Déclaration de M. André Rossinot, président du Parti radical, sur le projet radical dans la perspective de l'élection présidentielle de 2007, ses valeurs et son alliance avec la majorité UMP, Paris le 14 mai 2006.

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Circonstance : Réunion du Parti radical "Printemps des idées, Valeurs universelles", à Paris le 14 Mai 2006

Texte intégral

Lorsque j'ai proposé aux radicaux, après notre congrès de décembre, « le printemps des idées », aucun d'entre nous et moi le premier n'imaginions un instant que nous le tiendrions dans le contexte politique actuel.
Aussi, je voudrais remercier chacune et chacun d'avoir, presque envers et contre tout, su trouver la sérénité pour aborder le travail de réflexion nécessaire à notre second souffle, ce nouveau projet radical pour une République équitable.
A un moment où nos concitoyens s'interrogent, doutent, confrontés à un quotidien difficile, à une société en pleine mutation, plus que jamais le temps est venu de redonner du sens à l'action politique, aux valeurs fortes de liberté, d'égalité, de fraternité. De redonner à chacun cette fierté d'être Français et d'appartenir à une communauté nationale porteuse de mémoire et d'avenir.
30 avril, 1er mai 8, 9, 10 mai : je voudrais en débutant ce discours, vous faire réfléchir quelques instants à la symbolique que représente ces dates commémoratives de notre histoire, avec les valeurs de la République.
Le 30 avril, journée nationale de la déportation et de la libération des camps.
On ne remerciera jamais assez le chef de l'Etat, garant de la cohésion nationale, d'avoir su dès son arrivée à l'Elysée, reconnaître à la fois la responsabilité de l'Etat Français et sa complicité dans la mise en place de la Shoah et de la déportation. N'oublions jamais tout ceux qui ont été déportés, tués au nom de l'idéologie nazie, qu'ils soient juifs, résistants, francs maçons, tziganes, homosexuels.
Le 1er mai et ses cortèges de manifestants, peu nombreux cette année, oubliant cette France du travail qui mérite respect et attention.
Une France que Jean Louis connaît bien, qu'il accompagne et parfois soigne.
Une France fragilisée par le chômage et l'exclusion où la cohésion sociale est une priorité.
Une France, Jean Louis dont tu parles souvent en disant « que depuis quinze ans le fossé continue de se creuser entre ceux dont les enfants ont un avenir et ceux dont la descendance en est privé ». « D'innombrables talents » dis- tu « sont ainsi gaspillés, recevant la rage en lieu et place de diplôme ».
Avec toi nous aspirons aujourd'hui à un dialogue social authentique et profondément rénové. Le 8 Mai, bien sûr la capitulation nazie, la fin en Europe de la seconde guerre mondiale, marquée par un degré de barbarie jamais atteint.
Le 9 mai, la journée de l'espérance européenne, qui nous renvoie à ce que nous sommes : un parti engagé dans l'Europe des Lumières, de Robert Schumann et de Jean Monnet, un parti du « oui » à l'Europe institutionnelle et politique, à la nécessité de cette Europe sociale et citoyenne.
L'Europe ne s'arrêtera pas, n'en déplaise aux esprits chagrins. On a menti aux français.
Il n'y avait pas de « plan B », mais il y aura un « plan R » comme Relance de l'Europe et pour les Radicaux il est hors de question de soutenir un Européen frileux en 2007.
Une France apaisée : c'est aussi le 10 Mai, première journée commémorative de l'esclavage et de son abolition. La France reconnaît pour la 1er fois sa responsabilité et sa participation à la traite humaine, des esclaves noirs d'Afrique vers les Amériques et les Antilles.
Les Antilles Françaises, ont été trop souvent les oubliées de nos livres d'histoire, il n'est que
tant d'y remédier.
En 5 dates tout est dit où presque ;
une société n'a pas d'avenir sans passé,
on ne construit pas une économie contre les salariés,
on ne fait pas de paix durable sans projet, reconnaître ses fautes c'est s'assurer de ne pas les reproduire,
un peuple sans mémoire est un peuple aveugle et sourd.
Il est bon de rappeler tout cela, car petit à petit, un jour on oubliera l'essentiel.
Dans un an jour pour jour le 13mai 2007, nous serons en train de voter pour élire notre président de la République.
La réflexion pour les prochaines élections de 2007, doit répondre à une triple exigence :
- Celle d'aboutir tout d'abord -et nous l'espérons tous- à un débat achevé après le débat dramatiquement escamoté du deuxième tour en 2002.
- Celle d'être ensuite un débat de fond et non pas d'apparences, voire par officines interposées.
- Celle d'être enfin un débat axé sur des choix et non pas sur des refus.
Car un pays qui aborde chaque scrutin, en pensant qu'il doit se résumer seulement à un vote contre, se condamne à n'avoir que des gouvernements de conjoncture en perpétuel sursis.
