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Q - Vous êtes aujourd'hui lundi dans une entreprise qui emploie 40 % de Français. La Franche-Comté compte par ailleurs plus de 16.000 frontaliers. Quel en est, selon vous, le principal atout ?
R - Les zones de Morteau ou Pontarlier ont les taux de chômage les plus bas de la Région en partie grâce aux emplois offerts par la Suisse et il est clair aussi que la réputation de la Suisse en matière d'industries de précision s'appuie aussi sur le savoir-faire de la main d'oeuvre franc-comtoise. Nos traditions culturelles et industrielles communes doivent évoluer dans un esprit de coopération pour continuer à bénéficier de ce contexte frontalier dynamique.
Q - Pourtant, nombre de chefs d'entreprises français se plaignent de la surenchère des salaires et de la difficulté de garder la main d'oeuvre qualifiée de ce côté-ci de la frontière ?
R - La Suisse offre des salaires apparaissant attractifs aux travailleurs français alors que de nombreuses PME franc-comtoises affirment manquer de personnel. Ce type de problème est régulièrement évoqué avec les autorités suisses. Des démarches ont été effectuées pour limiter les excès.
Q - Inversement, les entreprises françaises qui travaillent en Suisse se plaignent de contrôles plus stricts depuis les accords bilatéraux. Y-a-t-il possibilité d'assouplissement ?
R - Des contrôles très rigoureux sont entrepris par l'administration suisse à l'égard des entrepreneurs français, en particulier dans le secteur du BTP. Ces contrôles peuvent être très pénalisants, alors qu'il ne semble pas que les entreprises suisses soient contrôlées aussi strictement. Nous en parlerons à nouveau avec les autorités suisses.
Q - De leur côté, les frontaliers comtois sont inquiets d'un possible retour du prélèvement des revenus à la source. Y êtes-vous favorable ?
La France et la Suisse s'entretiennent régulièrement du bon fonctionnement du régime fiscal des travailleurs frontaliers, qui repose sur le principe d'un paiement de l'impôt en France et du reversement à la Suisse d'une partie de cet impôt. Le prélèvement à la source est une exception genevoise qu'il n'est pas envisagé de généraliser.
Q - Les mêmes frontaliers souhaitent aussi préserver leur choix de mutuelle privée jusqu'en 2009. Ainsi que la possibilité de rapatrier leur capital retraite, le 2ème pilier. Quelle est votre position ?
R - Il faut être prudents sur cette question, qui mérite une analyse approfondie. Concernant la possibilité de rapatrier le 2ème pilier, le risque est pour les travailleurs frontaliers de compromettre leur retraite en cas de mauvaise gestion de ces fonds.
Q - Une récente enquête de la direction du travail conclut à la nécessité de mettre en place une zone d'activité transfrontalière pour gérer ensemble les problèmes. Qu'en pensez-vous ?
R - Je suis favorable à des formes de concertation de part et d'autre de la frontière. Utilisons au maximum les structures qui existent déjà comme la Conférence TransJurassienne, le Comité régional franco-genevois.
Q - Au-delà des accords bilatéraux, comment peuvent évoluer les relations entre l'Union européenne et la Suisse ?
R - A court terme, il semble difficile d'envisager, du fait de la volonté des Suisses, une autre voie qu'une approche pragmatique conforme aux intérêts communs et à la densité des échanges économiques entre l'Union européenne et la Suisse. Nous avons donc emprunté la voie de la signature d'accords sectoriels bilatéraux entre l'Union et la Suisse, qui se sont avérés mutuellement bénéfiques. Le Conseil fédéral suisse vient d'adopter le "rapport Europe 2006" qui illustre les nombreux avantages de la poursuite de cette coopération bilatérale. La Suisse fera probablement de nouvelles propositions en particulier celle d'un accord de libre-échange en matière agricole pour ouvrir des discussions dans certains domaines que nous examinerons attentivement avec nos partenaires de l'Union.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 juillet 2006