Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des médecins hospitaliers, Paris le 15 février 2001.

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Circonstance : Ouverture des négociations sur l'aménagement et la réduction du temps de travail pour les médecins hospitaliers, à Paris le 15 février 2001

Texte intégral

Lors de la réunion du 21 décembre, je vous ai présenté les grandes lignes du travail que nous avons à conduire pour réussir la mise en place de la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière, avec une démarche parallèle pour les médecins hospitaliers.
J'ouvre aujourd'hui les négociations sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des médecins afin que celle-ci puisse entrer en phase opérationnelle à partir de janvier 2002. Le calendrier est ambitieux, c'est pourquoi la méthode doit être précise.
L'ensemble des travaux que nous aurons à mener sur cet important chantier doit répondre aux objectifs suivants :
améliorer la qualité des soins offerts aux malades,
améliorer les conditions de vie professionnelle des médecins,
et réduire effectivement le temps de travail.
De nombreux thèmes devront faire l'objet de discussions et de négociations. Je citerai : le diagnostic que doivent mener les établissements, l'organisation du dispositif général de mise en uvre, la réglementation qui s'appliquera à partir de janvier 2002 et les modalités d'allocation des moyens supplémentaires nécessaires à la création d'emplois médicaux.
Sur ce dernier point, j'ai entendu vos remarques le 21 décembre, ainsi que vos craintes concernant la démographie médicale à l'hôpital. Je vais y revenir.
1) Je souhaite en premier lieu aborder en détail les étapes de la démarche que je retiens pour conduire notre travail, et tout d'abord la méthode et le calendrier.
Au niveau national, deux rendez-vous importants :
A la fin avril au plus tard, il nous faut, ensemble :
Elaborer le cahier des charges à l'attention des établissements pour analyser leur organisation existante.
Déterminer l'organisation à mettre en place aux niveaux national et local pour mener à bien l'ensemble de la démarche. Par exemple, préciser le rôle des instances nationales (conseil supérieur des hôpitaux) et locales (commissions médicales d'établissement en particulier) ; le rôle des autorités de tutelle
Définir les points indispensables à l'élaboration des nouveaux textes statutaires qui ne manqueront pas d'être nécessaires, compte tenu de la multiplicité et de la diversité des statuts médicaux à l'hôpital. Je peux citer en particulier : la définition du temps de travail, les sujétions (gardes, astreintes et permanences), la gestion des temps partiels, la distinction d'organisations différenciées en fonction des activités médicales.
Cette première étape nous servira à élaborer un nouveau cadre réglementaire à l'activité médicale à l'hôpital.
Il se traduira par la réalisation d'un document qui sera remis aux établissements et qui constituera le support pour réaliser l'analyse de l'existant et déterminer les premières pistes d'amélioration de l'organisation.
D'ici à la fin juin, la poursuite des négociations nationales devra permettre :
De finaliser les principes applicables en matière d'ARTT pour les médecins et je le souhaite de commencer à présenter au conseil supérieur des hôpitaux les projets de décrets.
De déterminer les modalités de répartition et les critères d'allocation de moyens supplémentaires pour créer des emplois médicaux.
Au niveau local, dès la fin avril 2001, les établissements conduiront le diagnostic préalable à la mise en uvre de la nouvelle organisation du travail résultant de l'aménagement et de la réduction du temps de travail médical à l'hôpital.
Cette analyse partagée de l'organisation est indispensable pour répondre aux objectifs que nous avons retenus. Elle est d'ailleurs également prévue dans le projet d'arrêté concernant le repos de sécurité, actuellement en cours de signature. Elle devra aider à repérer les points forts et les points faibles de l'organisation et déterminer les premières pistes d'amélioration.
Ce diagnostic sera réalisé dans le même temps que celui concernant les personnels de la fonction publique hospitalière. Il est indispensable que les deux démarches soient complémentaires. Il ne peut se concevoir en effet que l'ARTT du corps médical hospitalier soit définie sans en apprécier parallèlement l'impact sur l'organisation du travail de l'ensemble des personnels.
La préparation du budget 2002 permettra de démarrer la mise en place de la réduction du temps de travail pour les médecins par l'attribution des moyens supplémentaires négociés et contractualisés entre l'établissement et la tutelle (ARH) sur la base des critères de répartition définis au niveau national et dans le cadre des enveloppes régionales.
