Texte intégral
Je suis heureux de vous rencontrer aujourd'hui pour vous présenter l'exécution du budget de l'État à la fin de l'exercice 2006.
Nous avons clôturé nos comptes vendredi soir : nous sommes donc quasiment en temps réel, et vous savez que j'ai toujours tenu à informer les Français de la situation des comptes dès que j'en dispose ; c'est le meilleur moyen d'éviter de mauvaises polémiques.
Avant d'entrer dans le détail des chiffres, je voulais simplement souligner combien notre rendez-vous ce matin constitue pour moi un moment très important :
D'abord, par ce qu'en prenant mes fonctions comme ministre du Budget il y a maintenant un peu plus de deux ans, je m'étais fixé une double exigence :
- tenir les comptes,
- rendre des comptes.
Et pour moi, rendre des comptes, ce n'est pas un mot en l'air : comme pour les entreprises, c'est bien la clôture des comptes qui permet de juger des résultats et des performances que l'on réalise.
Mais aussi parce que l'année dont nous allons parler est la dernière année budgétaire qui aura été exécutée entièrement par l'actuelle législature. C'est donc avant tout sur la base de ces résultats que les Français pourront juger de la crédibilité de nos engagements pour l'avenir en matière de finances publiques et de fiscalité.
I - Une année budgétaire exceptionnelle sur tous les plans
1) Un solde budgétaire en amélioration de 7,3Md euros par rapport à 2005 et de près de 11 Md euros par rapport à la LFI
Mettons fin tout de suite à ce suspens intolérable, voici le chiffre que vous attendez tous : le solde budgétaire pour 2006 s'établit à 36,16 Md euros, hors mesure de régularisation relative aux pensions.
En effet, conformément aux recommandations de la Cour des comptes et aux dispositions de la loi de finances rectificative, l'exécution 2006 inclut une mesure d'ordre de 3,3Md euros destinée à régulariser le mode de comptabilisation des pensions qui étaient depuis 1987 imputées avec un mois de décalage. Retraité de cette opération purement comptable sans impact sur les déficits publics, le solde budgétaire s'établit précisément à 36,161 Md euros
Le déficit s'inscrit donc en amélioration de 10,8 Md euros par rapport à la prévision initiale du budget 2006 (46,9 Md euros) et de 6,3 Md euros par rapport à la dernière prévision du collectif (42,4 Md euros). Je reviendrai tout à l'heure sur les facteurs expliquant cette amélioration.
Je voudrais auparavant mettre en perspective ce résultat exceptionnel, qui constitue une avancée majeure dans la voie du désendettement. En effet, un déficit ramené à 36,2 Md euros, cela signifie :
- qu'en trois ans (2003-2006), nous aurons diminué le déficit de près de 21 Md euros. C'est une performance absolument inégalée dans notre histoire budgétaire ;
- que rapporté à la richesse nationale, c'est-à-dire au PIB, le déficit de l'État est ramené à 2 % du PIB. C'est la meilleure performance depuis 15 ans, à l'exception de l'année 2000, lorsque la croissance mondiale atteignait des niveaux records sous l'effet de la bulle internet, et avant que les socialistes ne gaspillent ces résultats ;
- que désormais, ce que les techniciens appellent le solde primaire (c'est-à-dire le solde budgétaire hors charges d'intérêt de la dette) est excédentaire. Concrètement, cela signifie que l'on sort de cette situation absurde où l'État s'endettait simplement pour pouvoir payer les intérêts de sa dette passée ;
- qu'enfin, que le déficit de l'État est également revenu au niveau du « solde stabilisant », c'est-à-dire au niveau qui permet de stabiliser le poids de la dette dans le PIB. Ce n'était arrivé qu'une seule fois pour l'État dans les 25 dernières années (en 2000).
Tout ceci montre bien le chemin parcouru.
Mais ce résultat n'est pas le fruit du hasard. C'est la conséquence de la politique économique et budgétaire menée avec constance par ce gouvernement sous l'autorité de D. de Villepin, reposant sur :
- un effort continu de maîtrise de la dépense ;
- une politique économique favorable à la croissance, et donc génératrice de recettes.
2) Des dépenses une nouvelle fois maîtrisées
Pour la quatrième année consécutive, le plafond de dépenses voté par le Parlement a été strictement respecté, et les dépenses ne progressent pas plus vite que l'inflation. Pour être tout à fait exact, nous nous situons 28 M euros en dessous du plafond voté.
