Texte intégral
Madame la Présidente,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Le gouvernement a déjà exprimé sa position sur cette proposition de loi le 18 mai dernier et n'en a pas varié. Il n'y est pas favorable et ce, pour trois raisons principales.
Tout d'abord, il faut rappeler que notre pays s'est d'ores et déjà doté, le 29 janvier 2001, il y a peu, d'une législation qui reconnaît officiellement le génocide arménien. Le président de la République l'a encore exprimé avec force et émotion, à Erevan, il y a deux semaines à peine : la France reconnaît pleinement la tragédie du génocide arménien commis en 1915, a-t-il dit.
Alors, permettez-moi Mesdames et Messieurs les Députés, de saluer chaleureusement avec vous nos compatriotes d'origine arménienne, qui sont une composante active et remarquable de notre communauté nationale. Ils font honneur à la France chacun dans leur domaine mais aussi à la terre de leurs aïeux.
Chacun connaît, en effet, le chemin de douleur et de peine parcouru par le peuple arménien jusqu'à ce qu'il trouve enfin un Etat. Nul ne peut aujourd'hui prétendre ignorer ce qui a été enduré alors et aucun d'entre nous, ici, ne songe à contester cette réalité-là.
Nous disposons donc d'une loi sur le génocide arménien. Elle s'impose à tous. La France est en pointe dans ce domaine.
Pourquoi dans ces conditions en faudrait-il une nouvelle ?
En second lieu, Mesdames et Messieurs les Députés, cette proposition de loi risque d'avoir des effets contraires à ceux que vous recherchez.
Nous sommes tous attachés à la qualité des relations que nous entretenons avec ce grand partenaire qu'est la Turquie. Des liens solides d'amitié et de solidarité se sont tissés au fil des siècles.
Mais l'exigence va de pair avec l'amitié. La Turquie doit effectuer un travail de mémoire sur son passé. D'autres pays ont su le faire, quelque difficile que soit ce travail. Notre pays s'honore de l'avoir fait. La Turquie s'y est progressivement résolue depuis peu grâce, en particulier, à l'engagement d'intellectuels courageux. Il convient donc de lui permettre d'effectuer ce travail en toute sérénité, c'est la condition de sa réussite.
Il nous faut d'ailleurs relever que ces intellectuels, dont certains ont été accusés et même condamnés pour avoir évoqué la question du génocide, ont lancé un appel pour que cette proposition de loi ne soit pas adoptée. Ils sont convaincus qu'elle nuirait à leur combat. Sommes-nous mieux placés qu'eux pour en juger ? Nous ne devons pas fragiliser cette première avancée, qui doit conduire le peuple turc à revisiter avec objectivité son histoire, comme nous le souhaitons tous. Nous devons accompagner cette démarche mais en aucun cas, prendre le risque de la contrarier, voire de la figer.
Mesdames et Messieurs les Députés, ne nous trompons pas de débat. Nous partageons tous la même conviction qu'il faut favoriser le processus démocratique en Turquie ainsi que la réconciliation entre Arméniens et Turcs. Notre engagement doit conduire à l'encourager.
Laissons pour cela le dialogue s'établir et l'apaisement des mémoires s'opérer.
Enfin le gouvernement a des réels doutes sur l'opportunité de cette proposition. En effet, il appartient d'abord et avant tout aux historiens, et non au législateur, d'éclairer l'Histoire. Lors du débat sur l'article 4 de la loi du 23 février 2005, votre Assemblée est ainsi convenue qu'il revenait aux historiens, et à eux seuls, d'établir la réalité des événements du passé et de façonner notre mémoire collective. Nous souhaitons, nous aussi, nous en tenir là. Voter cette proposition reviendrait donc à remettre en cause ce principe juste que, dans sa sagesse, votre Assemblée a consacré à l'issue d'un large débat public. Alors, après le président de la République, après le ministre des Affaires étrangères, je vous le redis à nouveau : ce n'est pas à la loi d'écrire l'Histoire.
