Déclaration de M. Lionel Jospin, Premier ministre, en réponse à une question sur les mesures en faveur des bas salaires, au Sénat le 11 janvier 2001

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Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Monsieur le sénateur,

Après vous avoir présenté tous mes meilleurs voeux, je voudrais demander au ministre de l'Economie et des Finances, qui s'apprêtait à vous répondre et qui connaît l'ensemble de ce dossier non seulement parce que nous y avons travaillé ensemble, avec la secrétaire d'Etat au Budget, avec la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, y compris pendant toute la période des fêtes, et qui présentera d'ailleurs avec la ministre de l'Emploi et de la Solidarité le dispositif précis, mardi prochain au matin, lorsqu'il sera revenu du voyage qu'il fait, je crois, avec le ministre de l'Economie et des Finances allemand au Japon, de me pardonner l'acte de discourtoisie que je semble commettre à son endroit, puisque c'est un acte de courtoisie que je veux faire à l'intention du ministre Arthuis et du Sénat. Et puis, j'interviens aussi parce qu'il y avait surtout dans votre interpellation un aspect politique - je n'ai pas dit "polémique" mais "politique".

Je voudrais vous dire très simplement, monsieur le sénateur, que si l'opposition n'avait pas saisi le Conseil constitutionnel - et je le dis simplement parce que vous vous êtes permis de demander si les promesses que nous avons fait miroiter auprès de millions de gens seront tenues -, si vous n'aviez pas saisi le Conseil constitutionnel - c'est votre droit, mais mesdames et messieurs les sénateurs, je ne parle pas droit, je parle politique ; le droit n'est pas en cause, j'ai été interpellé sur le plan politique et je réponds - que c'était vraiment cette mesure, destinée à 8 à 9 millions de personnes aux revenus modestes, salariés, mais aussi agriculteurs, mais aussi travailleurs indépendants que vous aviez envie de signaler à la censure possible du Conseil constitutionnel ? En tout cas une chose est certaine : c'est que si au-delà de votre droit - que je ne mets pas du tout en cause - vous n'aviez pas sur ce terrain saisi le Conseil constitutionnel, aujourd'hui, en janvier, ces personnes commenceraient à toucher les premiers versements de cette mesure que nous avions calibrée.
Je réponds aux questions qui me sont posées, y compris sur le miroitement des promesses et sur le fait que nous les tiendrons ou pas. Bien sûr, nous les tiendrons.

Pourquoi pendant toutes ces fêtes et au lendemain, quand nous avons repris le travail - et nous ne l'avons d'ailleurs jamais vraiment cessé -, pourquoi avons-nous eu du mal à trouver un dispositif technique pour aboutir au même résultat ? Justement parce que notre mesure a été censurée. Je ne discute pas cette censure mais notre mesure était bien conçue et bien calibrée. C'est pourquoi il a été difficile de trouver un instrument, une technique qui permette d'aboutir aux mêmes résultats - incitation à l'emploi, apport de revenus supplémentaires pour des personnes aux revenus faibles - qui ne comporte pas de danger. Nous avons fait un choix après un débat. Ce qui me frappe à nouveau, c'est qu'au cours de ces semaines, de ces derniers jours, la discussion a été menée au sein de la majorité sur des propositions, sur des approches, et que c'est encore nous qui avons animé le débat et que c'est encore nous qui tiendrons ces promesses concrètes.
Elles le seront effectivement selon le principe que j'ai indiqué et les modalités qui vous seront indiquées.
Le coût sera conforme, naturellement, à ce qui a été indiqué parce que nous sommes tenus par nos engagements budgétaires et nous respectons le budget, le projet de loi de Finances qui a été désormais voté. Quant au fait que les déclarations d'impôts ont été très rapidement modifiées à l'initiative du ministre de l'Economie et des Finances, alors même que la loi n'est pas votée au Parlement, vous ne pouvez pas, monsieur le sénateur, avancer deux arguments contradictoires, vous ne pouvez pas nous dire : "est-ce que ces personnes toucheront les sommes auxquelles elles s'attendaient ?" et nous demander de ne pas prendre immédiatement - parce que c'était dans les jours qui se sont écoulés - les décisions pour changer la feuille de déclaration d'impôts, cependant que nous disposions des revenus - notamment familiaux - qui nous permettent d'intégrer cela.
Alors, je regrette que vous ayez freiné ces démarches. Nous avons trouvé une méthode pour le faire et au-delà des débats théologiques, idéologiques sur telle ou telle approche, ce qui est sûr, c'est que le Gouvernement confirme que des sommes significatives seront apportées aux salariés modestes et aux autres personnes à ressources modestes dans ce pays, que nous servirons par là même le retour à l'activité et que, je crois, nous servons à la fois une bonne vision sociale et l'activité économique de notre pays."
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 25 janvier 2001)