Texte intégral
Q- F. Hollande, bonjour et merci d'être avec nous. D'abord la question que vous avez envie de poser ce matin aux auditeurs de RMC.
R- J'en ai beaucoup à poser : sur les débats au PS, sur le verdit contre Saddam Hussein. Mais je vais en poser une très concrète. Nous sommes, là, au moment où s'ouvre la Conférence de Nairobi sur le réchauffement climatique, il va falloir prendre des décisions. Il y en a une qui est envisagée au niveau européen, c'est une législation qui limiterait les émissions de Co2 sur chaque automobile. Est-ce que les auditeurs de RMC sont prêts à sans doute payer un peu plus cher un véhicule, ou en cas à faire en sorte qu'on oblige tout constructeur automobile à limiter l'émission de CO2, c'est-à-dire ce qui contribue à ce réchauffement de la planète.
Q- Mais pourquoi toujours payer plus cher, on pourrait payer moins cher aussi...
R- Mais, à terme, on paierait moins cher en définitive. Il y aurait sans doute une adaptation. Encore qu'il y a la concurrence. Les constructeurs seraient peut-être les meilleurs pour essayer d'avoir les fabrications de moteurs les plus économes, les plus propres, les moins polluants. Donc, il faut laisser la concurrence jouer. Mais il faut une contrainte. S'il n'y a pas de contrainte, là, sur les constructeurs automobiles, ça continuera. Cela fait des années que j'entends qu'il faut limiter la production de Co2, cela fait des années que j'entends qu'il faut des carburants propres...
Q- C'est vrai. Mais je constate aussi que tous les politiques commencent à s'y mettre maintenant et commencent à parler d'environnement et d'écologie. Jusque-là, on en parlait mais enfin bon, au coin d'une table, quoi...
R- C'est plutôt bien qu'il y ait cette prise de conscience, que quand il y a des rapports, y compris faits par des experts britanniques, qui donnent des chiffres invraisemblables de coût pour la planète...
Q- 6.500 milliards !
R- ...on se dit qu'on ne peut pas continuer comme ça. Quand on a des signes tangibles, pas simplement l'été mais aussi l'hiver de réchauffement climatique, quand on sait que la couche glacière est en train de disparaître, oui, il y a intérêt peut-être à changer nos façons de faire, nos façons de produire, nos façons de consommer, et je pense que c'est pas simplement un problème de décision politique - à l'évidence, il fallait en prendre - c'est aussi un problème de comportement de chacun.
Q- J'ai une question : faut-il imposer par exemple, des normes écologiques avant de donner un permis de construire ?
R- Oui. Vous savez qu'aujourd'hui, les permis de construire sont encadrés, on voit que pour l'achat d'un appartement ou d'une maison, il faut faire maintenant un diagnostic thermique, pour éviter effectivement qu'on puisse mettre sur le marché ou qu'on puisse mettre à la vente des appartements ou des maisons qui soient ouverts à tous les vents, c'est le cas de le dire. Oui, il faut que tout constructeur, privé comme public, puisse imposer des normes environnementales.
Q- Puisqu'on parle d'écologie, parlons de N. Hulot : est-ce que sa candidature est nécessaire ? Est-ce qu'elle serait utile la candidature de N. Hulot à la présidentielle, franchement ?
R- Des candidatures, il y en a de nombreuses, et chacun avance une idée, une bonne raison pour être candidat. C'est quoi l'élection présidentielle ? C'est un grand débat, un grand forum où chacun va venir dire : voilà mon message ? Ou c'est le choix du futur président de la République pour la France ? Moi je réponds, très nettement : une élection présidentielle, c'est pour choisir le prochain chef de l'Etat, et puis après il y aura des élections législatives pour choisir une majorité pour le soutenir ou pour ne pas le soutenir. Alors, N. Hulot, moi je respecte parfaitement sa démarche ; je crois que justement sur toutes ces questions-là, il a tiré à bien des égards des sonnettes d'alarme. Mais il y a des candidats écolos, j'en connais déjà deux au moins. Enfin une, D. Voynet, qui est la candidate des Verts, qui je crois a une expérience, a des qualités...
