Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Vous avez souhaité, Monsieur le Président du Conseil Général du Maine et Loire, Monsieur le Président du Conseil Général de Meurthe et Moselle et Président de l'Observatoire de l'action sociale décentralisée, que ces premières Assises nationales sur la protection de l'enfance se tiennent symboliquement à Angers. Elles coïncident avec un temps fort de la protection de l'enfance : dans les prochaines semaines, le projet de loi dont j'ai annoncé les grands axes le 16 mars dernier, sera présenté au Conseil des ministres puis au Parlement.
Ces premières assises nous permettent de faire un point d'étape important : où en sommes-nous aujourd'hui de la protection de l'enfance ?
Pour y répondre, vous avez souhaité rassembler des élus, des professionnels de la Justice, de l'Education Nationale, des médecins, des professionnels de la Protection maternelle et infantile, de l'Aide sociale à l'enfance, du service social départemental, des associations, et bien d'autres. L'échange que vous avez eu m'encourage à poursuivre l'action que j'ai entreprise depuis plusieurs mois.
Je souhaite souligner le consensus qui s'est dégagé, un consensus sur la nécessité de réformer, un consensus sur les fondements de notre système, que tous nous jugeons justes et sages, un consensus aussi sur les améliorations qu'il faut lui apporter.
Cette terre angevine, qui nous accueille aujourd'hui, connue pour sa douceur de vivre, pour son art de vivre, fut aussi le théâtre d'une tragédie criminelle dont plusieurs dizaines de jeunes enfants ont été victimes.
De ce drame, vous avez voulu faire le point de départ d'un sursaut. Et si nous sommes à Angers aujourd'hui, c'est pour ancrer notre réflexion et notre action dans l'expérience du réel.
Vous nous invitez en effet à tourner notre regard vers ces dizaines de milliers d'enfants qui, sans faire l'objet de la folie criminelle d'adultes indignes, souffrent souvent en silence de négligence, de manque d'amour, de violences morales et psychiques, d'humiliations et de brimades, ces dizaines de milliers d'enfants qui sont la proie de conflits aigus entre adultes et qui subissent la dureté de rapports familiaux dégradés.
Il faut en tirer les enseignements, resserrer les mailles du filet, tout faire pour éviter que de tels drames se renouvellent. Il faut, dans le même temps, élargir bien au-delà des affaires criminelles, et même bien au-delà de la seule maltraitance, qui seule intéressait le législateur de 1989, et poser l'exigence d'une politique d'aide à l'enfance dont l'ambition doit être d'assurer à chaque enfant les meilleures conditions d'épanouissement affectif, psychique et intellectuel,
- de le faire autant qu'il est possible en confortant le cadre familial,
- de le faire en prenant les difficultés à la racine,
- en agissant par la prévention,
- en détectant plus vite et mieux les situations de danger,
- en associant tous ceux qui de près ou de loin peuvent jouer un rôle auprès des enfants, à commencer bien sûr par les parents, dont la responsabilité est incontournable,
- en adaptant nos modes d'action aux difficultés de chaque enfant et de chaque famille pour leur donner les meilleures chances de surmonter ces difficultés.
Les drames des enfants martyrs ne doivent pas occulter d'autres réalités et nous empêcher de reconnaître et de conforter les acquis de l'expérience française en matière de protection de l'enfance
Nous avons su construire un véritable réseau de proximité autour des services départementaux de l'Aide sociale à l'enfance, auxquels sont associés les travailleurs sociaux des nombreux centres communaux d'action sociale. Nous mobilisons aussi, à travers un fort maillage associatif, des dizaines de milliers de bénévoles chaque année. Ce sont plus de 270 000 enfants qui sont ainsi aidés et soutenus.
Et surtout, nous avons un système de protection de l'enfance dont les fondements sont justes parce qu'ils reposent sur la primauté de l'enfant, sur l'intérêt de l'enfant placé au dessus de toute autre exigence.
C'est au nom de l'intérêt de l'enfant que nous recherchons d'abord, dans toute la mesure du possible, l'amélioration du contexte familial.
C'est aussi au nom de l'intérêt de l'enfant que nous mettons en oeuvre, lorsque c'est inévitable, des décisions de séparation, tout en évitant, sauf exception, la rupture définitive du lien avec les parents.
Et c'est encore au nom de l'intérêt de l'enfant que nous défendons l'utilité du secret professionnel parce qu'il est garant d'une relation de confiance avec les parents comme avec les enfants et nous avons besoin de cette relation de confiance pour aider l'enfant et la famille.
La force de notre système, c'est également de combattre l'esprit de système, c'est à dire de ne pas laisser encombrer notre jugement sur l'intérêt de l'enfant par des considérations plus idéologiques que professionnelles, d'être réaliste et pragmatique, de savoir faire évoluer nos pratiques et nos décisions au rythme même des évolutions de l'enfant et de sa famille. La protection de l'enfance est un domaine d'action qui exige de la part de tous une conscience, une sensibilité et une intelligence constamment en éveil, ennemies de tout dogme et de toute rigidité.
Car le propre de l'enfant est justement de changer plus vite que nous et il faut pouvoir le suivre, le rattraper et, souvent, le précéder. C'est le défi quotidien auxquels sont confrontés les nombreux acteurs de la protection de l'enfance. Je veux aujourd'hui de nouveau exprimer ma reconnaissance à tous, professionnels et bénévoles, pour la qualité de cette action.
Chacun me l'a dit dans les débats qui se sont multipliés au cours des derniers mois, notre protection de l'enfance présente pourtant des failles, des lacunes, des défauts d'organisation qui empêchent d'aider aussi efficacement que nous le voudrions, que vous le voudriez, les enfants en situation de risque ou de souffrance.
De cela, vous avez une conscience aiguë à Angers. Et je voudrais rendre hommage aux initiatives qui ont été prises par le département du Maine-et-Loire, avec l'ensemble de ses partenaires, justice, hôpitaux, gendarmerie, Education nationale notamment, à travers la Charte de protection de l'enfance en danger signée en février 2004. Vous avez voulu répondre à la tragédie par l'exemplarité. L'expérience du Maine-et-Loire, je l'ai retrouvée dans d'autres départements, à Chartres, à Dijon, à Chambéry et hier encore à Caen, au fil de mes déplacements. Je sais qu'elle est partagée par beaucoup d'autres départements encore.
Et c'est en partant de ce type d'expériences, en essayant de transposer le meilleur parmi toutes les innovations dont j'ai pu prendre connaissance et pour que, partout en France, nous puissions nous porter au niveau le plus élevé d'efficacité quand il s'agit de l'enfance en danger, que j'ai préparé le projet de loi que le Président de la République et le Premier ministre m'ont demandé d'élaborer.
Vous le savez, depuis ma prise de fonctions, j'ai beaucoup consulté.
J'ai reçu de très nombreux spécialistes.
J'ai rencontré des experts, des professionnels, des responsables d'organisations professionnelles représentatives,
- des présidents de conseil général,
- des responsables d'associations de défense des droits de l'enfance, des signataires de l'appel des 100.
J'ai lu attentivement les recommandations des rapports qui m'ont été remis.
Je me suis déplacé à la rencontre des acteurs de terrain.
Chaque fois, le même constat s'est imposé : il y a urgence à agir.
J'ai invité les présidents de conseil général à organiser un débat dans leur département en associant l'ensemble des acteurs locaux. Plus des deux tiers ont organisé ce débat. Ils m'ont adressé leurs propositions qui pour la plupart se rejoignent.
Au niveau national, j'ai organisé des journées thématiques qui ont réuni plusieurs dizaines d'experts et de professionnels.
J'ai également mis en place un comité national d'experts reconnus dans leur discipline, dont les échanges m'ont été précieux.
Fort de tous ces conseils et propositions, j'ai élaboré un projet de réforme, que j'ai souhaité ambitieux mais aussi réaliste et pragmatique.
1. Je souhaite vous en rappeler les grandes lignes.
Il nous faut :
Renforcer la prévention, notamment très en amont, afin d'anticiper des difficultés futures.
Organiser le signalement, pour détecter plus tôt et signaler plus efficacement les situations de danger.
Diversifier les modes de prise en charge, afin de mieux répondre aux besoins de chaque enfant.
Notre premier levier d'action, c'est d'abord le renforcement de la prévention.
La prévention est l'affaire de tous parce que la protection de l'enfance est l'affaire de tous.
Mon objectif est de multiplier les points de contact entre l'enfant, sa famille et les professionnels pour anticiper les difficultés et pouvoir soutenir les familles avant que la situation ne se détériore. Les moments clés se situent avant même la naissance, à l'occasion de la naissance et au cours de la petite enfance.
C'est pourquoi,
Je veux rendre systématique l'entretien au 4ème mois de grossesse et organiser, lorsqu'il est nécessaire, le suivi des femmes enceintes qui rencontrent des difficultés pour les aider à les surmonter.
Le séjour à la maternité et les premiers jours qui suivent le retour de la maternité sont cruciaux dans l'installation du lien mère-enfant.
Je souhaite là encore, qu'un contact systématique ait lieu dès la maternité entre les professionnels de la Protection maternelle et infantile (PMI) et les parents, en liaison avec les professionnels de la maternité.
Le retour de la maternité doit aussi être l'objet de toute notre attention et notamment dans les tout premiers jours ; la PMI doit proposer à tous les parents une visite à domicile.
Je souhaite que cette visite soit systématique lorsque les services auront identifié des difficultés particulières pour la mère qui pourraient mettre en jeu la santé ou le développement du nourrisson.
D'autres lieux, d'autres moments doivent aussi être mis à profit pour prévenir les situations préjudiciables à l'enfant.
L'école est le lieu propice pour détecter les risques pour l'enfant.
Je souhaite qu'un bilan soit assuré pour tous les enfants âgés de 3 à 4 ans, bilan qui sera effectué à l'école pour ceux qui sont scolarisés. Aujourd'hui seulement 40 % des enfants bénéficient de ces bilans. Il faut que ce soit 100 % des enfants.
Même principe en ce qui concerne la visite médicale de la sixième année qui doit être assurée pour tous les enfants. 77 % des enfants en bénéficient, il faut que ce soit tous les enfants.
Le deuxième volet de la réforme, c'est l'organisation du signalement. Mieux détecter et mieux évaluer les situations de danger : c'était le thème de votre premier débat ce matin.
Aujourd'hui, le signalement est organisé de manière très variable selon les départements. Il manque parfois de fiabilité et aussi de lisibilité pour les professionnels. Je souhaite clarifier ce dispositif.