Ceci est d'autant plus important, que cet objectif est atteint tout en respectant deux objectifs majeurs :
- le financement intégral de nos priorités, en particulier toutes nos lois de programme, qu'il s'agisse de la sécurité intérieure, de la justice ou de la recherche. Un exemple : la loi de programmation militaire : elle a toujours été intégralement respectée en budgétisation, mais la consommation des crédits avait pris un peu de retard au démarrage ; ce retard se résorbe, avec en 2006 la consommation de 400 M euros de reports au-delà des crédits de LFI ;
- l'assainissement de la situation budgétaire, avec la poursuite de la réduction de la bulle des reports, dont l'accumulation au cours de la législature précédente faisait peser une épée de Damoclès sur la maîtrise des dépenses et perturbait gestion. En s'interdisant toute ouverture de crédits non gagée en collectif, et en appliquant strictement les règles de la LOLF relatives aux reports, nous avons assaini la situation. Les reports de crédits sur 2007 devraient ainsi être limitées à environ 4 Md euros. Ils s'élevaient à 14 Md euros en 2002 !
Tout ceci n'est possible qu'en cherchant en permanence à dégager des marges de manoeuvre.
En particulier, nous avons su collectivement, avec les ministères gestionnaires, tirer parti des possibilités nouvelles de la LOLF. Car 2006 est aussi la première année de mise en oeuvre de la LOLF. Et de ce point de vue aussi, je crois que c'est un succès : quelques difficultés sont apparues en début d'année, notamment dans la mise à disponibilité des crédits, et c'est bien naturel à l'allumage d'une réforme d'une telle ampleur. J'ai d'ailleurs donné les consignes pour que les budgets opérationnels de programme puissent être approuvés en tout début d'année pour 2007.
Mais ce que je retiens avant tout, c'est le succès des nouveaux outils mis au service d'une gestion plus efficace :
- les nouvelles modalités de mise en réserve de crédits ont parfaitement répondu aux attentes, en permettant d'associer le Parlement en toute transparence tout en donnant aux ministères la visibilité nécessaire sur les crédits dont ils disposent. Ce dispositif a ainsi permis de faire face aux imprévus survenus en cours de gestion (je pense aux crises sanitaires par exemple) tout en respectant nos objectifs de dépenses ;
- les ministères se sont totalement appropriés les souplesses nouvelles apportées par la LOLF dans la gestion de leurs crédits, au service des objectifs dont ils doivent désormais rendre compte. Les ministères ont ainsi pu financer la plupart des besoins apparus en cours de gestion par redéploiement au sein des programmes. Des marges sont apparues en gestion sur la masse salariale, liées pour partie aux efforts de gestion réalisés par les ministères à travers une plus grande adaptation des recrutements aux besoins et un accroissement de l'efficacité des services grâce aux audits. Elles ont pu être mobilisées par les ministères au service de leurs priorités, grâce au jeu de la « fongibilité asymétrique », [utilisée à hauteur de 388 M euros]. En 2007, 50 % des marges ainsi dégagées (soit 600 M euros) sont mobilisées en faveur de la revalorisation additionnelle de 0,3 point des fonctionnaires, conformément aux engagements pris.
- Enfin, avec la LOLF, l'État est devenu une maison de verre, et les administrations doivent désormais rendre compte précisément de leur gestion. Je ne peux aujourd'hui que vous rendre compte à grands traits des résultats de l'exécution. Mais nous avons dans les prochains mois un rendez-vous important : celui de la loi de règlement et des rapports annuels de performance que l'ensemble des ministères remettront au plus tard fin mai. Ce sera l'occasion pour les ministères d'analyser dans le détail la gestion de leurs moyens et les facteurs explicatifs des marges observées en gestion, mais aussi de rendre compte de leur performance au regard des objectifs qui avaient été fixée par le Parlement.
3) Des plus-values de recettes exceptionnelles
Les recettes fiscales s'inscrivent en amélioration de 10,2 Md euros par rapport à la loi de finances initiale et de 5,3 Md euros par rapport au collectif.
L'impôt sur le revenu est en progression de 1,1 Md euros par rapport à l'estimation de LFI. Cela tient à la fois à la progression des revenus des Français, traduction de la progression de l'emploi et du pouvoir d'achat en 2005, et de l'amélioration du recouvrement sous l'effet de la modernisation continue de notre service public fiscal. Je pense en particulier au succès de la télédéclaration. Rappelons qu'en 2006, 5,7 millions de Français soit près de 20 % des contribuables, ont opté pour la déclaration en ligne ; c'est 2 millions de plus qu'en 2005. L'effet de l'amélioration du recouvrement est estimé à 350 M euros, grâce notamment au développement des paiements dématérialisés (mensualisation, prélèvement à l'échéance, paiement en ligne) qui atteignent désormais 73 %.
La TVA, en plus-value de 1,4Md euros par rapport au budget initial mais en ligne avec la prévision du collectif, illustre la bonne tenue de la consommation des Français.