Q- Elle est moins populaire.
R- Elle n'est pas populaire ou elle est moins populaire...
Q- Beaucoup moins même.
R- ...Mais elle ne passe pas à la télévision régulièrement, ce n'est pas une émission sur une grande chaîne d'information.
Q- Donc, ce ne serait pas utile cette candidature ? Oui ou non ?
R- Non, je crois qu'elle n'est pas utile, mais l'intervention de N. Hulot est nécessaire.
Q- Pour 66% des Français, elle est utile, vous avez vu...
R- Oui, mais on peut dire que c'est utile, on peut dire...
Q- Ce ne sont pas les citoyens qui gouvernent ?
R- Non, ce n'est pas ça que je veux dire. C'est eux qui votent. Donc, ça secoue à l'évidence le débat public, ça amène des idées je l'espère nouvelles. J'ai rencontré N. Hulot, c'était normal, il a rencontré l'ensemble des responsables politiques, et il m'a posé cette question : moi je vais faire des propositions dans un livre, eh bien vous allez réagir. J'ai trouvé que cette démarche était tout à fait correcte.
Q- C'est ce que nous faisons ici avec notre manifeste. D'ailleurs les auditeurs de RMC font des propositions...
R- Et puis après, il m'a dit : si je suis satisfait des propositions des uns et des autres, je considérerais que je n'ai pas à aller plus loin. Si je n'en suis pas satisfait - et là aussi je respecte ce choix - j'irais sans doute plus loin.
Q- Est-ce que les Français ont toujours raison ? Est-ce que vous trouveriez bien qu'un Français vienne siéger au Conseil des ministres ?
R- D'abord, répondons à la première question : les Français n'ont pas toujours raison. Mais en même temps, il faut toujours accepter le verdict électoral, le suffrage universel. On peut être battu, je l'ai été, on peut gagner, j'ai parfois gagné des élections, c'est la loi de la majorité qui s'applique. Mais ce n'est pas pour autant que l'on considère que c'était la bonne réponse, celle des Français. Deuxièmement, est-ce qu'il faut tirer au sort tel ou tel citoyen et l'envoyer au Conseil des ministres ? Je ne crois pas que ce soit la bonne manière. On peut réserver le Conseil des ministres à ceux qui ont vocation à décider, qui ont été nommés pour ça. Après, si on veut tirer au sort des citoyens pour les interroger sur telle ou telle proposition, oui, pourquoi pas.
Q- Est-ce que c'était maladroit de parler de jurys de citoyens ?
R- Non, ce n'était pas maladroit, au sens où c'est une proposition parmi d'autres. Je crois qu'il faut mettre cette proposition, si on veut l'avancer, dans un contexte plus global. Il y a une crise de la démocratie, incontestablement, quand on voit l'abstention, quand on voit les votes extrêmes, quand on voit la dispersion, on parlait des multiples candidatures... C'est que les citoyens ne sont pas satisfaits de ce qu'on leur présente. Donc, il faut en tenir compte. On ne peut pas dire : vous n'êtes pas satisfaits, eh bien ça va continuer comme ça. Donc, il y a une crise démocratique. Comment on y répond ? Par un changement des règles dans la démocratie. D'abord, la première démocratie, c'est la démocratie représentative, celle qui est issue des élections, du suffrage universel. Il faut renforcer le Parlement, il faut aller beaucoup plus loin dans la décentralisation, il faut supprimer le cumul des mandats, il faut avoir des élus à plein temps, il faut avoir aussi un statut des élus, c'est la première démocratie. La seconde démocratie, c'est la démocratie sociale : oui, il faut avoir des partenaires sociaux qui négocient, qui contractualisent, ils faut des syndicats reconnus dans les entreprises. Il faut que les accords entre les syndicats et le patronat puissent être transposés lorsqu'ils ont été adoptés avec une règle majoritaire. Il faut donc qu'on ait des acteurs sociaux vivants, c'est très important, des intermédiaires, sinon on a des assemblées générales, on a des coordinations, on a une frustration. Et puis la troisième démocratie, c'est la démocratie participative, alors là on peut imaginer des conseils de quartiers, des assemblées générales, des jurys de citoyens tirés au sort... Là, l'imagination est possible. Mais si on prend une mesure, seulement une mesure, on voit bien qu'on n'est pas à la hauteur de la crise que l'on traverse.
Q- Est-il vrai que vous avez donné des ordres aux élus socialistes de ne pas donner leurs parrainages à d'autres candidats venus d'ailleurs, c'est vrai ou pas ?
R- Oui, bien sûr que c'est vrai, je revendique cette position. Les élus socialistes, au moment où ils doivent faire un choix de parrainage, c'est-à-dire, permettre à une candidature d'exister valablement et pouvoir se présenter à l'élection présidentielle, ils doivent ne parrainer que le candidat ou la candidate socialiste, parce que sinon comment comprendre la vie politique. Alors, on me dira : oui, mais si cette directive est entendue par les élus socialistes, il y a un risque pour d'autres candidats de ne jamais pouvoir être candidats.
Q- Vous regretteriez que J.-M. Le Pen ne soit pas candidat ?
R- Mais je ne vais pas quand même donner les parrainages socialistes à J.-M. Le Pen ! D'abord, qu'est-ce qu'on penserait d'un parti de gauche qui donnerait un parrainage à un candidat d'extrême droite ? On me dira c'est la démocratie. Mais si J.-M. Le Pen peut trouver parmi les cinquante ou soixante mille parrains possibles, 500 c'est bien le moins. Deuxièmement, on me dit aussi : mais l'extrême gauche, est-ce qu'elle pourra se présenter ? Cela n'a jamais empêché A. Laguiller de se présenter depuis 1974. Donc, elle doit avoir des parrains ou des marraines. Moi, je veux être simple : qu'est-ce qu'on a vécu le 21 avril 2002 ? Une grave crise quand même : Le Pen au second tour, la gauche écartée, 16 candidats au premier tour. Je ne veux plus revivre cela. Donc, je dis qu'il y a un principe de responsabilité. Les socialistes doivent donner leurs parrainages uniquement aux socialistes, et faire que la gauche soit présente au second tour. Et victorieux, je l'espère.
Q- Nous allons revenir sur les débats au PS qui vont s'achever avant le 16 novembre. Mais revenons sur l'actualité avec la condamnation ou le verdict concernant Saddam Hussein. Faut-il pendre Saddam Hussein ?
R- Nous sommes, nous, conscients de tous les crimes qui ont été perpétrés par Saddam Hussein et sans autres formes de procès. On sait ce qui s'est passé, notamment dans certaines villes chiites à des moments particuliers de l'histoire irakienne. Donc, Saddam Hussein mérite la condamnation la plus ferme. Mais nous sommes aussi des militants de l'abolition de la peine, et donc, quand on est contre la peine de mort, cela vaut pour tous les criminels. C'est un principe fondamental. Donc, nous, nous disons : oui Saddam Hussein doit être condamné, il est condamné ; oui, Saddam Hussein doit être puni, oui Saddam Hussein doit rester sans doute enfermé jusqu'à la fin de ses jours. Mais nous sommes contre la peine de mort, que ce soit en France ou en Irak.
Q- Mais les Américains et les Irakiens vont vous rétorquer que c'est un tribunal irakien qui a jugé Saddam Hussein, et que l'Irak est un pays souverain.
R- C'est un fait, et j'admets cette souveraineté. Ils pourraient même nous faire une seconde remarque : c'est que nous, nous avons tué nos dictateurs. Laval a été mis sur le poteau d'exécution après la Seconde Guerre mondiale...
Q- Mais qu'aujourd'hui, on n'exécuterait pas Laval, ici en France ? Vous ne voteriez pas la peine de mort ?
