Déclaration de M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, sur le système de santé français et la réforme de l'assurance maladie, au Sénat le 24 octobre 2005.

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Circonstance : Premières rencontres sociales au Sénat le 24 octobre 2005

Texte intégral

Monsieur le Président du Sénat, je vous remercie de votre accueil et d'avoir organisé cette journée d'échanges et de travail autour d'un thème qui me tient particulièrement à coeur, celui de la santé. Je crois également que les « Rencontres Sociales du Sénat » méritent d'être reconduites d'année en année.
Je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui et de clore cette journée de travail. Je tiens à souligner à mon tour le caractère indispensable de la collaboration entre le gouvernement et le Parlement pour renforcer notre Sécurité Sociale et relayer l'attachement de tous les Français à cette institution qui est au coeur du pacte républicain.
De même, vous avez eu raison de refuser de faire vôtres les conceptions que Jules Romains prête au docteur Knock. De fait, la profession médicale est pleinement engagée dans la réforme de l'assurance maladie pour faire en sorte que chaque euro dépensé soit réellement utile à la santé.
I. La réussite du système de santé et d'assurance maladie français
Dans un domaine où l'on voit tant de dénigrements et de critiques, je voudrais signaler que nous avons raison d'être fiers de notre système de santé et de notre système d'assurance maladie. Certes, les déficits sont excessifs. Cependant, le gouvernement s'attèle à leur réduction, grâce au vote de la loi du 13 août 2004. En outre, ces déficits ne disqualifient en rien notre système d'assurance maladie, dont les performances sont exceptionnelles quand on les compare avec celles des autres systèmes. En effet, on oublie trop souvent à quel point notre Sécurité Sociale est une éclatante réussite.
Citez-moi un pays dans lequel l'accès aux soins est mieux assuré. Citez-moi un pays dans lequel la solidarité de tous devant la santé est mieux assurée. Citez-moi un pays dans lequel, depuis soixante ans, le progrès médical est systématiquement incorporé dans les délais les plus brefs au montant des remboursements pris en charge par l'assurance maladie. En réalité, vous ne trouverez pas un tel pays. Ainsi, nos voisins ont leurs listes d'attente et leurs exclusions, notamment pour les personnes âgées, que nous acceptons de prendre en charge pour des interventions chirurgicales à tous les stades du troisième âge.
Ensuite, l'année dernière, nous avons incorporé à la liste des médicaments remboursables 196 nouveaux médicaments. Malheureusement, on ne nous parle aujourd'hui uniquement des médicaments qui feront l'objet d'un déremboursement. Cependant, il est nécessaire d'instaurer une respiration à la liste des médicaments remboursables si nous voulons continuer la prise en charge du progrès médical. Pour ma part, je préfère faire sortir de la liste des médicaments d'habitude et de confort pour pouvoir ajouter à cette même liste des médicaments à haute valeur ajoutée.
Nous avons des raisons d'être profondément attachés à ce système de santé et de vouloir le maintenir. Aux Etats-Unis, la couverture sociale peut être de qualité. Cependant, plus de 40 millions de personnes en sont exclues, y compris une partie des classes moyennes. Voulons-nous ce genre de système en France ? En quoi est-il supérieur ? De fait, les indicateurs de santé américains ne sont pas meilleurs que les nôtres.
Par conséquent, arrêtons de faire comme si notre modèle de Sécurité Sociale n'était pas le bon et de dire qu'il est archaïque sous le seul prétexte qu'il engendre des déficits excessifs, dont la proportion par rapport au montant des dépenses est pourtant nettement inférieure à celle du budget de l'Etat. C'est la raison pour laquelle le gouvernement s'attèle à réduire les déficits de l'Etat.
II. Premiers résultats et conditions de réussite de la réforme
Avant la réforme qui a été présentée par Philippe Douste-Blazy et Philippe Bertrand l'année dernière, la Commission des comptes estimait qu'en l'absence d'action, le déficit de l'assurance maladie se serait élevé à 16 milliards d'euros. Or cette réforme est bien intervenue et a permis de ramener ce déficit à 8,3 milliards à la fin de 2005. Ce résultat devrait être au moins reconnu.