L'impôt sur les sociétés s'inscrit en plus-value de 6,4 Md euros par rapport à la loi de finances initiale, et de 3,7 Md euros par rapport au collectif. C'est d'abord la conséquence de la bonne santé de nos entreprises et donc de leur capacité à investir et créer de la richesse. C'est également pour partie l'effet des mesures prises pour moderniser le recouvrement de l'IS et faire en sorte qu'il reflète mieux les évolutions économiques. Coupons court aux polémiques : le rendement de la mesure de relèvement des seuils de versement de l'acompte exceptionnel adoptée en collectif 2006, qui avait été évalué à l'époque à 500 M euros, est d'environ 1 Md euros.
Les impôts assis les actifs ont connu cette année encore des progressions importantes, qu'il s'agisse des donations (+500 M euros) ou de l'ISF (+450 M euros), en lien avec les évolutions constatées sur les marchés immobiliers et financiers.
À l'inverse, la TIPP s'inscrit en moins-value de 500 M euros, sous l'effet d'une consommation de carburant plus modérée que prévu en réponse au renchérissement des prix.
Pour le reste, les recettes non fiscales et les prélèvements au profit de l'Union européenne et des collectivités locales sont en ligne avec les prévisions du collectif. Notons toutefois le dynamisme particulier des prélèvements au profit des collectivités locales, en accroissement de 800 M euros par rapport au budget initial sous l'effet de la progression du Fonds départemental de mobilisation pour l'insertion et du FCTVA, porté par le dynamisme de l'investissement des collectivités locales.
Le solde des comptes spéciaux est en amélioration d'1 Md euros, sous l'effet notamment du niveau record des cessions immobilières : 800 M euros, pour un objectif qui était fixé à 480M euros. On voit là que la réforme de la gestion de l'immobilier de l'État est désormais ancrée dans la réalité : elle ne se résume pas à vendre des immeubles parisiens mais touche maintenant toutes les administrations sur l'ensemble du territoire.
II - Ces résultats, ils ne tombent pas du ciel ! Si nous avons réussi a les obtenir, c'est grâce a la stratégie mise en oeuvre qui a porté ses fruits
Il n'y a pas de miracle : même si nous avons tous été surpris par l'ampleur des plus-values d'IS, tout ceci est d'abord le résultat d'une politique économique et budgétaire qui, en libérant le travail et les énergies, est au service de la croissance et du redressement de nos finances publiques.
Cette politique, elle repose sur trois piliers :
1/ On a tenu les dépenses. Pendant trois ans, nous avons maintenu la progression des dépenses au niveau de l'inflation. La maîtrise des dépenses repose aussi sur un certain nombre d'outils développés ces dernières années. Je pense bien sûr aux outils de la LOLF, au virus de la performance qu'elle a inoculée. Je pense également aux audits, désormais entrés dans les moeurs et qui se poursuivent au rythme d'une vague toutes les deux mois.
Ces audits nous permettent maintenant de passer à a vitesse supérieure, avec une diminution de 1 point en volume dès 2007. C'est je crois un acquis majeur de cette législature ; je lancerai d'ailleurs la semaine prochaine une nouvelle vague. Plus généralement, c'est une attitude totalement nouvelle que nous adoptons, qui consiste à avoir les yeux rivés sur l'étranger pour s'inspirer des meilleures pratiques.
2/ Nous avons affecté l'intégralité des plus-values de recettes au désendettement. La LOLF nous invite désormais à prévoir à l'avance l'affectation des éventuelles plus-values de recettes. Avec le Parlement, nous avons fait le choix d'une affectation intégrale à la réduction du déficit. C'est un choix de bon sens quand on voit la situation dégradée d'où l'on part.
3/ Nous avons mis en oeuvre une politique fiscale dynamique qui a été payante.
Si nous avons baissé les impôts depuis 2002, ce n'est pas par idéologie, c'est avant tout parce que nous avons souhaité faire de la politique fiscale l'un des leviers majeurs d'une politique économique entièrement tournée vers l'emploi et le pouvoir d'achat :
- quand on crée le CNE et qu'on augmente la prime pour l'emploi, on facilite les embauches pour les employeurs et on augmente l'écart entre les revenus de l'activité et ceux de l'assistance : le résultat, c'est une accélération des créations d'emplois dans le secteur privé et une baisse du chômage (8,7 %) ;
- quand on baisse l'impôt sur le revenu, on restitue aux Français le fruit de leur travail qu'ils peuvent utiliser pour consommer : d'où les bonnes rentrées de TVA ;
- enfin, lorsqu'on améliore l'environnement fiscal de nos entreprises, on leur permet d'être plus compétitives ce qui se traduit par de meilleurs résultats financiers ce dont témoignent les excellentes rentrées d'IS.
La réforme fiscale qui entre en vigueur cette année nous permet de franchir une nouvelle étape.
