Texte intégral
Mes chers amis,
Vous aurez noté qu'il y a au moins une originalité pour les vux de l'UDF : ils sont les derniers de 2001. Si nous avons choisi une date avancée pour ces vux, c'est que j'ai souhaité les faire coïncider avec la première réunion de notre nouveau bureau politique et l'annonce de notre nouvel exécutif national.
J'ai donc à mes côtés pour cette rencontre Hervé de Charette, président délégué, Anne-Marie Idrac notre nouvelle secrétaire générale, Jean-Louis Borloo, notre nouveau porte-parole, les vice-présidents, présents dans cette salle, parmi lesquels vous me permettrez de saluer particulièrement Nicole Fontaine, présidente du Parlement européen, qui a accepté cette responsabilité.
C'est donc une équipe de personnalités majeures qui va assumer des fonctions, dans la perspective des dix-huit mois qui viennent, de travail et de construction d'un projet.
S'agissant des vux pour 2001, je voudrais souligner de manière forte que ces vux se portent d'abord sur les élections municipales. Je vois beaucoup de débats, j'entends beaucoup d'agitation, quelques fois de confusion, autour de projets dont il est visible qu'ils enjambent les municipales, et même, pour certains d'entre eux, qui sont construits sur la perspective d'un échec aux municipales. Ce n'est pas dans cette perspective que je me place, et si j'ose le dire, il me semble que tous les responsables de l'opposition devraient au contraire se placer dans la perspective du succès aux municipales, d'un succès à construire.
Naturellement, les augures, comme presque chaque fois, multiplient les signes néfastes. Et puis, quand on regarde la réalité de près, on s'aperçoit que ce n'est pas exactement ce que les Français disent.
Je ne prendrai comme exemple que le sondage que le Progrès a publié ce matin à Lyon. Si vous lisez ce qu'était la tonalité de la presse ces derniers jours et que vous regardez les chiffres du sondage, vous mesurez que la situation est complètement différente. A Lyon elle se résume en deux phrases : premièrement l'opposition peut gagner Lyon, elle est même probablement en situation de le faire si les chiffres de ce sondage sont exacts ; et deuxièmement il n'y a évidemment qu'une seule tête de liste qui puisse gagner Lyon, c'est Michel Mercier, qui distance assez nettement les autres concurrents de son camp. Vous voyez bien que la situation n'est pas exactement celle qu'on disait. J'attire en particulier votre attention sur les chiffres publiés du deuxième tour. Dans le cas où Michel Mercier est au deuxième tour, c'est 50 / 50, si c'était Charles Millon, la différence serait de dix-huit points, 41 contre 59.
Je veux dire simplement que pour nous, quels que soient les augures, l'ordre du jour est à la mobilisation pour ces élections locales, municipales, et cantonales je ne l'oublie pas, je suis président de conseil général pour encore quelques semaines.
Nous regardons non seulement les grandes villes françaises, mais nous regardons un certain nombre d'autres très grands pôles régionaux qui nous paraissent à portée de la victoire. Par exemple à Strasbourg, à Tours, à Angers, à Rennes, les notations de terrain sont des notations positives et encourageantes.
S'il y avait un premier message, ce serait celui-ci : que l'opposition se focalise sur les combats qu'elle a à conduire aujourd'hui au lieu de se diviser sur les perspectives de demain.
Ce qu'a noté ce matin au bureau politique l'immense majorité des intervenants qui sont des candidats aux élections locales, c'est que ces agitations ressenties comme parisiennes font perdre du terrain, représentent du trouble qui menacent les élections locales alors qu'ils sentent au contraire, dans le débat qu'ils ont avec les citoyens sur les enjeux locaux, qu'il y a un courant porteur.
C'était le premier point. Deuxième vu, que 2001 soit l'année où la France se prépare au changement.
La France n'est pas bien gouvernée. C'est depuis très longtemps le diagnostic que nous faisons, la cohabitation, les impasses, les enlisements, le refus de traiter les problèmes apparaissent aux yeux de tous. Elle n'est pas bien gouvernée et elle va avoir le choix, dans les dix-huit mois qui viennent, de ses orientations majeures.