Dès lors que la peine de mort a été abolie en France, comme partout en Europe, dois-je le rappeler, on n'exécuterait pas les pires dictateurs.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 novembre 2006
R- J'en ai beaucoup à poser : sur les débats au PS, sur le verdit contre Saddam Hussein. Mais je vais en poser une très concrète. Nous sommes, là, au moment où s'ouvre la Conférence de Nairobi sur le réchauffement climatique, il va falloir prendre des décisions. Il y en a une qui est envisagée au niveau européen, c'est une législation qui limiterait les émissions de Co2 sur chaque automobile. Est-ce que les auditeurs de RMC sont prêts à sans doute payer un peu plus cher un véhicule, ou en cas à faire en sorte qu'on oblige tout constructeur automobile à limiter l'émission de CO2, c'est-à-dire ce qui contribue à ce réchauffement de la planète.
Q- Mais pourquoi toujours payer plus cher, on pourrait payer moins cher aussi...
R- Mais, à terme, on paierait moins cher en définitive. Il y aurait sans doute une adaptation. Encore qu'il y a la concurrence. Les constructeurs seraient peut-être les meilleurs pour essayer d'avoir les fabrications de moteurs les plus économes, les plus propres, les moins polluants. Donc, il faut laisser la concurrence jouer. Mais il faut une contrainte. S'il n'y a pas de contrainte, là, sur les constructeurs automobiles, ça continuera. Cela fait des années que j'entends qu'il faut limiter la production de Co2, cela fait des années que j'entends qu'il faut des carburants propres...
Q- C'est vrai. Mais je constate aussi que tous les politiques commencent à s'y mettre maintenant et commencent à parler d'environnement et d'écologie. Jusque-là, on en parlait mais enfin bon, au coin d'une table, quoi...
R- C'est plutôt bien qu'il y ait cette prise de conscience, que quand il y a des rapports, y compris faits par des experts britanniques, qui donnent des chiffres invraisemblables de coût pour la planète...
Q- 6.500 milliards !
R- ...on se dit qu'on ne peut pas continuer comme ça. Quand on a des signes tangibles, pas simplement l'été mais aussi l'hiver de réchauffement climatique, quand on sait que la couche glacière est en train de disparaître, oui, il y a intérêt peut-être à changer nos façons de faire, nos façons de produire, nos façons de consommer, et je pense que c'est pas simplement un problème de décision politique - à l'évidence, il fallait en prendre - c'est aussi un problème de comportement de chacun.
Q- J'ai une question : faut-il imposer par exemple, des normes écologiques avant de donner un permis de construire ?
R- Oui. Vous savez qu'aujourd'hui, les permis de construire sont encadrés, on voit que pour l'achat d'un appartement ou d'une maison, il faut faire maintenant un diagnostic thermique, pour éviter effectivement qu'on puisse mettre sur le marché ou qu'on puisse mettre à la vente des appartements ou des maisons qui soient ouverts à tous les vents, c'est le cas de le dire. Oui, il faut que tout constructeur, privé comme public, puisse imposer des normes environnementales.
Q- Puisqu'on parle d'écologie, parlons de N. Hulot : est-ce que sa candidature est nécessaire ? Est-ce qu'elle serait utile la candidature de N. Hulot à la présidentielle, franchement ?
R- Des candidatures, il y en a de nombreuses, et chacun avance une idée, une bonne raison pour être candidat. C'est quoi l'élection présidentielle ? C'est un grand débat, un grand forum où chacun va venir dire : voilà mon message ? Ou c'est le choix du futur président de la République pour la France ? Moi je réponds, très nettement : une élection présidentielle, c'est pour choisir le prochain chef de l'Etat, et puis après il y aura des élections législatives pour choisir une majorité pour le soutenir ou pour ne pas le soutenir. Alors, N. Hulot, moi je respecte parfaitement sa démarche ; je crois que justement sur toutes ces questions-là, il a tiré à bien des égards des sonnettes d'alarme. Mais il y a des candidats écolos, j'en connais déjà deux au moins. Enfin une, D. Voynet, qui est la candidate des Verts, qui je crois a une expérience, a des qualités...
Q- Elle est moins populaire.
R- Elle n'est pas populaire ou elle est moins populaire...
Q- Beaucoup moins même.
R- ...Mais elle ne passe pas à la télévision régulièrement, ce n'est pas une émission sur une grande chaîne d'information.
Q- Donc, ce ne serait pas utile cette candidature ? Oui ou non ?
R- Non, je crois qu'elle n'est pas utile, mais l'intervention de N. Hulot est nécessaire.
Q- Pour 66% des Français, elle est utile, vous avez vu...
R- Oui, mais on peut dire que c'est utile, on peut dire...
Q- Ce ne sont pas les citoyens qui gouvernent ?
R- Non, ce n'est pas ça que je veux dire. C'est eux qui votent. Donc, ça secoue à l'évidence le débat public, ça amène des idées je l'espère nouvelles. J'ai rencontré N. Hulot, c'était normal, il a rencontré l'ensemble des responsables politiques, et il m'a posé cette question : moi je vais faire des propositions dans un livre, eh bien vous allez réagir. J'ai trouvé que cette démarche était tout à fait correcte.
Q- C'est ce que nous faisons ici avec notre manifeste. D'ailleurs les auditeurs de RMC font des propositions...
R- Et puis après, il m'a dit : si je suis satisfait des propositions des uns et des autres, je considérerais que je n'ai pas à aller plus loin. Si je n'en suis pas satisfait - et là aussi je respecte ce choix - j'irais sans doute plus loin.
Q- Est-ce que les Français ont toujours raison ? Est-ce que vous trouveriez bien qu'un Français vienne siéger au Conseil des ministres ?
R- D'abord, répondons à la première question : les Français n'ont pas toujours raison. Mais en même temps, il faut toujours accepter le verdict électoral, le suffrage universel. On peut être battu, je l'ai été, on peut gagner, j'ai parfois gagné des élections, c'est la loi de la majorité qui s'applique. Mais ce n'est pas pour autant que l'on considère que c'était la bonne réponse, celle des Français. Deuxièmement, est-ce qu'il faut tirer au sort tel ou tel citoyen et l'envoyer au Conseil des ministres ? Je ne crois pas que ce soit la bonne manière. On peut réserver le Conseil des ministres à ceux qui ont vocation à décider, qui ont été nommés pour ça. Après, si on veut tirer au sort des citoyens pour les interroger sur telle ou telle proposition, oui, pourquoi pas.
Q- Est-ce que c'était maladroit de parler de jurys de citoyens ?
R- Non, ce n'était pas maladroit, au sens où c'est une proposition parmi d'autres. Je crois qu'il faut mettre cette proposition, si on veut l'avancer, dans un contexte plus global. Il y a une crise de la démocratie, incontestablement, quand on voit l'abstention, quand on voit les votes extrêmes, quand on voit la dispersion, on parlait des multiples candidatures... C'est que les citoyens ne sont pas satisfaits de ce qu'on leur présente. Donc, il faut en tenir compte. On ne peut pas dire : vous n'êtes pas satisfaits, eh bien ça va continuer comme ça. Donc, il y a une crise démocratique. Comment on y répond ? Par un changement des règles dans la démocratie. D'abord, la première démocratie, c'est la démocratie représentative, celle qui est issue des élections, du suffrage universel. Il faut renforcer le Parlement, il faut aller beaucoup plus loin dans la décentralisation, il faut supprimer le cumul des mandats, il faut avoir des élus à plein temps, il faut avoir aussi un statut des élus, c'est la première démocratie. La seconde démocratie, c'est la démocratie sociale : oui, il faut avoir des partenaires sociaux qui négocient, qui contractualisent, ils faut des syndicats reconnus dans les entreprises. Il faut que les accords entre les syndicats et le patronat puissent être transposés lorsqu'ils ont été adoptés avec une règle majoritaire. Il faut donc qu'on ait des acteurs sociaux vivants, c'est très important, des intermédiaires, sinon on a des assemblées générales, on a des coordinations, on a une frustration. Et puis la troisième démocratie, c'est la démocratie participative, alors là on peut imaginer des conseils de quartiers, des assemblées générales, des jurys de citoyens tirés au sort... Là, l'imagination est possible. Mais si on prend une mesure, seulement une mesure, on voit bien qu'on n'est pas à la hauteur de la crise que l'on traverse.