Cette réforme, je l'ai bâtie sur deux mots-clés : attractivité, justice.
- Attractivité : non seulement nous allégeons l'IR de 4 milliards d'euros, mais nous simplifions en profondeur le barème pour le rendre plus lisible et plus attractif à travers :
- une réduction du nombre de tranches de 7 à 5,
- l'intégration de l'abattement de 20 % dans le barème,
- la fixation d'un taux maximum à 40 % qui nous remet aux standards européen et même un peu mieux !
Enfin, l'attractivité, c'est aussi l'instauration d'un bouclier fiscal à 60 %, pour mettre fin à l'impôt confiscatoire
- Mais l'attractivité ne va pas sans la justice :
- nous concentrons 80 % de la baisse d'impôt sur les personnes dont les revenus sont compris entre 1 000 et 3 500 euros par mois, et la réforme ne fait aucun perdant !
- nous augmentons la prime pour l'emploi pour faire en sorte que les revenus du travail soient supérieurs à ceux de la solidarité : 9 millions de personnes bénéficieront ainsi de l'équivalent d'un 13e mois en 2007.
- enfin, je rappelle que 90 % des bénéficiaires du bouclier fiscal se situent dans le 1er décile de l'impôt sur le revenu.
Vous l'avez compris, à mes yeux la politique fiscale n'est pas un outil qui doit conduire à comparer, à juger et même à punir : c'est un outil qui doit mettre l'économie en mouvement, respecter la liberté de choix des Français, leur permettre de donner le meilleur d'eux-mêmes.
Et le moins que l'on puisse dire, c'est que grâce au chemin parcouru, notre famille politique est capable d'assumer pleinement ses convictions dans ce domaine, loin de la dissimulation ou du double langage auxquels certains, à gauche, nous ont habitué depuis plusieurs mois :
- oui, nous croyons qu'il est possible de réduire en même temps les impôts et les déficits. Car baisser les impôts, c'est restituer aux Français le fruit de leur travail et les encourager à travailler plus. Et lorsqu'on travaille plus, on augmente la richesse produite dans l'économie et cela génère en retour des recettes supplémentaires. Le dynamisme de l'impôt sur le revenu, au cours de ces dernières années en sont d'ailleurs de bons exemples ;
- oui, nous croyons qu'il est possible et même indispensable de maîtriser les dépenses tout en continuant à améliorer la qualité des services publics. Car dire le contraire, c'est en réalité mépriser la capacité des agents et des usagers à se saisir des nouvelles technologies pour réaliser des gains de productivité.
Je ne voudrais pas conclure cette présentation sans vous dire qu'à mes yeux, ces résultats nous donnent évidemment de solides arguments pour parler d'avenir aux Français.
Les résultats du côté de l'État sont bons. Mais nous ne pouvons évidemment en rester là. Il faudra aller plus loin.
D'abord, je veux lire dans ces résultats les premiers indices que nos objectifs pour l'ensemble des finances publiques (un déficit public ramené à 2,7 % en 2006, une dette publique en diminution de 2 points de PIB) seront tenus, et même peut être au-delà.
Au-delà, l'engagement national de désendettement présenté par le Premier ministre en juin dernier a clairement tracé l'objectif de retour à l'équilibre de nos finances publiques.
- Le budget 2007 marque une première étape : c'est l'année de mise en oeuvre de la réforme fiscale, dont les Français ont déjà pu mesurer les premiers effets en recevant leurs mensualités d'impôt sur le revenu. C'est également la première année de réduction des dépenses en volume.
L'objectif est bien de tendre dans les années qui suivent vers une stabilisation des dépenses en valeur, grâce à la mise en oeuvre des audits. Ceux-ci ont déjà permis d'identifier plus de 3 Md euros de marges de productivité. La poursuite de cette démarche en 2007 et 2008 devrait permettre d'identifier au total 6 à 7 Md euros de gisements potentiels d'économies.
- Cette démarche concerne également les autres acteurs de la dépense publique :
- les collectivités locales : il nous faut en effet essayer de refonder le contrat avec les collectivités locales, et étudier avec elles les moyens d'une plus grande maîtrise de la dépense locale ; le rapport rendu par Pierre Richard contient à cet égard des pistes intéressantes.
- la sécurité sociale : qu'il s'agisse du retour à l'équilibre en 2009, du rendez-vous capital sur les retraites en 2008, de la recherche d'une meilleure articulation entre les finances sociales et celles de l'État, là aussi les chantiers sont nombreux.
Le Premier ministre réunira le 12 février la conférence nationale des finances publiques. Elle sera j'en suis sûr l'occasion d'avancer sur tous ces chantiers.
