Déclaration de Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, sur la prévention et la répression des violences au sein des couples, Paris le 5 décembre 2006.

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Circonstance : Réunion de la Commission nationale contre les les violences envers les femmes à Paris le 5 décembre 2006

Texte intégral

Vous connaissez ma détermination et celle de l'ensemble du Gouvernement à combattre le fléau des violences contre les femmes.
J'ai souhaité que la Commission nationale contre les violences envers les femmes soit réunie une seconde fois cette année car elle joue, en tant qu'instance d'observation, de réflexion et de proposition, un rôle essentiel dans notre action.
Je veux que nous maintenions notre mobilisation et que nous poursuivions le travail engagé.
Les récentes informations recueillies par le Ministère de l'intérieur montrent qu'au cours des neuf premiers mois de l'année 2006 une femme est morte tous les trois jours victime de violences conjugales.
La connaissance de ces violences est un facteur essentiel de prise de conscience, de sensibilisation et d'efficacité des réponses apportées. C'est pourquoi j'ai aussi demandé à ce que soit réalisée une étude évaluant les répercussions économiques des violences au sein du couple en France.
Cette étude, dont les principaux résultats vous ont été présentés aujourd'hui, estime le coût lié aux violences conjugales à plus d'un milliard d'euros au minimum. C'est une raison supplémentaire pour apporter une réponse forte et déterminée à ces violences.
I. Depuis l'adoption du plan triennal, j'ai encore renforcé notre mobilisation.
La loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein d'un couple ou commises contre les mineurs apporte des avancées importantes :
- elle élargit le champ d'application de la circonstance aggravante, qui accroît les sanctions, à de nouveaux auteurs - pacsés et ex-conjoints - et à de nouvelles infractions - meurtres, viols, agressions sexuelles ;
- elle fait du respect un nouveau devoir conjugal et reconnait la notion de viol entre époux ;
- elle fait aussi passer l'âge nubile des filles de 16 à 18 ans, ce qui permettra de lutter plus efficacement contre les mariages forcés.
Les partenaires sociaux ont introduit une disposition fondamentale dans la nouvelle convention d'assurance chômage pour les femmes victimes de violences.
Désormais, une femme qui quitte son domicile à la suite de violences et doit démissionner de son emploi pourra bénéficier de l'assurance chômage. Elle ne sera donc plus dans une situation aussi précaire qu'avant.
L'accueil, l'écoute et le traitement judiciaire des personnes victimes de violences au sein du couple ont été améliorés :
- Le Garde des Sceaux a recommandé aux autorités judiciaires un traitement des procédures en temps réel.
- Des permanences d'associations d'aide aux victimes et des intervenants sociaux sont désormais présents dans les services de police ou de gendarmerie ; la formation, initiale et continue, des personnels de ses services sur ces questions est renforcée.
Parallèlement à ces actions nationales, il convient de saluer les nombreuses initiatives qui sont menées au niveau local.
L'action de sensibilisation des médecins généralistes organisée dans le département du Lot-et-Garonne, qui vous a été présentée aujourd'hui, en est une bonne illustration.
II. Pour autant, et malgré ces progrès accomplis, l'ampleur de ces violences nécessite de poursuivre et d'amplifier notre effort.
Certains auraient souhaité une loi intégrale contre les violences exercées à l'encontre des femmes, à l'exemple de celle adoptée en juillet 2003 en Espagne.
Une telle loi, si elle était utile en Espagne, ne me semble pas constituer une réponse adaptée chez nous.
Le dispositif législatif existe déjà en France, il convient désormais de le faire connaître. C'est pourquoi j'ai proposé au Premier Ministre d'éditer un code des droits des femmes afin que chacune des femmes de notre pays puisse connaître les règles qui la protègent.
Dans notre lutte, l'accent doit être mis sur une approche multidisciplinaire et partenariale. Un travail en réseau est essentiel.
C'est la raison pour laquelle j'ai donné une impulsion nouvelle à notre action en annonçant, à l'occasion de la Journée du 25 novembre, un train de mesures spécifiques répondant à des besoins concrets et vitaux des victimes de violences.
