Texte intégral
Monsieur le Secrétaire perpétuel (Guy PAILLOTIN)
Madame le Président (Marion GUILLOU)
Mesdames et Messieurs les honorables membres de l'Académie,
C'est un honneur pour moi d'accueillir dans les locaux du Ministère de l'Agriculture et de la Pêche cette séance exceptionnelle de l'Académie d'Agriculture de France, et de pouvoir en conclure les travaux.
C'est un honneur exigeant, puisque votre expérience et votre sagesse se sont associées aujourd'hui à l'excellence scientifique portée dans le domaine agronomique par l'INRA.
Ce moment d'échange est essentiel à mes yeux : les académiciens rencontrent les chercheurs, l'expérience dialogue avec l'innovation, au service d'une agronomie en perpétuel progrès.
I. L'histoire de l'Académie d'Agriculture de France, fondée en 1761, et l'histoire de l'Institut National de la Recherche Agronomique, fondé en 1946, c'est l'engagement de notre pays en faveur d'une agriculture de pointe.
Constituée par les personnalités les plus éminentes dans le domaine de l'agronomie (Duhamel de MONCEAU, BUFFON, LAVOISIER, MALESHERBES, VILMORIN), l'Académie d'Agriculture de France a vu le jour en plein « siècle des Lumières », à un moment où il devenait essentiel de développer l'agriculture française en utilisant et en améliorant les techniques disponibles. Aujourd'hui, l'Académie est une instance de réflexion sur l'évolution du monde agricole, en prenant en considération ses différents aspects (scientifique, technique, économique, juridique, social et culturel).
L'histoire des recherches à l'INRA, fondé en 1946, est aussi portée par l'ambition de placer l'agriculture française au premier rang. Après la guerre, il fallait accompagner la modernisation de l'agriculture française. Pendant cette période, l'INRA contribue à la « révolution agricole », qui a permis à l'agriculture française de rattraper son retard. L'amélioration des techniques de production et la sélection génétique, végétale et animale, furent les piliers de cette révolution. L'obtention de la variété de blé à haut rendement Etoile de Choisy est l'un des résultats emblématiques de l'INRA pendant cette période.
La France sort rapidement de la situation de pénurie alimentaire. Ce résultat démontre alors la synergie entre une recherche agronomique vigoureuse et une politique agricole volontariste, tant au niveau français que communautaire. La profession agricole s'organise et s'engage résolument dans cette mutation.
Les gains de productivité conquis au cours des années soixante font de notre pays un exportateur de denrées agricoles. La question de la transformation des produits agricoles se pose aussi et l'INRA développe une activité de recherche autour des procédés agroalimentaires, mettant au point par exemple l'ultrafiltration du lait ou encore la cuisson extrusion. L'INRA développe des partenariats avec une industrie agro-alimentaire en pleine expansion, et composée principalement, à l'époque, de petites et moyennes entreprises (PME-PMI). Des pôles agroalimentaires régionaux se mettent en place et bientôt la France devient le premier exportateur mondial de produits agro-alimentaires.
Le premier choc pétrolier de 1973 oriente les chercheurs vers l'invention d'une « agriculture plus autonome et plus économe », pour reprendre la célèbre formule de Jacques Poly, alors directeur général de l'Institut. Simultanément, les agriculteurs incluent l'environnement dans la définition des bonnes pratiques agricoles.
L'INRA profite de nouveaux modes d'investigation du vivant : l'heure est à la biologie moléculaire et aux biotechnologies. C'est dans ce contexte qu'est affirmée la vocation publique de l'établissement, qui passe en 1984 sous la tutelle conjointe du Ministère de l'Agriculture et du Ministère de la Recherche.
Les résultats obtenus pendant cette période, comme les techniques de transplantation embryonnaire ou la caractérisation de différents gènes bactériens, illustrent le dynamisme de la recherche française.
Dans les années 90, les questions liées à la sécurité sanitaire des aliments prennent une importance croissante, et les garanties offertes aux consommateurs deviennent un élément déterminant pour le succès de notre industrie agroalimentaire. Les préoccupations liées à la santé humaines sont incluses dans les priorités de l'INRA, comme en témoignent le développement des techniques pour lutter contre les contaminations microbiennes des aliments.
Les recherches touchant à la préservation du milieu naturel continuent de se développer pendant cette décennie, comme le montre la mise au point, pour les effluents agroalimentaires, de divers procédés de dépollution.
II. L'accélération de la recherche agronomique est aujourd'hui cruciale, et nous avons besoin d'unir nos forces pour fournir les réponses appropriées à notre temps.
De nombreuses inquiétudes se font jour, en France et dans le monde, concernant tantôt les organismes génétiquement modifiés, tantôt la gestion des espaces agricoles, ou bien la lutte contre les maladies émergentes.
La recherche publique est bien placée pour préserver l'intérêt général, en conduisant des travaux qui n'ont pas forcément valeur marchande, et en transférant les innovations au plus grand nombre d'opérateurs concernés. Il est d'autant plus important de maintenir le caractère public de la recherche agronomique, que dans la mise en oeuvre de normes sanitaires ou environnementales, les pouvoirs publics ont besoin d'un regard impartial.
Je me félicite que des expertises aient été lancées sur l'utilisation des pesticides ou les effets de la sécheresse. Les enjeux soulevés par le changement climatique, le bioterrorisme, la gestion durable de l'eau, du littoral et des déchets, ou bien encore les pratiques de consommation, doivent combiner des programmes conduits sur le long terme et des actions plus immédiates, qui intègrent déjà les connaissances acquises. L'INRA est aujourd'hui en mesure de suivre l'intégralité du système alimentaire chez l'homme, et de décrypter petit à petit les millions d'interactions qui le composent.
Le 3 octobre, j'ai eu le plaisir de signer le contrat d'objectifs de l'INRA avec Marion GUILLOU et François GOULARD. Ce document d'orientation stratégique pour la période 2006-2009 confirme les axes majeurs de notre recherche autour du triptyque « Agriculture, Alimentation, Environnement ». Je me réjouis de l'accent mis dans ce document sur le renforcement des partenariats socio-économiques, sur la finalisation des recherches et sur le développement des liens avec l'enseignement supérieur. La création d'un fonds d'amorçage a retenu mon attention : je souhaite que la dotation de ce fonds à hauteur de 300 000euros soit doublée par le Ministère de l'Agriculture et de la Pêche en 2007.
Le renforcement des activités de l'INRA à l'international, dont une dimension essentielle tient au rapprochement avec le CIRAD (Centre international de recherche agronomique pour le développement), est destiné à faire participer la France à la production de biens publics mondiaux, dont nous avons tant besoin. L'établissement participe également à la construction de l'espace européen de recherche. Son rôle est essentiel, comme premier institut de recherche agronomique au niveau européen.
Une plus grande mobilité des chercheurs et une participation accrue du Ministère aux instances de gouvernance de la recherche me paraît aussi une voie de progrès à explorer, en lien avec le Ministère de la Recherche.
Les opportunités nouvelles du développement agricole figurent en bonne place, qu'il s'agisse de la valorisation de la biomasse, des applications de la génomique, ou de la mise au point de systèmes de production innovants capables de préserver ou de valoriser la biodiversité. Nous attendons un appui renforcé de l'INRA à la décision en matière de politiques agricoles au niveau européen.
Conclusion
L'association féconde entre la sagesse et l'innovation est un atout pour l'avenir. Nous avons besoin des compétences de l'Académie d'Agriculture, de sa contribution à l'histoire de l'agriculture française et du dialogue qu'elle entretient avec les institutions. Une grande puissance agricole comme la France a aussi besoin d'une recherche active et présente sur la scène internationale. Produire des données génériques pour la connaissance du vivant, diversifier nos produits agricoles et adapter les systèmes de production, continuer l'exploration génétique pour ne pas tomber en situation de dépendance scientifique et technologique demain, ce sont autant de tâches qui nous attendent. Je sais pouvoir compter sur votre implication.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 20 octobre 2006
Madame le Président (Marion GUILLOU)
Mesdames et Messieurs les honorables membres de l'Académie,
C'est un honneur pour moi d'accueillir dans les locaux du Ministère de l'Agriculture et de la Pêche cette séance exceptionnelle de l'Académie d'Agriculture de France, et de pouvoir en conclure les travaux.
C'est un honneur exigeant, puisque votre expérience et votre sagesse se sont associées aujourd'hui à l'excellence scientifique portée dans le domaine agronomique par l'INRA.
Ce moment d'échange est essentiel à mes yeux : les académiciens rencontrent les chercheurs, l'expérience dialogue avec l'innovation, au service d'une agronomie en perpétuel progrès.
I. L'histoire de l'Académie d'Agriculture de France, fondée en 1761, et l'histoire de l'Institut National de la Recherche Agronomique, fondé en 1946, c'est l'engagement de notre pays en faveur d'une agriculture de pointe.
Constituée par les personnalités les plus éminentes dans le domaine de l'agronomie (Duhamel de MONCEAU, BUFFON, LAVOISIER, MALESHERBES, VILMORIN), l'Académie d'Agriculture de France a vu le jour en plein « siècle des Lumières », à un moment où il devenait essentiel de développer l'agriculture française en utilisant et en améliorant les techniques disponibles. Aujourd'hui, l'Académie est une instance de réflexion sur l'évolution du monde agricole, en prenant en considération ses différents aspects (scientifique, technique, économique, juridique, social et culturel).
L'histoire des recherches à l'INRA, fondé en 1946, est aussi portée par l'ambition de placer l'agriculture française au premier rang. Après la guerre, il fallait accompagner la modernisation de l'agriculture française. Pendant cette période, l'INRA contribue à la « révolution agricole », qui a permis à l'agriculture française de rattraper son retard. L'amélioration des techniques de production et la sélection génétique, végétale et animale, furent les piliers de cette révolution. L'obtention de la variété de blé à haut rendement Etoile de Choisy est l'un des résultats emblématiques de l'INRA pendant cette période.
La France sort rapidement de la situation de pénurie alimentaire. Ce résultat démontre alors la synergie entre une recherche agronomique vigoureuse et une politique agricole volontariste, tant au niveau français que communautaire. La profession agricole s'organise et s'engage résolument dans cette mutation.
Les gains de productivité conquis au cours des années soixante font de notre pays un exportateur de denrées agricoles. La question de la transformation des produits agricoles se pose aussi et l'INRA développe une activité de recherche autour des procédés agroalimentaires, mettant au point par exemple l'ultrafiltration du lait ou encore la cuisson extrusion. L'INRA développe des partenariats avec une industrie agro-alimentaire en pleine expansion, et composée principalement, à l'époque, de petites et moyennes entreprises (PME-PMI). Des pôles agroalimentaires régionaux se mettent en place et bientôt la France devient le premier exportateur mondial de produits agro-alimentaires.
Le premier choc pétrolier de 1973 oriente les chercheurs vers l'invention d'une « agriculture plus autonome et plus économe », pour reprendre la célèbre formule de Jacques Poly, alors directeur général de l'Institut. Simultanément, les agriculteurs incluent l'environnement dans la définition des bonnes pratiques agricoles.
L'INRA profite de nouveaux modes d'investigation du vivant : l'heure est à la biologie moléculaire et aux biotechnologies. C'est dans ce contexte qu'est affirmée la vocation publique de l'établissement, qui passe en 1984 sous la tutelle conjointe du Ministère de l'Agriculture et du Ministère de la Recherche.
Les résultats obtenus pendant cette période, comme les techniques de transplantation embryonnaire ou la caractérisation de différents gènes bactériens, illustrent le dynamisme de la recherche française.
Dans les années 90, les questions liées à la sécurité sanitaire des aliments prennent une importance croissante, et les garanties offertes aux consommateurs deviennent un élément déterminant pour le succès de notre industrie agroalimentaire. Les préoccupations liées à la santé humaines sont incluses dans les priorités de l'INRA, comme en témoignent le développement des techniques pour lutter contre les contaminations microbiennes des aliments.
Les recherches touchant à la préservation du milieu naturel continuent de se développer pendant cette décennie, comme le montre la mise au point, pour les effluents agroalimentaires, de divers procédés de dépollution.
II. L'accélération de la recherche agronomique est aujourd'hui cruciale, et nous avons besoin d'unir nos forces pour fournir les réponses appropriées à notre temps.
De nombreuses inquiétudes se font jour, en France et dans le monde, concernant tantôt les organismes génétiquement modifiés, tantôt la gestion des espaces agricoles, ou bien la lutte contre les maladies émergentes.
La recherche publique est bien placée pour préserver l'intérêt général, en conduisant des travaux qui n'ont pas forcément valeur marchande, et en transférant les innovations au plus grand nombre d'opérateurs concernés. Il est d'autant plus important de maintenir le caractère public de la recherche agronomique, que dans la mise en oeuvre de normes sanitaires ou environnementales, les pouvoirs publics ont besoin d'un regard impartial.
Je me félicite que des expertises aient été lancées sur l'utilisation des pesticides ou les effets de la sécheresse. Les enjeux soulevés par le changement climatique, le bioterrorisme, la gestion durable de l'eau, du littoral et des déchets, ou bien encore les pratiques de consommation, doivent combiner des programmes conduits sur le long terme et des actions plus immédiates, qui intègrent déjà les connaissances acquises. L'INRA est aujourd'hui en mesure de suivre l'intégralité du système alimentaire chez l'homme, et de décrypter petit à petit les millions d'interactions qui le composent.
Le 3 octobre, j'ai eu le plaisir de signer le contrat d'objectifs de l'INRA avec Marion GUILLOU et François GOULARD. Ce document d'orientation stratégique pour la période 2006-2009 confirme les axes majeurs de notre recherche autour du triptyque « Agriculture, Alimentation, Environnement ». Je me réjouis de l'accent mis dans ce document sur le renforcement des partenariats socio-économiques, sur la finalisation des recherches et sur le développement des liens avec l'enseignement supérieur. La création d'un fonds d'amorçage a retenu mon attention : je souhaite que la dotation de ce fonds à hauteur de 300 000euros soit doublée par le Ministère de l'Agriculture et de la Pêche en 2007.
Le renforcement des activités de l'INRA à l'international, dont une dimension essentielle tient au rapprochement avec le CIRAD (Centre international de recherche agronomique pour le développement), est destiné à faire participer la France à la production de biens publics mondiaux, dont nous avons tant besoin. L'établissement participe également à la construction de l'espace européen de recherche. Son rôle est essentiel, comme premier institut de recherche agronomique au niveau européen.
Une plus grande mobilité des chercheurs et une participation accrue du Ministère aux instances de gouvernance de la recherche me paraît aussi une voie de progrès à explorer, en lien avec le Ministère de la Recherche.
Les opportunités nouvelles du développement agricole figurent en bonne place, qu'il s'agisse de la valorisation de la biomasse, des applications de la génomique, ou de la mise au point de systèmes de production innovants capables de préserver ou de valoriser la biodiversité. Nous attendons un appui renforcé de l'INRA à la décision en matière de politiques agricoles au niveau européen.
Conclusion
L'association féconde entre la sagesse et l'innovation est un atout pour l'avenir. Nous avons besoin des compétences de l'Académie d'Agriculture, de sa contribution à l'histoire de l'agriculture française et du dialogue qu'elle entretient avec les institutions. Une grande puissance agricole comme la France a aussi besoin d'une recherche active et présente sur la scène internationale. Produire des données génériques pour la connaissance du vivant, diversifier nos produits agricoles et adapter les systèmes de production, continuer l'exploration génétique pour ne pas tomber en situation de dépendance scientifique et technologique demain, ce sont autant de tâches qui nous attendent. Je sais pouvoir compter sur votre implication.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 20 octobre 2006