Entretien de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, avec Radio France internationale le 6 mai 2006, sur le budget communautaire et les perspectives en matière d'institutions et d'élargissement de l'Union européenne.

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Média : Radio France Internationale

Texte intégral

Q - Il y a près d'un an maintenant, bientôt un an, les Français disaient "non" au projet de Constitution européenne, le traité constitutionnel. Aujourd'hui, la France voit sa dette publique continuer à enfler ; donc nous sommes toujours en infraction vis à vis des critères de Maastricht, et nous renvoyons comme image à nos partenaires extérieurs, celle d'une société bloquée, avec des grèves, des réformes avortées, des scandales au sommet de l'Etat ; un cycle électoral politique qui n'en finit pas de se terminer. Est-ce que ce n'est pas trop difficile d'être ministre des Affaires européennes en ce moment ?
R - De toutes façons, prendre les fonctions de ministre déléguée aux Affaires européennes au lendemain d'un échec au référendum - parce que c'était, pour moi, vécu comme un échec - c'est un défi à relever. Alors je le fais avec optimisme, avec volontarisme et avec quelques raisons de croire dans ce que je fais et de croire en l'Europe. Une inexactitude, pardonnez-moi de la relever, que vous m'offrez l'occasion de corriger : la France respecte les critères de Maastricht, en 2005 nous sommes restés en dessous de la barre des 3%...
Q - Pour le déficit mais pas pour la dette.
R - C'est vrai, pour le déficit. Et pour la dette nous sommes en train de faire un gros travail avec un plan quinquennal, un effort sans précédent, pour réduire notre dette parce que la dette d'aujourd'hui ce sont les impôts de demain ; donc nous ne voulons pas transmettre aux générations futures une situation difficile. Il est important de redresser la barre, courageusement, le gouvernement a pris des mesures.
Q - Est-ce qu'un an après le "non", le fameux non à la Constitution européenne, il a été compris, digéré, intégré pour essayer de faire avancer les choses en tenant compte de cet avertissement des Français ?
R - Oui, bien sûr. Vous savez, le peuple est souverain et le résultat a été clair. On peut regretter que le traité qui était proposé à l'approbation des Français n'ait pas été approuvé ; tout simplement parce que c'était un texte certainement meilleur que le texte actuel. Mais enfin nous avons un traité, nous avons des institutions, nous avons un budget, nous avons des mécanismes de prises de décision et donc l'Europe fonctionne. Mais il fallait tenir compte de cela et depuis un an le gouvernement s'est employé à donner la priorité à une Europe plus concrète, ce qu'on appelle l'Europe des projets ; une Europe qui soit plus proche des gens, plus proche de leurs préoccupations. C'est quoi leurs préoccupations ? C'est le développement économique et social, c'est l'emploi, c'est la sécurité, c'est la défense aussi ; et puis nous travaillons pas à pas pour que l'Europe dispose d'un budget, c'est fait et c'est un bon budget. Pour qu'elle lance des politiques sur les sujets sur lesquels elle est attendue : la sécurité et la croissance, l'énergie qui est un sujet nouveau, les bourses pour les étudiants. Donc nous avançons pas à pas ; l'Europe, ça a toujours été des hauts et des bas. Je crois que l'important c'est de garder le cap, de savoir ce que l'on veut et puis de faire le travail.
Q - En juin 2005, donc sous le contrecoup du "non" français, les Vingt-cinq et la Commission européenne avaient promis une année de débats, de dialogues, de démocratie - pour reprendre les trois "D" de Barroso. Où est-ce qu'on en est aujourd'hui près d'un an après ?
R - En juin 2005, les dirigeants européens ont décidé, au Conseil européen de la mi-juin, d'ouvrir en effet une période de réflexion d'un an et de se donner rendez-vous un an plus tard, en juin 2006, pour faire le point sur l'avenir de l'Europe. L'avenir de l'Europe, c'est quoi ? Ce sont ces grandes politiques, c'est la question institutionnelle et puis c'est la problématique de l'élargissement. Alors sur les grandes politiques, je viens d'en parler, il faut résolument rapprocher l'Europe de ses citoyens et donc travailler à faire une Europe plus concrète. Beaucoup de choses ont été faites depuis, je n'y reviens pas. Sur les institutions, la question n'est pas réglée aujourd'hui. Quatorze Etats membres ont ratifié le traité, deux l'ont rejeté ; un pays s'apprête à le ratifier et huit ne se sont pas prononcés ; donc l'avenir de ce traité est incertain. Je n'ai pas de réponse de court terme à cette question et pourtant je sais qu'il faudra des institutions rénovées à l'Europe élargie pour fonctionner. Et nous voulons de toute façon aborder de façon libre, débattre de façon très ouverte avec tous nos partenaires de l'ensemble de ces questions, au mois de juin. Pour cela, nous avons fait tout récemment des propositions sur la question institutionnelle, et sur la stratégie d'élargissement aussi parce que la période de réflexion se termine bientôt et donc il faut alimenter la réflexion. Nous le faisons.
