Texte intégral
Q - Le 29 mai 2005, une majorité de Françaises et de Français rejetaient votre projet de Constitution européenne. Un an plus tard, selon un récent sondage, cette majorité confirme à 98 % son vote, alors que 10 % de celles et ceux qui ont voté "Oui" le regrettent aujourd'hui. Les oppositions qui s'étaient exprimées alors contre la directive Bolkestein restent d'actualité et ce n'est pas une réécriture, qui en rien n'en modifie le fond, qui nous rassurera.
Monsieur le Premier ministre, le rejet de votre politique s'est renforcé, mais comme si de rien n'était, vous continuez à vous obstiner en restant sourd aux attentes d'une majorité de nos concitoyens. Pire, vous multipliez, depuis un an, les décisions qui aggravent les inégalités, amplifient les fléaux de la précarité et d'exclusion, démantèlent les services publics, remettent en cause le Code du travail, saignent l'hôpital public, laissent des marchés financiers dilapider richesse et emploi. Nous ne prenons pas beaucoup de risques en affirmant que votre gouvernement et votre majorité ont aujourd'hui perdu toute légitimité populaire. Par respect pour la démocratie, par respect pour ces millions d'hommes et de femmes qui attendent autre chose du gouvernement de la France, vous vous seriez honoré, avec le président de la République, en retournant devant les électrices et les électeurs de ce pays, après une dissolution de l'Assemblée nationale, vous ne l'avez pas fait. Alors, une question se pose, je vous la pose : pourquoi méprisez-vous, à ce point, l'opposition citoyenne, largement majoritaire dans ce pays ?
R - Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Député,
Pour vous répondre, par l'exemple et par un langage de vérité, je vais vous parler de la proposition de directive services : nous venons d'atteindre un accord politique, par consensus, au sein de l'Union européenne. Et pour parler le langage de la vérité, je vais commencer par vous dire qu'il n'y avait jamais eu de directive Bolkestein. Il n'y avait jamais eu qu'une proposition - ce qui n'est pas la même chose - et le texte n'avait jamais été approuvé, ni par les Etats, ni par le Parlement européen.
La vérité c'est aussi qu'il n'y aura jamais de directive Bolkestein ; et d'ailleurs, cette personne n'est plus membre de la Commission. Le texte sur lequel nous avons pu obtenir, hier, un accord politique par consensus est totalement différent du texte d'origine, il a été totalement remanié - sans votre vote - par le Parlement européen, et nous l'avons encore amélioré depuis.
Dans le texte actuel, le principe du pays d'origine a disparu, les services publics sont préservés, le droit du travail s'appliquera en France, comme il se doit, les secteurs sensibles, la santé, le social, l'audiovisuel sont également préservés. Le texte est donc débarrassé de tout ce qui était inacceptable et nous permettra de développer le secteur des services, ce dont nous avons besoin car je rappelle qu'ils représentent les trois quarts de nos emplois.
Mais les enseignements que l'on peut tirer de l'accord d'hier vont au-delà, Monsieur le Député. Ils sont importants car ils contredisent nombre d'idées reçues, et pour tout dire, nombre d'idées fausses sur la France et sur l'Europe.
Ce renversement de situation montre la force de la volonté politique ; ce fut celle de notre pays depuis l'origine sur ce dossier, depuis mars 2004. Il montre aussi que la France n'est pas affaiblie et sait gagner des majorités : il y a même eu hier consensus. Il montre aussi la force de la relation entre la France et l'Allemagne puisque, jusqu'au bout, et encore hier, nous nous somme appuyés mutuellement.
Et puis, pour l'Europe, cela montre que la démocratie européenne fonctionne, qu'elle est capable de concilier le dynamisme économique et la fidélité aux valeurs sociales et qu'elle se fait dans un esprit collectif, par le rassemblement et non pas les uns contre les autres.
Alors pour conclure, Mesdames et Messieurs les Députés, Monsieur le Député, oui, je sais qu'il fallait réorienter les choses sur cette directive et c'est un bon exemple en ce 30 mai 2006 : grâce au Parlement européen, grâce à la Commission européenne, grâce aux encouragements de la représentation nationale, nous l'avons fait.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1 juin 2006