Texte intégral
Monsieur le Président du GRAMM,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
Mesdames et Messieurs les Représentants des organisations internationales et nationales,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureuse de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de m'exprimer en clôture de votre colloque sur la réduction de la mortalité maternelle et néonatale dans les Pays en développement dans le cadre du programme AQUASOU (Amélioration de la Qualité et de l'Accès aux Soins Obstétricaux d'Urgence dans les Pays en développement), dont je tiens à saluer la qualité des travaux.
Comme vous le savez, mon ministère est très attentif à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement parmi lesquels figure la réduction de la mortalité maternelle.
Le Droit à la Santé qui est un droit humain fondamental, est encore dénié à une trop large partie de la population mondiale, les femmes et les enfants en étant les premières victimes. Améliorer la santé des femmes est donc un devoir moral, mais plus encore une nécessité pour réussir toute politique de développement. Comme l'a rappelé en effet le Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan : "(...) Il ne peut y avoir de stratégie efficace de développement dans laquelle les femmes ne jouent un rôle central. Lorsque les femmes sont impliquées, les effets sont immédiats : les familles sont en meilleure santé et sont mieux alimentées; leur revenu, leur épargne et leur capacité à réinvestir augmentent. Et ce qui est vrai pour les familles l'est également pour les communautés et, tôt ou tard, pour des pays entiers".
Cette réalité a conduit la France à s'engager dans une politique encore plus déterminée en faveur de la santé des femmes dans les pays en développement, comme le prouvent les nombreux projets soutenus par la coopération française depuis deux décennies.
Je voudrais donc rappeler ici quelques uns d'entre eux, parmi les plus significatifs :
Tout d'abord, l'enquête prospective sur la morbidité maternelle grave (MOMA) menée à Abidjan, Bamako, Niamey, Nouakchott, Ouagadougou, Saint-Louis et Kaolack en collaboration avec l'INSERM, entre 1996 et 1998 : cette enquête a permis de mesurer pour la première fois l'incidence de la morbidité maternelle sévère, cause directe de mortalité maternelle. C'est à partir de cette enquête que des recommandations ont pu être proposées avec les membres de la Société africaine de Gynécologie et d'Obstétrique, et c'est sur cette base qu'a pu être conçu par la suite le projet FSP AQUASOU.
Par ailleurs, le projet "Maternité sans Risque à Nouakchott", conduit entre 1998 et 2006, s'est avéré très novateur par son approche pluridisciplinaire mise en oeuvre pour la première fois dans un projet de santé maternelle. Il associait en effet des praticiens des disciplines cliniques, des spécialistes de santé publique, des socio-anthropologues, des ONG de mobilisation sociale et des spécialistes de mobilisation politique. Il a permis d'améliorer la qualité des soins obstétricaux et néonatals d'urgence, d'augmenter leur offre, tout en les rendant plus accessibles par la mise en place d'un forfait obstétrical, expérience unique à ce jour et jouissant d'une grande réputation internationale. Devant le succès de ce programme, le gouvernement mauritanien a décidé son extension à l'ensemble de la capitale et à plusieurs communes.
Autre programme exemplaire mis en oeuvre par la coopération française, le projet Kollo au Niger, dans lequel a été mise en oeuvre une coopération Sud-Sud avec nos amis tunisiens, afin d'améliorer la qualité et l'accès à la santé de la procréation et aux soins obstétricaux d'urgence. Ce programme a montré l'importance de la sensibilisation et de la mobilisation des responsables politiques, religieux, des professionnels et des populations pour arriver à des résultats probants, tout en associant l'utilisation d'équipes mobiles permettant d'accéder aux populations rurales dispersées.
Enfin, je tiens naturellement à mentionner le projet d'amélioration de la qualité et de l'accès à des soins obstétricaux d'urgence dans les Pays en développement (AQUASOU), dont vous venez de dresser le bilan, et qui fait actuellement l'objet d'une évaluation finale externe et indépendante.
Les leçons et les acquis de ces différents projets, mais aussi l'expérience et les recommandations internationales, sont autant de contributions à notre stratégie en matière de santé des femmes dans les Pays en développement.
