Texte intégral
Mesdames,
Messieurs,
Mes chers amis,
L'heureuse tradition des voeux nous offre, chaque année, l'occasion de nous retourner avec lucidité sur le passé récent et de nous projeter avec résolution sur le futur proche. L'un ne va pas sans l'autre. Comme l'écrivait Albert Mathiez, « l'histoire est un miroir ; si le miroir fausse l'image, il égare le guide... ».
L'année 2005, entre déception européenne du printemps et violences urbaines de l'automne, nous a valu certaines désillusions. Elle s'est heureusement achevée sous de meilleurs auspices pour les intérêts de la France dans le monde.
Le Conseil européen de Bruxelles et la réunion de l'Organisation mondiale du commerce à Hong-Kong ont, coup sur coup, démontré que l'on pouvait éviter les échecs annoncés. Ils ont notamment préservé, pour les années à venir, la politique agricole européenne et les intérêts légitimes de nos agriculteurs.
2006 ne doit pas être, 2006 ne sera pas une année entre parenthèses, une année de transition. Exempte -à ma connaissance- de toute échéance électorale, cette année 2006 doit être au contraire une année pleine, une année d'action et ainsi une année fructueuse pour la France et nos concitoyens.
Le Sénat, assemblée parlementaire à part entière, y jouera pleinement son rôle. Sa spécificité, son expertise, sa connaissance ses réalités locales, et sa sagesse reconnue lui permettront d'apporter une contribution éclairée aux réformes indispensables pour l'avenir de notre pays. Il en a, soyez-en assuré - et je sais qu'aucun de mes collègues ici présents ne me démentira- la ferme volonté et la totale détermination.
J'en prendrai trois exemples.
La bataille pour l'emploi est, à juste titre, la priorité de l'action gouvernementale et, nous le savons bien, la priorité dans l'esprit de nos compatriotes. Y a-t-il de meilleur exemple de la nécessité impérieuse que l'année qui s'ouvre soit une année efficace ?
Le chômage de masse n'est pas tolérable. Non pas parce que l'État et la société auraient pour mission d'assister et de garantir le citoyen, tout au long de la vie, dans chacun de ses faits et gestes. Pas seulement non plus parce qu'il affaiblit gravement les capacités économiques de notre pays. Mais parce qu'il constitue un véritable cancer qui ronge notre société, mine notre pacte républicain et porte atteinte à la dignité même de ceux qui en souffrent.
Cela justifiait l'urgente nécessité de tout mettre en oeuvre pour éradiquer ce fléau et d'inventer de nouvelles solutions pour ne plus échouer là où d'autres pays ont réussi avant nous.
C'est ce qui justifie l'objectif clair et prioritaire fixé au Gouvernement, porté avec énergie par le Premier ministre, et mis en oeuvre, sous son autorité, par des hommes de talent et de terrain.
Reposant sur une vaste panoplie de mesures opérationnelles et mises en oeuvre avec rapidité, les dispositions prises ont permis de repasser durablement, depuis plus de huit mois, sous la « barre » inacceptable des 10 %. Cette diminution, tant attendue, du nombre de chômeurs représente d'ores et déjà plus de 150 000 demandeurs d'emploi en moins.
Ces premiers résultats, encore insuffisants mais indicateurs d'un véritable retournement de tendance, doivent nous conduire à redoubler d'efforts, en particulier en faveur des plus jeunes.
C'est pourquoi l'année 2006 doit être une année fertile. Ce seront ainsi douze mois qui redonneront confiance et espoir à nos concitoyens en vue des échéances futures.
La priorité absolue accordée à la lutte pour l'emploi ne pourra que nous aider à mettre également à profit l'année 2006 pour conforter notre pacte républicain. Il nous faut pour cela tirer toutes les leçons de la récente crise dans nos cités.
Cette crise aiguë, révélatrice d'un profond mal être et d'une peur de l'avenir, a été surmontée. Elle a même, d'une certaine façon, été rassurante sur la solidité et la réactivité de nos institutions. La sécurité, qui est la première des libertés, a été garantie. Les forces de l`ordre ont fait preuve, dans des circonstances très difficiles, d'un professionnalisme sans faille.
Les élus locaux - et d'abord les maires, ces «hussards» modernes de la République - ont joué un rôle déterminant pour maintenir le dialogue indispensable. Relais de proximité irremplaçables, ils doivent disposer des moyens nécessaires pour aider, rénover et, quand il le faut, reconquérir les quartiers en difficulté.
