Déclaration de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, sur les relations entre la France et la Catalogne espagnole dans le cadre de l'Union européenne, à Barcelone le 21 décembre 2006.

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Circonstance : Déplacement en Espagne-remise du prix "Pyrenées" 2006 de la chambre de commerce et d'industrie française de Barcelone, à Barcelone le 21 décembre 2006

Texte intégral


Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
C'est un grand plaisir pour moi d'être présente à Barcelone ce soir pour la remise du prix des Pyrénées 2006. Il a été attribué à Abertis, une grande entreprise catalane, espagnole et européenne. A travers elle, c'est aussi un hommage rendu au dynamisme de la Catalogne, qui suscite tant d'intérêt et d'admiration en France. Grâce à la Chambre de commerce et d'industrie française de Barcelone, c'est enfin la contribution des Français et de leurs entreprises à cette réussite exceptionnelle de l'économie catalane que je veux honorer.
Je l'ai dit, avant de vous rejoindre ce soir, au président Montilla à qui j'ai présenté les félicitations officielles du gouvernement français pour sa récente élection à la tête de la Généralité : la France entend être le partenaire de référence de la Catalogne, et cela dans tous les domaines. Nous savons ce que cela suppose de conviction, de volontarisme et de sens de l'action, pour nouer des partenariats avec une Catalogne dont le succès suscite de très nombreuses vocations, en Europe et au-delà.
Nous savons que nous disposons ici d'un fond de sympathie réel. La Chambre de commerce et d'industrie française de Barcelone, fondée en 1883, doyenne des Chambres françaises en Europe, en constitue une vivante illustration.
Je tiens à saluer son président, Gérard Lheure, et son directeur général, Philippe Saman, mais aussi, au-delà de ces deux personnes, toutes les entreprises, françaises et catalanes, qui font vivre cette institution dans l'échange entre nous.
Ce fond de sympathie, nous l'entretenons aussi grâce à ces Français qui sont de plus en plus nombreux, depuis près de dix ans, à venir s'installer en Catalogne pour y vivre et y travailler. Ils sont probablement plus de 30.000, aujourd'hui installés ici et heureux, je crois, de ce choix.
Je saisis d'ailleurs l'occasion qui m'est donnée ce soir, à la fin de l'année 2006, de convier ces Français de Catalogne à s'inscrire sur les listes électorales du consulat général de France à Barcelone, au plus tard le 30 de ce mois de décembre 2006, pour participer à l'élection présidentielle française de 2007 dans les bureaux de vote qui seront installés à Barcelone et à Gérone, grâce à l'appui des autorités locales que je remercie de leur soutien.
Cette sympathie naturelle qui nous unit vient aussi de la frontière commune, des liens culturels et linguistiques entre Catalans espagnols et français, ou des nombreuses initiatives prises pour la coopération trans-frontalière, notamment par la ville de Perpignan et le département des Pyrénées orientales.
Mais il nous faut aujourd'hui aller au-delà. Nous avons la volonté de nouer des partenariats dans tous les domaines susceptibles de nous mettre en situation d'affronter ensemble les défis de la mondialisation. Ils sont nombreux et je voudrais vous en dire quelques mots.
L'adaptation de l'Europe aux nouveaux enjeux de la mondialisation est une question décisive pour la pérennité de notre modèle économique et social. Elle engage notre avenir à très court terme. Là réside aujourd'hui l'enjeu majeur de la construction européenne. Car, dans un monde aux évolutions rapides, très rapides, nous devons tirer le meilleur parti de l'Europe pour nous adapter, mais aussi pour nous protéger là où c'est nécessaire. Et je le dis souvent, l'Europe doit apprendre à devenir un acteur global dans la mondialisation. Nous devons apporter aux citoyens la preuve que l'Europe n'est pas une belle idée seulement, une "belle endormie", mais qu'elle possède aussi une capacité de réaction rapide face aux défis économiques et sociaux aujourd'hui :
- je pense d'abord au puissant effet structurant de l'arrivée du TGV en 2009, qui reliera Perpignan à Barcelone. Je souhaite que les acteurs publics et privés multiplient les occasions d'échanges des deux côtés de la frontière pour se préparer comme il convient aux effets de l'arrivée du TGV sur la création d'entreprises, sur les transports, sur le marché de l'immobilier, sur la culture, sur l'environnement, sur les échanges humains, etc ;
- je pense aussi aux politiques de recherche et d'innovation, qui constituent une priorité absolue des gouvernements français, espagnol et catalan. Le gouvernement français souhaite encourager les partenariats dans ce domaine, notamment à travers les pôles de compétitivité, par exemple dans les secteurs de la santé, des biotechnologies, de l'aéronautique, des nanotechnologies, autant de domaines où la Catalogne et ses entreprises excellent et où la France est disponible, je le disais tout à l'heure au président Montilla, pour nouer des actions communes de nature à relever notre niveau de développement technologique ;
- l'immigration est aussi un défi commun. Elle est largement vue ici comme une chance, une contribution à la croissance et à l'emploi. La France a, vous le savez, une longue histoire d'immigration et d'intégration. Cette histoire se poursuit aujourd'hui, avec des difficultés que personne ne peut nier, mais aussi avec des succès partout, y compris dans les banlieues, succès trop mal connus pourtant et dont nous devrions parler davantage. Le gouvernement a la volonté de continuer à agir résolument pour l'égalité des chances, l'emploi, le logement, la solidarité, et contre les discriminations. Sur toutes ces questions qui relèvent de politique de la ville, de l'intégration, de l'immigration, de la jeunesse, je souhaite encourager les échanges entre Français et Catalans, dans une perspective européenne, entre les élus, les responsables administratifs et universitaires notamment. L'Institut français de Barcelone sera le pivot de ces initiatives avec nos interlocuteurs catalans à compter de l'automne 2007, vous le savez.