Voilà, en quelques mots ce que je souhaitais vous dire sur les résultats de cette exécution 2006. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.Source http://www.minefi.gouv.fr, le 24 janvier 2007
Nous avons clôturé nos comptes vendredi soir : nous sommes donc quasiment en temps réel, et vous savez que j'ai toujours tenu à informer les Français de la situation des comptes dès que j'en dispose ; c'est le meilleur moyen d'éviter de mauvaises polémiques.
Avant d'entrer dans le détail des chiffres, je voulais simplement souligner combien notre rendez-vous ce matin constitue pour moi un moment très important :
D'abord, par ce qu'en prenant mes fonctions comme ministre du Budget il y a maintenant un peu plus de deux ans, je m'étais fixé une double exigence :
- tenir les comptes,
- rendre des comptes.
Et pour moi, rendre des comptes, ce n'est pas un mot en l'air : comme pour les entreprises, c'est bien la clôture des comptes qui permet de juger des résultats et des performances que l'on réalise.
Mais aussi parce que l'année dont nous allons parler est la dernière année budgétaire qui aura été exécutée entièrement par l'actuelle législature. C'est donc avant tout sur la base de ces résultats que les Français pourront juger de la crédibilité de nos engagements pour l'avenir en matière de finances publiques et de fiscalité.
I - Une année budgétaire exceptionnelle sur tous les plans
1) Un solde budgétaire en amélioration de 7,3Md euros par rapport à 2005 et de près de 11 Md euros par rapport à la LFI
Mettons fin tout de suite à ce suspens intolérable, voici le chiffre que vous attendez tous : le solde budgétaire pour 2006 s'établit à 36,16 Md euros, hors mesure de régularisation relative aux pensions.
En effet, conformément aux recommandations de la Cour des comptes et aux dispositions de la loi de finances rectificative, l'exécution 2006 inclut une mesure d'ordre de 3,3Md euros destinée à régulariser le mode de comptabilisation des pensions qui étaient depuis 1987 imputées avec un mois de décalage. Retraité de cette opération purement comptable sans impact sur les déficits publics, le solde budgétaire s'établit précisément à 36,161 Md euros
Le déficit s'inscrit donc en amélioration de 10,8 Md euros par rapport à la prévision initiale du budget 2006 (46,9 Md euros) et de 6,3 Md euros par rapport à la dernière prévision du collectif (42,4 Md euros). Je reviendrai tout à l'heure sur les facteurs expliquant cette amélioration.
Je voudrais auparavant mettre en perspective ce résultat exceptionnel, qui constitue une avancée majeure dans la voie du désendettement. En effet, un déficit ramené à 36,2 Md euros, cela signifie :
- qu'en trois ans (2003-2006), nous aurons diminué le déficit de près de 21 Md euros. C'est une performance absolument inégalée dans notre histoire budgétaire ;
- que rapporté à la richesse nationale, c'est-à-dire au PIB, le déficit de l'État est ramené à 2 % du PIB. C'est la meilleure performance depuis 15 ans, à l'exception de l'année 2000, lorsque la croissance mondiale atteignait des niveaux records sous l'effet de la bulle internet, et avant que les socialistes ne gaspillent ces résultats ;
- que désormais, ce que les techniciens appellent le solde primaire (c'est-à-dire le solde budgétaire hors charges d'intérêt de la dette) est excédentaire. Concrètement, cela signifie que l'on sort de cette situation absurde où l'État s'endettait simplement pour pouvoir payer les intérêts de sa dette passée ;
- qu'enfin, que le déficit de l'État est également revenu au niveau du « solde stabilisant », c'est-à-dire au niveau qui permet de stabiliser le poids de la dette dans le PIB. Ce n'était arrivé qu'une seule fois pour l'État dans les 25 dernières années (en 2000).
Tout ceci montre bien le chemin parcouru.
Mais ce résultat n'est pas le fruit du hasard. C'est la conséquence de la politique économique et budgétaire menée avec constance par ce gouvernement sous l'autorité de D. de Villepin, reposant sur :
- un effort continu de maîtrise de la dépense ;
- une politique économique favorable à la croissance, et donc génératrice de recettes.
2) Des dépenses une nouvelle fois maîtrisées
Pour la quatrième année consécutive, le plafond de dépenses voté par le Parlement a été strictement respecté, et les dépenses ne progressent pas plus vite que l'inflation. Pour être tout à fait exact, nous nous situons 28 M euros en dessous du plafond voté.