Je propose qu'une cellule soit créée dans chaque département, bien identifiée et vers laquelle convergent toutes les informations préoccupantes concernant un enfant.
La cellule devra veiller à ce qu'une évaluation collégiale permette de croiser les regards des professionnels et d'envisager ensemble ce qu'il convient de faire.
Bien souvent, c'est déjà le cas mais plus ou moins formellement. Je souhaite que ce soit la règle.
Cela suppose le partage d'informations entre professionnels habilités au secret.
Je veux autoriser ce partage d'informations dans l'intérêt de l'enfant, parce que sa situation nécessite un échange et une expertise collégiale.
Mais ce partage ne doit être autorisé qu'entre professionnels tenus au secret professionnel.
Le signalement pose la question de l'articulation entre l'autorité sociale et l'autorité judiciaire. Je sais que c'est un point central.
Il faut préciser les règles de signalement, pour que la justice soit saisie quand c'est nécessaire.
La protection administrative doit prévaloir lorsqu'elle suffit à protéger du danger. Elle doit prévaloir parce qu'il est toujours préférable que l'enfant reste chez lui quand c'est possible, quand son intérêt est préservé.
Le recours au juge doit être réservé aux cas où la protection administrative n'est pas suffisante pour protéger l'enfant du danger
ou lorsque qu'elle ne peut être assurée parce que les parents ne peuvent pas ou refusent d'accepter l'accompagnement proposé par l'aide sociale à l'enfance.
Enfin, troisième volet : diversifier les modes de prise en charge des enfants, afin d'offrir des solutions adaptées aussi souvent que possible à chaque cas.
Ce sera l'objet de vos débats de cet après-midi.
Je souhaite inscrire dans la loi de nouveaux modes de prise en charge, souples, qui permettent de dépasser l'alternative sommaire entre le placement et le maintien à domicile.
La diversification des modes de prise en charge doit permettre de graduer les réponses, de les adapter au contexte et aux besoins du moment.
C'est l'accueil de jour, l'accueil séquentiel.
C'est l'accueil mixte à la fois éducatif et thérapeutique qui pourra être ponctuel ou permanent pour les enfants et les adolescents souffrant de troubles du comportement.
C'est l'accueil d'urgence pour une période de 72 heures maximum pour les adolescents en fugue.
C'est l'assistance éducative en milieu ouvert, modulée sur le moment, associant quand c'est nécessaire la famille.
Enfin, nous faisons souvent l'expérience que certains problèmes de l'enfant proviennent de difficultés à gérer le budget familial.
Un accompagnement social et budgétaire par un professionnel formé à l'économie sociale et familiale pourra être proposé dans le cadre de la protection administrative ou judiciaire.
Le projet de loi doit, en définitive, conforter le rôle central, le rôle de chef de file du Conseil général en matière de protection de l'enfance.
Le Conseil général pourra ainsi assurer une plus grande continuité et une plus grande cohérence de la prise en charge de l'enfant dans le temps.
Bien sûr, il ne portera pas seul la responsabilité de la protection de l'enfance.
L'État prendra sa part. L'autorité judiciaire tout particulièrement ainsi que la protection judiciaire de la jeunesse.
2. Je souhaite aborder à présent le programme d'accompagnement de la réforme qui est d'une grande importance.
La loi ne suffira pas à réformer notre dispositif. Bien des points relèvent des pratiques et des procédures, mais aussi de la coordination et du renforcement du partenariat.
La loi, ce sont des mots qui prennent force de droit. Mais la réforme, c'est vous qui la ferez vivre. C'est vous qui lui donnerez toute sa mesure.
C'est pourquoi, dès la mi-avril, un travail de fond va être engagé pour accompagner le projet de loi par des mesures qui ne relèvent pas du domaine législatif.
Ce travail se fera avec les professionnels eux-mêmes : dans la concertation en associant, comme cela a été le cas pour l'élaboration du projet de loi, experts et professionnels de tous les horizons.
Le travail pour la réforme de la protection de l'enfance se poursuit donc. Je veux que l'essentiel du programme soit achevé d'ici la fin de l'année.
Ce travail doit porter sur l'élaboration de guides de bonnes pratiques.
Pour les professionnels, cela implique des changements dans la manière d'appréhender les questions à traiter.
La formation est un élément important pour réaliser effectivement ces changements.
Les travailleurs sociaux et médico-sociaux exerçant dans les services départementaux ou des associations sont les plus concernés.
Pour les partenaires institutionnels, cela implique d'adopter des outils de travail communs, d'harmoniser les pratiques professionnelles et d'assurer une meilleure articulation.
Ce programme d'accompagnement s'articule autour de trois points.
1. Les pratiques professionnelles sont la clé du dispositif pour préserver les enfants des situations de danger.
Les pratiques professionnelles doivent être l'objet de toute notre attention à deux niveaux :
en matière d'évaluation des situations individuelles et familiales
et en matière de signalement fassent l'objet d'une harmonisation.
Un guide national des bonnes pratiques de l'évaluation des situations individuelles et familiales sera réalisé.
Les professionnels pourront s'y référer pour :
- favoriser le repérage des risques et les situations de danger
- faciliter l'analyse des informations et de situations
- améliorer la qualité des écrits (dont le rapport de signalement au Procureur).
Un guide national des bonnes pratiques du signalement également.