Nous allons poursuivre l'action entreprise. Ainsi, la loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2006 va ramener ce déficit de l'assurance maladie à 6,1 milliards l'année prochaine. Seul cet effort nous permettra d'éviter des mesures radicales telles la hausse des impôts ou la baisse du niveau général des prises en charge. Nous voulons donc mettre en oeuvre une méthode dont la méthode repose sur le changement des comportements et le principe directeur sur la responsabilité de chacun.
Désormais, 32 millions d'assurés sociaux acceptent de passer par le médecin généraliste plutôt que de tâtonner pour rechercher plusieurs spécialistes et d'effectuer des analyses inutiles. Il s'agit ainsi d'avoir une bonne maîtrise du parcours de soin que chacun d'entre nous va suivre. Les Français ont confiance en leur médecin généraliste, ce qui va nous permettre de construire un parcours de soin plus efficace pour la santé de chacun et beaucoup moins dépensier.
Ensuite, la convention des médecins est simple, rustique et robuste. Elle indique qu'il est nécessaire de prescrire moins d'antibiotiques, d'antidépresseurs et d'arrêts de travail et plus de médicaments génériques. Les médecins sont également là pour être vigilants, et non pas systématiquement complaisants vis-à-vis des demandes du malade. Il convient également de souligner la responsabilité des caisses d'assurance maladie dans la lutte contre la fraude, tant il est vrai que la fraude représente la mort de la solidarité.
En résumé, nous avons tous une responsabilité, qui seule peut faire naître des comportements plus vertueux afin de réduire une évolution des dépenses par des arguments médicaux raisonnés.
III. De nouvelles marges d'action dégagées par la réduction des déficits
De plus, lorsque nous sommes efficaces pour réduire la progression des dépenses de santé, nous réussissons à nous créer de nouvelles marges d'action pour répondre à des besoins cruciaux de la population française que nous n'aurions pas pu financer en laissant filer les déficits.
A cet égard, il convient de mentionner deux exemples. Ainsi, le besoin d'équipement et de recrutement pour appliquer aux personnes âgées les soins dont elles ont besoin est immense. L'année prochaine, la réduction des déficits va permettre de mettre en oeuvre une augmentation de 9 % des dépenses d'assurance maladie pour les établissements médico-sociaux prenant en charge des personnes âgées dépendantes.
En outre, l'argent issu de la Journée nationale de solidarité a été sanctuarisé dans la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Ainsi, nous allons ajouter aux 9 % déjà mentionnés 4% issus de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. En conséquence, l'année prochaine, les budgets soins pour les personnes âgées augmenteront de 13 %.
En outre, nous augmenterons l'année prochaine de plus de 400 millions d'euros les dépenses de soin en faveur des personnes handicapées pour augmenter l'offre de service du secteur médico-social en leur faveur.
Tel est le sens de cette réduction des déficits à hauteur de 25 % l'année prochaine, ce qui représente un effort considérable. Que l'on cesse de répéter partout que l'effort de réduction des déficits n'est pas suffisant : il va à l'extrême possible, pour permettre de reprendre le chemin de l'équilibre aux horizons définis dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie.
En guise de conclusion, je tiens à rappeler que la République n'est pas seulement le suffrage universel et la démocratie. La République constitue aussi un choix de vie pour tous nos compatriotes qui repose sur un certain nombre de valeurs et sur deux piliers fondamentaux :
·- l'école, qui assure l'égalité des chances entre tous les Français devant l'éducation ;
·- la Sécurité Sociale, qui assure l'égalité des chances entre tous les Français devant la santé.
La République est aussi un idéal qui repose sur la liberté, l'égalité et la fraternité. Ne le laissons pas dépérir. Il en va en effet de l'avenir de notre pacte social et de notre cohésion nationale. C'est la raison pour laquelle nous sommes si attentifs à résoudre ce problème de déficit. En effet, derrière la résolution du problème de déficit figure le pacte républicain et l'avenir de la Sécurité Sociale, à laquelle nous sommes si profondément les uns et les autres attachés.Source http://www.senat.fr, le 16 décembre 2005