Déclaration de M. François Bayrou, président de l'UDF, sur la réflexion menée par l'UDF pour rassembler les Français et redonner à la France un "projet d'espérance", Lyon le 29 janvier 2006.

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Circonstance : Congrès de l'UDF à Lyon (Rhône), les 28 et 29 janvier 2006

Texte intégral

Mes chers amis, permettez-moi, avant d'entrer dans la réflexion qui
conclura ce congrès, de dire le sentiment de gratitude que nous
éprouvons à l'égard de trois des groupes qui forment notre réunion.
J'ai un immense sentiment de gratitude à l'égard de la petite équipe
des femmes et hommes qui ont pris vingt heures sur vingt-quatre pour
organiser ce congrès en quelques jours à Paris, à la fédération du
Rhône. Je n'ai pas le temps de les nommer, mais je vous demande de les
applaudir.
Je veux saluer les vingt-sept ambassadeurs et représentations
diplomatiques de vingt-sept des pays du monde, des plus grands aux plus
voisins, qui ont honoré de leur présence ce congrès, et que je
remercie.
Je veux dire notre gratitude aux journalistes qui nous ont suivis
patiemment et chaleureusement pendant ces deux journées, malgré la
neige et les difficultés. Je veux le faire spécialement parce que les
journaux écrits, en France, vivent une crise qui doit faire souci à
chacun d'entre nous, et dans laquelle il faut identifier ce qu'il y a,
j'espère, de conjoncturel et ce qu'il y a qui touche au grand mouvement
de société et de civilisation.
Comme je sais qu'ils ont du souci, je voulais simplement dire, en notre
nom, que nous ne sommes pas indifférents, que nous faisons attention à
la période qu'ils traversent.
Et je veux aussi vous remercier, vous.
Un extraordinaire congrès
C'était, au départ, un congrès extraordinaire, convoqué pour des
raisons politiques, pour que nous disions clairement à nous-mêmes et à
la France quel était notre choix. Cette question politique posée
s'adressait à l'ensemble des adhérents de l'UDF en France.
Vous connaissez le résultat. C'est un résultat tranché. Il dit, de la
manière la plus claire, non pas une tactique, mais il dit le choix
profond d'une formation politique qui assume sa liberté pour changer le
destin de son pays.
Désormais, c'est avec fierté que nous avons pu arborer, à l'issue de ce
vote, la définition nouvelle de l'UDF : "l'UDF, le parti libre".
C'était un congrès extraordinaire et quelque chose a fait - vous, la
météo, les difficultés pour arriver à Lyon - cette ambiance formidable
d'un groupe, d'une communauté humaine qui relève les défis de son temps
? quelque chose a fait que ce congrès extraordinaire s'est transformé
en extraordinaire congrès.
Ce congrès a été extraordinaire aussi parce que vous avez vu de vos
yeux, entendu avec votre coeur, quelle formidable équipe nous avons
formée en quelques mois, en quelques années, après 2002.
Vous avez vu tous ces visages nouveaux qui se sont exprimés hier et
aujourd'hui : les maires de terrain, les élus du terrain, les militants
de terrain, les responsables de demain, qui sont à la tribune et dans
la salle et qui ont tous les capacités, le niveau, l'enthousiasme et le
courage pour prendre en France les responsabilités qui s'imposent, et
changer le visage de notre pays.
C'est vrai que c'est une rupture avec les facilités et les enlisements
du passé, mais ce n'est pas seulement une rupture.
À mes yeux, c'est aussi - je vais employer un mot qu'il n'est pas
d'usage d'employer en politique -, c'est une incarnation. Dans cet
univers des mots usés dans lequel nous vivons, des phrases que l'on a
entendues mille fois, des concepts, quelque chose change lorsqu'une
communauté humaine s'avance : des femmes et des hommes qui croient la
même chose, qui sont entre eux amicaux, non pas en rivalité, non pas en
petits complots dans les couloirs, les uns contre les autres, mais qui
assument, ensemble, un destin, qui ne ressemblera pas à ce qu'est la
France actuellement.
Cette communauté humaine que vous formez, elle se soude et se soulève,
ne vous y trompez pas, pour porter quelque chose qui est plus grand
qu'elle.
Ce dont nous avons la charge, ce n'est pas le destin de l'UDF, ce n'est
pas même pas le destin du centre dans la vie politique française, ce
n'est pas des intérêts de parti, ce n'est pas une étiquette. Ce dont
nous avons la charge, c'est l'espérance d'un pays qui avait depuis
longtemps oublié le sens de ce mot.
C'est un moment juste. Je vous ai dit hier à quel point j'aimais
l'adjectif "juste".
C'est un moment juste, parce que tous les épuisements de la France,
toutes les usures de la France se lisent aujourd'hui à livre ouvert.
Être rebelles
C'est dans ce moment-là que se fait sentir l'urgence qu'apparaissent
des responsables résistants, j'allais dire rebelles, capables de ne
céder à aucune pression, parce qu'ils savent que ce qu'ils ont entre
les mains est plus important que leur propre avenir et leur propre
destin.