Ce guide servira de référence aux acteurs locaux de la protection de l'enfance qui pourront s'en inspirer pour l'élaboration de leur protocole départemental.
Il permettra de bien définir la procédure de recueil des informations préoccupantes.
Il permettra de mieux identifier les cas de saisine directe du Procureur de la République.
Il permettra de clarifier le circuit des informations préoccupantes.
2. Le deuxième point, c'est accompagner les professionnels dans leur action quotidienne au service de la protection de l'enfance.
C'est élaborer, avec les professionnels, un guide auquel ils puissent se référer.
Je pense à l'accompagnement des familles à domicile.
Les actions éducatives sont très hétérogènes en matière d'aide et d'assistance éducative.
Elles varient d'un professionnel à l'autre, d'un organisme à l'autre, d'un département à l'autre.
Au nom de l'égalité de traitement des usagers sur l'ensemble du territoire national, il est bon qu'une référence commune existe.
Ces prestations ne sont pas toujours ajustées aux besoins des enfants et de leur famille.
Je souhaite que les interventions d'ordre éducatif soient personnalisées.
Je pense à la nouvelle prestation définie par le projet de loi : l'accompagnement budgétaire.
Ce guide intégrera un volet relatif à l'accompagnement budgétaire. Il indiquera notamment les modalités de mise en oeuvre de la mesure.
Je pense aux visites médiatisées.
Les modalités du déroulement de ces visites manquent aujourd'hui de clarté, le rôle du tiers médiateur n'est pas clairement établi.
Elles ne sont pas suffisamment sécurisantes pour l'enfant.
Dans l'intérêt de l'enfant, un guide préconisera les modalités de l'exercice de ce droit.
Je pense aussi à la prise en charge des enfants. Des guides, là encore, seront élaborés notamment pour l'accueil d'urgence et l'accueil en établissement.
3. Enfin, le troisième et dernier point, c'est la formation des professionnels.
Il faut tout d'abord des formations pluridisciplinaires qui associent les professionnels qui participent à la protection de l'enfance.
C'est nécessaire si nous voulons rendre notre dispositif plus fiable et plus cohérent.
Des modules de formation continue sur la protection de l'enfance, seront définis pour tous ceux qui concourent à la protection de l'enfance.
Ce seront des modules spécifiques conçus à l'intention :
des professionnels de l'Aide sociale à l'enfance,
de la Protection maternelle et infantile,
du service social du département
mais aussi des associations.
Enfin, je souhaite que les cadres territoriaux, en particulier, et les inspecteurs de l'Aide sociale à l'enfance bénéficient de formations adaptées. Ils sont confrontés quotidiennement à des responsabilités énormes. Je connais leur professionnalisme et leur implication. Je souhaite rendre hommage à leur action.
Ils doivent bénéficier d'une formation spécifique pour leur permettre de bien assumer ces responsabilités.
Pour ces trois volets de la formation, des référentiels nationaux verront le jour prochainement.
Mesdames, Messieurs,
Voilà quels sont les principaux axes de la réforme que je présenterai bientôt au Parlement. Les deux journées auxquelles vous avez participé ont été riches et constructives, je le sais. Je souhaite en remercier les organisateurs.
Pour réussir cette réforme, il nous faudra compter sur l'engagement et la responsabilité de tous. Au-delà de la loi, au delà du programme d'actions que nous devons mettre en oeuvre, c'est dans le dialogue singulier avec l'enfant, avec les parents, avec la famille que tout se joue. Il y a là une alchimie qui opère ou qui n'opère pas.
C'est pourquoi toute mon attention est tournée vers les professionnels, la qualité du dialogue qu'ils peuvent avoir entre eux, la qualité du soutien qu'ils peuvent recevoir et s'apporter les uns aux autres, la qualité des formations qu'ils peuvent suivre et renouveler tout au long de leur activité, la qualité des guides de bonnes pratiques que nous allons élaborer ensemble.
Je veux vous dire aussi qu'au-delà de ce que nous allons faire par la réforme, au-delà de ce que nous pouvons faire en mobilisant tous les moyens de la solidarité, c'est aux parents que revient la responsabilité principale. Ces parents, sans doute moins préparés que leurs aînés à assumer leur rôle, ces parents sans doute plus exposés aux difficultés de la vie. Difficultés économiques et sociales, bien sûr mais aussi difficultés liées à la précarité de la cellule familiale. Sans compter tout ce qui peut transformer parfois le désir d'enfant en volonté de possession plutôt qu'en don de soi. Tel est le noeud de beaucoup de difficultés dans l'établissement du lien entre parents et enfants, quand l'égoïsme nourrit la frustration et la frustration la violence.
Personne n'est jamais sûr de savoir et de pouvoir être un bon parent, mais c'est à la conscience de chacun que je veux m'adresser en rappelant cette exigence fondamentale qui veut que l'intérêt de l'enfant, l'intérêt bien compris de l'enfant, qui suppose l'exercice d'une autorité juste et rassurante, soit toujours la première préoccupation des parents. Ce n'est pas à la société d'élever les enfants. Elle doit seulement être là pour venir à leur secours le plus tôt possible et le plus efficacement possible. Cet équilibre entre la nécessaire responsabilité des parents et les missions de la protection de l'enfance est au coeur des défis qu'il nous faut relever.