1) Comme je m'y étais engagée lors de la dernière réunion de la Commission nationale contre les violences envers les femmes, j'ai veillé à ce que la question des enfants témoins de violences conjugales soit intégrée dans les travaux de la réforme de la protection de l'enfance, car ces enfants en sont pour la plupart des victimes indirectes. 10 enfants sont morts depuis le début de l'année suite à des violences conjugales.
J'ai demandé à ce qu'une collaboration soit développée sur cet aspect avec l'Observatoire national de l'enfance en danger.
2) Dans la continuité des travaux présidés par le docteur COUTANCEAU, un groupe de travail a été mis en place en juillet dernier.
Il est composé de représentants des ministères de l'intérieur, de la justice, de la santé et de la cohésion sociale ainsi que de personnes qualifiées, dont Madame Annie Guilberteau, membre de cette Commission.
Sa première mission est d'évaluer les progrès réalisés et l'efficience des dispositifs existants en matière de prise en charge et de suivi des hommes auteurs de violence.
Ce groupe, qui a déjà recensé une soixantaine de structures de soin et d'hébergement pour les auteurs de violences, va désormais s'attacher à définir un dispositif global d'intervention auprès des auteurs de violences.
Un protocole de bonnes pratiques sera ainsi réalisé en 2007, afin de susciter la création de nouvelles structures prenant en charge les auteurs de violences et de les fédérer autour d'une pratique professionnelle commune.
3) Plusieurs mesures visant à faciliter l'hébergement et le relogement des femmes victimes de violences seront prises dans le courant de l'année 2007.
Les femmes victimes de violences seront prioritaires pour l'attribution des logements financés par l'allocation de logement temporaire - 19 500 logements budgétés en 2007 et pourront bénéficier de logements meublés à proximité d'un CHRS ou répartis dans le parc locatif. Les femmes victimes de violences figurent par ailleurs parmi les publics concernés par la création des 600 places de CHRS prévues pour 2007.
D'autres difficultés rencontrées par les femmes victimes de violences en matière de logement doivent trouver une solution. Des représentants de la Direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction vous ont présenté les mesures que j'ai décidé de mettre en oeuvre à cet effet, dont l'assouplissement de la clause de solidarité contenue dans le bail lorsque la victime quitte le domicile commun et souhaite donner congé au bailleur.
La réglementation sera également modifiée pour que, en cas de demande de divorce, seuls les revenus du conjoint faisant effectivement acte de candidature soient pris en compte pour l'attribution d'un logement social.
4) Le premier accueil des femmes victimes de violences sera également amélioré, par la mise en place dès 2007d'un numéro d'appel unique, facile à retenir et de faible coût. Il n'est pas question de remettre en cause le travail associatif effectué au sein des permanences téléphoniques existantes mais, au contraire, d'en tirer le meilleur bénéfice pour les femmes victimes de violences.
Nous veillerons biens sûr à ce que le nouveau dispositif puisse faire face à l'augmentation du nombre d'appels que suscitera un numéro très identifiable, facile à mémoriser et à coût réduit.
Les frais supplémentaires engagés pour la mise en place de ce dispositif seront supportés par mon ministère dans l'enveloppe 2007 dédiée aux violences conjugales.
Sur ce sujet, je tiens à remercier Madame Mercier et Madame Clamens, respectivement Présidente et Directrice générale de la Fédération Nationale Solidarité Femmes (présentes ici), d'avoir participé à cette démarche, qui représente une avancée utile pour les femmes victimes de violences.
5) Une campagne sur les violences au sein du couple, constituée d'une dizaine de courts-métrages d'auteurs et de cinéastes reconnus, a débuté le 25 novembre dernier.
Ces courts-métrages traitent notamment des conséquences des violences sur les femmes enceintes et les enfants ou bien encore des répercussions dans le travail.
Ils sont diffusés à la télévision, dans les salles de cinéma, dans les festivals français et étrangers et distribués sous la forme d'un DVD. Emmanuelle MILLET, l'une des réalisatrices, vous a présenté sa démarche.
Je souhaite que les travaux de la Commission nationale contre les violences envers les femmes viennent conforter l'ensemble de ces actions : notre partenariat est essentiel pour amplifier notre action et améliorer constamment nos dispositifs de prévention et de lutte contre ces violences.Source http://www.femmes-egalite.gouv.fr, le 6 décembre 2006