Être différents, être rebelles et ne pas céder, voilà ce que nous
devons être.
J'entends bien - Jean-Christophe Lagarde, dans son discours, l'a dit
hier, avec humour - j'entends bien les questions habituelles qui se
posent, et que désormais nous laissons derrière nous : "est-ce que vous
appartenez à la majorité ou à l'opposition ?"
La majorité de 2007
Mes chers amis, il n'y a qu'une réponse: la seule majorité qui nous
intéresse, c'est la majorité de 2007. C'est la majorité que la France
va se donner, qui va changer son destin.
Pendant très longtemps, lorsqu'on a parlé de nous, même avec amitié,
même nous-mêmes quand nous parlions de nous, nous avons utilisé les
mots de "troisième voie".
Mes chers amis, je vous invite à tourner la page sur la troisième voie.
La troisième voie, c'est la première !
Notre démarche est une démarche de rassemblement, capable de faire se
rencontrer et se réunir des Français qui ont eu des valeurs différentes
et ont connu des parcours différents.
Valeurs à droite, valeurs au centre, valeurs à gauche.
Je veux vous en dire un mot.
Il est arrivé à cette tribune, hier, pendant le débat, que j'entende
certains de nos amis qui disent : "Nous ne sommes ni à droite, ni à
gauche". Je vous le dis franchement, je n'aime pas le "ni-ni". Il me
semble que cela aussi, nous devons le laisser derrière nous.
C'est une force nouvelle, non pas entre les deux, mais qui s'oppose aux
deux.
Une force de rassemblement
C'est une force de renouvellement et c'est une force de rassemblement.
Pour ceux qui aiment l'histoire et qui sont dans la salle, il y a eu un
temps, dans notre pays, où la question religieuse a coupé la France en
deux de manière sauvage ; et jamais, pendant toute cette longue période
- la première partie au moins du XXème siècle - jamais les chrétiens
d'un côté et les laïcs de l'autre, n'auraient imaginé qu'ils
pourraient, un jour, dépasser leurs clivages et travailler ensemble.
Puis, un jour, en raison de la nécessité des temps, sans qu'aucun des
deux ait renoncé à sa philosophie, sa foi, sa conviction, sans qu'ils
fussent plus tièdes, ils ont découvert que ce n'était plus le sujet de
la vie politique de leur pays. Ils ont découvert que le sujet avait
changé, que le monde avait changé, qu'ils pouvaient travailler
ensemble, et même qu'ils étaient obligés de travailler ensemble s'ils
voulaient en assumer la charge et le destin.
Eh bien, il en sera ainsi, selon nous, des vieilles catégories de la
droite et de la gauche. Non pas qu'elles disparaîtront !
Il y aura toujours des valeurs de droite, et elles sont honorables. La
fierté nationale, le goût de l'ordre, le sens de l'honneur, ce sont des
valeurs honorables, que nous partageons. Et il y a des valeurs de
gauche, la générosité, la volonté du partage.
Ces deux séries de valeurs sont dévoyées dans les partis qui prétendent
les incarner.
Nous, nous voulons les réunir, et il faut que nous les réunissions,
parce que, mes amis, il faut conjurer le malheur des temps.
Tous ici, nous avons vécu comme un symptôme terrible la crise des
banlieues, il y a à peine deux mois, et dont plus personne ne parle.
Il y a moins de quatre semaines, nous étions encore sous l'Etat
d'urgence, une loi d'exception pour les temps de guerre. Il y a quatre
semaines à peine !...
Il y a huit semaines, à peine, chers amis, les maires des villes de
banlieue ont enchaîné réunions sur réunions à Matignon, à l'Elysée,
"pour vous écouter", comprendre la crise. Eh bien, l'actualité n'a pas
plus tôt tourné la page, les journaux télévisés n'ont pas plus tôt
changé de titre que la crise des banlieues a été totalement effacée de
l'esprit même et de l'expression même de ceux qui prétendaient, la main
sur le coeur, en faire désormais la priorité nationale.
Mais nous n'avons pas oublié ce qui s'est exprimé dans ce drame. Bien
entendu, ce drame ne ressemblait en rien à ce que l'on nous en
racontait. Il n'y avait pas de main noire, d'organisateur en chef, pas
plus trotskiste qu'islamiste, qui tirait les ficelles dans les
banlieues des villes de France, et qui donnait l'ordre sournois,
mystérieux, sombre, de brûler des voitures pour renverser l'ordre
établi dans notre pays.
Rien de tout cela.
Jean-Christophe (Lagarde) a employé le mot "jacquerie". C'est quelque
chose de cet ordre. Il n'y avait pas de chef, il n'y avait pas
d'organisateur, il n'y avait pas de mots d'ordre. Il n'y avait même pas
de nom pour cette affaire, et il n'y en a toujours pas, deux mois après
!