Je vous remercie.
source http://www.famille.gouv.fr, le 12 avril 2006
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Vous avez souhaité, Monsieur le Président du Conseil Général du Maine et Loire, Monsieur le Président du Conseil Général de Meurthe et Moselle et Président de l'Observatoire de l'action sociale décentralisée, que ces premières Assises nationales sur la protection de l'enfance se tiennent symboliquement à Angers. Elles coïncident avec un temps fort de la protection de l'enfance : dans les prochaines semaines, le projet de loi dont j'ai annoncé les grands axes le 16 mars dernier, sera présenté au Conseil des ministres puis au Parlement.
Ces premières assises nous permettent de faire un point d'étape important : où en sommes-nous aujourd'hui de la protection de l'enfance ?
Pour y répondre, vous avez souhaité rassembler des élus, des professionnels de la Justice, de l'Education Nationale, des médecins, des professionnels de la Protection maternelle et infantile, de l'Aide sociale à l'enfance, du service social départemental, des associations, et bien d'autres. L'échange que vous avez eu m'encourage à poursuivre l'action que j'ai entreprise depuis plusieurs mois.
Je souhaite souligner le consensus qui s'est dégagé, un consensus sur la nécessité de réformer, un consensus sur les fondements de notre système, que tous nous jugeons justes et sages, un consensus aussi sur les améliorations qu'il faut lui apporter.
Cette terre angevine, qui nous accueille aujourd'hui, connue pour sa douceur de vivre, pour son art de vivre, fut aussi le théâtre d'une tragédie criminelle dont plusieurs dizaines de jeunes enfants ont été victimes.
De ce drame, vous avez voulu faire le point de départ d'un sursaut. Et si nous sommes à Angers aujourd'hui, c'est pour ancrer notre réflexion et notre action dans l'expérience du réel.
Vous nous invitez en effet à tourner notre regard vers ces dizaines de milliers d'enfants qui, sans faire l'objet de la folie criminelle d'adultes indignes, souffrent souvent en silence de négligence, de manque d'amour, de violences morales et psychiques, d'humiliations et de brimades, ces dizaines de milliers d'enfants qui sont la proie de conflits aigus entre adultes et qui subissent la dureté de rapports familiaux dégradés.
Il faut en tirer les enseignements, resserrer les mailles du filet, tout faire pour éviter que de tels drames se renouvellent. Il faut, dans le même temps, élargir bien au-delà des affaires criminelles, et même bien au-delà de la seule maltraitance, qui seule intéressait le législateur de 1989, et poser l'exigence d'une politique d'aide à l'enfance dont l'ambition doit être d'assurer à chaque enfant les meilleures conditions d'épanouissement affectif, psychique et intellectuel,
- de le faire autant qu'il est possible en confortant le cadre familial,
- de le faire en prenant les difficultés à la racine,
- en agissant par la prévention,
- en détectant plus vite et mieux les situations de danger,
- en associant tous ceux qui de près ou de loin peuvent jouer un rôle auprès des enfants, à commencer bien sûr par les parents, dont la responsabilité est incontournable,
- en adaptant nos modes d'action aux difficultés de chaque enfant et de chaque famille pour leur donner les meilleures chances de surmonter ces difficultés.
Les drames des enfants martyrs ne doivent pas occulter d'autres réalités et nous empêcher de reconnaître et de conforter les acquis de l'expérience française en matière de protection de l'enfance
Nous avons su construire un véritable réseau de proximité autour des services départementaux de l'Aide sociale à l'enfance, auxquels sont associés les travailleurs sociaux des nombreux centres communaux d'action sociale. Nous mobilisons aussi, à travers un fort maillage associatif, des dizaines de milliers de bénévoles chaque année. Ce sont plus de 270 000 enfants qui sont ainsi aidés et soutenus.
Et surtout, nous avons un système de protection de l'enfance dont les fondements sont justes parce qu'ils reposent sur la primauté de l'enfant, sur l'intérêt de l'enfant placé au dessus de toute autre exigence.
C'est au nom de l'intérêt de l'enfant que nous recherchons d'abord, dans toute la mesure du possible, l'amélioration du contexte familial.
C'est aussi au nom de l'intérêt de l'enfant que nous mettons en oeuvre, lorsque c'est inévitable, des décisions de séparation, tout en évitant, sauf exception, la rupture définitive du lien avec les parents.
Et c'est encore au nom de l'intérêt de l'enfant que nous défendons l'utilité du secret professionnel parce qu'il est garant d'une relation de confiance avec les parents comme avec les enfants et nous avons besoin de cette relation de confiance pour aider l'enfant et la famille.
La force de notre système, c'est également de combattre l'esprit de système, c'est à dire de ne pas laisser encombrer notre jugement sur l'intérêt de l'enfant par des considérations plus idéologiques que professionnelles, d'être réaliste et pragmatique, de savoir faire évoluer nos pratiques et nos décisions au rythme même des évolutions de l'enfant et de sa famille. La protection de l'enfance est un domaine d'action qui exige de la part de tous une conscience, une sensibilité et une intelligence constamment en éveil, ennemies de tout dogme et de toute rigidité.
Car le propre de l'enfant est justement de changer plus vite que nous et il faut pouvoir le suivre, le rattraper et, souvent, le précéder. C'est le défi quotidien auxquels sont confrontés les nombreux acteurs de la protection de l'enfance. Je veux aujourd'hui de nouveau exprimer ma reconnaissance à tous, professionnels et bénévoles, pour la qualité de cette action.
