Déclaration de M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, sur la mise en place de la réforme du secteur aéroportuaire français, afin de répondre aux nouveaux défis économiques, Paris le 1er juin 2006.

Prononcé le 1er juin 2006

Intervenant(s) : 
  • Dominique Perben - Ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer

Circonstance : Colloque de l'Union des Aéroports Français intitulé : "Le nouveau paysage aéroportuaire français et ses enjeux pour les acteurs publics locaux" à Paris, le 1er juin 2006

Texte intégral

Monsieur le Président de l'Union des Aéroports Français, (M. TERRAZZONI)
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,

. C'est avec grand plaisir que j'ai accepté l'invitation de l'Union des Aéroports Français à ouvrir ce colloque consacré au « nouveau paysage aéroportuaire français » et à ses enjeux pour les acteurs publics locaux.
. Le choix du titre du thème de ce colloque : un « nouveau paysage » pour nos aéroports est une réalité, tant le monde du transport aérien est en perpétuelle évolution et les défis auxquels le secteur aéroportuaire va être confronté dans les prochaines années sont importants.

. Quelques mots sur le contexte :
- Après les événements du 11 septembre 2001 et une période significative de creux, le trafic aérien a renoué depuis deux ans avec une forte croissance, qui s'annonce durable.
- Cette croissance reste fragile, car elle s'effectue dans un environnement international soumis à de fortes tensions :
- Nous sommes entrés dans une ère du pétrole cher.
- La menace terroriste reste forte.
- Des crises sanitaires peuvent impacter fortement le secteur : hier le SRAS, aujourd'hui le chikungunya et la grippe aviaire.
- Dans ce contexte exigeant de croissance où la concurrence est plus que jamais présente, les opérateurs du transport aérien doivent se montrer adaptables et réactifs afin de maintenir leur équilibre économique et leur position concurrentielle sur le marché mondial :
- En adaptant l'offre de places à la demande : cela passe notamment par la réalisation de hubs performants pour développer le trafic en correspondance.
- En modernisant les flottes d'appareils : je pense notamment à la prochaine entrée en service commercial de ce géant des airs qu'est l'Airbus A380, ou à l'arrivée des Boeing 777 sur la desserte des départements d'Outre-Mer, qui va améliorer de beaucoup le confort de cette desserte.
- En créant de nouveaux types de desserte avec des gammes tarifaires accessibles, je pense notamment au développement des compagnies dites « low-cost ».

. Dans ce contexte, les aéroports, qui sont les véritables supports au sol de l'activité du transport aérien, doivent donc relever de véritables défis :
- en adaptant rapidement les infrastructures, pour faire face à la croissance attendue du trafic et aux nouveaux appareils,
- en renforçant leur rôle de pôle d'aménagement du territoire :
- comme portes d'entrées sur le territoire national ou régional,
- comme pôles facteurs de développement économique et créateurs d'emplois,
- comme espaces d'activités bien insérés dans leur environnement dans
une perspective de développement durable.

. La grande réforme du secteur aéroportuaire que porte actuellement le Gouvernement, d'une ampleur majeure (le secteur n'en a pas connu de telle depuis plus de 50 ans) vise précisément à permettre aux aéroports français de répondre à ces défis. L'esprit de cette réforme vise à :
- définir un niveau de décision adéquat
- donner plus d'autonomie pour plus de réactivité et d'efficacité économique

. Vous les connaissez à présent par coeur : deux lois réforment le secteur :
- la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, dont l'article 28 va amener d'ici le 1er janvier 2007 le transfert de plus de 150 aéroports, d'intérêt régional et local, de l'État vers des collectivités territoriales ou groupements de collectivités ;
- la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports, qui transforme Aéroports de Paris en société anonyme, qui permet l'évolution du régime de gestion des aéroports régionaux majeurs et qui réforme le régime des redevances aéroportuaires et de la régulation économique du secteur.

. Pour ce qui concerne la décentralisation, le processus avance rapidement.
- Le Directeur général de l'aviation civile vous fera un point détaillé plus tard au cours de la journée,
- mais en résumé je peux vous indiquer :
- qu'une douzaine de transferts sont effectifs,
- plus de 60 autres aéroports ont fait l'objet d'une candidature formelle,
- il reste environ 70 plates-formes, dont certaines d'importance, pour lesquelles aucune candidature formelle n'a encore été enregistrée.
- Je ne doute pas que pour ces dernières plates-formes, les choses évolueront rapidement car il s'agit pour les collectivités d'une opportunité unique d'obtenir la pleine maîtrise de pôles importants pour le développement de leur territoire.

. La réforme a tout particulièrement concerné Aéroports de Paris, qui est aujourd'hui l'un des tout premiers opérateurs aéroportuaires mondiaux. Je tiens à souligner la bonne tenue du calendrier et des objectifs pour ADP : ADP est effectivement devenue une société anonyme en juillet 2005 et le processus d'ouverture de son capital a débuté hier, l'Etat devant rester à terme actionnaire majoritaire. L'augmentation de capital prévue doit participer au financement du programme d'investissements de 2,7 milliards d'euros nécessaire dans les prochaines années.

. En ce qui concerne la réforme des grands aéroports régionaux et la création de sociétés aéroportuaires, grâce au travail efficace mené dans le meilleur climat entre les services de l'Etat et le comité d'action pour la mise en place des sociétés aéroportuaires (CASA) -et je tiens à vous en remercier, Monsieur TERRAZZONI-, le travail avance lui aussi rapidement.
- Avec mon collègue Thierry BRETON, j'ai souhaité que Monsieur. Emmanuel DURET soit chargé d'une mission d'animation de la mise en oeuvre de ces sociétés aéroportuaires, car cette réforme doit permettre de mieux associer à la gestion de ces grands équipements, les collectivités pour lesquelles ils représentent des enjeux déterminants.