Il y avait simplement quelque chose qui ressemble à l'acte de détresse
que les psychologues et psychiatres connaissent bien, l'acte de
détresse des adolescents, quelque chose qui ressemble à de
l'automutilation.
Lorsque les adolescents se blessent volontairement, ils ne se blessent
pas volontairement pour se faire du mal, vous le savez bien, ils se
blessent volontairement pour dire quelque chose en se faisant du mal.
Mes amis, le monde rural, Jean Lassalle pourrait vous en dire autant,
est dans le même genre de désarroi, dans le même genre de dépossession.
Nous vivons dans un pays et nous formons un peuple dont, peu à peu,
chacune des parties est dépossédée de son identité, dépossédée de son
destin, du sens de sa vie, dépossédée de la fierté d'être lui-même.
Eh bien, lorsque les peuples en sont là, qu'ils souffrent tant, que
n'importe quelle bêtise est possible, c'est la cause qu'il faut
soigner, même s'il est naturellement important de s'occuper du
symptôme.
Ce n'est pas seulement une affaire de sécurité, une affaire
sécuritaire. C'est quelque chose de beaucoup plus profond, qui tient à
l'âme d'un peuple, et c'est à l'âme de ce peuple qu'il faut désormais
que nous nous adressions.
Voyez-vous - je vais aborder des sujets difficiles mais dont on a eu
beaucoup d'indices à la tribune - le tissu de notre peuple est en train
de se défaire.
Un terrible problème de reconnaissance et d?identité
J'ai mis très longtemps à comprendre, moi comme citoyen, que nos
compatriotes de couleur noire, simplement parce qu'ils ont un peu plus
de pigment de mélanine dans la peau que nous en avons, ont un terrible
problème de reconnaissance et d'identité.
Cela a été exprimé plusieurs fois à cette tribune. Le sentiment qu'ils
ressentent de rejet, de stigmatisation, il faut que l'on s'en parle, il
faut que l'on en parle : nos compatriotes de couleur noire, nos
compatriotes issus de l'immigration, en particulier de l'immigration
qui vient du Maghreb, nos compatriotes juifs, qui ont le sentiment
qu'ils sont constamment sur le fil du rasoir, et maintenant, dans
certains coins de France, nos compatriotes blancs, "gaulois" comme l'on
dit dans certains quartiers?
Vous vous rendez compte, un pays de concitoyens qui met sur ses
monuments publics "Liberté, Égalité, Fraternité" et qui explose en
autant de communautés qu'il y a d'origines, de couleurs de peau, qui
contredit dans la rue, sur les trottoirs de ses villes, la devise qu'il
affiche au fronton des monuments publics?
Eh bien, ceci est notre affaire.
Les mots pour le dire
Dans les mois, dans le long chemin de dix-huit mois qui va s'ouvrir et
qui conduit, nous le savons bien, aux échéances majeures de notre pays,
dans ce long chemin, si nous voulons prendre ces problèmes comme les
vôtres, alors ma conviction profonde est celle-ci : il ne faut pas
faire de promesse. Il ne faut pas multiplier les mesures. Il ne faut
pas créer, Hervé, des centaines de commissions de plus. Il ne faut pas
faire des programmes technocratiques, il faut d'abord trouver les mots.
C'est une petite chose de trouver les mots pour le dire, mais c'est la
clef de toutes les compréhensions, les mots de la peine, les mots de
l'inquiétude, les mots de l'angoisse, les mots des victimes, les mots
des enfants et les mots des mamans, les mots des pères dont la place
est chancelante. Il faut d'abord parler avec eux et en leur nom,
simplement pour qu'ils sachent qu'il est dans leur pays des
responsables qui, au lieu de les traiter comme des dossiers, les
traitent comme des hommes.
Des centaines de milliers d?enfants
C'est notre différence, mais -je vais heurter quelques-uns dans cette
salle- j'ai désapprouvé l'inspiration de la pétition contre l'adoption
homosexuelle et les termes de cette pétition.
Je le dis parce qu'il y a un certain nombre d'amis qui, sûrement, ne
comprennent pas ce que j'exprime et puis aussi, j'ai désapprouvé cette
pétition -non pas que je sois favorable à l'adoption homosexuelle, je
pense que ce sujet mérite d'être traité avec beaucoup de prudence,
beaucoup de nuance et beaucoup de respect- je vais vous dire pourquoi.
D?abord parce qu'il y a des centaines de milliers d'enfants, dans notre
pays, qui sont élevés par des couples homosexuels. Parce que des femmes
et des hommes ont traversé cette épreuve, ce changement dans leur vie,
ont commencé dans leur vie en croyant que leur destin, leur voie, était
d'être comme leurs parents et puis qu'ils ont découvert, ensuite,
d'autres éléments d'eux-mêmes, de leur identité, de leur choix. Or ils
avaient des enfants et ils les élèvent, ils étaient la mère ou le père
d'enfants qui étaient nés dans un couple, et ils sont obligés de
continuer d'assumer leur charge de mère et de père, et tous ne le font
pas mal !
