Texte intégral
Q - Pensez-vous que votre déplacement en Colombie puisse contribuer à finaliser un accord humanitaire ?
R - C'est la raison majeure de mon voyage en Colombie. L'Espagne, la France et la Suisse ont élaboré une proposition. C'est une proposition sérieuse et précise qui a été communiquée tant au gouvernement colombien qu'aux FARC. Le président Uribe l'a acceptée le 13 décembre dernier. Nous attendons la réponse des FARC. Elles se sont toujours prononcé en faveur d'un accord humanitaire. Je veux donc espérer qu'ils accepteront notre proposition afin que ceux qui sont détenus en Colombie puissent retrouver rapidement la liberté. Comme vous le savez, l'Union européenne a souligné la "nécessité d'un accord humanitaire" et les opinions publiques partout dans le monde, notamment en Europe mais aussi au Canada, sont fortement mobilisées. En ce moment, un mouvement est enclenché ; à nous tous d'en accélérer le cours.
Q - Quels moyens la France a t-elle de convaincre le gouvernement et la guérilla de conclure un échange ?
R - Le dialogue et la persuasion. Nous avons choisi de parler à tous, sans discrimination et avec la volonté de jouer la carte de la bonne foi et de la détermination. Nous avons convaincu le gouvernement, nous ferons tout pour convaincre les FARC. Nos trois pays conjuguent leurs efforts à cette fin.
Q - Que pensez-vous du refus réitéré des FARC d'examiner les propositions du gouvernement ?
R - Je ne lis pas les derniers communiqués des FARC de cette manière. En effet, l'accord humanitaire est une revendication qu'elles ont formulée de longue date. Nous pensons donc qu'il est possible de trouver un terrain d'entente en partant de leur demande d'organiser des négociations dans les communes de Pradera et de Florida. C'est dans le cadre qu'elles ont fixé que nous avons travaillé. Nous avons pleinement tenu compte de l'exigence de sécurité exprimée par les FARC. C'est pourquoi je continue à avoir confiance dans l'aboutissement de nos efforts.
Q - Le président Chirac avait laissé entendre que la France pourrait accueillir des guérilleros, au terme d'un échange humanitaire. Qu'en est-il exactement ? Cette possibilité existe t-elle ? Selon quelles modalités ? Qu'advient-il de la proposition du président Chirac d'accueillir des guérilleros si un accord est trouvé ?
R - Le président Chirac est personnellement très attaché à la recherche d'une solution à la tragédie des otages. Il s'est fréquemment exprimé en ce sens. Nous ne fermons aucune porte. Il reviendra au gouvernement colombien et aux FARC, au cours des négociations, de définir les conditions d'un accord humanitaire. Ils pourront nous saisir de demandes que nous examinerons dans l'intérêt de tous ceux qui, en Colombie, sont privés de liberté et de leurs familles.
Q - La France est très active lorsqu'il s'agit d'obtenir la libération d'otages. Comment évaluez-vous sa politique dans l'affaire Betancourt ?
R - Vous avez raison de souligner l'engagement constant du gouvernement français, de l'ensemble de la classe politique et de l'opinion dès que l'un de nos compatriotes est pris en otage. C'est une cause qui rassemble les Français. Le cas d'Ingrid Betancourt est particulièrement tragique : cela fera bientôt 4 ans qu'elle a été enlevée. C'est une durée particulièrement longue. Pensez au drame familial d'une femme coupée de ses enfants et de sa famille depuis si longtemps. Son père est mort pendant sa captivité. A travers ce drame et au-delà du cas d'Ingrid, les Français ont compris l'ampleur de la tragédie colombienne. Pour nous, le cas d'Ingrid Betancourt est emblématique de tout ce que souffrent les Colombiens. C'est pour cela que nous nous sommes engagés pour la libération de tous les otages.
Q - Comment jugez-vous l'action du président Uribe dans cette affaire d'otages, et en particulier dans le cas d'Ingrid Betancourt ?
R - Le président Uribe, comme les FARC d'ailleurs, s'est dit favorable au principe d'un accord humanitaire. C'est pourquoi la France se situe résolument dans une perspective d'avenir. L'important, aujourd'hui, c'est de ne plus perdre de temps. Il y a urgence à rendre la liberté à ceux qui l'ont perdue, souvent depuis si longtemps. Une proposition est sur la table. Faisons-la avancer.
Q - Si votre voyage permet d'enregistrer des résultats positifs, quelles seront ensuite les prochaines étapes ?
R - Je veux croire que ce voyage sera utile et positif et qu'il permettra de faire avancer l'objectif de la libération des otages. Soyez certains que je continuerai, au-delà de ma visite à Bogota, à mobiliser tous les efforts de la diplomatie française, en liaison avec nos partenaires espagnols et suisses, pour parvenir à ce résultat tant espéré par tous.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 janvier 2006