Q- Est-il vrai que vous avez donné des ordres aux élus socialistes de ne pas donner leurs parrainages à d'autres candidats venus d'ailleurs, c'est vrai ou pas ?
R- Oui, bien sûr que c'est vrai, je revendique cette position. Les élus socialistes, au moment où ils doivent faire un choix de parrainage, c'est-à-dire, permettre à une candidature d'exister valablement et pouvoir se présenter à l'élection présidentielle, ils doivent ne parrainer que le candidat ou la candidate socialiste, parce que sinon comment comprendre la vie politique. Alors, on me dira : oui, mais si cette directive est entendue par les élus socialistes, il y a un risque pour d'autres candidats de ne jamais pouvoir être candidats.
Q- Vous regretteriez que J.-M. Le Pen ne soit pas candidat ?
R- Mais je ne vais pas quand même donner les parrainages socialistes à J.-M. Le Pen ! D'abord, qu'est-ce qu'on penserait d'un parti de gauche qui donnerait un parrainage à un candidat d'extrême droite ? On me dira c'est la démocratie. Mais si J.-M. Le Pen peut trouver parmi les cinquante ou soixante mille parrains possibles, 500 c'est bien le moins. Deuxièmement, on me dit aussi : mais l'extrême gauche, est-ce qu'elle pourra se présenter ? Cela n'a jamais empêché A. Laguiller de se présenter depuis 1974. Donc, elle doit avoir des parrains ou des marraines. Moi, je veux être simple : qu'est-ce qu'on a vécu le 21 avril 2002 ? Une grave crise quand même : Le Pen au second tour, la gauche écartée, 16 candidats au premier tour. Je ne veux plus revivre cela. Donc, je dis qu'il y a un principe de responsabilité. Les socialistes doivent donner leurs parrainages uniquement aux socialistes, et faire que la gauche soit présente au second tour. Et victorieux, je l'espère.
Q- Nous allons revenir sur les débats au PS qui vont s'achever avant le 16 novembre. Mais revenons sur l'actualité avec la condamnation ou le verdict concernant Saddam Hussein. Faut-il pendre Saddam Hussein ?
R- Nous sommes, nous, conscients de tous les crimes qui ont été perpétrés par Saddam Hussein et sans autres formes de procès. On sait ce qui s'est passé, notamment dans certaines villes chiites à des moments particuliers de l'histoire irakienne. Donc, Saddam Hussein mérite la condamnation la plus ferme. Mais nous sommes aussi des militants de l'abolition de la peine, et donc, quand on est contre la peine de mort, cela vaut pour tous les criminels. C'est un principe fondamental. Donc, nous, nous disons : oui Saddam Hussein doit être condamné, il est condamné ; oui, Saddam Hussein doit être puni, oui Saddam Hussein doit rester sans doute enfermé jusqu'à la fin de ses jours. Mais nous sommes contre la peine de mort, que ce soit en France ou en Irak.
Q- Mais les Américains et les Irakiens vont vous rétorquer que c'est un tribunal irakien qui a jugé Saddam Hussein, et que l'Irak est un pays souverain.
R- C'est un fait, et j'admets cette souveraineté. Ils pourraient même nous faire une seconde remarque : c'est que nous, nous avons tué nos dictateurs. Laval a été mis sur le poteau d'exécution après la Seconde Guerre mondiale...
Q- Mais qu'aujourd'hui, on n'exécuterait pas Laval, ici en France ? Vous ne voteriez pas la peine de mort ?
Dès lors que la peine de mort a été abolie en France, comme partout en Europe, dois-je le rappeler, on n'exécuterait pas les pires dictateurs.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 novembre 2006