Je sais que je heurte certains d'entre vous, mais comme nous sommes
dans une famille où le débat est libre, je voulais vous dire cela.
J'ajoute une chose. Dans la pétition, il est écrit : "Un enfant a
besoin d'un père et d'une mère". Que fait-on lorsque c'est une mère
célibataire qui a un enfant et que le père n'est pas là ? Et que
fait-on pour ceux de nos compatriotes célibataires qui ont adopté des
enfants, des femmes formidables que je connais, proches, qui élèvent
des enfants toutes seules, qu'elles ont adoptés, et qui les élèvent
bien ? Qu'est-ce qu'on fait si l'on ne fait pas attention à la manière
dont on parle ? Si l'on se met dans le mouvement de cette société,
d'ailleurs toujours plus violente et toujours davantage porteuse
d'accusations, d'un groupe contre un autre, d'une identité contre une
autre, d'une couleur contre une autre, d'une religion contre une autre,
d'une manière de vivre contre une autre ? Nous sommes là pour les
réconcilier et non pas pour les confronter.
Écarter le risque de la surenchère et de la violence
Voyez vous, j'ai plusieurs différences fondamentales avec Nicolas
Sarkozy -on est là pour se dire les choses?- le modèle de société, son
goût pour le modèle américain? Alors qu'il me semble que nous avons un
autre modèle. Mais j'ai une différence plus importante et plus accusée
que les autres, c'est qu'il croit que l'on n?exprimera que mieux les
problèmes de la société en acceptant une certaine surenchère de
violence, même verbale, et que moi je crois que le devoir des
responsables est d'écarter le risque de la surenchère et de la violence
pour faire un pays qui soit réconcilié, ensemble.
Le risque est un devoir
Je veux à mon tour et en votre nom vous dire que c'est en pleine
conscience que nous avons décidé d'assumer le risque contenu dans cette
définition d'un parti libre. Beaucoup de mes amis l'ont dit avant moi.
Bien sûr, il y a un risque et bien sûr, selon le critère des
raisonnables, ceux qui nous disent : « Attention, vos mandats, mes
chers élus, sont en jeu. Attention, il faut que vous ménagiez les uns
ou les autres, parce qu'autrement vous risquez de perdre des voix ? ».
Eh bien, je veux tout simplement vous dire que le risque, dans la
situation où se trouve la France aujourd'hui, c'est un devoir.
Que la société française, ceux qui ont du travail, ceux qui n'en ont
pas, ceux qui sont au RMI et dont la porte sera fermée et qui n'osent
quelquefois même plus sortir, ceux qui vont tenter l'expérience d'une
petite entreprise artisanale, ceux qui créent quelque chose, ceux qui
écrivent, ceux qui cherchent, les médecins, les infirmières, ils
prennent des risques tous les jours.
Tous dans la société française, tous les gens bien prennent des risques
et nous ne sommes pas là pour assurer, Dieu sait ... le confort des
carrières, le confort des places, l'agrément des galons sur les
épaules, l'intérêt des voitures, des chauffeurs, des gardes du corps,
des ors de la République.
Nous sommes là tous ensemble parce que nous avons choisi de changer la
vie, la situation, le destin de notre pays. Alors, comme il s'agit de
risques, que le pays a besoin de responsables qui les assument, avec
bonheur, car on a besoin des deux, du risque et de l'optimisme, je vais
prendre un risque en votre nom, il n'est pas très important, mais je
vais prendre un engagement devant vous. Quand le temps de la campagne
s'ouvrira, je prends l'engagement que nous refuserons de faire la
moindre promesse électorale.
Un projet d?espérance pour la France
Nous n'allons pas faire une campagne de promesses. Nous allons
seulement montrer, exposer aux Français, les principes d'un projet
d'espérance pour la France. Ce n'est pas du tout la même chose que des
promesses.
Ce qu'on a vu, hélas, lors des dernières compétitions, lors des
élections de 2002, lors des élections de 1995, lors des élections de
1988, c'est la duperie. La duperie organisée contre tout un pays par la
multiplication de promesses dont ceux qui les faisaient savaient, au
moment où ils les formulaient, qu'elles seraient impossibles à
appliquer et impossibles à respecter.
Car nul ne pouvait ignorer que prendre, pour prendre un seul exemple,
la promesse de baisse de 30 % des impôts était, dans la situation de
nos finances publiques, impossible à assumer. Nous, nous l'avons dit le
jour même, mais ceux qui prenaient ces engagements étaient tous aussi
informés que nous l'étions, de la réalité de la situation du pays dont
ils avaient la charge depuis déjà longtemps.
Donc, j'affirme que le langage entre un candidat et le peuple de
citoyens auquel il s'adresse doit écarter les promesses électorales. Il
doit, en revanche, choisir les principes. Dans le peu de temps qui me
reste, je voudrais énoncer devant vous un certain nombre des principes
qui seront les piliers du projet d'espérance que nous défendrons devant
les Français : un projet d'espérance pour la France, un projet
d'espérance pour les Français.