2) Une fois précisé l'ensemble du processus, j'aborde plus concrètement le déroulement de la négociation nationale qui s'ouvre et les modalités de travail que nous avons retenues pour celle-ci :
La négociation sera conduite par le directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, qui me rendra compte régulièrement.
Une mission d'appui sera créée auprès du directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins afin d'accompagner et de suivre la démarche dans les régions et les établissements, à l'instar de ce qui a été fait pour la RTT des autres professionnels de la Fonction Publique Hospitalière. Elle sera composée de professionnels de l'hospitalisation et animée par une personnalité qualifiée dans ce domaine.
Cette mission devra notamment, avec l'aide des ARH, réaliser des simulations en fonction des différentes hypothèses formulées, dans le souci de garantir la permanence et la qualité de la prise en charge médicale.
Par ailleurs, j'envisage que dans un second temps, à partir du mois de juin, cette mission puisse conduire une simulation en vraie grandeur dans deux régions test afin d'évaluer les conditions de faisabilité et les moyens supplémentaires à prévoir.
Édouard Couty organisera, dans les jours qui viennent, un cycle de rencontres bilatérales avec chacun d'entre vous qui portera en particulier sur l'organisation du dispositif général et sur l'identification des thèmes qui nécessiteront une nouvelle réglementation. Puis, comme c'est toujours le cas, des réunions multilatérales seront organisées pour finaliser l'ensemble.
En ce qui concerne plus précisément le diagnostic préalable, de nombreuses questions devront trouver des solutions. Elles tiennent aux perspectives démographiques générales ainsi qu'aux habitudes d'organisation du travail médical à l'hôpital. Je veux en poser quelques-unes :
Comment mesurer le temps médical ?
Quelles sont les unités de compte pertinentes pour ce décompte du temps médical : heure, demi-journée, journée, garde, astreinte, et dans le cadre de quelle organisation ?
Quels sont les systèmes d'organisation différenciés pertinents selon les activités, sachant que les contraintes organisationnelles peuvent varier profondément ?
Quelle place donner à l'activité libérale et à l'activité d'intérêt général dans le temps de travail tel qu'il est défini légalement ? En effet, ces activités ne constituent pas un " temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur [] sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles " (art. 2 du décret d'août 2000), ce qui constitue la définition réglementaire du temps de travail.
La mutualisation des moyens en personnel médical peut-elle être imaginée, selon quelles règles en matière d'exercice ou de nomination ?
Des modifications des frontières de compétence entre professionnels peuvent-elles permettre d'améliorer l'utilisation des moyens en personnel médical ?
Autant de questions qu'il faut aborder d'emblée, dès le démarrage des discussions bilatérales que vous allez avoir avec la DHOS.
L'ensemble de ce travail sera achevé, comme je l'ai évoqué, fin avril.
Pour la deuxième étape nationale qui portera sur les deux aspects précédemment évoqués ( mise au point des projets de décrets, l'élaboration des critères et des modalités de répartition des moyens supplémentaires), de la même façon que pour la première étape, le directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins mènera les négociations en bilatéral puis en multilatéral.
Ce dispositif général qui articule, dans un processus continu, des phases locales et nationales, est celui que j'ai arrêté pour nous permettre de réussir, dans les délais très courts qui nous sont impartis, la mise en place de l'aménagement et de la réduction du temps de travail médical à l'hôpital.
Je ne méconnais pas les difficultés que nous sommes susceptibles de rencontrer pour certaines disciplines ou certains modes d'organisation à temps très contraint. Nous aurons à faire preuve d'imagination.
J'ai confiance quant à l'aboutissement de ce dossier, qui va modifier profondément nos organisations hospitalières. Je sais pouvoir compter sur vous qui êtes impliqués en tant que responsables des unités de soins pour réussir ce grand chantier qui est une opportunité majeure pour l'hôpital public pour améliorer l'organisation du travail, décloisonner les services, développer la qualité du service rendu aux malades et améliorer les conditions de travail.


(Source http://www.sante.gouv.fr, le 22 février 2001)