Les pouvoirs publics ont enfin trouvé, si besoin était, dans ces évènements un aiguillon supplémentaire pour poursuivre et donner un élan supplémentaire à la politique de cohésion sociale mise en oeuvre par le Gouvernement.
Il nous faut pourtant aller plus loin, mieux analyser pour mieux comprendre, et prendre ainsi le cap le mieux adapté. Le Sénat entend jouer pleinement son rôle d'assemblée de proximité, de chambre de réflexion et de laboratoires d'idées ouvert sur la société et sur l'avenir.
Nous sommes, depuis bien longtemps, conscients dans cette maison des dangers et des enjeux des quartiers en difficulté. Depuis déjà trois ans, l'opération « Talents des Cités » illustre la richesse de la jeunesse de notre pays et offre un message d'espoir à ceux qui pourraient se laisser gagner par les tentations de la transgression ou du repli identitaire.
Pour aller plus loin, le Bureau du Sénat a décidé de constituer une mission d'information, commune à l'ensemble des commissions permanentes, qui s'est fixé pour objectif d'analyser concrètement, partout en France, les politiques conduites dans ces quartiers depuis une quinzaine d'années et d'apporter ainsi les réponses les mieux adaptées à la crise dans nos banlieues.
Nous devons bien mesurer l'enjeu. Il y va tout simplement de la pérennité de notre pacte républicain. Je nourris de grandes inquiétudes, si nous n'y prenons garde, sur sa dilution amorcée, non seulement dans certaines de nos banlieues, mais encore dans toutes les couches de la population où les valeurs fondatrices de la République sont aujourd'hui battues en brèche.
Liberté, égalité, fraternité -et j'ajouterai volontiers laïcité-, voilà bien des valeurs dont il m'apparaît urgent de redécouvrir, d'approfondir et de traduire le sens au quotidien.
Il nous faut en troisième lieu -je le dis avec force- mettre à profit l'année qui s'ouvre pour ajuster -et redonner tout son sens- à notre ambition européenne qui reste, n'en doutons pas, la clé de notre avenir, celui de nos enfants et celui de la France.
Je souhaite que 2006 soit l'année de la confiance retrouvée pour l'Union européenne.
Certes, le coup qui lui a été porté le 29 mai fut rude. Les causes des votes français et néerlandais sur la Constitution de l'Europe sont complexes et multiples. L'impact du « non » a dépassé nos frontières. Il ne doit être ni occulté ni mésestimé.
Mais il ne doit pas davantage arrêter la marche vers l'Europe efficace que nous appelons de nos voeux. Nous devons saisir, nous devons provoquer les occasions de repartir de l'avant.
Comme l'a justement relevé Madame Ursula Plassnik, ministre autrichienne des Affaires étrangères, dont le pays assure depuis le 1er janvier la présidence de l'Union européenne, « il n'y a pas de potion magique ». Mais il nous il faut conduire avec confiance et dynamisme les débats nécessaires pour que la « pause de réflexion » décidée en matière institutionnelle permette de définir le cap de l'Union européenne de demain.
Car notre dessein demeure. Notre ambition, pour la France et pour l'Europe, reste intacte. Et les possibilités de remettre, dès aujourd'hui, l'Europe dans le sens de la marche existent.
L'accord budgétaire conclu lors du dernier Conseil européen, s'il doit encore faire l'objet du « compromis institutionnel » nécessaire, a illustré que la crise pouvait être évitée dans un esprit de solidarité et d'équité. Il doit garantir, pour les sept prochaines années, le financement des politiques communes et répondre aux besoins de l'élargissement.
Il a aussi rappelé, si besoin était, le rôle déterminant d'une étroite coopération et d'une approche commune franco-allemandes pour redonner à l'Europe la capacité de surmonter les obstacles, franchir de nouvelles étapes et garder le cap de l'avenir.
Le Parlement est prêt à jouer un rôle majeur dans l'indispensable réappropriation du débat européen par les citoyens et l'ensemble de leurs représentants. Nos compatriotes, la campagne du printemps l'a montré, souhaitent y voir clair et savoir, dans chaque domaine, ce qu'ils peuvent attendre de l'Union.
Le Sénat souhaite être en mesure de s'impliquer en permanence et avec efficacité dans les questions européennes. Nos méthodes de travail -celles du Parlement comme celles du Gouvernement- doivent continuer à s'adapter pour y parvenir.
Ainsi redonnerons-nous aux questions européennes la dimension politique sans laquelle elles ne seront pas comprises et paraîtront lointaines à nos concitoyens. Alors même qu'il s'agit de leur vie quotidienne et de notre destin collectif !