Chacun me l'a dit dans les débats qui se sont multipliés au cours des derniers mois, notre protection de l'enfance présente pourtant des failles, des lacunes, des défauts d'organisation qui empêchent d'aider aussi efficacement que nous le voudrions, que vous le voudriez, les enfants en situation de risque ou de souffrance.
De cela, vous avez une conscience aiguë à Angers. Et je voudrais rendre hommage aux initiatives qui ont été prises par le département du Maine-et-Loire, avec l'ensemble de ses partenaires, justice, hôpitaux, gendarmerie, Education nationale notamment, à travers la Charte de protection de l'enfance en danger signée en février 2004. Vous avez voulu répondre à la tragédie par l'exemplarité. L'expérience du Maine-et-Loire, je l'ai retrouvée dans d'autres départements, à Chartres, à Dijon, à Chambéry et hier encore à Caen, au fil de mes déplacements. Je sais qu'elle est partagée par beaucoup d'autres départements encore.
Et c'est en partant de ce type d'expériences, en essayant de transposer le meilleur parmi toutes les innovations dont j'ai pu prendre connaissance et pour que, partout en France, nous puissions nous porter au niveau le plus élevé d'efficacité quand il s'agit de l'enfance en danger, que j'ai préparé le projet de loi que le Président de la République et le Premier ministre m'ont demandé d'élaborer.
Vous le savez, depuis ma prise de fonctions, j'ai beaucoup consulté.
J'ai reçu de très nombreux spécialistes.
J'ai rencontré des experts, des professionnels, des responsables d'organisations professionnelles représentatives,
- des présidents de conseil général,
- des responsables d'associations de défense des droits de l'enfance, des signataires de l'appel des 100.
J'ai lu attentivement les recommandations des rapports qui m'ont été remis.
Je me suis déplacé à la rencontre des acteurs de terrain.
Chaque fois, le même constat s'est imposé : il y a urgence à agir.
J'ai invité les présidents de conseil général à organiser un débat dans leur département en associant l'ensemble des acteurs locaux. Plus des deux tiers ont organisé ce débat. Ils m'ont adressé leurs propositions qui pour la plupart se rejoignent.
Au niveau national, j'ai organisé des journées thématiques qui ont réuni plusieurs dizaines d'experts et de professionnels.
J'ai également mis en place un comité national d'experts reconnus dans leur discipline, dont les échanges m'ont été précieux.
Fort de tous ces conseils et propositions, j'ai élaboré un projet de réforme, que j'ai souhaité ambitieux mais aussi réaliste et pragmatique.
1. Je souhaite vous en rappeler les grandes lignes.
Il nous faut :
Renforcer la prévention, notamment très en amont, afin d'anticiper des difficultés futures.
Organiser le signalement, pour détecter plus tôt et signaler plus efficacement les situations de danger.
Diversifier les modes de prise en charge, afin de mieux répondre aux besoins de chaque enfant.
Notre premier levier d'action, c'est d'abord le renforcement de la prévention.
La prévention est l'affaire de tous parce que la protection de l'enfance est l'affaire de tous.
Mon objectif est de multiplier les points de contact entre l'enfant, sa famille et les professionnels pour anticiper les difficultés et pouvoir soutenir les familles avant que la situation ne se détériore. Les moments clés se situent avant même la naissance, à l'occasion de la naissance et au cours de la petite enfance.
C'est pourquoi,
Je veux rendre systématique l'entretien au 4ème mois de grossesse et organiser, lorsqu'il est nécessaire, le suivi des femmes enceintes qui rencontrent des difficultés pour les aider à les surmonter.
Le séjour à la maternité et les premiers jours qui suivent le retour de la maternité sont cruciaux dans l'installation du lien mère-enfant.
Je souhaite là encore, qu'un contact systématique ait lieu dès la maternité entre les professionnels de la Protection maternelle et infantile (PMI) et les parents, en liaison avec les professionnels de la maternité.
Le retour de la maternité doit aussi être l'objet de toute notre attention et notamment dans les tout premiers jours ; la PMI doit proposer à tous les parents une visite à domicile.
Je souhaite que cette visite soit systématique lorsque les services auront identifié des difficultés particulières pour la mère qui pourraient mettre en jeu la santé ou le développement du nourrisson.
D'autres lieux, d'autres moments doivent aussi être mis à profit pour prévenir les situations préjudiciables à l'enfant.
L'école est le lieu propice pour détecter les risques pour l'enfant.
Je souhaite qu'un bilan soit assuré pour tous les enfants âgés de 3 à 4 ans, bilan qui sera effectué à l'école pour ceux qui sont scolarisés. Aujourd'hui seulement 40 % des enfants bénéficient de ces bilans. Il faut que ce soit 100 % des enfants.
Même principe en ce qui concerne la visite médicale de la sixième année qui doit être assurée pour tous les enfants. 77 % des enfants en bénéficient, il faut que ce soit tous les enfants.
Le deuxième volet de la réforme, c'est l'organisation du signalement. Mieux détecter et mieux évaluer les situations de danger : c'était le thème de votre premier débat ce matin.
Aujourd'hui, le signalement est organisé de manière très variable selon les départements. Il manque parfois de fiabilité et aussi de lisibilité pour les professionnels. Je souhaite clarifier ce dispositif.