Ceci est d'autant plus important, que cet objectif est atteint tout en respectant deux objectifs majeurs :
- le financement intégral de nos priorités, en particulier toutes nos lois de programme, qu'il s'agisse de la sécurité intérieure, de la justice ou de la recherche. Un exemple : la loi de programmation militaire : elle a toujours été intégralement respectée en budgétisation, mais la consommation des crédits avait pris un peu de retard au démarrage ; ce retard se résorbe, avec en 2006 la consommation de 400 M euros de reports au-delà des crédits de LFI ;
- l'assainissement de la situation budgétaire, avec la poursuite de la réduction de la bulle des reports, dont l'accumulation au cours de la législature précédente faisait peser une épée de Damoclès sur la maîtrise des dépenses et perturbait gestion. En s'interdisant toute ouverture de crédits non gagée en collectif, et en appliquant strictement les règles de la LOLF relatives aux reports, nous avons assaini la situation. Les reports de crédits sur 2007 devraient ainsi être limitées à environ 4 Md euros. Ils s'élevaient à 14 Md euros en 2002 !
Tout ceci n'est possible qu'en cherchant en permanence à dégager des marges de manoeuvre.
En particulier, nous avons su collectivement, avec les ministères gestionnaires, tirer parti des possibilités nouvelles de la LOLF. Car 2006 est aussi la première année de mise en oeuvre de la LOLF. Et de ce point de vue aussi, je crois que c'est un succès : quelques difficultés sont apparues en début d'année, notamment dans la mise à disponibilité des crédits, et c'est bien naturel à l'allumage d'une réforme d'une telle ampleur. J'ai d'ailleurs donné les consignes pour que les budgets opérationnels de programme puissent être approuvés en tout début d'année pour 2007.
Mais ce que je retiens avant tout, c'est le succès des nouveaux outils mis au service d'une gestion plus efficace :
- les nouvelles modalités de mise en réserve de crédits ont parfaitement répondu aux attentes, en permettant d'associer le Parlement en toute transparence tout en donnant aux ministères la visibilité nécessaire sur les crédits dont ils disposent. Ce dispositif a ainsi permis de faire face aux imprévus survenus en cours de gestion (je pense aux crises sanitaires par exemple) tout en respectant nos objectifs de dépenses ;
- les ministères se sont totalement appropriés les souplesses nouvelles apportées par la LOLF dans la gestion de leurs crédits, au service des objectifs dont ils doivent désormais rendre compte. Les ministères ont ainsi pu financer la plupart des besoins apparus en cours de gestion par redéploiement au sein des programmes. Des marges sont apparues en gestion sur la masse salariale, liées pour partie aux efforts de gestion réalisés par les ministères à travers une plus grande adaptation des recrutements aux besoins et un accroissement de l'efficacité des services grâce aux audits. Elles ont pu être mobilisées par les ministères au service de leurs priorités, grâce au jeu de la « fongibilité asymétrique », [utilisée à hauteur de 388 M euros]. En 2007, 50 % des marges ainsi dégagées (soit 600 M euros) sont mobilisées en faveur de la revalorisation additionnelle de 0,3 point des fonctionnaires, conformément aux engagements pris.
- Enfin, avec la LOLF, l'État est devenu une maison de verre, et les administrations doivent désormais rendre compte précisément de leur gestion. Je ne peux aujourd'hui que vous rendre compte à grands traits des résultats de l'exécution. Mais nous avons dans les prochains mois un rendez-vous important : celui de la loi de règlement et des rapports annuels de performance que l'ensemble des ministères remettront au plus tard fin mai. Ce sera l'occasion pour les ministères d'analyser dans le détail la gestion de leurs moyens et les facteurs explicatifs des marges observées en gestion, mais aussi de rendre compte de leur performance au regard des objectifs qui avaient été fixée par le Parlement.
3) Des plus-values de recettes exceptionnelles
Les recettes fiscales s'inscrivent en amélioration de 10,2 Md euros par rapport à la loi de finances initiale et de 5,3 Md euros par rapport au collectif.
L'impôt sur le revenu est en progression de 1,1 Md euros par rapport à l'estimation de LFI. Cela tient à la fois à la progression des revenus des Français, traduction de la progression de l'emploi et du pouvoir d'achat en 2005, et de l'amélioration du recouvrement sous l'effet de la modernisation continue de notre service public fiscal. Je pense en particulier au succès de la télédéclaration. Rappelons qu'en 2006, 5,7 millions de Français soit près de 20 % des contribuables, ont opté pour la déclaration en ligne ; c'est 2 millions de plus qu'en 2005. L'effet de l'amélioration du recouvrement est estimé à 350 M euros, grâce notamment au développement des paiements dématérialisés (mensualisation, prélèvement à l'échéance, paiement en ligne) qui atteignent désormais 73 %.
La TVA, en plus-value de 1,4Md euros par rapport au budget initial mais en ligne avec la prévision du collectif, illustre la bonne tenue de la consommation des Français.