Mes chers amis, pour atteindre, ou au moins tendre vers les objectifs que je viens d'évoquer, l'action politique, au sens le plus noble du terme, doit retrouver tout son crédit. J'ai la conviction qu'elle seule est capable de renouer les fils du dialogue et de restaurer la confiance pour retrouver le chemin de la cohésion nationale.
Il revient précisément au Parlement, dans cet esprit, de créer les conditions du débat et d'éclairer l'avenir. Le Sénat est déterminé à assumer pleinement ce rôle de médiateur qui contribuera à réconcilier nos compatriotes, tous nos compatriotes, avec leurs représentants, à restaurer la démocratie représentative, et finalement à réinventer la République.
Je voudrais à cet instant, chers amis, vous dire, très tranquillement, la totale sérénité et la non moins totale détermination de chacune et de chacun de mes collègues Sénatrices et Sénateurs face aux mises en cause émanant, de temps à autre, de critiques en mal d'inspiration et - il faut bien le dire- d'originalité.
Le Sénat, l'histoire nous l'a appris, doit toujours s'attendre à de telles situations -qui ont d'ailleurs toujours tourné à la confusion de ses contempteurs...
Plus encore, il trouve sans doute une partie de sa force, de sa cohérence et de son dynamisme dans ces critiques récurrentes.
Car les avantages du bicamérisme, de plus en plus répandu de par le monde, sont connus : double examen des textes, division du pouvoir, garantie contre les excès... Victor Hugo n'avait-il d'ailleurs pas déjà tout dit : « La France gouvernée par une assemblée unique, c'est l'océan gouverné par l'ouragan » ?
L'enracinement du Sénat est une chance pour notre pays. Il donne aussi à notre assemblée une responsabilité particulière.
Soyez assuré qu'il aura à coeur, en 2006, de donner toujours plus de réalité concrète aux liens qui l'unissent constitutionnellement à tous les élus de France.
Il le fera ainsi à travers la poursuite des « états généraux des élus locaux » organisés depuis plusieurs années dans nos régions, avec le concours de tous les Sénateurs, quelles que soient leurs étiquettes politiques. Ce sera à nouveau le cas, dès la semaine prochaine, à Besançon, où nous débattrons, avec l'ensemble des élus de la région Franche-Comté, de l'évolution de l'intercommunalité.
Il le fera également à l'égard de nos compatriotes établis hors de France, qui contribuent activement au rayonnement de notre pays et dont le Sénat assure la représentation, à l'occasion de la première « Journée des Français de l'étranger » qui se déroulera au Palais du Luxembourg le 4 mars prochain.
Il continuera bien entendu à le faire aussi au plan national en veillant, comme il l'a fait lors de la discussion de la dernière loi de finances, à ce que le pacte financier et fiscal de la décentralisation soit respecté. d'observatoire de la décentralisation, que nous avons mis en place, y apportera également sa contribution.
Ce souci permanent du concret nous amène aussi à poursuivre notre travail de contrôle de l'application des lois. Nous allons le renforcer encore en organisant, pendant les séances d'« ordre du jour réservé », des débats sur ce point avec les membres du Gouvernement concernés.
Nous entendons enfin, bien entendu, ne pas déserter le « grand chantier de la loi ». L'analyse est connue. La solution ne peut être que collective et inclut aussi bien le Gouvernement et ses conseils que l'ensemble des acteurs parlementaires.
Cela est vrai pour le contenu de la loi. Mais cela est vrai aussi des conditions du travail législatif, particulièrement bousculé au cours des dernières semaines de l'année 2005. Tous ces points font partie de ceux que je soumettrai à la réflexion de mes collègues Sénateurs en 2006.
C'est dans cet esprit résolument pragmatique, constructif et positif que j'ai, Mesdames, Messieurs, mes chers amis, l'honneur et le plaisir de vous présenter, au nom de mes collègues, de tous mes collègues Sénatrices et Sénateurs, et à titre personnel, mes voeux les plus chaleureux pour l'année nouvelle.
Pour que cette année commence sous les meilleurs auspices de l'art et de la beauté, permettez-moi de suggérer ici, à ceux qui ne l'auraient pas encore fait, de ne pas manquer l'éblouissante visite de la Collection Phillips que le Sénat a le plaisir de vous présenter au musée du Luxembourg.
Que 2006 soit pour vous, pour tous les vôtres, et pour la France, une belle et heureuse année !
