Interview de M. Philippe de Villiers, président du Mouvement pour la France, dans "Le Monde" du 8 septembre 2006, sur le relogement des squatteurs de Cachan, l'immigration clandestine, le mariage homosexuel et sur son projet pour l'élection présidentielle

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Média : Emission la politique de la France dans le monde - Le Monde

Texte intégral

Q - Vous vous insurgez contre le relogement des squatters de Cachan en les opposant aux Français en attente de logement. Feriez-vous vôtre le slogan frontiste : "Les Français d'abord" ?
R - Ce n'est pas "Les Français d'abord", mais le principe de l'égalité républicaine... Je ne vois pas pourquoi des Français patienteraient cinq ou dix ans pour obtenir un logement social, sans aide extérieure pour leur démarche, et que, dans le même temps, des étrangers en situation irrégulière se verraient, eux, proposer un logement social ou un hôtel aux frais des contribuables. Les 400 000 migrants illégaux qui séjournent sur le territoire national doivent être renvoyés chez eux. L'Etat n'a pas a donner des droits à ceux qui ne respectent pas le droit.
Q - Vous devez vous réjouir des déclarations de Nicolas Sarkozy sur l'expulsion des sans-papiers, la limitation du droit de grève et le mariage homosexuel...
R - Sarko, c'est la rupture entre la parole et les actes ! Pour ce qui concerne les expulsions, les chiffres montrent que l'immigration a explosé ces cinq dernières années. Nicolas Sarkozy a abrogé la double peine, ce qui revient à instituer un droit de séjour perpétuel pour les étrangers délinquants sur le territoire national. Il a redit son attachement, à titre personnel, au droit de vote des étrangers. Il s'est prononcé pour la discrimination positive, le financement des mosquées et il veut l'immigration choisie : autant de points qui nous opposent. Moi, ce que je veux, c'est l'immigration zéro : le contrôle aux frontières, la fin du regroupement familial, la fin de l'aide médicale d'Etat et le changement du droit sur l'acquisition automatique de la nationalité.
Quant au mariage homosexuel, Sarkozy dit dans un premier temps qu'il est contre, puis il prône un contrat d'union civile avec cérémonie en mairie qui accorde les mêmes droits patrimoniaux, successoraux et fiscaux que le mariage. Cela revient à un mariage bis.
Moi, je veux faire inscrire dans la Constitution la phrase suivante : "Le mariage est l'alliance d'un homme et d'une femme." C'est une chose de garantir la liberté de comportement, et une autre de veiller à l'intérêt de la société et à la nécessaire protection de l'enfant.
Q - Vous pensez que l'enfant élevé par un couple homosexuel est en danger ?
R - Le bon sens nous recommande de regarder la société avec ses déchirures affectives et le paysage de détresse qui est sous nos yeux. Il y a un droit de l'enfant, il n'y a pas de droit à l'enfant. L'enfant n'est pas un caprice. Les dernières études de la psychologie moderne, notamment des pédiatres, établissent un lien de relation inverse entre la stabilité sociale et la détresse affective. Je ne veux pas que la France continue à faire trembler ses bases.
Q - Mais en quoi l'instabilité des couples concernerait plus particulièrement les couples homosexuels ?
R - Pour un enfant, un papa et une maman, c'est mieux que deux papas ou deux mamans. C'est une question de sécurité pour la société. Dissocier le mariage de la filiation, c'est aller vers le chaos.
Q - Et quand Nicolas Sarkozy parle de limiter le droit de grève ?
R - Méfions-nous de ceux qui prétendent faire la rupture demain, mais qui se gardent bien de la faire aujourd'hui, alors qu'ils en auraient le pouvoir.
Q - Vous ne parvenez pas à décoller dans les sondages. N'est-ce pas l'échec de votre stratégie de concurrence avec Jean-Marie Le Pen sur son terrain ?
R - Les sondages me rassurent, parce qu'ils se sont toujours trompés, ainsi d'ailleurs que les éditorialistes. Vous verrez, je créerai la surprise : j'ai été l'un des vainqueurs du référendum sur la Constitution européenne, je serai l'un des vainqueurs de la présidentielle. Jean-Marie Le Pen fait son dernier tour de piste. 2007 est son point d'arrivée. Pour ce qui concerne ma candidature, c'est un point de départ.
Q - Quel est votre projet pour 2007 ?
R - Il repose sur cinq choix : la France rurale plutôt que les techno-parisiens ; la famille plutôt que le mariage homosexuel ou le contrat d'union civile ; l'abrogation des 35 heures plutôt que l'abandon de la France qui travaille ; l'immigration zéro plutôt que l'immigration choisie ou subie ; l'Europe des patries plutôt que l'Europe avec la Turquie.
Nous sommes devant une question vitale : la France va-t-elle devenir une juxtaposition d'alvéoles ethniques, sexuelles, religieuses - une addition de mémoires particulières -, ou va-t-elle redevenir une communauté nationale fondée sur les principes républicains d'égalité, d'unité et de citoyenneté ? C'est le choix entre "la France d'après les Français" et "la France avec les Français". Le mondialisme et le communautarisme sont les deux soubassements idéologiques de notre classe politique. Elle est là, la vraie rupture, celle du patriotisme populaire.

Source http://www.pourlafrance.fr, le 3 octobre 2006