Simplicité, lisibilité, stabilité
Le premier de ces principes, même si cela paraît étrange, c'est que
nous avons le devoir de réintroduire la simplicité, la lisibilité et la
stabilité dans l'ensemble des lois et des règlements, des contrats, des
aides, des normes sociales, des normes fiscales qui font que la France
est désormais devenue un pays illisible pour ses citoyens et un pays
illisible pour le monde extérieur.
Hervé m'a présenté la semaine dernière un de ses amis, très brillant,
responsable d'un très grand fonds d'investissements américain. On a
parlé avec lui, on lui demandait comment il se faisait que jamais les
grandes entreprises ne venaient installer leur siège en France. Il
répondait quelque chose de très simple qui m'a marqué, et que je veux
vous répéter.
Il disait : Nous examinons toujours la candidature de la France. Elle
est toujours dans, comme l'on dit, la short-list, la dernière liste,
les deux ou trois choix, parce que la France est tellement bien placée,
que les gens ont tellement envie d'y vivre, que pour nous c'est
naturellement formidable d'imaginer que l'on pourrait s'installer dans
ce pays. Et il y a deux raisons qui font que la France n'est jamais
choisie.
La première de ces raisons, c'est que les charges sociales, en
particulier, et fiscales qui pèsent sur l'emploi des cadres font qu'un
cadre de haut niveau, en France, est deux fois plus cher qu'un cadre de
haut niveau en Grande-Bretagne. Eh bien, cela, il faudra le changer. Il
est courageux et nécessaire de le dire.
La deuxième raison, c'est que chez vous, la réglementation change tout
le temps : la réglementation fiscale, la réglementation sociale, la
réglementation administrative ? et que cela donne le tournis. Il n'y a
rien que redoutent tant les décideurs d'entreprise, que de ne pas avoir
la visibilité sur le long terme. Nous faisons de la simplicité et de la
stabilité un but nécessaire, un principe nécessaire du projet que nous
présenterons à la France.
Deuxième principe. Il s'agit d'un projet de société, et ce projet de
société est nécessairement un projet de résistance. Nous sommes devant
un mouvement qui paraît inexorable de financiarisation de la planète.
Les décisions sont désormais prises dans le monde économique et
peut-être dans le monde politique, uniquement en considération de la
primauté des valeurs financières. Pour nous, un projet de société est
un projet qui résiste à ce mouvement inexorable, et non pas un projet
qui sert ce mouvement inexorable.
L'énergie de l'économie doit être au service d'un projet de société
Nous avons d'autres valeurs. Ce n'est pas que je méprise l'économie
libérale. Je pense, au contraire, qu'elle a fait ses preuves en matière
de création de richesses, d'augmentation presque exponentielle de la
richesse de certains pays et de certains individus. Cela crée
davantage, mais il est très important de remettre les choses à leur
place. Le modèle libéral, pour parler comme si nous avions une voiture
devant nous, c'est le meilleur moteur. C'est le moteur qui développe le
plus de chevaux. C'est le moteur le plus puissant en matière d'énergie.
On aurait grand tort de s'en priver, mais la seule chose qu'on n'ait
pas le droit de confondre, dans une voiture, c?est le moteur et le
volant.
Nous, nous pensons que l'énergie de l'économie doit être au service
d'un projet de société qui doit être défini non pas par l'économie,
mais par la politique, non pas par l'économique mais par la démocratie.
Autrement, si l'on confond moteur et le volant, si on laisse gouverner
la voiture par le moteur, comme vous le savez bien, c'est le dérapage
qui est assuré et forcément, la sortie de route, et c'est à cette
sortie de route que nous sommes.
Nous avons donc deux devoirs : débrider le moteur pour qu'il développe
le plein d'énergie et assurer le volant. Il y a donc des questions pour
débrider le moteur, des questions de fiscalité simples et justes, non
dissuasives ? j'ai déjà dit ici, hier, ce que je pensais, par exemple,
de l'ISF auquel il faudra trouver une alternative, selon moi- mais nous
avons à bâtir les valeurs d'un projet de société qui ne se résume pas à
la réussite économique qui est créatrice, nous le savons, de trop
d'injustice et de trop d'inégalité.
La mission de la politique est de conduire le monde
La mission de la politique est de conduire le monde, et non pas que le
monde soit conduit par la fatalité des temps. Par exemple, la mission
de la politique est de s'interroger - comme on doit le faire, de
manière stratégique, sur l'OPA hostile lancée sur Arcelor, c'est-à-dire
sur le plus grand producteur d'acier européen et notamment -je vois nos
amis de Lorraine qui sont au premier plan- qui joue un rôle essentiel
dans l'économie de notre pays et de certaines de nos régions. Il y a
bien des intérêts stratégiques que les États et l'union européenne, et
je dis bien et l'union européenne, devraient se fixer comme objectif de
défendre, sous peine de se retrouver dans un monde où la plupart des
décisions stratégiques seront devenues extérieures au continent qu'ils
forment tous ensemble.
Je pourrais poser de la même manière la question de l'agriculture. Je
vois très bien les réflexions qui sont conduites à l'OMC sur
l'ouverture absolue de la circulation des produits. Mais je veux vous
dire une seule chose, moi qui depuis longtemps ai investi beaucoup de
passion, de temps, beaucoup d'affection dans le monde agricole. Si l'on
veut placer, dans la même compétition, sur le même marché, avec les
mêmes règles d'échanges, un paysan du Burkina Faso et un paysan des
immenses latifundias d'Amérique du Sud ou d'Australie, alors à ce
moment-là, on est absolument assuré que le paysan du Burkina Faso
disparaîtra, qu'il ira rejoindre les bidonvilles - au mieux - autour
des grandes cités anarchiques que cette situation a créées. Et la
multinationale qui possède les exploitations d'Amérique du Sud
triomphera.
Or il faut que nous bâtissions un équilibre nouveau, parce que cette
grenade va nous exploser à la figure. Ce n'est pas possible de faire
des centaines de millions de pauvres à moins de un dollar par jour et
de les placer dans une situation de concurrence faussée avec ceux qui
ont, évidemment, tous les moyens de la mécanisation et du capital à
leur disposition. C'est impossible et nous devons le dire, puisque
personne d'autre ne le dit dans le débat politique mondial.
Cette idée que la politique, c'est fait pour conduire le monde, bâtir
la société, opposer des valeurs morales de vie en commun, de vie
ensemble, à des valeurs mécaniques et notamment de mécanique
financière. Cette idée est spécialement une idée française.
La réconciliation des Français avec la France
Cela m'amène à vous dire un mot d'une autre réconciliation que je pense
nécessaire de conduire : c'est la réconciliation des Français avec la
France, des Français avec l'image de la France, et des Français avec
l'histoire de la France.
Voyez-vous, je crois vous l'avoir fait sentir, je suis profondément
sensible au drame que beaucoup de nos compatriotes vivent, drame
souvent inconscient, qui est celui de la difficulté à remonter le temps
pour retrouver la réalité de l'esclavage. C'est un drame collectif et
peut-être un drame personnel, et il est nécessaire que cela soit pris
en compte. Je ne sais pas comment le Président de la République va
faire pour se sortir du débat des dates. Moi j'avoue que, bêtement,
j'aurais choisi le 27 avril, anniversaire du 27 avril 1848, abolition
de l'esclavage par Victor Schoelcher.
On aurait peut-être pu choisir la date de l'abolition de l'esclavage
par la République française. Elle prouve que nous avions déjà de
l'influence politique à cette époque.
Il y a un problème de commémoration et plus encore un problème de
connaissance pour ceux qui sont les descendants des victimes d'un crime
contre l'humanité. Car c?était un crime contre l'humanité, un crime
exceptionnel conduit par toute l'humanité, de tous les pays, de toutes
les sociétés - avant la société du libéralisme et de l'émancipation que
nous avons réussi à construire, et pour lesquels nous devons exprimer
une gratitude très importante.
Donc, ceci, nous devons l'assumer. Ma conviction est que cela doit être
assumé par ceux qui expriment le sentiment de leur pays, c'est-à-dire
principalement par le Président de la République.
Il est dans son rôle quand il le fait. Je souhaite que cette idée d'un
Président de la République exprimant, au nom du peuple qui l'a élu, au
nom de la nation dont il a la charge, ces enjeux de mémoire, je
souhaite que cela se perpétue et soit encore plus fort dans la période
qui vient.
Et cependant, je veux dire, parlant de réconciliation des Français avec
la France, que je n'ai pas compris pourquoi, comment le Président de la
République et le Premier Ministre avaient choisi d'effacer, d'ignorer,
d'éluder, tout sentiment de mémoire historique à destination de
Napoléon. Je n'ai pas compris pourquoi nous envoyions un porte-avions
pour l'anniversaire de Trafalgar et que nous étions incapables d'avoir
un geste national pour l'anniversaire d'Austerlitz.
On pouvait parfaitement faire l'un et l'autre, dire que nous nous
souvenons des pages glorieuses et que nous sommes capables de ne rien
ignorer des pages noires.
Est-ce que vous connaissez une seule aventure historique qui n'ait que
des pages glorieuses et aucune page noire ? Moi, je n'en connais pas.
L'humilité et la fierté nationale consistent à dire que nous devons
assumer les deux, réconciliation des Français entre eux et
réconciliation des Français avec leur histoire et aussi avec leur
mission.
J'entends très souvent parler par des esprits que j'estime, en France
et hors de France, de l'arrogance française.
Il y a une part de réalité dans cette accusation, mais c'est une part
de réalité qui ne doit pas conduire la France à abandonner
l'originalité et la force du message qu'elle a hérité de l'histoire,
qu'elle a forgé de ses mains et qui est un message d'actualité pour le
siècle qui vient, sans doute pour toute l'Europe, sans doute aussi un
message universel.