Q - Période de réflexion et période de propositions, Jacques Chirac avait annoncé des initiatives pour faire avancer l'Europe après ce fameux "non". Je n'ai pas le sentiment d'avoir entendu particulièrement le président de la République sur ces questions.
R - Eh bien écoutez, depuis le mois juin dernier la France a fait des propositions, elle a pris des initiatives. Je vais vous donner quelques exemples. Il était important que l'Europe ait un budget pour les années qui viennent et nous avons pu passer un accord sur le budget au mois de décembre seulement, après six mois de difficulté à Vingt-cinq...
Q - Cela, on ne le doit pas à la France toute seule.
R - On le doit à la France et à l'Allemagne parce que la proposition qui a permis au mois de décembre de passer un accord, là où le Conseil européen de juin avait échoué, c'est une proposition franco-allemande. De plus, c'est un bon budget, c'est 864 milliards d'euros pour l'Europe, c'est 55 milliards d'euros de plus, et c'est très largement le résultat d'un travail franco-allemand.
Q - Mais un budget ça ne parle pas forcément aux citoyens.
Mais ça permet des politiques. Alors quelles politiques ? Il faut développer des politiques sur les sujets d'avenir, l'Europe a su le faire. Sur la recherche et l'innovation, c'est 33% en plus. Sur les bourses pour les étudiants, je ne veux assommer personne avec des chiffres, c'est presque 50% en plus. Sur la politique étrangère et de sécurité commune, c'est 60% en plus. On pourrait multiplier les exemples. Ce que je veux dire, c'est que l'Europe fait son travail, elle prend les décisions quand il faut en prendre, elle prend les bonnes décisions. Nous avons, nous, de plus, Français, fait des propositions pour qu'on ajoute un certain nombre de sujets nouveaux : la démographie dont dépend une partie de notre croissance, mais aussi notre avenir...
C'est-à-dire alors, concrètement... le déclin de la démographie de l'Europe, quelle est la proposition française ?
R - Développer au niveau européen des politiques publiques, parce qu'il s'agit bien de cela, politiques publiques comme nous avons su le faire en France, qui permettent de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale et donc qui encouragent la natalité.
Q - C'est-à-dire plus de places en crèches, un salaire maternel...
R - Une égalité réelle pour les hommes et les femmes, qui n'est pas encore assurée aujourd'hui, ni en France, ni en Europe. Il y a des instruments de politiques publiques dont on sait qu'ils ont des effets réels et positifs sur la démographie. Ça, c'est un thème d'avenir. L'énergie, quand on voit le prix du pétrole qui monte, quand on sait que les ressources en hydrocarbures vont aller se raréfiant, quand on sait quels sont les enjeux du développement durable : dotons l'Europe d'une politique commune de l'énergie. Ce n'était pas fait. Nous avons fait des propositions, nous avons élaboré de façon très, très précise un document de réflexion et de propositions ; la Commission a fait un livre vert, le Conseil européen vient de prendre les premières mesures. Tout ne sera pas fait en un jour mais pas à pas nous avançons.
Q - Alors, une fois n'est pas coutume, c'est moi qui vais vous demander de revenir du concret non pas à l'abstrait mais à des choses un petit peu plus compliquées, parce que la question qui portait sur les propositions de Jacques Chirac, il avait annoncé donc dans les semaines qui avaient suivi le "non" français, "je prendrai prochainement un certain nombre d'initiatives pour débloquer la situation ; pour débloquer la crise institutionnelle". Où en est-on de ce point de vue-là ?