Nous pensons que les Français ont le droit d'avoir le choix. Pour notre part, nous voulons offrir un choix nouveau à la France, un choix différent.
Naturellement, nous apercevons bien que tout est fait pour enfoncer dans la tête des Français l'idée qu'ils ne devraient avoir le choix qu'entre les deux acteurs majeurs de la cohabitation, dont les partis respectifs ont déjà exercé le pouvoir trois fois chacun dans les vingt dernières années. Et chaque fois, les Français ont dit : ce n'est pas ce que nous voulons.
Notre certitude, c'est que les Français attendent autre chose. Ils veulent des choses très simples.
Ils veulent une vie politique honnête. Ils veulent que les affaires n'encombrent plus le débat public. Ils veulent que les élus respectent pour eux-mêmes la loi qu'ils votent pour les autres.
Ils veulent de l'imagination au pouvoir. Dans tous les domaines et sur tous les sujets, ils ont l'impression que l'on ressasse toujours les mêmes mots, auxquels personne ne comprend rien. Ils veulent qu'on leur propose des solutions nouvelles et qu'ils puissent enfin y voir clair.
Ils veulent de la clarté. La manière dont notre démocratie est organisée, personne n'y comprend plus rien. La démocratie locale, cinq ou six ou sept niveaux de décision. La démocratie nationale, rendue illisible en particulier par les circonstances nées de la dissolution de 1997. Et l'Europe issue du traité de Nice, qui pourrait l'expliquer à ses enfants ?
Ils veulent du courage, enfin. Ils sentent bien que sur la plupart des sujets, on élude, on fuit, on retarde les décisions nécessaires.
Une démocratie nouvelle, honnête, imaginative, claire, juste et courageuse, c'est ce que nous avons l'intention de soutenir en 2001 et de proposer aux Français.
Je n'ai pas jusqu'à maintenant consacré beaucoup de commentaires à la floraison des appels au parti unique. D'abord parce que deux partis uniques par semaine, cela finit par faire beaucoup. Et ensuite parce que tout cela est au fond relativement transparent : est-ce que le parti unique c'est fait pour changer, pour ouvrir une voie nouvelle, pour donner aux Français une autre solution que celles qu'ils ont aujourd'hui ou bien est-ce que c'est fait pour verrouiller le débat et présenter les mêmes ?
Poser la question, c'est y répondre. C'est fait pour verrouiller, non pas pour changer les approches, les visages et les équipes, mais pour empêcher de changer ! Une tentative désespérée pour essayer que surtout, rien ne change !
L'union, comme on dit, ce n'est pas affaire d'organisation. J'ai rappelé ce qui se passe sur le terrain. Permettez-moi de rappeler, parce que ce n'est jamais dit, que la division, à Paris par exemple, ne vient pas de rivalités entre partis différents, c'est une rivalité entre hommes ou entre clans à l'intérieur du même parti !
Dès lors, présenter ce genre de division comme étant une conséquence de l'organisation pluraliste de l'opposition, c'est au moins se tromper de diagnostic !
Et bien nous, nous avons choisi le changement. Nous avons choisi de porter et de proposer le changement.
Et ce changement, une fois que l'inversion du calendrier aura été adoptée, et nous y sommes pour quelque chose, c'est aux élections présidentielles qu'il va se jouer. C'est aux élections présidentielles que les Français choisiront leur nouveau chemin.
Pour nous, l'immédiat, l'urgent, ce qui réclame et requiert la mobilisation des Français, ce sont les municipales. Et puis ce qui s'ouvre après, c'est la période des élections présidentielles. Celles où les Français vont réellement avoir le choix. Non pas un choix enfermé entre deux pôles rivaux et complices mais un choix réel où la cohérence des visions va se proposer à eux.
Et c'est au deuxième tour de l'élection présidentielle qu'une majorité nouvelle se constitue pour l'avenir de la France. Ce sont les Français qui, dans le grand choix national qui s'annonce, dessineront cette majorité nouvelle et aussi, par la force des choses, leur nouvelle opposition.