Messieurs,
Mes chers amis,
L'heureuse tradition des voeux nous offre, chaque année, l'occasion de nous retourner avec lucidité sur le passé récent et de nous projeter avec résolution sur le futur proche. L'un ne va pas sans l'autre. Comme l'écrivait Albert Mathiez, « l'histoire est un miroir ; si le miroir fausse l'image, il égare le guide... ».
L'année 2005, entre déception européenne du printemps et violences urbaines de l'automne, nous a valu certaines désillusions. Elle s'est heureusement achevée sous de meilleurs auspices pour les intérêts de la France dans le monde.
Le Conseil européen de Bruxelles et la réunion de l'Organisation mondiale du commerce à Hong-Kong ont, coup sur coup, démontré que l'on pouvait éviter les échecs annoncés. Ils ont notamment préservé, pour les années à venir, la politique agricole européenne et les intérêts légitimes de nos agriculteurs.
2006 ne doit pas être, 2006 ne sera pas une année entre parenthèses, une année de transition. Exempte -à ma connaissance- de toute échéance électorale, cette année 2006 doit être au contraire une année pleine, une année d'action et ainsi une année fructueuse pour la France et nos concitoyens.
Le Sénat, assemblée parlementaire à part entière, y jouera pleinement son rôle. Sa spécificité, son expertise, sa connaissance ses réalités locales, et sa sagesse reconnue lui permettront d'apporter une contribution éclairée aux réformes indispensables pour l'avenir de notre pays. Il en a, soyez-en assuré - et je sais qu'aucun de mes collègues ici présents ne me démentira- la ferme volonté et la totale détermination.
J'en prendrai trois exemples.
La bataille pour l'emploi est, à juste titre, la priorité de l'action gouvernementale et, nous le savons bien, la priorité dans l'esprit de nos compatriotes. Y a-t-il de meilleur exemple de la nécessité impérieuse que l'année qui s'ouvre soit une année efficace ?
Le chômage de masse n'est pas tolérable. Non pas parce que l'État et la société auraient pour mission d'assister et de garantir le citoyen, tout au long de la vie, dans chacun de ses faits et gestes. Pas seulement non plus parce qu'il affaiblit gravement les capacités économiques de notre pays. Mais parce qu'il constitue un véritable cancer qui ronge notre société, mine notre pacte républicain et porte atteinte à la dignité même de ceux qui en souffrent.
Cela justifiait l'urgente nécessité de tout mettre en oeuvre pour éradiquer ce fléau et d'inventer de nouvelles solutions pour ne plus échouer là où d'autres pays ont réussi avant nous.
C'est ce qui justifie l'objectif clair et prioritaire fixé au Gouvernement, porté avec énergie par le Premier ministre, et mis en oeuvre, sous son autorité, par des hommes de talent et de terrain.
Reposant sur une vaste panoplie de mesures opérationnelles et mises en oeuvre avec rapidité, les dispositions prises ont permis de repasser durablement, depuis plus de huit mois, sous la « barre » inacceptable des 10 %. Cette diminution, tant attendue, du nombre de chômeurs représente d'ores et déjà plus de 150 000 demandeurs d'emploi en moins.
Ces premiers résultats, encore insuffisants mais indicateurs d'un véritable retournement de tendance, doivent nous conduire à redoubler d'efforts, en particulier en faveur des plus jeunes.
C'est pourquoi l'année 2006 doit être une année fertile. Ce seront ainsi douze mois qui redonneront confiance et espoir à nos concitoyens en vue des échéances futures.
La priorité absolue accordée à la lutte pour l'emploi ne pourra que nous aider à mettre également à profit l'année 2006 pour conforter notre pacte républicain. Il nous faut pour cela tirer toutes les leçons de la récente crise dans nos cités.
Cette crise aiguë, révélatrice d'un profond mal être et d'une peur de l'avenir, a été surmontée. Elle a même, d'une certaine façon, été rassurante sur la solidité et la réactivité de nos institutions. La sécurité, qui est la première des libertés, a été garantie. Les forces de l`ordre ont fait preuve, dans des circonstances très difficiles, d'un professionnalisme sans faille.
Les élus locaux - et d'abord les maires, ces «hussards» modernes de la République - ont joué un rôle déterminant pour maintenir le dialogue indispensable. Relais de proximité irremplaçables, ils doivent disposer des moyens nécessaires pour aider, rénover et, quand il le faut, reconquérir les quartiers en difficulté.