Je suis pour que nous assumions la fierté de ce message.
En vérité, ce que l'on appelle arrogance, c'est une manière d'être
quand, à côté ou à l'intérieur de soi-même, on sent un très grand
désarroi. L'arrogance, c'est ce qui reste quand la fierté a disparu.
Je propose que nous abandonnions l'arrogance, mais que nous retrouvions
la fierté parce que, de ces retrouvailles entre la France et elle-même,
dépend aussi, Graham Watson l'a dit, une grande part de l'avenir de
l'Europe.
Si la France ne se retrouve pas, l'Europe sera perdue. Si nous
n'assumons plus la mission qui a été la nôtre, celle de constructeurs
et celle d'inspirateurs, alors il n'y aura pas de destin pour l'Europe
: il y aura le lent et inexorable enlisement que nous connaissons
depuis plusieurs mois, et qui fait que de recul en recul, l'Europe
s'efface.
Mes chers amis, si vous regardez le Proche-Orient et le Moyen-Orient,
si vous mettez côte à côte la situation nouvelle en Palestine et la
victoire du Hamas, l'évolution nouvelle de l'Iran, alors vous mesurez
que quelque chose est en route, dont nous ne pouvons pas ne pas voir le
caractère menaçant.
Je ne suis pas parmi les pessimistes. Je pense qu'il y a toujours un
moyen pour que le mal tourne en bien.
Je pense que les hommes peuvent changer : Ariel Sharon nous l'a montré,
pour qui j'ai une pensée. Je pense que les hommes de guerre peuvent
devenir des hommes de paix.
Ceux qui ont porté le fer et le feu et fait couler le sang peuvent
changer.
Mais une telle situation ne se dénouera pas si nous ne sommes pas
capables d'exercer les pressions et d'envoyer les messages nécessaires.
Qui ne voit que, si les nations européennes se mettent à agir dans
cette affaire comme elles en ont l'habitude, c'est-à-dire en ordre
dispersé, qui ne voit que leur influence s'annulera, et que
l'inexorable continuera à rouler ?
Voyez-vous, l'autorité palestinienne vit sous perfusion financière de
l'union européenne. Cela ne nous donne pas le droit de parler à leur
place, parce que ce n'est pas une sujétion, mais cela nous donne le
devoir de réfléchir, de veiller, de donner les critères qui, pour nous,
Europe, sont ceux d'une évolution positive de la situation, et de
refuser le renoncement qui consisterait à observer sans agir. De
l'existence de l'Europe dépend une partie essentielle de la stabilité
et de la paix dans le monde, et de la vigueur de la France dépend
l'existence de l'Europe. Je ne sais pas si vous mesurez ce que cela
veut dire comme responsabilité que nous avons à affronter et à assumer.
L?arme atomique est une arme de dernier recours
La voix de la France, c'est très important et c'est très difficile, et
notamment lorsque les responsables français abordent des questions
cruciales, puisqu'il s'agit ici d'évoquer ce que pourrait être une
nouvelle manière d'exercer ses responsabilités. Je veux vous dire en
toute simplicité que j'ai été un peu troublé par l'évocation récente
que le Président de la République a faite de l'utilisation de l'arme
atomique.
Je suis d'accord avec lui pour dire que les intérêts vitaux de la
France ne sont pas définis uniquement par les frontières hexagonales ou
même l?outre-mer. Je suis d'accord avec lui pour dire qu?il faut
considérer comme juste que nous considérions l'intérêt vital de nos
alliés les plus proches comme une part de notre intérêt vital.
Sur ce point, je n'ai aucune divergence à exprimer, seulement du
soutien.
J'ai été plus troublé lorsque le président de la République a évoqué
l'idée que l'arme atomique pourrait être mise en oeuvre dans des
situations de terrorisme international.
Non que j'ai la moindre indulgence pour le terrorisme ; mais je pense
que l'arme atomique n'est pas une arme de maintien de l'ordre
international. C'est une arme de dernier recours et il convient de lui
garder son statut de dernier recours : sans cela, elle perdra son
caractère dissuasif.
Retrouver pour la démocratie la place du peuple
Nouveau projet d'espérance pour la France : mes amis l'ont évoqué
largement à la tribune, je ne le ferai que d'un mot, c'est retrouver
pour la démocratie française la place du peuple français, qui doit être
la première. Démocratie, cela veut dire le gouvernement du peuple.
La manière dont le peuple est représenté dans les institutions de la
République fait de la France le pays le plus en retard, le plus
archaïque, le plus moqué de l'ensemble des pays développés et de
l'ensemble des pays européens ; et nous ne pouvons pas continuer à
accepter cette situation.
Il n'est pas possible d'accepter que la représentation des Français
dans leur diversité soit aussi caricaturée dans les assemblées où nous
siégions -Marielle a très bien parlé de la situation des femmes dans la
vie, dans la société et en politique-, et on ne peut pas accepter
d'être le 81ème pays pour la représentation des femmes dans les
institutions démocratiques qui sont les nôtres et au Parlement.