Cette stratégie traduira les différents engagements politiques pris par la France dans ce domaine, et que je souhaite rappeler brièvement devant vous :
- d'abord, l'engagement pris lors de la Conférence internationale des Nations unies du Caire sur la population et le développement, en 1994. 179 pays ont alors affirmé le droit des femmes à avoir accès à des soins appropriés pendant la grossesse et lors de l'accouchement, et se sont engagés à prévoir un accès universel à la santé en matière de sexualité et de procréation ;
- ensuite, l'engagement pris lors de la 4ème Conférence mondiale sur les Femmes tenue à Pékin en septembre 1995, où la communauté internationale a proclamé que l'égalité entre les femmes et les hommes est une condition essentielle du développement durable, de la paix et de la démocratie.
La France, dans ces différents cadres, a confirmé son engagement pour la promotion des droits des femmes dans le monde, notamment face aux grands défis que sont la lutte contre la féminisation de la pauvreté, la lutte contre les violences faites aux femmes, la défense des droits liés à la santé sexuelle et reproductive, l'accès à des emplois décents, la garantie des droits civils, le droit à l'éducation et à la représentativité des femmes dans les instances de décisions.
Notre stratégie prend en compte les aspects de droit, de genre, de sexualité et de procréation. Elle s'appuie sur une approche multidisciplinaire, et vise donc à contribuer significativement aux efforts de la communauté internationale pour améliorer l'accès des femmes à la santé sexuelle et reproductive, à lutter contre les pratiques néfastes, à réduire la mortalité néonatale.
Elle vise aussi à orienter, développer, affirmer, fédérer et valoriser les actions entreprises dans ces domaines par les différents acteurs français que sont notamment les pouvoirs publics, les collectivités locales, ou encore les ONG.
Cette politique met enfin l'accent sur l'amélioration du droit des femmes, l'accès à la planification familiale, ou encore l'intégration de la prévention et du traitement des infections sexuellement transmissibles et du sida dans l'offre de service de santé pour les femmes. Nous voulons aussi accentuer notre effort en matière de présence de personnel qualifié pour les accouchements, et pour l'accès aux soins obstétricaux d'urgence, en prenant tout particulièrement en compte l'humanisation des soins et l'accès financier. Enfin, nous apportons une attention particulière à la prévention et à la prise en charge des fistules obstétricales.
En appui à cette stratégie globale, des moyens seront affectés à la fois en soutien aux organisations multilatérales compétentes, et dans le cadre de programmes bilatéraux conduits par l'AFD.
Dans une première phase, mon ministère soutiendra le Fonds des Nations unies pour la Population (FNUAP) dès la fin de cette année, par un projet visant à la fois à renforcer les capacités des pays francophones d'Afrique sub-saharienne pour accélérer la lutte contre la mortalité maternelle et néo-natale, et visant à renforcer la prise en charge des fistules obstétricales en Afrique de l'Ouest.
Pour mobiliser davantage de ressources tant humaines que financières, ce projet s'appuiera également sur la société civile française.
A la demande de la directrice générale du FNUAP, l'expertise française au sein du FNUAP sera renforcée par la mise à disposition d'un assistant technique en soutien aux équipes sous-régionales de sa division Afrique.
Au cours de l'année 2007, je souhaite poursuivre cet effort en proposant un nouveau projet mobilisateur, en partenariat avec l'OMS, et en cohérence avec les priorités définies dans l'accord cadre France-OMS.
Pour conclure, je crois que tous ces projets illustrent bien l'engagement résolu de notre pays en faveur de la santé dans les pays en développement. Je rappelle à cet égard que la France est devenue le principal pays contributeur au Fonds mondial de lutte contre le sida. Au total, les financements mobilisés par la France à travers les canaux multilatéraux pour le secteur de la santé seront de 1,4 milliard d'euros pour la période 2006-2008, contre 50 millions d'euros pour la période 2000-2002.
En mobilisant ainsi nos forces et nos moyens de façon coordonnée et pragmatique, et en tirant les leçons de l'expérience pour permettre la mise en oeuvre à grande échelle des actions qui se sont révélées les plus efficaces en terme de santé maternelle et néo-natale, nous pouvons espérer atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement.
Je vous remercie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin