Déclaration de M. Jean-François Roubaud, président de la CGPME, sur l'engagement de la CGPME en faveur de la révision de l'Accord sur les marchés publics (AMP), Strasbourg le 25 octobre 2006.

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Circonstance : Intervention de M. Roubaud devant les membres de l'Intergroupe PME du Parlement européen, à Strasbourg le 25 octobre 2006

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
C'est un grand honneur pour moi, et pour la CGPME, d'avoir l'opportunité de m'exprimer devant les membres de l'Intergroupe PME du Parlement européen.
Je tiens à adresser mes très sincères remerciements au Président KARAS pour avoir accepté d'organiser cette rencontre aujourd'hui.
Quelques mots pour situer la Confédération Générale des PME dans le paysage français. Notre organisation représente l'ensemble de petites et moyennes entreprises françaises, soit plus de 1 500 000 entreprises. En sa qualité de partenaire social français, elle assure la représentation et la défense de l'ensemble des PME des secteurs de l'industrie, du commerce et des services.
Pourquoi avoir choisi d'organiser notre rencontre d'aujourd'hui sur le thème des Marchés publics ?
Pourquoi devons-nous nous préoccuper, aujourd'hui, de la place des PME dans les marchés publics ?
Plusieurs raisons me paraissent particulièrement convaincantes :
- Sur le plan économique, les marchés publics représentent, dans tous les pays, une importance considérable. Pour la seule France, l'achat public représente entre 60 et 130 milliards d'euros. Au niveau européen, ce sont 1 500 milliards d'euros soit environ 16 % du produit intérieur brut.
- Quant aux PME, vous savez parfaitement qu'elles constituent l'essentiel du tissu économique européen, qu'elles sont le moteur de la croissance, de l'innovation et de l'emploi dans l'Union européenne.
- En dépit de la force économique qu'elles représentent, les PME européennes n'ont pas, à l'heure actuelle, un accès satisfaisant aux marchés publics. Leur participation à la commande publique est relativement faible : environ 40 % en France, aux alentours de 22 % au Royaume-Uni.
Les PME innovantes sont encore trop souvent rejetées du processus en raison de capacités financières estimées insuffisantes par les donneurs d'ordre,
Les PME nouvellement créées ont également des difficultés pour accéder au processus de la commande publique en raison de leur impossibilité de fournir des références,
Une tendance lourde se dessine depuis quelques années : les acheteurs publics favorisent la mutualisation et les regroupements avec la présence d'intervenants de taille plus importante et le souci prioritaire d'avoir des marges plus conséquentes. Sur ce plan, les partenariats publics-privés représentent un risque non négligeable pour les PME.
- Pour les petites et moyennes entreprises, qui sont « l'épine dorsale » de l'économie européenne, une plus grande participation aux marchés publics signifie une compétitivité accrue, des possibilités d'embauche supplémentaires et une stimulation certaine en termes d'innovation.
La récente communication de la Commission européenne sur l'innovation reconnaît d'ailleurs que, je cite : « l'amélioration des pratiques de passation des marchés publics peut contribuer à favoriser l'adoption par le marché de produits et des services innovants ».
- De plus, sur le plan concurrentiel, une plus grande participation des PME aux marchés publics favorise une multiplicité d'intervenants, un tissu économique plus diversifié.
Cela signifie une véritable mise en concurrence, un risque d'ententes moindre qui permettent d'asseoir la politique d'achats publics sur la recherche de la qualité.
- Au niveau international, les PME européennes sont placées dans une situation de déséquilibre économique, cautionnée par un accord international, qui les handicape et ne leur permet pas de lutter à armes égales avec leurs concurrents.
Quelles sont les attentes des PME ?
Il faut rappeler très clairement que les PME, qu'elles soient françaises ou européennes, ne demandent pas de « part réservataire », de « quotas », d' « obligations quantitatives d'attribution des marchés ». Une telle politique ne pourrait avoir que des effets néfastes sur les secteurs de marché où les PME sont déjà bien présentes.
Ce que nous souhaitons, au niveau de la CGPME, c'est que l'Accord sur les Marchés Publics (AMP), négocié dans le cadre de l'OMC, cesse d'être un instrument destiné à entériner des situations de concurrence déloyale comme la dérogation au bénéfice des Etats-Unis l'illustre depuis des années.
L'AMP doit favoriser la mise en place d'un environnement non contraignant où des objectifs sont à atteindre pour favoriser, en particulier, les PME innovantes qui concourent aux marchés.
Or, nous savons que les Etats-Unis ne souhaitent pas remettre en cause leur politique préférentielle en faveur des PME, comme en témoigne la dernière offre révisée qu'ils ont remis à l'OMC.
Ce que nous souhaitons, très clairement, c'est que l'Union européenne tire toutes les conséquences de la stratégie de Lisbonne et adopte une attitude offensive dans le cadre de l'AMP.
Il faut que l'Union européenne accepte de reconnaître qu'il existe une « défaillance du marché », à deux niveaux :
- entre les Etats : il faut donc restaurer un équilibre entre tous les pays pour que chacun ait la possibilité, librement, de mettre en place une politique préférentielle vis-à-vis de ses petites et moyennes entreprises,
- entre les grandes entreprises et les plus petites : il n'est ni juste, ni équitable de laisser le libre jeu de la concurrence organiser le marché sans en atténuer les effets pervers.
Il faut que les PME européennes soient en mesure de concurrencer à armes égales les grandes entreprises, mais également leurs homologues des autres pays partenaires de l'Union européenne, grâce à l'obtention d'une dérogation similaire à celle obtenue par les PME américaines, canadiennes, coréennes et japonaises notamment.
Le 13 mars dernier, le Conseil des Ministres de l'Union européenne n'appelait-il pas la Commission européenne à « passer en revue les règles et les pratiques concernant les marchés publics, en tenant compte des besoins spécifiques des PME afin de faciliter leur accès à ces marchés et aux pratiques y afférant » ?
Mesdames et Messieurs les Parlementaires, au travers de cette rencontre, nous espérons vous associer à notre cause. Nous ne demandons pas la mise en oeuvre de mesures protectionnistes. Nous demandons simplement des conditions équilibrées entre les parties en présence.
L'Union européenne a, aujourd'hui, la possibilité de présenter à son tour une offre en vue d'obtenir la levée du verrou de l'AMP. Si elle ne profite pas de cette opportunité qui lui est donnée pendant les négociations actuelles, nos entreprises devront supporter encore pendant 10 ans cet environnement défavorable.
Source http://www.cgpme.fr, le 27 octobre 2006