On ne peut pas accepter d'être un pays fort et si divers - diversité de
culture, diversité d'origine, diversité de situation - et que cette
diversité soit totalement gommée à l'Assemblée Nationale : tout cela
fait faire au gouvernement des bêtises. Ils oublient le pays dont ils
sont les représentants. Ils oublient la réalité dont ils devraient
rendre compte; ils sont pris dans des jeux de pouvoir, dans la
soumission, notamment au gouvernement et au pouvoir exécutif, dans des
disciplines qui ne devraient pas être de saison. Nous devons changer
tout cela.
C'est un devoir et c'est naturellement un engagement.
Il n'est pas normal que l'Etat ne soit pas soumis aux mêmes règles de
droit que celles qu?il impose
Je reviendrai une autre fois sur le social, sur l'idée d'activité
universelle, j'ai développé déjà devant vous ces points, mais je veux
dire un mot de la question du statut de l'Etat, en France, parce qu'il
me semble qu'une série d'événements récents a mis la prééminence de
l'Etat en France en question aux yeux des citoyens.
Hervé MORIN a dit à quel point il était injuste que l'Etat ne soit pas
soumis aux règles qu'il impose aux autres. Il n'est pas juste, il n'est
pas normal que l'Etat ne soit pas soumis aux mêmes règles de droit et à
la même justice que celle qu'il impose aux citoyens.
Un juge de l?instruction
Mais je veux vous dire un mot de l'affaire d'Outreau, parce qu'elle est
liée à cette question. C'est une immense vague d'émotion qui balaie
notre pays, et cette émotion est justifiée lorsqu'on voit ces vies
brisées... lorsqu'on voit cette multiplication de victimes d'un système
qui nous fait découvrir ce que nous avions trop oublié, mais qui, pour
moi, est si important, c'est que les victimes se défendent moins bien
que les coupables.
Que lorsqu'on est pris dans cette mécanique, dans ce rouleau
compresseur, tout d'un coup on devient maladroit, tout d'un coup, on ne
trouve plus les mots, ou même parfois d'autres mots que les siens?
Avez-vous vu l'extraordinaire distance entre les visages de ceux qui
étaient mis en accusation, et que tout le monde dépeignait comme des
bêtes brutes et le visage des mêmes, une fois réhabilités, à
l'assemblée Nationale, devant leurs représentants, et qui prenaient à
témoin les parlementaires des misères qu'ils avaient subi, avec
grandeur et avec force ?
C'étaient les mêmes personnes.
Quand on remonte un peu plus loin dans la mécanique de ce drame,
l'organisation du système judiciaire français qui fait que le juge
d'instruction représentant l'Etat peut-être en même temps accusateur et
juge, on se dit qu'il y a, dans ce déséquilibre hérité de l'ancien
régime, quelque chose qui ne ressemble plus aux nécessités d'une
justice équitable, et qu'il faut dégager la justice de ces contraintes,
qui ne peuvent que conduire trop souvent à l'abus de pouvoir.
Et qu'il faut rétablir l'équilibre entre l'accusateur et le défenseur
pour avoir non plus un juge d'instruction, mais un juge de
l'instruction.
Il n'est aucune victoire qui nous soit interdite
Vous avez, mes chers amis, 18 mois pour donner à ce projet d'espérance
pour la France, à ce projet d'espérance pour les Français, le visage
qui devra être le sien lorsque les échéances approcheront.
Je veux vous dire cependant ceci : quelque chose a commencé à Lyon.
Les plus grandes aventures commencent ainsi. Vous étiez des milliers,
malgré la neige, sous la neige, bloqués par la neige pour quelques-uns
d'entre vous, et c'est parce que vous étiez ainsi, dans ces situations
de défi, que vous avez pu vous retrouver dans cette salle et commencer
à bâtir ensemble quelque chose.
C'est un besoin de notre pays, c'est un besoin des générations qui en
ont assez d'aller d'échec en échec et qui voudraient bien, en effet,
qu'un chemin nouveau se dégage.
Si ce que nous disons, si ce que nous sentons est juste, alors je vous
le dis, rien ne l'arrêtera.
Si nous parlons la langue des gens, non pas la langue des pouvoirs, la
langue des puissants, mais la langue des femmes et des hommes, la
langue des femmes jeunes, et des hommes jeunes, et la langue des hommes
vieillis et des femmes vieillies, tous membres de la communauté
nationale, tous citoyens, tous dignes de s'exprimer, d'être représentés
et de voir porter leurs déceptions et leurs espoirs, alors il n'est
aucune victoire qui nous soit interdite. Il n'est aucun défi que nous
ne pourrons relever, il n'est aucune réponse que nous ne pourrons
apporter à la demande d'un pays qui a besoin à nouveau d'espérer.
Je vous remercie.Source http://www.udf.org, le 30 janvier 2006