L'impôt sur les sociétés s'inscrit en plus-value de 6,4 Md euros par rapport à la loi de finances initiale, et de 3,7 Md euros par rapport au collectif. C'est d'abord la conséquence de la bonne santé de nos entreprises et donc de leur capacité à investir et créer de la richesse. C'est également pour partie l'effet des mesures prises pour moderniser le recouvrement de l'IS et faire en sorte qu'il reflète mieux les évolutions économiques. Coupons court aux polémiques : le rendement de la mesure de relèvement des seuils de versement de l'acompte exceptionnel adoptée en collectif 2006, qui avait été évalué à l'époque à 500 M euros, est d'environ 1 Md euros.
Les impôts assis les actifs ont connu cette année encore des progressions importantes, qu'il s'agisse des donations (+500 M euros) ou de l'ISF (+450 M euros), en lien avec les évolutions constatées sur les marchés immobiliers et financiers.
À l'inverse, la TIPP s'inscrit en moins-value de 500 M euros, sous l'effet d'une consommation de carburant plus modérée que prévu en réponse au renchérissement des prix.
Pour le reste, les recettes non fiscales et les prélèvements au profit de l'Union européenne et des collectivités locales sont en ligne avec les prévisions du collectif. Notons toutefois le dynamisme particulier des prélèvements au profit des collectivités locales, en accroissement de 800 M euros par rapport au budget initial sous l'effet de la progression du Fonds départemental de mobilisation pour l'insertion et du FCTVA, porté par le dynamisme de l'investissement des collectivités locales.
Le solde des comptes spéciaux est en amélioration d'1 Md euros, sous l'effet notamment du niveau record des cessions immobilières : 800 M euros, pour un objectif qui était fixé à 480M euros. On voit là que la réforme de la gestion de l'immobilier de l'État est désormais ancrée dans la réalité : elle ne se résume pas à vendre des immeubles parisiens mais touche maintenant toutes les administrations sur l'ensemble du territoire.
II - Ces résultats, ils ne tombent pas du ciel ! Si nous avons réussi a les obtenir, c'est grâce a la stratégie mise en oeuvre qui a porté ses fruits
Il n'y a pas de miracle : même si nous avons tous été surpris par l'ampleur des plus-values d'IS, tout ceci est d'abord le résultat d'une politique économique et budgétaire qui, en libérant le travail et les énergies, est au service de la croissance et du redressement de nos finances publiques.
Cette politique, elle repose sur trois piliers :
1/ On a tenu les dépenses. Pendant trois ans, nous avons maintenu la progression des dépenses au niveau de l'inflation. La maîtrise des dépenses repose aussi sur un certain nombre d'outils développés ces dernières années. Je pense bien sûr aux outils de la LOLF, au virus de la performance qu'elle a inoculée. Je pense également aux audits, désormais entrés dans les moeurs et qui se poursuivent au rythme d'une vague toutes les deux mois.
Ces audits nous permettent maintenant de passer à a vitesse supérieure, avec une diminution de 1 point en volume dès 2007. C'est je crois un acquis majeur de cette législature ; je lancerai d'ailleurs la semaine prochaine une nouvelle vague. Plus généralement, c'est une attitude totalement nouvelle que nous adoptons, qui consiste à avoir les yeux rivés sur l'étranger pour s'inspirer des meilleures pratiques.
2/ Nous avons affecté l'intégralité des plus-values de recettes au désendettement. La LOLF nous invite désormais à prévoir à l'avance l'affectation des éventuelles plus-values de recettes. Avec le Parlement, nous avons fait le choix d'une affectation intégrale à la réduction du déficit. C'est un choix de bon sens quand on voit la situation dégradée d'où l'on part.
3/ Nous avons mis en oeuvre une politique fiscale dynamique qui a été payante.
Si nous avons baissé les impôts depuis 2002, ce n'est pas par idéologie, c'est avant tout parce que nous avons souhaité faire de la politique fiscale l'un des leviers majeurs d'une politique économique entièrement tournée vers l'emploi et le pouvoir d'achat :
- quand on crée le CNE et qu'on augmente la prime pour l'emploi, on facilite les embauches pour les employeurs et on augmente l'écart entre les revenus de l'activité et ceux de l'assistance : le résultat, c'est une accélération des créations d'emplois dans le secteur privé et une baisse du chômage (8,7 %) ;
- quand on baisse l'impôt sur le revenu, on restitue aux Français le fruit de leur travail qu'ils peuvent utiliser pour consommer : d'où les bonnes rentrées de TVA ;
- enfin, lorsqu'on améliore l'environnement fiscal de nos entreprises, on leur permet d'être plus compétitives ce qui se traduit par de meilleurs résultats financiers ce dont témoignent les excellentes rentrées d'IS.
La réforme fiscale qui entre en vigueur cette année nous permet de franchir une nouvelle étape.
Cette réforme, je l'ai bâtie sur deux mots-clés : attractivité, justice.