Je propose qu'une cellule soit créée dans chaque département, bien identifiée et vers laquelle convergent toutes les informations préoccupantes concernant un enfant.
La cellule devra veiller à ce qu'une évaluation collégiale permette de croiser les regards des professionnels et d'envisager ensemble ce qu'il convient de faire.
Bien souvent, c'est déjà le cas mais plus ou moins formellement. Je souhaite que ce soit la règle.
Cela suppose le partage d'informations entre professionnels habilités au secret.
Je veux autoriser ce partage d'informations dans l'intérêt de l'enfant, parce que sa situation nécessite un échange et une expertise collégiale.
Mais ce partage ne doit être autorisé qu'entre professionnels tenus au secret professionnel.
Le signalement pose la question de l'articulation entre l'autorité sociale et l'autorité judiciaire. Je sais que c'est un point central.
Il faut préciser les règles de signalement, pour que la justice soit saisie quand c'est nécessaire.
La protection administrative doit prévaloir lorsqu'elle suffit à protéger du danger. Elle doit prévaloir parce qu'il est toujours préférable que l'enfant reste chez lui quand c'est possible, quand son intérêt est préservé.
Le recours au juge doit être réservé aux cas où la protection administrative n'est pas suffisante pour protéger l'enfant du danger
ou lorsque qu'elle ne peut être assurée parce que les parents ne peuvent pas ou refusent d'accepter l'accompagnement proposé par l'aide sociale à l'enfance.
Enfin, troisième volet : diversifier les modes de prise en charge des enfants, afin d'offrir des solutions adaptées aussi souvent que possible à chaque cas.
Ce sera l'objet de vos débats de cet après-midi.
Je souhaite inscrire dans la loi de nouveaux modes de prise en charge, souples, qui permettent de dépasser l'alternative sommaire entre le placement et le maintien à domicile.
La diversification des modes de prise en charge doit permettre de graduer les réponses, de les adapter au contexte et aux besoins du moment.
C'est l'accueil de jour, l'accueil séquentiel.
C'est l'accueil mixte à la fois éducatif et thérapeutique qui pourra être ponctuel ou permanent pour les enfants et les adolescents souffrant de troubles du comportement.
C'est l'accueil d'urgence pour une période de 72 heures maximum pour les adolescents en fugue.
C'est l'assistance éducative en milieu ouvert, modulée sur le moment, associant quand c'est nécessaire la famille.
Enfin, nous faisons souvent l'expérience que certains problèmes de l'enfant proviennent de difficultés à gérer le budget familial.
Un accompagnement social et budgétaire par un professionnel formé à l'économie sociale et familiale pourra être proposé dans le cadre de la protection administrative ou judiciaire.
Le projet de loi doit, en définitive, conforter le rôle central, le rôle de chef de file du Conseil général en matière de protection de l'enfance.
Le Conseil général pourra ainsi assurer une plus grande continuité et une plus grande cohérence de la prise en charge de l'enfant dans le temps.
Bien sûr, il ne portera pas seul la responsabilité de la protection de l'enfance.
L'État prendra sa part. L'autorité judiciaire tout particulièrement ainsi que la protection judiciaire de la jeunesse.
2. Je souhaite aborder à présent le programme d'accompagnement de la réforme qui est d'une grande importance.
La loi ne suffira pas à réformer notre dispositif. Bien des points relèvent des pratiques et des procédures, mais aussi de la coordination et du renforcement du partenariat.
La loi, ce sont des mots qui prennent force de droit. Mais la réforme, c'est vous qui la ferez vivre. C'est vous qui lui donnerez toute sa mesure.
C'est pourquoi, dès la mi-avril, un travail de fond va être engagé pour accompagner le projet de loi par des mesures qui ne relèvent pas du domaine législatif.
Ce travail se fera avec les professionnels eux-mêmes : dans la concertation en associant, comme cela a été le cas pour l'élaboration du projet de loi, experts et professionnels de tous les horizons.
Le travail pour la réforme de la protection de l'enfance se poursuit donc. Je veux que l'essentiel du programme soit achevé d'ici la fin de l'année.
Ce travail doit porter sur l'élaboration de guides de bonnes pratiques.
Pour les professionnels, cela implique des changements dans la manière d'appréhender les questions à traiter.
La formation est un élément important pour réaliser effectivement ces changements.
Les travailleurs sociaux et médico-sociaux exerçant dans les services départementaux ou des associations sont les plus concernés.
Pour les partenaires institutionnels, cela implique d'adopter des outils de travail communs, d'harmoniser les pratiques professionnelles et d'assurer une meilleure articulation.
Ce programme d'accompagnement s'articule autour de trois points.
1. Les pratiques professionnelles sont la clé du dispositif pour préserver les enfants des situations de danger.
Les pratiques professionnelles doivent être l'objet de toute notre attention à deux niveaux :
en matière d'évaluation des situations individuelles et familiales
et en matière de signalement fassent l'objet d'une harmonisation.
Un guide national des bonnes pratiques de l'évaluation des situations individuelles et familiales sera réalisé.
Les professionnels pourront s'y référer pour :
- favoriser le repérage des risques et les situations de danger
- faciliter l'analyse des informations et de situations
- améliorer la qualité des écrits (dont le rapport de signalement au Procureur).
Un guide national des bonnes pratiques du signalement également.