Pour toutes ces raisons, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Députés, le gouvernement n'est pas favorable à cette proposition de loi.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 octobre 2006
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Le gouvernement a déjà exprimé sa position sur cette proposition de loi le 18 mai dernier et n'en a pas varié. Il n'y est pas favorable et ce, pour trois raisons principales.
Tout d'abord, il faut rappeler que notre pays s'est d'ores et déjà doté, le 29 janvier 2001, il y a peu, d'une législation qui reconnaît officiellement le génocide arménien. Le président de la République l'a encore exprimé avec force et émotion, à Erevan, il y a deux semaines à peine : la France reconnaît pleinement la tragédie du génocide arménien commis en 1915, a-t-il dit.
Alors, permettez-moi Mesdames et Messieurs les Députés, de saluer chaleureusement avec vous nos compatriotes d'origine arménienne, qui sont une composante active et remarquable de notre communauté nationale. Ils font honneur à la France chacun dans leur domaine mais aussi à la terre de leurs aïeux.
Chacun connaît, en effet, le chemin de douleur et de peine parcouru par le peuple arménien jusqu'à ce qu'il trouve enfin un Etat. Nul ne peut aujourd'hui prétendre ignorer ce qui a été enduré alors et aucun d'entre nous, ici, ne songe à contester cette réalité-là.
Nous disposons donc d'une loi sur le génocide arménien. Elle s'impose à tous. La France est en pointe dans ce domaine.
Pourquoi dans ces conditions en faudrait-il une nouvelle ?
En second lieu, Mesdames et Messieurs les Députés, cette proposition de loi risque d'avoir des effets contraires à ceux que vous recherchez.
Nous sommes tous attachés à la qualité des relations que nous entretenons avec ce grand partenaire qu'est la Turquie. Des liens solides d'amitié et de solidarité se sont tissés au fil des siècles.
Mais l'exigence va de pair avec l'amitié. La Turquie doit effectuer un travail de mémoire sur son passé. D'autres pays ont su le faire, quelque difficile que soit ce travail. Notre pays s'honore de l'avoir fait. La Turquie s'y est progressivement résolue depuis peu grâce, en particulier, à l'engagement d'intellectuels courageux. Il convient donc de lui permettre d'effectuer ce travail en toute sérénité, c'est la condition de sa réussite.
Il nous faut d'ailleurs relever que ces intellectuels, dont certains ont été accusés et même condamnés pour avoir évoqué la question du génocide, ont lancé un appel pour que cette proposition de loi ne soit pas adoptée. Ils sont convaincus qu'elle nuirait à leur combat. Sommes-nous mieux placés qu'eux pour en juger ? Nous ne devons pas fragiliser cette première avancée, qui doit conduire le peuple turc à revisiter avec objectivité son histoire, comme nous le souhaitons tous. Nous devons accompagner cette démarche mais en aucun cas, prendre le risque de la contrarier, voire de la figer.
Mesdames et Messieurs les Députés, ne nous trompons pas de débat. Nous partageons tous la même conviction qu'il faut favoriser le processus démocratique en Turquie ainsi que la réconciliation entre Arméniens et Turcs. Notre engagement doit conduire à l'encourager.
Laissons pour cela le dialogue s'établir et l'apaisement des mémoires s'opérer.
Enfin le gouvernement a des réels doutes sur l'opportunité de cette proposition. En effet, il appartient d'abord et avant tout aux historiens, et non au législateur, d'éclairer l'Histoire. Lors du débat sur l'article 4 de la loi du 23 février 2005, votre Assemblée est ainsi convenue qu'il revenait aux historiens, et à eux seuls, d'établir la réalité des événements du passé et de façonner notre mémoire collective. Nous souhaitons, nous aussi, nous en tenir là. Voter cette proposition reviendrait donc à remettre en cause ce principe juste que, dans sa sagesse, votre Assemblée a consacré à l'issue d'un large débat public. Alors, après le président de la République, après le ministre des Affaires étrangères, je vous le redis à nouveau : ce n'est pas à la loi d'écrire l'Histoire.
Pour toutes ces raisons, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Députés, le gouvernement n'est pas favorable à cette proposition de loi.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 octobre 2006