Des gouvernements qui ne peuvent à aucun moment conduire les réformes structurelles, dont notre pays a tant besoin.
Il va falloir dire un certain nombre de vérités aux français, et non pas comme nous l'avons fait, il y a un an, lors du référendum sur la Constitution Européenne : c'est à dire avec l'apparence du mépris, de « ceux qui savent ».
Nous avons tous donné -notre majorité et aussi les socialistes- le sentiment qu'un vote non était au mieux, un vote d'incompréhension et au pire un vote stupide. Le résultat on le connaît. Que cette leçon nous soit au moins profitable.
Aujourd'hui le pouvoir apparaît comme supérieur, lointain, comme celui qui sait.
La population, quant à elle ne sait plus qui croire, et se demande quel sens elle doit donner à
ses votes -quand elle va voter !
Il n'est pas étonnant qu'elle transfère son intérêt à des combats humanitaires et de société
plutôt qu'aux textes de lois.
L'exemple le plus frappant c'est au travers du 20eme anniversaire de la mort de Coluche que nous le trouvons.
En fondant les restos du coeur il y a plus de 20 ans, il pensait que cela ne durerait pas. 20 ans après, c'est plus de 65 millions de repas qui sont offerts chaque année c'est-à-dire que l'on a franchi le seuil symbolique d'un repas par français et rien ne laisse présager une décrue : voilà une dure réalité de la France d'aujourd'hui.
On cultive la peur, on joue sur l'ignorance, on flatte, on inquiète, qui sont ces « on »? Nous les trouvons à l'extrême droit et à l'extrême gauche unis dans leur refus de toute démocratie parlementaire.
Et pour cause, celle-ci a pour but de gérer les conflits alors que la seule légitimité de tous ces extrémismes, ne peut se réaliser que lors du pourrissement des conflits!
La violence tient de plus en plus lieu de discours, y compris même dans des lieux où elle devrait en être le plus bannie.
Il y a urgence dans les écoles de la République, et je ne comprends pas comment suite à l'agression filmée d'une enseignante, une action symbolique de grande envergure n'ait pas eu lieu !
Du refus du respect, du refus de l'autorité des enseignants on est passé aux agressions et maintenant elles sont préméditées et on les filme ! Filmer et diffuser le mal que l'on fait subir aux autres, c'est un des pires symboles de barbarie.
Même s'il faut réfléchir voire redéfinir les valeurs qui organisent notre société, notre « vivre ensemble » on ne peut accepter de tels faits.
La France ne se renforce que dans la cohésion sociale, les Français ont besoin de débattre, et seul le débat exclura la tentation de l'extrémisme.
Or nous avons un problème de gouvernance dramatique dans notre pays qui s'aggrave de jour en jour.
Gouvernance et Réformes
La bonne gouvernance, c'est être attentif au fonctionnement de la société française, politique, parlementaire gouvernemantale. Encore plus à un moment où la société politique et institutionnelle est confrontée à une succession de crises notamment - CPE, clairstream -.
La crise du CPE a été grave, pas tant par le débat de fond sur les évolutions au demeurant nécessaires du droit du travail, mais par les erreurs de gouvernance.
Les français n'acceptent plus tout ce qui vient d'en haut ! Ce qui est en cause, c'est la façon de bâtir un projet, de partager un diagnostic qui ne soit pas que le fait des spécialistes, mais porté par l'opinion, les partis, les syndicats, les relais associatifs...
On légifère trop, trop vite. Il n'y a plus de respiration démocratique et de véritable dialogue approfondi mettant chacun devant ses responsabilités.
Tout ce qui peut être acté par contrat et accords avec les partenaires sociaux a notre préférence. Sur le Cpe, nous avions alerté en vain, suggéré une démarche expérimentale, proposé de donner davantage de temps au débat parlementaire.
Rien n'y a fait. On est revenu au gouvernement de la Rue.
Le programme politique qui répondrait le mieux à ces contraintes et ces espérances tiendrait en peu de propositions :
-un engagement moral, celui d'être vrai, dans ce que l'on dit et ce que l'on fait
-une volonté : investir dans la science, la recherche et le progrès pour tous.
-une recherche de productivité pour toutes les dépenses publiques
-une revalorisation du travail.
Le futur pour la France est imprévisible : il faut l'inventer ensemble.
Gouverner la France, ce n'est plus gouverner la moitié de la France contre l'autre moitié : le parti radical est là, où il doit être, avec les seuls alliés qui sauront résister aux extrêmes.
La bonne gouvernance, c'est celle qui privilégie l'intérêt général, qui s'adresse à l'ensemble des français, qui évite tout esprit de clans, qui donne tout son rôle au Parlement sans contracter les procédures.
Les Français réclament une démocratie de proximité concrète, respectueuse des opinions. La même démarche doit s'appliquer au niveau national : la cohérence et les pratiques politiques valent à tous les niveaux de notre pays.
