
Face à ce mouvement de fond, l'industrie française doit s'adapter pour rattraper ses concurrentes en terme de capacité d'innovation ainsi qu'en témoigne le fait que sa part dans les découvertes de molécules innovantes a reculé du 2ème au 9ème rang mondial en 20 ans.
Ce constat me conduit à la première réflexion que je voudrais vous livrer notre politique du médicament doit tenir compte de l'impératif de modernisation de notre industrie pharmaceutique.
La politique du médicament ne doit pas, en effet, reposer sur une vision statique et conservatrice de l'industrie. La mondialisation du marché du médicament, la libre circulation des produits dans l'Union Européenne, tout cela exige des évolutions fortes pour s'adapter à une concurrence véritable et secouer les habitudes acquises sur un marché national peut-être un peu trop longtemps protégé : notre industrie pharmaceutique doit davantage exporter, elle doit encore se concentrer, elle doit mettre en place des stratégies plus sélectives de recherche et de développement en liaison avec les universités et les instituts de recherche public ; elle doit entrer avec conviction sur les nouveaux marchés, qu'il s'agisse des produits génétiques ou biotechnologies et ne pas les abandonner à nos concurrents.
Je souhaite tout particulièrement voir se développer le marché du générique. Il ne représente aujourd'hui que 2 % des ventes de médicaments en France contre 16 % en Allemagne. Le niveau des prix français longtemps plus bas en moyenne que celui des autres pays européens n'explique pas à lui seul ce retard. Le Comité Économique du Médicament va prochainement conclure le premier accord prix-volume avec un laboratoire qui commercialise exclusivement des médicaments génériques. C'est un premier pas dans le bon sens.
Pour sa part, l'État a largement entamé son évolution. Depuis trois ans, l'administration centrale a profondément modifié son visage avec la naissance de l'Agence Française du Médicament et du Comité Économique du Médicament. Ces deux institutions aujourd'hui bien assises assurent avec efficacité leur mission. Soumise à la concurrence administrative des autres agences nationales de nos partenaires de l'Union Européenne, l'Agence du Médicament et contrainte à sans cesse accroître la qualité de ses prestations et surveiller ses délais de décision qui sont aujourd'hui parmi les plus bas d'Europe pour la mise sur le marché.
Cette organisation administrative clarifiée doit contribuer à l'adaptation de notre industrie pharmaceutique et à la maîtrise de l'évolution des dépenses de santé.
Cela me conduit à la deuxième réflexion que je voudrais vous livrer en matière de politique du médicament. Notre pays ne pourra durablement améliorer la qualité des soins dispensés et son industrie ne pourra demeurer compétitive que si les dépenses de médicament et plus généralement de santé sont rapidement maîtrisées. Car faute d'y parvenir notre système d'assurance maladie implosera au détriment des malades et des professionnels de santé.
Actuellement, notre politique de maîtrise des dépenses de médicaments repose, vous l'avez dit Monsieur le Président (M. MESURE), sur le choix de la contractualisation plutôt que sur la contrainte financière et comptable. L'objectif de cette politique est de concilier des impératifs de santé publique et la maîtrise des dépenses. Elle marque à n'en pas douter une rupture avec une politique qui reposait sur une logique de prix dont les effets pervers en terme de volume de consommation ont été dénoncés à juste titre.
Aujourd'hui, le médicament est couvert simultanément par deux dispositifs conventionnels.
Une politique d'accord-cadre pluriannuel a été lancée en janvier 1994, avec pour objectif de parvenir à une consommation de médicament mieux adaptée aux besoins de santé publique en contrepartie du développement des ventes de médicaments génériques et d'un réajustement des prix des médicaments. Sur la base de ce dispositif, près de 101 conventions prix-volume, qui représentent 86 % du marché des médicaments remboursés, ont été à ce jour signées entre des industriels et le Comité économique du Médicament.
En outre, les prescriptions de médicament relèvent comme les autres prescriptions, des objectifs conventionnels annuels négociés entre l'assurance maladie et les médecins libéraux, les médicaments représentant 36 % des dépenses concernées par cet accord.
Les premiers résultats de cette politique sont malheureusement contrastés. L'année 1994 a été il est vrai très prometteuse avec une progression de 3 % en 1994 de la dépense, et une stabilité de la dépense remboursée. Mais en 1995, les ventes de médicaments connaissent une tendance à la hausse qui devrait être de l'ordre de 7 %. Nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un tel résultat. Nous devons savoir aller plus loin.