R - Nous l'avons fait il y a maintenant une dizaine de jours. Dans le cadre de cette contribution que nous devons faire tous, et la France l'a fait, à la période de réflexion, donc à la réflexion commune, nous avançons des propositions pour améliorer le fonctionnement des institutions dans le cadre des textes actuels. La question du traité, elle, reste une question ouverte ; il faudra en débattre, il faudra le moment venu trouver des réponses. Mais en tout cas, en tout cas, il faut sortir dès maintenant du statu quo, parce que l'immobilisme n'est pas bon et ce n'est pas l'immobilisme qui nous apportera des réponses. Bon. Nous avons transmis des propositions, nos partenaires réagiront, chacun pourra approuver ou avoir d'autres idées, mais dans les textes actuels il est déjà possible, sur le social, sur la sécurité, sur la représentation extérieure de l'Union, d'améliorer les choses.
Q - Pourquoi est-ce qu'il fallait une Constitution alors ?
R - Parce qu'il y a un certain nombre de seuils que nous ne pouvons pas franchir sans cela ; je vous donne un exemple. Dans le domaine de la politique extérieure et de sécurité commune, nous pouvons d'ores et déjà nous organiser mieux. Faire en sorte que dans un pays où l'Union européenne dispose de représentants sur plusieurs programmes, eh bien ce soit une seule personne qui la représente plutôt que trois ou quatre. Bon. Nous proposons de le faire. Mais si nous voulons aller plus loin, si nous voulons qu'il y ait un jour un ministre des Affaires européennes avec des services mais aussi avec des moyens budgétaires, nous ne pouvons pas le faire sans changer les traités.
Q - Je suis très frappé en vous entendant depuis le début de cet entretien, vous dites souvent "si nous voulons... si nous voulons", comme si vous doutiez vous-même qu'il existe aujourd'hui en Europe une volonté d'aller plus loin. Alors, est-ce que c'est un doute personnel, est-ce que c'est le doute de l'opinion française que vous traduisez-là, ou est-ce qu'au fond c'est un doute général des peuples d'Europe qui ne savent plus très bien quoi faire de la construction européenne ; qui ne savent plus très bien quel sens donner à l'Union européenne ?
R - J'accepte votre remarque, parce que bien sûr l'Europe vit un moment d'incertitude. Elle ne va pas mal, elle prend les décisions, mais enfin... elle est allée mieux. Et ce qui me frappe depuis que j'ai pris mes fonctions, c'est que nous arrivons à faire fonctionner l'Union européenne mais qu'il y a en effet un peu un manque d'ambition collective, un manque d'esprit collectif européen. Nous sommes vingt-cinq pays, nous négocions, nous prenons des décisions, plus ou moins facilement, mais nous les prenons. Mais néanmoins il n'y a pas d'esprit européen à la hauteur des enjeux d'aujourd'hui. C'est peut-être la raison pour laquelle très involontairement vous m'avez souvent entendue dire "nous devons, nous voulons", mais je le crois et puis je le crois possible. Il faut sans doute se mobiliser davantage.
Q - Catherine Colonna, d'un mot et puis on passera à l'élargissement, quand on est aujourd'hui le ministre français des Affaires européennes et qu'on est face à ses collègues européens, est-ce qu'on est mal à l'aise ; est-ce qu'on est regardé comme la représentante du pays qui a fait plonger l'Europe dans la crise ?
R - Non, j'ai pris mes fonctions le 2 juin dernier et je crois que le lendemain ou le surlendemain j'assistais à mon premier Conseil des ministres européens. Nous avons été très bien accueillis, pour une raison simple et qui est une raison qui doit faire réfléchir. Je crois que chacun en Europe a immédiatement compris que le vote en France avait été plus un révélateur qu'une cause de difficulté. Le révélateur d'une distance qui s'est établie, malheureusement, entre les citoyens et le projet européen partout en Europe, au-delà de la France, au-delà des Pays-Bas, et qui nous amène à réfléchir aux moyens de réparer cette distance et nous oblige à travailler plus concrètement.
Q - Est-ce que les...
R - Je crois que depuis...
Q - Est-ce que l'erreur, ce n'était pas de choisir le référendum ?
R - Le référendum en France était souhaité par tous, toutes les forces politiques, le président Giscard d'Estaing, la majorité comme l'opposition. Et puis je crois plus simplement qu'il ne faut jamais regretter de donner la parole au peuple.
Q - On a quand même entendu de nombreux regrets s'exprimer et ouvertement.
R - Je regrette peut-être le résultat, parce qu'il nous prive d'un texte qui était un meilleur texte et qui, au passage, était moins libéral et plus social que celui avec lequel nous devons travailler aujourd'hui. Mais on ne fera pas l'Europe sans les peuples. Alors, nous n'avons pas su convaincre. Il faudra convaincre.