- Attractivité : non seulement nous allégeons l'IR de 4 milliards d'euros, mais nous simplifions en profondeur le barème pour le rendre plus lisible et plus attractif à travers :
- une réduction du nombre de tranches de 7 à 5,
- l'intégration de l'abattement de 20 % dans le barème,
- la fixation d'un taux maximum à 40 % qui nous remet aux standards européen et même un peu mieux !
Enfin, l'attractivité, c'est aussi l'instauration d'un bouclier fiscal à 60 %, pour mettre fin à l'impôt confiscatoire
- Mais l'attractivité ne va pas sans la justice :
- nous concentrons 80 % de la baisse d'impôt sur les personnes dont les revenus sont compris entre 1 000 et 3 500 euros par mois, et la réforme ne fait aucun perdant !
- nous augmentons la prime pour l'emploi pour faire en sorte que les revenus du travail soient supérieurs à ceux de la solidarité : 9 millions de personnes bénéficieront ainsi de l'équivalent d'un 13e mois en 2007.
- enfin, je rappelle que 90 % des bénéficiaires du bouclier fiscal se situent dans le 1er décile de l'impôt sur le revenu.
Vous l'avez compris, à mes yeux la politique fiscale n'est pas un outil qui doit conduire à comparer, à juger et même à punir : c'est un outil qui doit mettre l'économie en mouvement, respecter la liberté de choix des Français, leur permettre de donner le meilleur d'eux-mêmes.
Et le moins que l'on puisse dire, c'est que grâce au chemin parcouru, notre famille politique est capable d'assumer pleinement ses convictions dans ce domaine, loin de la dissimulation ou du double langage auxquels certains, à gauche, nous ont habitué depuis plusieurs mois :
- oui, nous croyons qu'il est possible de réduire en même temps les impôts et les déficits. Car baisser les impôts, c'est restituer aux Français le fruit de leur travail et les encourager à travailler plus. Et lorsqu'on travaille plus, on augmente la richesse produite dans l'économie et cela génère en retour des recettes supplémentaires. Le dynamisme de l'impôt sur le revenu, au cours de ces dernières années en sont d'ailleurs de bons exemples ;
- oui, nous croyons qu'il est possible et même indispensable de maîtriser les dépenses tout en continuant à améliorer la qualité des services publics. Car dire le contraire, c'est en réalité mépriser la capacité des agents et des usagers à se saisir des nouvelles technologies pour réaliser des gains de productivité.
Je ne voudrais pas conclure cette présentation sans vous dire qu'à mes yeux, ces résultats nous donnent évidemment de solides arguments pour parler d'avenir aux Français.
Les résultats du côté de l'État sont bons. Mais nous ne pouvons évidemment en rester là. Il faudra aller plus loin.
D'abord, je veux lire dans ces résultats les premiers indices que nos objectifs pour l'ensemble des finances publiques (un déficit public ramené à 2,7 % en 2006, une dette publique en diminution de 2 points de PIB) seront tenus, et même peut être au-delà.
Au-delà, l'engagement national de désendettement présenté par le Premier ministre en juin dernier a clairement tracé l'objectif de retour à l'équilibre de nos finances publiques.
- Le budget 2007 marque une première étape : c'est l'année de mise en oeuvre de la réforme fiscale, dont les Français ont déjà pu mesurer les premiers effets en recevant leurs mensualités d'impôt sur le revenu. C'est également la première année de réduction des dépenses en volume.
L'objectif est bien de tendre dans les années qui suivent vers une stabilisation des dépenses en valeur, grâce à la mise en oeuvre des audits. Ceux-ci ont déjà permis d'identifier plus de 3 Md euros de marges de productivité. La poursuite de cette démarche en 2007 et 2008 devrait permettre d'identifier au total 6 à 7 Md euros de gisements potentiels d'économies.
- Cette démarche concerne également les autres acteurs de la dépense publique :
- les collectivités locales : il nous faut en effet essayer de refonder le contrat avec les collectivités locales, et étudier avec elles les moyens d'une plus grande maîtrise de la dépense locale ; le rapport rendu par Pierre Richard contient à cet égard des pistes intéressantes.
- la sécurité sociale : qu'il s'agisse du retour à l'équilibre en 2009, du rendez-vous capital sur les retraites en 2008, de la recherche d'une meilleure articulation entre les finances sociales et celles de l'État, là aussi les chantiers sont nombreux.
Le Premier ministre réunira le 12 février la conférence nationale des finances publiques. Elle sera j'en suis sûr l'occasion d'avancer sur tous ces chantiers.
Voilà, en quelques mots ce que je souhaitais vous dire sur les résultats de cette exécution 2006. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.Source http://www.minefi.gouv.fr, le 24 janvier 2007