- Monsieur DURET doit vous faire le point un peu plus tard dans la journée sur l'avancement de sa mission, mais d'ores et déjà je peux vous indiquer :
- Que la mise en place des premières sociétés sera, au plan technique, envisageable dans quelques mois, avec le travail mené par les aéroports « pionniers » que sont Toulouse-Blagnac, Bordeaux- Mérignac, Nice-Côte-d'Azur et Lyon-Saint-Exupéry.
- Je souhaite que les partenaires puissent s'accorder pour aboutir effectivement à la création de sociétés dès 2007.
- En ce sens, les services de l'Etat ont entamé les discussions avec les instances communautaires.
- Je souhaite que le décret sur le nouveau cahier des charges-type puisse être p ublié au début de l'automne prochain.
- Parmi les aéroports concernés, figurent aussi les quatre aéroports d'État des départements d'Outre Mer ; comme le Gouvernement s'y est engagé lors du débat parlementaire, les spécificités des ces aéroports seront prises en compte dans la mise en oeuvre de la loi.

. Au passage, un mot sur le nouveau dispositif de régulation économique des aéroports qui a été introduit par la loi relative aux aéroports :
- Dans ce cadre, je tiens à vous indiquer mon intérêt pour que la régulation des principaux aéroports se place préférentiellement dans le cadre de contrats pluriannuels, du type de celui établi en début d'année pour Aéroports de Paris, afin de permettre une meilleure visibilité pour la réalisation des investissements nécessaires au développement du transport aérien et incitant à l'amélioration des performances des exploitants aéroportuaires.
- Autre nouveauté : pour les aéroports relevant à l'avenir de collectivités territoriales, celles-ci seront pleinement compétentes pour leur régulation économique, l'État n'interviendra plus.
- D'une manière générale, le régime des redevances est assoupli, avec la possibilité explicite, sous certaines conditions, de procéder à des modulations pour motifs d'intérêt général et de recourir au préfinancement.
- Sur ce dernier point, je souhaiterais, à la lumière des événements récents, évoquer avec vous le sujet du transport aérien « low-cost », qui intéresse, je le sais, nombre d'acteurs locaux pour favoriser la croissance du trafic aérien. Sur ce sujet :
- Je serai vigilant pour maintenir des conditions favorables au développement de tous les transports aériens tout en assurant le respect des conditions d'une saine concurrence.
- Un cadre clair est maintenant fixé par le droit français et le droit communautaire, et des instructions vont prochainement être données aux préfets sur ces sujets.
- Dans ce cadre, il appartient aux responsables des aéroports de décider des actions à mener pour permettre le développement de ce type de transport sur les plates-formes.

. Enfin, je tiens à réaffirmer devant vous ma vigilance sur les compétences que conserve l'État pour fixer et contrôler les règles en matière de sécurité et de sûreté, ainsi que, au plan national, les principes d'insertion des aéroports dans leur environnement.
- La question de la sûreté est notamment devenue essentielle dans le « paysage aéroportuaire » et pour le transport aérien en général, tant au niveau des enjeux économiques qu'elle représente que par la confiance qu'elle contribue à donner aux passagers.
- Face à l'évolution de la menace, ces dernières années ont vu un renforcement considérable des mesures de sûreté dans les aéroports, notamment à la suite des attentats survenus le 11 septembre 2001 aux États-Unis. Le cadre législatif et réglementaire qui les fonde a également beaucoup évolué tant sur le plan national que sur les plans européen et international.
- Comme j'ai eu l'occasion de le rappeler récemment à l'occasion d'une visite avec le Ministre de l'Intérieur à l'aéroport de Roissy, la sûreté est l'affaire de tous les acteurs du monde aéroportuaire, et la coordination en la matière doit être sans faille.
- Je sais qu'aujourd'hui, face à des coûts de sûreté qui ont fortement augmenté, nous devons faire évoluer l'organisation du système en place pour plus d'efficacité et d'optimisation. Le Gouvernement y travaille activement, et je sais que les exploitants d'aéroports seront prochainement invités à s'associer aux réflexions en cours pour faire part de leurs propres propositions.
J'évoquerai pour terminer le sujet incontournable de l'insertion des aéroports dans leur environnement.
- Il s'agit de concilier une double exigence : d'une part le transport aérien représente un atout économique majeur pour la France, d'autre part, il constitue une contrainte pour l'environnement et la qualité de vie des populations riveraines des aéroports.
De mon point de vue, une étroite concertation entre les compagnies aériennes, les exploitants d'aéroports, les collectivités locales et les associations de riverains est le préalable indispensable à la conciliation des objectifs économiques et des objectifs environnementaux.
Je vous appelle donc à développer, dans un effort de tous les instants, cette nécessaire concertation.

Mesdames, Messieurs,

Le monde aéroportuaire vit actuellement une période de mutation profonde. Comme pour toutes les grandes réformes, la période actuelle suscite beaucoup d'interrogations. Pour ma part, je pense que cette évolution ouvre des perspectives enthousiasmantes :

  • pour permettre plus de réactivité face aux enjeux futurs du transport aérien ;
  • pour permettre à notre tissu aéroportuaire français de s'ancrer de manière homogène à la fois sur le plan européen et international et sur le plan local ;
  • pour affirmer nos aéroports comme pôles économiques d'aménagement durable du territoire, créateurs de développement et d'emplois.

Je vous souhaite d'avoir des débats fructueux aujourd'hui et je ne doute pas, à la lecture du programme et à la qualité des intervenants, qu'il s'agira d'une journée d'échanges couronnée de succès.
Je vous remercie de votre attention.

Source http://www.equipement.gouv.fr, le 2 juin 2006