Q - Est-ce que ça veut dire qu'il faudra faire revoter les Français sur un nouveau traité ?
R - Le moment venu, peut-être, moi je...
Q - Le moment venu ça veut dire quoi, après 2007, après l'élection présidentielle ?
R - Je n'imagine pas, peut-être parce que je manque d'imagination, mais je n'imagine pas qu'on puisse faire voter les Français une deuxième fois sur le même texte. Mais la priorité aujourd'hui ce n'est pas ça. Si véritablement, dans tous les pays européens...
Q - Mais il faudra passer par-là.
R - ...on s'était interrogé sur la construction européenne...
Q - Mais il faudra passer par une nouvelle consultation populaire...
R - Il faudra l'adhésion des peuples, exprimée soit directement soit par leurs représentants comme les règles démocratiques le veulent, mais il nous faudra des institutions rénovées, très certainement.
Q - Catherine Colonna, le 16 mai prochain, le commissaire européen à l'Elargissement, Olli Rehn devrait annoncer ce qu'il propose en ce qui concerne l'élargissement, à la Bulgarie et à la Roumanie. Est-ce que vous pouvez aujourd'hui nous dire vers quoi on se dirige, c'est-à-dire une adhésion pour 2007 ou est-ce que ça va être remis à plus tard, c'est-à-dire 2008 ?
R - Ces deux pays ont d'ores et déjà négocié leurs traités d'adhésion et ils les ont signés. Donc ces traités existent. Ils prévoient que l'adhésion effectivement se fera soit au 1er janvier 2007, soit au 1er janvier 2008, sur la base de ce qu'on appelle des "rapports de progrès" qui sont des évaluations faites par la Commission européenne, de la façon dont ils se sont préparés. Alors sont-ils prêts ou pas ? Le dernier rapport sera fait par la Commission dans un peu plus d'une semaine. Je n'en connais pas la teneur et nous n'en connaissons pas la teneur, ce qui est vraisemblable, c'est que la Commission relèvera que des efforts réels ont été faits depuis un an. Seront-ils suffisants ? Ecoutez, nous le verrons, de toute façon jusqu'ici les élargissements ont été réussis, jusqu'ici les dates butoirs ont permis aux pays candidats de faire ce qu'il fallait pour mettre les bouchées doubles. Alors attendons le rapport de la Commission, mais ne soyons pas a priori pessimistes.
Q - Est-ce qu'on peut dire "non" à la Bulgarie et à la Roumanie ? Il y a quand même de sérieux doutes, il y a eu des rapports intermédiaires, il y a des enquêtes sur notamment l'infiltration du crime organisé dans les appareils de justice, de police de ces deux pays, la fraude, la corruption. Est-ce qu'on peut aujourd'hui leur dire "non, vous n'êtes pas prêts, attendez encore un petit peu". Est-ce qu'il y a ce courage politique des 25 ?
R - C'est ce dernier rapport qui nous le dira...
Q - Mais la décision elle ne revient, enfin ce sont les 25 chefs d'Etat et de gouvernement qui la prendront donc...
R - C'est une décision du Conseil oui, c'est vrai, bien sûr, et c'est normal, sur la base d'une évaluation faite par la Commission, qui est une évaluation objective et d'ailleurs nous demandons à la Commission d'être sincère et objective dans ses évaluations. Vous savez, il lui est arrivé d'être sévère, je crois que le rapport précédent l'était, que par voie de conséquence le message a été compris par ces deux pays, qui savent quelle est la règle du jeu. Et la règle du jeu, il faut l'appliquer avec sérénité, mais en toute lucidité, elle est ce qu'elle est, il faut la respecter. Vous venez de voir que l'Union européenne est tout à fait capable de prendre des décisions même quand elles sont difficiles, dans un autre cas, dans un autre dossier, avec la Serbie-et-Monténégro qui n'avait pas fait ce qu'il devait, les négociations ont été suspendues.
Q - On va y venir, alors justement effectivement, le Monténégro s'apprête à organiser un référendum le 21 mai prochain, d'autodétermination, quelle pourrait être la réaction de l'Europe, si le Monténégro se déclarait indépendant ?
Si une majorité de Monténégrins se prononçaient pour la sécession avec la Serbie ?