Pour remédier à ces dysfonctionnements récents, il faudra redonner une place et du sens à l'action des parlementaires. Le rôle du Parlement doit être renforcé ! Le parlement c'est le coeur de la République.
Quelques perspectives de réformes :
Une vraie dose de proportionnelle
plus de parité politique
suppression du 49.3
un ordre du jour partagé entre le Parlement et le gouvernement.
La méthode en conclusion c'est la réforme qui est une affaire collective. Il faut apprendre à jouer collectif, à coproduire du bien public. J'insiste : nous légiférons trop ! Avant il faut dialoguer, écouter, partager. La réforme réussie, c'est celle qui apparaît juste au plus grand nombre, qui garantit l'avenir, qui récuse les peurs, et la démagogie. Seule la pratique intelligente de la réforme garantit la durée légitime, et protège le pays d'alternances accélérées qui fragilisent.
Bien gouverner et pas seulement durer. Voilà le sens de notre action politique.
UMP-PARTI RADICAL
Nous avons impulsé avec d'autres en 2001 et 2002 successivement l'Union en mouvement puis l'UMP. Nous avons fait le bon choix en refusant la stratégie solitaire et personnelle de François Bayrou.
Il faut développer le Parti Radical (équipe radicale, Borloo, Dutreil, Loos,) certes mais il faut aussi une alliance privilégiée et approfondie avec les autres sensibilités politiques du centre gauche à la droite républicaine.
Nous ne pouvions pas abandonner le Radicalisme à d'autres.
Nous sommes utiles à la majorité présidentielle par nos propositions, nos actions gouvernementales, par la gestion de nos villes et de nos départements
A nos associés de l'UMP de nous reconnaître pour notre utilité, notre loyauté, notre capacité à contribuer au débat : bref notre rôle est indispensable.
Pour la France pour la République l'heure des choix approche. En ce début du 21ème siècle,
ce ne sera plus un problème Droite / Gauche, ce sera d'un coté les Conservateurs prisonniers de leur idéologie et de l'autre le Parti du Mouvement.
Les Radicaux ont été toujours le Parti du mouvement, c'est tout le sens de notre « Printemps des Idées ». Restons fidèles à nos valeurs à nos combats.
Nous partageons la volonté, l'enthousiasme, la détermination de Nicolas Sarkozy, à la tête de l'UMP pour mettre sur pied et développer une grande formation de droite et du centre pour bâtir un projet pour la France.
Comme l'UMP avec ses conventions, le Parti radical travaille à son projet et à ses propositions. Nous nous retrouverons à l'Université d'été à Palavas.
Cet automne il nous faudra préparer les voies d'une nouvelle convention partenariale avec l'UMP. Elle devra porter à l'aube d'une nouvelle présidence de la République et d'une législature à la fois sur le fond mais aussi clarifier et amplifier notre statut de formation politique associée.
Clarification, transparence, respect mutuel, contrat seront le gage d'une volonté et d'un projet au service des valeurs communes de la majorité présidentielle à venir.
Voilà notre méthode pour être chacune et chacun Radical et Populaire.
ABSENCE DE PROGRAMME PS
La gauche socialiste actuelle, ne représente plus ni dans son intégralité ni majoritairement,
les classes populaires.
C'est une des raisons de son élimination, dés le premier tour en 2002, car les premières victimes des 35 heures et de la création de plusieurs, Smic variables, ce furent les ouvriers et les employés.
Toujours figé, le PS refuse systématiquement les réformes lorsqu'il est dans l'opposition et n'a pas le courage de les mettre en oeuvre lorsqu'il est au pouvoir: retraites et assurance maladie.
Mais aujourd'hui, le trouble qui règne au PS, ne vient pas du débat de fond. Il a pour nom Mme Royal. Au point que Jospin, parait-il pour être sûr de ne pas la rencontrer est allé au mont Athos ce week-end-, là où les femmes sont interdites!
Au-delà de cette boutade, je tiens à réaffirmer à tous que la culture Républicaine, n'idolâtre personne. Je dis : Non à la « ségolenmania », Non à la République émotionnelle, Non à la République « people ».
Conclusion
Mes chers amis, au terme de ce week-end de réflexion, vous comprendrez que je ne puisse pas terminer mon propos, sans évoquer le dossier « Clearstream » sans dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas.
Le temps presse, il faut sortir de cette situation, de cette confusion, le pays attend. Les élus attendent, les parlementaires attendent, les militants attendent. Nous sommes inquiets. Comme il faut savoir finir une grève, il faut savoir finir une crise, et j'en appelle à l'écoute du Président de la République, pour redonner confiance politique à la France.
La France a besoin d'apaisement, de cohésion et d'humanisme. Avec un nouveau souffle radical. L'un d'entre nous peut l'incarner, suivez mon regard, je te passe la parole Jean-louis.Source http://www.partiradical.net, le 16 mai 2006