Pour cela, il faut d'abord faire fonctionner le dispositif. Les accords signés devront être respectés et vous le savez la consigne a été donnée au Président du Comité économique du Médicament de veiller au respect des engagements contractuels qui ont été pris.
Ensuite il faut, au plus vite, le rendre plus efficace. Il faut ainsi que très rapidement 100 % du marché du médicament soit couvert par des accords prix-volume et que soit placé au centre de ce système l'impératif du bon usage du médicament.
Enfin, il faut l'intégrer dans un cadre renforcé et global des maîtrises des dépenses de santé qui prenne en compte l'ensemble des acteurs de la chaîne du médicament et plus généralement l'ensemble des professions de santé.
Pour y parvenir, il faudra rénover notre système d'assurance maladie au même titre que l'ensemble de notre système de protection sociale.
Sur cet enjeu essentiel, j'ai souhaité, vous le savez, qu'un vaste débat soit lancé dans le pays sur les vraies questions qui se posent pour moderniser et rendre plus juste notre système de protection sociale. C'est au terme de ce débat qui se déroulera dans chaque région et qui se conclura au Parlement à la mi-novembre que j'annoncerai les mesures qui seront prises pour ramener en deux ans notre système de protection sociale à l'équilibre financier mais aussi pour le rendre plus juste et équitable.
Sans vouloir anticiper sur ce débat je souhaiterais vous exposer les principales questions qui devront être abordées en matière d'assurance maladie et plus particulièrement dans le domaine du médicament.
Vous connaissez la situation : 10 % du PIB consacré aux dépenses de santé, ce qui nous place au troisième rang mondial, alors que nos indicateurs de santé publique sont à peine dans la moyenne européenne, 35 Mds de F de déficit tendanciel de l'assurance maladie. Un système devenu inégalitaire puisque, pour ne prendre que deux exemples, beaucoup trop nombreux sont ceux de nos concitoyens qui n'ont pas effectivement accès aux soins et que le taux de mortalité des RMistes est deux fois supérieur à la moyenne nationale.
Enfin, un système qui se caractérise par des gaspillages. Ainsi en matière de consommation de médicaments, par exemple, les Français consomment deux fois plus d'anxiolytiques que leurs voisins européens et deux fois plus d'antibiotiques que les Allemands ou les Italiens. En sont-ils pour autant mieux soignés ?
Ce constat montre à quel point il faut réformer et moderniser notre système.
Deux problèmes me paraissent notamment devoir être clairement soulevés. Le premier est celui des comportements de prescription des médecins qui conduisent, nous le savons, à une consommation excessive de médicaments par nos concitoyens.
Pour modifier cette situation il faut mettre en place les outils nécessaires et faire évoluer les mentalités.
L'élargissement et le renforcement des références médicales opposables (RMO) est une nécessité. La connaissance et le suivi de la prescription sont également indispensables. Vous le savez, je souhaite que l'on avance rapidement dans la voie du codage des actes et de la généralisation du carnet médical. Je souhaite également que soit posé le problème de la prescription de médicaments hors des indications pour lesquelles ils ont été admis au remboursement et des conditions dans lesquelles ces comportements dangereux pour la santé des malades devront être sanctionnés.
Mais, il faudra aussi agir sur les mentalités. Cela conduit bien sûr à se poser la question de la formation initiale des médecins et de l'obligation de formation continue obligatoire mais également celle de l'efficacité avec laquelle l'industrie pharmaceutique parviendra à lutter contre certaines dérives dans le domaine de ce que l'on appelle la "visite médicale".
Le second problème qui me parait essentiel est celui de la façon dont notre système de santé tirera profit des progrès thérapeutiques.
En effet, ces progrès dus à l'innovation pharmaceutique ainsi qu'aux avancées récentes en matière chirurgicale ont ouvert des perspectives très importantes de réduction des durées d'hospitalisation. Un des enjeux de la réforme de l'hôpital est d'en tirer toutes les conséquences en matière d'organisation, de structure et d'amélioration de la qualité des soins.
Ces questions vous concernent en tant que professionnels de santé attachés à l'amélioration de la qualité des soins et des prises en charge. Ils vous concernent aussi en tant qu'industriels. Car si l'on ne fait rien pour ramener notre système de protection sociale à l'équilibre, il faudra accepter de voir les prélèvements obligatoires augmenter encore et toujours pour couvrir les déficits et cela au détriment de la compétitivité de notre économie et principalement des industries qui comme la vôtre sont profondément engagées dans les marchés internationaux.