R - Les règles démocratiques nous conduisent à laisser d'abord les peuples s'exprimer, donc ne préjugeons pas du résultat de ce référendum. Vous savez qu'il a été décidé dans la charte constitutionnelle de l'Etat de Serbie-et-Monténégro, nouvellement créé, il y a maintenant quatre ans. Les procédures ont été fixées, il faut que bien sûr que les élections se déroulent de la façon la plus libre et la plus incontestable possible et puis il y a un seuil de majorité qualifiée, qui a été fixée à 55 %, d'un commun accord entre tous, mais il n'est pas rare en démocratie qu'il y ait besoin d'une majorité qualifiée. Alors laissons les Monténégrins voter et puis l'Europe en tirera les conséquences, mais ça c'est normal.
Q - Un mot en ce qui concerne la Turquie, échéance beaucoup plus lointaine en terme d'adhésion, mais l'Assemblée nationale française va examiner dans les prochains jours un texte qui consisterait à pénaliser la négation du génocide arménien par la Turquie au début du siècle dernier. On se prépare sans doute, là, à une nouvelle crise diplomatique, entre la Turquie et la France.
R - C'est un sujet délicat en effet, parce que les sensibilités nationales sont différentes ou peuvent l'être. Nous avons déjà eu des difficultés sur ce dossier avec la Turquie. Du point de vue de la France, il y a eu un génocide...
Q - Oui, oui, ça a été officiellement reconnu, par l'Assemblée nationale.
R - L'histoire, avec un grand H, est qu'il y a eu un génocide. Comment l'exprime-t-on ? Quelles conséquences en tire-t-on ? C'est d'abord à chaque pays concerné, bien sûr, de parler pour lui-même. Ce que je souhaite, c'est que lorsqu'ils s'exprimeront, lorsqu'ils prendront leur décision, les parlementaires mesurent toutes leurs responsabilités. Ils ont la leur, je n'ai pas à empiéter sur leurs responsabilités, je rappelle que le contexte est difficile et que l'histoire avec un grand H a déjà été écrite.
Q - Ca veut dire que vous êtes favorable ou pas à cette proposition de loi qui émane du groupe socialiste, mais à laquelle déjà des députés UMP ont annoncé qu'ils se rallieraient ?
R - Cela veut dire que je considère, comme tout le monde en France, que l'Histoire a montré qu'il y avait bel et bien eu non pas seulement des massacres, non pas seulement des exactions, mais ce que l'on peut appeler un génocide en 1915. Comment faut-il l'exprimer ? Je ne suis pas à titre personnel convaincue qu'il faille une loi pour cela. D'ailleurs l'Histoire n'est pas la loi et la loi n'est pas l'Histoire. Mais chacun prendra ses responsabilités.
Q - Le Parlement de Strasbourg, Catherine Colonna, paie-t-il trop cher son loyer à la ville de Strasbourg ? Et est-ce que tout cela, question est un peu serrée, parce que la réponse devra être brève, est-ce que tout cela pourrait conduire au départ définitif des parlementaires européens de Strasbourg, pour s'installer définitivement à Bruxelles ?
R - Strasbourg c'est la ville siège du Parlement européen, par les textes européens, par les traités européens. Première chose. Deuxième chose, il y a un contrat, donc ce sont des relations de droit privé entre le Parlement européen et la ville de Strasbourg. Je vois bien les difficultés actuelles, d'ailleurs le président du Parlement européen avait appelé, il y a quelques semaines, mon attention sur ce sujet, il vient d'écrire au Premier ministre Dominique de Villepin. La République française ne peut pas se désintéresser de ce qui se passe. Donc nous suivons cela de près, en liaison très étroite avec la mairie de Strasbourg, d'une part, et avec le Parlement européen d'autre part, et si nous pouvons faciliter d'une façon ou d'une autre le travail d'explication et de transparence, je donne là mon sentiment personnel, je crois que ce serait utile et je crois qu'il serait important de le faire.
Q - Et la France, Catherine Colonna, s'opposerait fermement au déménagement total du Parlement européen à Strasbourg, à Bruxelles ?
R - Je vous ai rappelé que les textes européens...
Q - Je sais bien, mais vous n'ignorez pas qu'il y a un certain nombre d'eurodéputés qui ne verraient pas ça d'un mauvais oeil ?
R - Cela ne m'a pas échappé ! Je ne suis pas du tout d'ailleurs leur logique et je leur rappelle que par les traités, Strasbourg est la ville siège du Parlement européen.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 mai 2006