Ce guide servira de référence aux acteurs locaux de la protection de l'enfance qui pourront s'en inspirer pour l'élaboration de leur protocole départemental.
Il permettra de bien définir la procédure de recueil des informations préoccupantes.
Il permettra de mieux identifier les cas de saisine directe du Procureur de la République.
Il permettra de clarifier le circuit des informations préoccupantes.
2. Le deuxième point, c'est accompagner les professionnels dans leur action quotidienne au service de la protection de l'enfance.
C'est élaborer, avec les professionnels, un guide auquel ils puissent se référer.
Je pense à l'accompagnement des familles à domicile.
Les actions éducatives sont très hétérogènes en matière d'aide et d'assistance éducative.
Elles varient d'un professionnel à l'autre, d'un organisme à l'autre, d'un département à l'autre.
Au nom de l'égalité de traitement des usagers sur l'ensemble du territoire national, il est bon qu'une référence commune existe.
Ces prestations ne sont pas toujours ajustées aux besoins des enfants et de leur famille.
Je souhaite que les interventions d'ordre éducatif soient personnalisées.
Je pense à la nouvelle prestation définie par le projet de loi : l'accompagnement budgétaire.
Ce guide intégrera un volet relatif à l'accompagnement budgétaire. Il indiquera notamment les modalités de mise en oeuvre de la mesure.
Je pense aux visites médiatisées.
Les modalités du déroulement de ces visites manquent aujourd'hui de clarté, le rôle du tiers médiateur n'est pas clairement établi.
Elles ne sont pas suffisamment sécurisantes pour l'enfant.
Dans l'intérêt de l'enfant, un guide préconisera les modalités de l'exercice de ce droit.
Je pense aussi à la prise en charge des enfants. Des guides, là encore, seront élaborés notamment pour l'accueil d'urgence et l'accueil en établissement.
3. Enfin, le troisième et dernier point, c'est la formation des professionnels.
Il faut tout d'abord des formations pluridisciplinaires qui associent les professionnels qui participent à la protection de l'enfance.
C'est nécessaire si nous voulons rendre notre dispositif plus fiable et plus cohérent.
Des modules de formation continue sur la protection de l'enfance, seront définis pour tous ceux qui concourent à la protection de l'enfance.
Ce seront des modules spécifiques conçus à l'intention :
des professionnels de l'Aide sociale à l'enfance,
de la Protection maternelle et infantile,
du service social du département
mais aussi des associations.
Enfin, je souhaite que les cadres territoriaux, en particulier, et les inspecteurs de l'Aide sociale à l'enfance bénéficient de formations adaptées. Ils sont confrontés quotidiennement à des responsabilités énormes. Je connais leur professionnalisme et leur implication. Je souhaite rendre hommage à leur action.
Ils doivent bénéficier d'une formation spécifique pour leur permettre de bien assumer ces responsabilités.
Pour ces trois volets de la formation, des référentiels nationaux verront le jour prochainement.
Mesdames, Messieurs,
Voilà quels sont les principaux axes de la réforme que je présenterai bientôt au Parlement. Les deux journées auxquelles vous avez participé ont été riches et constructives, je le sais. Je souhaite en remercier les organisateurs.
Pour réussir cette réforme, il nous faudra compter sur l'engagement et la responsabilité de tous. Au-delà de la loi, au delà du programme d'actions que nous devons mettre en oeuvre, c'est dans le dialogue singulier avec l'enfant, avec les parents, avec la famille que tout se joue. Il y a là une alchimie qui opère ou qui n'opère pas.
C'est pourquoi toute mon attention est tournée vers les professionnels, la qualité du dialogue qu'ils peuvent avoir entre eux, la qualité du soutien qu'ils peuvent recevoir et s'apporter les uns aux autres, la qualité des formations qu'ils peuvent suivre et renouveler tout au long de leur activité, la qualité des guides de bonnes pratiques que nous allons élaborer ensemble.
Je veux vous dire aussi qu'au-delà de ce que nous allons faire par la réforme, au-delà de ce que nous pouvons faire en mobilisant tous les moyens de la solidarité, c'est aux parents que revient la responsabilité principale. Ces parents, sans doute moins préparés que leurs aînés à assumer leur rôle, ces parents sans doute plus exposés aux difficultés de la vie. Difficultés économiques et sociales, bien sûr mais aussi difficultés liées à la précarité de la cellule familiale. Sans compter tout ce qui peut transformer parfois le désir d'enfant en volonté de possession plutôt qu'en don de soi. Tel est le noeud de beaucoup de difficultés dans l'établissement du lien entre parents et enfants, quand l'égoïsme nourrit la frustration et la frustration la violence.
Personne n'est jamais sûr de savoir et de pouvoir être un bon parent, mais c'est à la conscience de chacun que je veux m'adresser en rappelant cette exigence fondamentale qui veut que l'intérêt de l'enfant, l'intérêt bien compris de l'enfant, qui suppose l'exercice d'une autorité juste et rassurante, soit toujours la première préoccupation des parents. Ce n'est pas à la société d'élever les enfants. Elle doit seulement être là pour venir à leur secours le plus tôt possible et le plus efficacement possible. Cet équilibre entre la nécessaire responsabilité des parents et les missions de la protection de l'enfance est au coeur des défis qu'il nous faut relever.
Je vous remercie.
source http://www.famille.gouv.fr, le 12 avril 2006