Je sais que vous êtes tous conscients de ces enjeux et que vous prendrez votre part dans ce débat, notamment dans le cadre des forums régionaux de protection sociale qui se dérouleront du 9 au 30 octobre prochain et en Aquitaine, le 12 octobre sous la présidence de Mme HUBERT. Je sais aussi que vous avez pleinement conscience que nous devrons tous prendre notre part de responsabilité pour redresser notre système de protection sociale et le rendre plus juste et plus efficace. Ainsi, c'est avec beaucoup de satisfaction que j'ai pris acte, par la voix de M. MESURE, du fait que l'industrie pharmaceutique était décidée à participer activement à cet effort de redressement qui engage notre avenir collectif.
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de participer à la séance de clôture du Forum Intermed qui cette année se déroule à Bordeaux.
Vos travaux ont porté sur les médicaments anti-infectieux avec un sous-titre au programme qui me paraît parfaitement résumer la problématique actuelle de la politique du médicament dans son ensemble : "stratégie industrielle et stratégie de santé publique : cohérence ou conflit ?"
Je souhaiterais saisir l'occasion de ma présence parmi vous pour vous faire part de mes réflexions en matière de politique du médicament et les replacer dans le cadre plus général du débat sur la protection sociale que je viens de lancer.
Je voudrais avant toute chose rendre hommage à l'industrie pharmaceutique qui par sa capacité d'innovation a contribué d'une manière primordiale à l'amélioration de l'état de santé et à l'allongement de l'espérance de vie des Français.
Mais l'industrie pharmaceutique a encore bien des défis à relever. Je pense à la lutte contre les fléaux modernes que sont le SIDA et l'hépatite C. Je pense aussi à la découverte des médicaments nécessaires pour soigner les pathologies pour lesquelles il n'en existe pas encore et elles sont, hélas, très nombreuses. Je pense enfin aux perspectives immenses qui sont ouvertes par les avancées actuelles en matière de biotechnologies et à plus long terme de thérapies géniques.
Je voudrais en second lieu vous dire que j'ai pleinement conscience que l'industrie pharmaceutique traverse une période de mutation sans précédent et qu'il faut tout faire pour que la France conserve dans ce secteur stratégique une place importante.
Car, si les performances de notre industrie sont flatteuses, elles ne doivent pas cacher l'effort nécessaire de modernisation qu'il lui faudra impérativement accomplir.
La France est le quatrième marché mondial avec 6,1 % des ventes de médicaments. Notre industrie pharmaceutique c'est 100 Mds de F de chiffre d'affaire, 13 Mds de F consacrés chaque année à la recherche et 82.000 emplois.
Mais malgré ces atouts elle traverse une période de mutation douloureuse en raison notamment d'un mouvement mondial de concentration industrielle. Il n'y a pas de semaine en effet, sans que soit annoncée au niveau mondial la fusion de groupes pharmaceutiques en vue de la constitution de géants industriels, capables de supporter les investissements nécessaires au développement et à la commercialisation de molécules innovantes, les chiffres, il est vrai, sont impressionnants : il faut aujourd'hui, me dit-on, investir de 1 à 2 Mds de F pour développer une molécule qui sera commercialisée au plan international.
Face à ce mouvement de fond, l'industrie française doit s'adapter pour rattraper ses concurrentes en terme de capacité d'innovation ainsi qu'en témoigne le fait que sa part dans les découvertes de molécules innovantes a reculé du 2ème au 9ème rang mondial en 20 ans.
Ce constat me conduit à la première réflexion que je voudrais vous livrer notre politique du médicament doit tenir compte de l'impératif de modernisation de notre industrie pharmaceutique.
La politique du médicament ne doit pas, en effet, reposer sur une vision statique et conservatrice de l'industrie. La mondialisation du marché du médicament, la libre circulation des produits dans l'Union Européenne, tout cela exige des évolutions fortes pour s'adapter à une concurrence véritable et secouer les habitudes acquises sur un marché national peut-être un peu trop longtemps protégé : notre industrie pharmaceutique doit davantage exporter, elle doit encore se concentrer, elle doit mettre en place des stratégies plus sélectives de recherche et de développement en liaison avec les universités et les instituts de recherche public ; elle doit entrer avec conviction sur les nouveaux marchés, qu'il s'agisse des produits génétiques ou biotechnologies et ne pas les abandonner à nos concurrents.
