Entretien de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, avec le quotidien bulgare Troud à Sofia le 28 avril 2006, sur le projet de transformation de l'OTAN en un système de sécurité globalisée, la modernisation militaire de l'Alliance atlantique et les partenariats, l'avenir de l'Union européenne et le calendrier d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie

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Circonstance : Réunion ministérielle informelle de l'OTAN à Sofia les 27 et 28 avril 2006

Texte intégral

Q - Quel est votre commentaire concernant le projet de transformer l'OTAN en un système de sécurité globalisée qui inclurait d'autres pays comme l'Australie, l'Israël, etc ?
R - Notre réunion d'aujourd'hui est une étape importante dans la préparation du Sommet de l'OTAN à Riga. Nous évoquerons notamment la modernisation militaire de l'Alliance et les partenariats. C'est dans les opérations militaires que se joue la crédibilité de l'Alliance. C'est pourquoi je crois que notre priorité doit être de continuer à renforcer nos capacités militaires.
Notre objectif doit être d'améliorer concrètement notre capacité à agir avec des pays, quand ceux-ci participent aux opérations de l'OTAN. Pour les pays qui contribuent avec des troupes à nos opérations, il serait par exemple utile d'améliorer nos procédures de consultation avec eux. Nous devons aussi veiller à préserver la spécificité de la relation établie par l'OTAN avec l'Union européenne pour la gestion des crises.

Q - La France a voté contre la Constitution européenne, comment envisagez-vous le futur de l'Europe : comme un Etat fédéral ou comme une union d'Etats indépendants ?
R - Le 29 mai, les Français ont refusé la ratification du traité constitutionnel. Ils n'ont pas voulu rejeter l'Europe, bien au contraire. Par ce vote, les Français ont exprimé leurs interrogations face aux développements actuels du projet européen. Ce faisant, j'en suis convaincu, ils ont manifesté leurs attentes pour plus d'Europe, une Europe qui réponde davantage à leurs préoccupations, une Europe qui soit plus démocratique, plus concrète et plus solidaire. Cette attente va bien au-delà de la France et me paraît assez largement partagée par toutes les opinions en Europe.
C'est à cette attente que nous devons aujourd'hui répondre : c'est le sens de l'Europe des projets et des résultats à laquelle nous plaidons. Des premières orientations ont été prises, notamment lors du dernier Conseil européen de mars qui a pris des décisions concrètes, visibles et compréhensibles, tout particulièrement dans le domaine de l'énergie.

Q - Pensez-vous en France qu'il existe des raisons sérieuses de séparer la Bulgarie de la Roumanie sur la voie de l'adhésion à l'Union européenne ?
R - Nous souhaitons l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie le plus tôt possible, ce qui signifiera que les efforts consentis par ces deux pays ont permis de remplir les critères fixés par l'Union. Nous avons à cet égard une très bonne coopération bilatérale avec la Bulgarie, en particulier dans le domaine de la justice et des affaires intérieures qui constituent les points critiques identifiés par la Commission européenne.

Q - Quel est le soutien de la France à la Bulgarie pour son adhésion à l'Union européenne ?
R - La France a apporté dès le début son plein soutien à la Bulgarie dans son processus d'intégration et dans la perspective de son adhésion à l'Union européenne, notamment à travers les programmes européens de reprises de l'acquis, et elle continue de le faire aujourd'hui. Nous voulons l'adhésion de la Bulgarie pour des raisons politiques qui tiennent à notre vision de l'Europe, de sa sécurité, de la stabilité de la région et à nos valeurs partagées. C'est pour toutes ces raisons que la France ratifiera prochainement le traité d'adhésion.

Q - Selon vous, quand la Bulgarie pourra-t-elle adhérer à l'Union européenne ?
R - Nous espérons que celle-ci sera effective au 1er janvier 2007, grâce à la reconnaissance des efforts fournis par la Bulgarie dans son chemin vers l'intégration, en particulier depuis le dernier rapport de la Commission du 25 octobre dernier, et à la volonté courageuse du peuple bulgare de faire face aux difficultés. La France sera néanmoins attentive aux prochaines recommandations de la Commission qui auront une importance capitale dans le processus d'adhésion.

Q - Un nouveau procès contre les infirmières bulgares doit avoir lieu en Libye. Votre pays, qui nous a apporté son soutien dans cette affaire, pense-t-il que l'issue sera favorable pour nos concitoyennes ?
R - La France partage les préoccupations bulgares pour le sort des infirmières emprisonnées. Lors de mon déplacement du 5 janvier en Libye, j'ai pu les visiter et leur apporter réconfort et espoir. Cette visite était destinée à attirer une fois de plus l'attention de la communauté internationale sur leur sort, mais aussi, vis-à-vis des autorités libyennes, à marquer notre attachement à leur prompte libération.
Parallèlement, je me suis rendu à Benghazi pour visiter les enfants contaminés soignés à l'hôpital et rendre public le plan français de lutte contre le sida. Ce dispositif français doit, dans notre esprit, contribuer à créer un climat de confiance favorable à la libération des infirmières.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 mai 2006