Les pouvoirs publics ont enfin trouvé, si besoin était, dans ces évènements un aiguillon supplémentaire pour poursuivre et donner un élan supplémentaire à la politique de cohésion sociale mise en oeuvre par le Gouvernement.
Il nous faut pourtant aller plus loin, mieux analyser pour mieux comprendre, et prendre ainsi le cap le mieux adapté. Le Sénat entend jouer pleinement son rôle d'assemblée de proximité, de chambre de réflexion et de laboratoires d'idées ouvert sur la société et sur l'avenir.
Nous sommes, depuis bien longtemps, conscients dans cette maison des dangers et des enjeux des quartiers en difficulté. Depuis déjà trois ans, l'opération « Talents des Cités » illustre la richesse de la jeunesse de notre pays et offre un message d'espoir à ceux qui pourraient se laisser gagner par les tentations de la transgression ou du repli identitaire.
Pour aller plus loin, le Bureau du Sénat a décidé de constituer une mission d'information, commune à l'ensemble des commissions permanentes, qui s'est fixé pour objectif d'analyser concrètement, partout en France, les politiques conduites dans ces quartiers depuis une quinzaine d'années et d'apporter ainsi les réponses les mieux adaptées à la crise dans nos banlieues.
Nous devons bien mesurer l'enjeu. Il y va tout simplement de la pérennité de notre pacte républicain. Je nourris de grandes inquiétudes, si nous n'y prenons garde, sur sa dilution amorcée, non seulement dans certaines de nos banlieues, mais encore dans toutes les couches de la population où les valeurs fondatrices de la République sont aujourd'hui battues en brèche.
Liberté, égalité, fraternité -et j'ajouterai volontiers laïcité-, voilà bien des valeurs dont il m'apparaît urgent de redécouvrir, d'approfondir et de traduire le sens au quotidien.
Il nous faut en troisième lieu -je le dis avec force- mettre à profit l'année qui s'ouvre pour ajuster -et redonner tout son sens- à notre ambition européenne qui reste, n'en doutons pas, la clé de notre avenir, celui de nos enfants et celui de la France.
Je souhaite que 2006 soit l'année de la confiance retrouvée pour l'Union européenne.
Certes, le coup qui lui a été porté le 29 mai fut rude. Les causes des votes français et néerlandais sur la Constitution de l'Europe sont complexes et multiples. L'impact du « non » a dépassé nos frontières. Il ne doit être ni occulté ni mésestimé.
Mais il ne doit pas davantage arrêter la marche vers l'Europe efficace que nous appelons de nos voeux. Nous devons saisir, nous devons provoquer les occasions de repartir de l'avant.
Comme l'a justement relevé Madame Ursula Plassnik, ministre autrichienne des Affaires étrangères, dont le pays assure depuis le 1er janvier la présidence de l'Union européenne, « il n'y a pas de potion magique ». Mais il nous il faut conduire avec confiance et dynamisme les débats nécessaires pour que la « pause de réflexion » décidée en matière institutionnelle permette de définir le cap de l'Union européenne de demain.
Car notre dessein demeure. Notre ambition, pour la France et pour l'Europe, reste intacte. Et les possibilités de remettre, dès aujourd'hui, l'Europe dans le sens de la marche existent.
L'accord budgétaire conclu lors du dernier Conseil européen, s'il doit encore faire l'objet du « compromis institutionnel » nécessaire, a illustré que la crise pouvait être évitée dans un esprit de solidarité et d'équité. Il doit garantir, pour les sept prochaines années, le financement des politiques communes et répondre aux besoins de l'élargissement.
Il a aussi rappelé, si besoin était, le rôle déterminant d'une étroite coopération et d'une approche commune franco-allemandes pour redonner à l'Europe la capacité de surmonter les obstacles, franchir de nouvelles étapes et garder le cap de l'avenir.
Le Parlement est prêt à jouer un rôle majeur dans l'indispensable réappropriation du débat européen par les citoyens et l'ensemble de leurs représentants. Nos compatriotes, la campagne du printemps l'a montré, souhaitent y voir clair et savoir, dans chaque domaine, ce qu'ils peuvent attendre de l'Union.
Le Sénat souhaite être en mesure de s'impliquer en permanence et avec efficacité dans les questions européennes. Nos méthodes de travail -celles du Parlement comme celles du Gouvernement- doivent continuer à s'adapter pour y parvenir.
Ainsi redonnerons-nous aux questions européennes la dimension politique sans laquelle elles ne seront pas comprises et paraîtront lointaines à nos concitoyens. Alors même qu'il s'agit de leur vie quotidienne et de notre destin collectif !