Je souhaite tout particulièrement voir se développer le marché du générique. Il ne représente aujourd'hui que 2 % des ventes de médicaments en France contre 16 % en Allemagne. Le niveau des prix français longtemps plus bas en moyenne que celui des autres pays européens n'explique pas à lui seul ce retard. Le Comité Économique du Médicament va prochainement conclure le premier accord prix-volume avec un laboratoire qui commercialise exclusivement des médicaments génériques. C'est un premier pas dans le bon sens.
Pour sa part, l'État a largement entamé son évolution. Depuis trois ans, l'administration centrale a profondément modifié son visage avec la naissance de l'Agence Française du Médicament et du Comité Économique du Médicament. Ces deux institutions aujourd'hui bien assises assurent avec efficacité leur mission. Soumise à la concurrence administrative des autres agences nationales de nos partenaires de l'Union Européenne, l'Agence du Médicament et contrainte à sans cesse accroître la qualité de ses prestations et surveiller ses délais de décision qui sont aujourd'hui parmi les plus bas d'Europe pour la mise sur le marché.
Cette organisation administrative clarifiée doit contribuer à l'adaptation de notre industrie pharmaceutique et à la maîtrise de l'évolution des dépenses de santé.
Cela me conduit à la deuxième réflexion que je voudrais vous livrer en matière de politique du médicament. Notre pays ne pourra durablement améliorer la qualité des soins dispensés et son industrie ne pourra demeurer compétitive que si les dépenses de médicament et plus généralement de santé sont rapidement maîtrisées. Car faute d'y parvenir notre système d'assurance maladie implosera au détriment des malades et des professionnels de santé.
Actuellement, notre politique de maîtrise des dépenses de médicaments repose, vous l'avez dit Monsieur le Président (M. MESURE), sur le choix de la contractualisation plutôt que sur la contrainte financière et comptable. L'objectif de cette politique est de concilier des impératifs de santé publique et la maîtrise des dépenses. Elle marque à n'en pas douter une rupture avec une politique qui reposait sur une logique de prix dont les effets pervers en terme de volume de consommation ont été dénoncés à juste titre.
Aujourd'hui, le médicament est couvert simultanément par deux dispositifs conventionnels.
Une politique d'accord-cadre pluriannuel a été lancée en janvier 1994, avec pour objectif de parvenir à une consommation de médicament mieux adaptée aux besoins de santé publique en contrepartie du développement des ventes de médicaments génériques et d'un réajustement des prix des médicaments. Sur la base de ce dispositif, près de 101 conventions prix-volume, qui représentent 86 % du marché des médicaments remboursés, ont été à ce jour signées entre des industriels et le Comité économique du Médicament.
En outre, les prescriptions de médicament relèvent comme les autres prescriptions, des objectifs conventionnels annuels négociés entre l'assurance maladie et les médecins libéraux, les médicaments représentant 36 % des dépenses concernées par cet accord.
Les premiers résultats de cette politique sont malheureusement contrastés. L'année 1994 a été il est vrai très prometteuse avec une progression de 3 % en 1994 de la dépense, et une stabilité de la dépense remboursée. Mais en 1995, les ventes de médicaments connaissent une tendance à la hausse qui devrait être de l'ordre de 7 %. Nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un tel résultat. Nous devons savoir aller plus loin.
Pour cela, il faut d'abord faire fonctionner le dispositif. Les accords signés devront être respectés et vous le savez la consigne a été donnée au Président du Comité économique du Médicament de veiller au respect des engagements contractuels qui ont été pris.
Ensuite il faut, au plus vite, le rendre plus efficace. Il faut ainsi que très rapidement 100 % du marché du médicament soit couvert par des accords prix-volume et que soit placé au centre de ce système l'impératif du bon usage du médicament.
Enfin, il faut l'intégrer dans un cadre renforcé et global des maîtrises des dépenses de santé qui prenne en compte l'ensemble des acteurs de la chaîne du médicament et plus généralement l'ensemble des professions de santé.
Pour y parvenir, il faudra rénover notre système d'assurance maladie au même titre que l'ensemble de notre système de protection sociale.