Le gouvernement français souhaite aussi travailler avec la généralité de Catalogne, mais aussi avec l'ensemble des acteurs, publics et privés, pour développer ici la langue française. J'ai fait part au président Montilla, tout à l'heure, de notre volonté de mettre en place ensemble les moyens permettant de progresser et de faire réellement du français la quatrième langue des Catalans, dans le cadre du plurilinguisme. Le français est traditionnellement ici une langue de culture et d'échanges entre les hommes. Elle doit continuer à l'être. Elle est aussi, notamment en raison de la proximité de la frontière, du nombre des entreprises françaises présentes en Catalogne, des liens commerciaux tissés avec des pays francophones d'Europe mais aussi du pourtour sud de la Méditerranée, une langue de travail, notamment pour les entreprises. On voit beaucoup d'illustrations de cette utilité du plurilinguisme et de la langue française, pour le tourisme ou l'accueil des migrants francophones, par exemple, au-delà de l'absolue nécessité de préserver la diversité, dans une démarche d'ouverture et de tolérance. Pour cela aussi, le gouvernement français est ici à l'écoute, mobilisé, volontariste, auprès des pouvoirs publics comme des entreprises, aidé dans sa tâche par notre ambassade et notre Consulat général. Je tiens à saluer la présence et l'action remarquable menée par notre ambassadeur et notre consul général.
Je suis venue à Barcelone vous confirmer la volonté de la France d'être le partenaire de référence de nos voisins et amis catalans ; dans le respect des différences ; dans la volonté commune de faire face aux défis de la mondialisation. Je l'ai dit au Président de la Généralité, je vous le dis aussi ce soir.
C'est pourquoi je suis heureuse de remettre le Prix Pyrénées de la Chambre de commerce et d'industrie de Barcelone à Abertis. Ce prix est, depuis sa création, l'affirmation d'une volonté de vivre et de travailler ensemble. Il fut attribué dans le passé à de grandes personnalités, à commencer par le président Jordi Pujol, et à de grandes entreprises.
Abertis est aujourd'hui la meilleure illustration du dynamisme et des succès de l'économie catalane. Par ses dimensions, elle incarne l'ouverture de la Catalogne sur le monde, si consubstantielle à l'identité catalane, à l'heure de la mondialisation. Elle est aussi un acteur européen majeur. En France, Abertis est présente, notamment dans le secteur autoroutier. En Europe, elle se positionne comme un important acteur du marché des télécommunications et des satellites. A l'heure ou nous mettons en place GALILEO, je suis particulièrement heureuse de pouvoir compter sur Abertis pour la réalisation de ce projet qui est l'un des projets emblématiques d'une Europe en marche.
Nous savons que l'Europe passe par une période de doutes, d'interrogations. Les Français l'ont dit, comme les Néerlandais, à leur manière, à l'occasion du référendum sur le projet de traité constitutionnel. Mais partout en Europe, l'envie d'Europe reste puissante. Le gouvernement français est tourné, avec ses partenaires, vers la recherche des moyens permettant de faire progresser le projet européen, de relancer l'Europe. Ce fut notamment la dominante du récent sommet franco-espagnol de Gérone, pendant lequel le président de la République et le président Zapatero ont, sur le sol catalan, rappelé la contribution décisive de nos deux pays à la relance de l'Europe et ont fait part de leurs espoirs et de leurs ambitions.
Depuis bientôt 50 ans, l'Europe est un remarquable succès. Elle s'est construite pour ancrer la paix et la démocratie sur un continent qui a connu bien d'autres expériences. Aujourd'hui, les peuples européens considèrent ces biens comme naturels et ont tendance à les tenir pour choses acquises. Il ne faut jamais oublier ces objectifs fondamentaux de l'Europe ainsi que cette réussite, mais il faut en ajouter d'autres. Pour renouveler le pacte qui nous lie au projet collectif européen, il faut donc lui assigner de nouvelles finalités qui répondent aux aspirations profondes des peuples dans le monde d'aujourd'hui et cette dimension nouvelle doit être de faire de l'Union européenne un acteur global dans le monde de demain.
Elle doit maintenant renforcer sa présence, ses moyens et sa capacité d'action collective pour mieux nous préparer aux enjeux économiques et sociaux de cette mutation fondamentale du monde. D'ailleurs, c'est ma conviction que l'année 2007 sera largement déterminée par ces questions et que les thèmes de l'Europe et de la mondialisation seront présents au coeur du débat européen, car les réponses à apporter aux grandes évolutions économiques intègrent nécessairement la dimension européenne. Il n'y a pas un sujet, un enjeu que l'un de nos Etats puisse relever seul.
Les gouvernements prennent et prendront leurs responsabilités, comme le fait le gouvernement français. Mais l'action de tous est décisive, et notamment celle des entreprises, même si elles peuvent parfois être confrontées aux décisions des Etats ou de l'Union. Cette mobilisation des entreprises est essentielle pour nous faire avancer et faire avancer l'Europe de l'emploi au travers de projets aussi indispensables et symboliques que peut l'être GALILEO.
Pour toutes ces raisons, je félicite à nouveau Abertis pour ce 7ème Prix Pyrénées que j'ai eu l'honneur de lui remettre.
Je vous remercie et je vous souhaite de très joyeuses fêtes de Noël et une heureuse année 2007.source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 27 décembre 2006