Mes chers amis, pour atteindre, ou au moins tendre vers les objectifs que je viens d'évoquer, l'action politique, au sens le plus noble du terme, doit retrouver tout son crédit. J'ai la conviction qu'elle seule est capable de renouer les fils du dialogue et de restaurer la confiance pour retrouver le chemin de la cohésion nationale.
Il revient précisément au Parlement, dans cet esprit, de créer les conditions du débat et d'éclairer l'avenir. Le Sénat est déterminé à assumer pleinement ce rôle de médiateur qui contribuera à réconcilier nos compatriotes, tous nos compatriotes, avec leurs représentants, à restaurer la démocratie représentative, et finalement à réinventer la République.
Je voudrais à cet instant, chers amis, vous dire, très tranquillement, la totale sérénité et la non moins totale détermination de chacune et de chacun de mes collègues Sénatrices et Sénateurs face aux mises en cause émanant, de temps à autre, de critiques en mal d'inspiration et - il faut bien le dire- d'originalité.
Le Sénat, l'histoire nous l'a appris, doit toujours s'attendre à de telles situations -qui ont d'ailleurs toujours tourné à la confusion de ses contempteurs...
Plus encore, il trouve sans doute une partie de sa force, de sa cohérence et de son dynamisme dans ces critiques récurrentes.
Car les avantages du bicamérisme, de plus en plus répandu de par le monde, sont connus : double examen des textes, division du pouvoir, garantie contre les excès... Victor Hugo n'avait-il d'ailleurs pas déjà tout dit : « La France gouvernée par une assemblée unique, c'est l'océan gouverné par l'ouragan » ?
L'enracinement du Sénat est une chance pour notre pays. Il donne aussi à notre assemblée une responsabilité particulière.
Soyez assuré qu'il aura à coeur, en 2006, de donner toujours plus de réalité concrète aux liens qui l'unissent constitutionnellement à tous les élus de France.
Il le fera ainsi à travers la poursuite des « états généraux des élus locaux » organisés depuis plusieurs années dans nos régions, avec le concours de tous les Sénateurs, quelles que soient leurs étiquettes politiques. Ce sera à nouveau le cas, dès la semaine prochaine, à Besançon, où nous débattrons, avec l'ensemble des élus de la région Franche-Comté, de l'évolution de l'intercommunalité.
Il le fera également à l'égard de nos compatriotes établis hors de France, qui contribuent activement au rayonnement de notre pays et dont le Sénat assure la représentation, à l'occasion de la première « Journée des Français de l'étranger » qui se déroulera au Palais du Luxembourg le 4 mars prochain.
Il continuera bien entendu à le faire aussi au plan national en veillant, comme il l'a fait lors de la discussion de la dernière loi de finances, à ce que le pacte financier et fiscal de la décentralisation soit respecté. d'observatoire de la décentralisation, que nous avons mis en place, y apportera également sa contribution.
Ce souci permanent du concret nous amène aussi à poursuivre notre travail de contrôle de l'application des lois. Nous allons le renforcer encore en organisant, pendant les séances d'« ordre du jour réservé », des débats sur ce point avec les membres du Gouvernement concernés.
Nous entendons enfin, bien entendu, ne pas déserter le « grand chantier de la loi ». L'analyse est connue. La solution ne peut être que collective et inclut aussi bien le Gouvernement et ses conseils que l'ensemble des acteurs parlementaires.
Cela est vrai pour le contenu de la loi. Mais cela est vrai aussi des conditions du travail législatif, particulièrement bousculé au cours des dernières semaines de l'année 2005. Tous ces points font partie de ceux que je soumettrai à la réflexion de mes collègues Sénateurs en 2006.
C'est dans cet esprit résolument pragmatique, constructif et positif que j'ai, Mesdames, Messieurs, mes chers amis, l'honneur et le plaisir de vous présenter, au nom de mes collègues, de tous mes collègues Sénatrices et Sénateurs, et à titre personnel, mes voeux les plus chaleureux pour l'année nouvelle.
Pour que cette année commence sous les meilleurs auspices de l'art et de la beauté, permettez-moi de suggérer ici, à ceux qui ne l'auraient pas encore fait, de ne pas manquer l'éblouissante visite de la Collection Phillips que le Sénat a le plaisir de vous présenter au musée du Luxembourg.
Que 2006 soit pour vous, pour tous les vôtres, et pour la France, une belle et heureuse année !