Sur cet enjeu essentiel, j'ai souhaité, vous le savez, qu'un vaste débat soit lancé dans le pays sur les vraies questions qui se posent pour moderniser et rendre plus juste notre système de protection sociale. C'est au terme de ce débat qui se déroulera dans chaque région et qui se conclura au Parlement à la mi-novembre que j'annoncerai les mesures qui seront prises pour ramener en deux ans notre système de protection sociale à l'équilibre financier mais aussi pour le rendre plus juste et équitable.
Sans vouloir anticiper sur ce débat je souhaiterais vous exposer les principales questions qui devront être abordées en matière d'assurance maladie et plus particulièrement dans le domaine du médicament.
Vous connaissez la situation : 10 % du PIB consacré aux dépenses de santé, ce qui nous place au troisième rang mondial, alors que nos indicateurs de santé publique sont à peine dans la moyenne européenne, 35 Mds de F de déficit tendanciel de l'assurance maladie. Un système devenu inégalitaire puisque, pour ne prendre que deux exemples, beaucoup trop nombreux sont ceux de nos concitoyens qui n'ont pas effectivement accès aux soins et que le taux de mortalité des RMistes est deux fois supérieur à la moyenne nationale.
Enfin, un système qui se caractérise par des gaspillages. Ainsi en matière de consommation de médicaments, par exemple, les Français consomment deux fois plus d'anxiolytiques que leurs voisins européens et deux fois plus d'antibiotiques que les Allemands ou les Italiens. En sont-ils pour autant mieux soignés ?
Ce constat montre à quel point il faut réformer et moderniser notre système.
Deux problèmes me paraissent notamment devoir être clairement soulevés. Le premier est celui des comportements de prescription des médecins qui conduisent, nous le savons, à une consommation excessive de médicaments par nos concitoyens.
Pour modifier cette situation il faut mettre en place les outils nécessaires et faire évoluer les mentalités.
L'élargissement et le renforcement des références médicales opposables (RMO) est une nécessité. La connaissance et le suivi de la prescription sont également indispensables. Vous le savez, je souhaite que l'on avance rapidement dans la voie du codage des actes et de la généralisation du carnet médical. Je souhaite également que soit posé le problème de la prescription de médicaments hors des indications pour lesquelles ils ont été admis au remboursement et des conditions dans lesquelles ces comportements dangereux pour la santé des malades devront être sanctionnés.
Mais, il faudra aussi agir sur les mentalités. Cela conduit bien sûr à se poser la question de la formation initiale des médecins et de l'obligation de formation continue obligatoire mais également celle de l'efficacité avec laquelle l'industrie pharmaceutique parviendra à lutter contre certaines dérives dans le domaine de ce que l'on appelle la "visite médicale".
Le second problème qui me parait essentiel est celui de la façon dont notre système de santé tirera profit des progrès thérapeutiques.
En effet, ces progrès dus à l'innovation pharmaceutique ainsi qu'aux avancées récentes en matière chirurgicale ont ouvert des perspectives très importantes de réduction des durées d'hospitalisation. Un des enjeux de la réforme de l'hôpital est d'en tirer toutes les conséquences en matière d'organisation, de structure et d'amélioration de la qualité des soins.
Ces questions vous concernent en tant que professionnels de santé attachés à l'amélioration de la qualité des soins et des prises en charge. Ils vous concernent aussi en tant qu'industriels. Car si l'on ne fait rien pour ramener notre système de protection sociale à l'équilibre, il faudra accepter de voir les prélèvements obligatoires augmenter encore et toujours pour couvrir les déficits et cela au détriment de la compétitivité de notre économie et principalement des industries qui comme la vôtre sont profondément engagées dans les marchés internationaux.
Je sais que vous êtes tous conscients de ces enjeux et que vous prendrez votre part dans ce débat, notamment dans le cadre des forums régionaux de protection sociale qui se dérouleront du 9 au 30 octobre prochain et en Aquitaine, le 12 octobre sous la présidence de Mme HUBERT. Je sais aussi que vous avez pleinement conscience que nous devrons tous prendre notre part de responsabilité pour redresser notre système de protection sociale et le rendre plus juste et plus efficace. Ainsi, c'est avec beaucoup de satisfaction que j'ai pris acte, par la voix de M. MESURE, du fait que l'industrie pharmaceutique était décidée à participer activement à cet effort de redressement qui engage notre avenir collectif.