Pour une fois, ce sont les Français qui tiendront le crayon et non pas les caciques autour des tables nocturnes ou vespérales. Et je vous le dis de toute ma conviction, celle que nous exprimons dans cette famille : ils choisiront le changement.
Et puisqu'il s'agit de vux, je voudrais émettre quelques souhaits pour le changement.
Que l'Europe que nous construisons ne soit plus jamais celle du traité de Nice. J'aperçois bien que le traité de Nice, c'est l'uvre commune du Président de la République et du Premier ministre. Et donc je sais que ce traité sera ratifié à une majorité écrasante. Mais pour ma part, et je crois que nous serons nombreux dans cette famille, je ne l'approuverai pas. Même si nous sommes minoritaires, même si j'étais seul à voter contre, je n'approuverai pas ce traité qui porte en lui les germes de l'impuissance européenne.
Je ne retiens pas l'argument de l'élargissement, qu'on utilise souvent, selon lequel si l'on ne ratifie pas le traité de Nice, c'est que l'on ne reçoit pas les pays d'Europe centrale et orientale qui veulent adhérer. Nos pays frères d'Europe centrale et orientale ont leur place dans l'Union. A mes yeux ils sont l'Europe autant que nous. Mais l'Union après Nice, elle est plus illisible et plus impuissante, plus intergouvernementale et moins communautaire, que l'Union d'avant Nice. Je préfèrerais l'élargissement dans l'Union d'avant Nice que dans l'Union d'après Nice. Jean-Louis Bourlanges l'a clairement montré: il suffit de replacer les pays adhérents dans le cadre de l'Union d'avant Nice avec les distributions de voix et de commissaires précédentes.
L'Europe qui a été décidée à Nice est une Europe incompréhensible par les citoyens. C'est le triomphe de l'Europe des initiés, des négociations de couloir. C'est une Europe que les citoyens ne comprendront jamais et donc qu'ils rejetteront. Or, dans le train de l'intergouvernemental, il n'y a pas de ticket de retour. Lorsqu'on commence à construire uniquement entre diplomates et dans les rapports de force, un compromis européen, on perd complètement l'énergie et la dynamique qui seraient nées d'une vraie démocratie européenne. Pour moi, ce n'est pas la voie à prendre.
2002, ce sera le moment de proposer à la France une grande, claire et simple ambition européenne. Non pas l'Europe des couloirs mais l'Europe au grand jour ! Avec une constitution lisible, avec des dirigeants élus, pour que la voix des citoyens soit la voix des dirigeants, et que les décisions ne se prennent pas dans leur dos !
Je voudrais émettre un deuxième vu, c'est que l'opposition retrouve l'inspiration sociale. Et dans le social aussi, on a un besoin immense de retrouver la lisibilité qui fait le pouvoir du citoyen.
Songez qu'il a fallu l'actuelle crise sur les retraites pour découvrir que les 45 milliards de cotisations dites ASF destinées à équilibrer la retraite à 60 ans, étaient prélevées et gérées par une association loi de 1901, sans agrément, et collectées en son nom, on se demande bien pourquoi, par l'UNEDIC !
Si cette crise juridique débouche sur une épreuve de force sociale, c'est parce que le problème des retraites n'est pas traité en France, depuis des années ! Le gouvernement actuel en porte une part essentielle de responsabilité.
La lisibilité et la simplicité, on ne peut pas dire qu'elles soient le lot du chèque emploi, ou impôt négatif. Je m'avance avec prudence parce que cette idée mirobolante est soutenue unanimement d'un bout à l'autre de l'échiquier politique. C'est Jacques Chirac qui l'a demandée, Lionel Jospin qui l'a réalisée et Alain Madelin qui l'a, paraît-il, inspirée. Et je n'ignore pas que beaucoup des nôtres l'ont dans un premier temps approuvée. Alors disons que je suis le seul à ne pas comprendre toutes les vertus de cette mirobolante entreprise.
S'il s'était agi de compléter pour les amener jusqu'au niveau du Smic les salaires des emplois débutants ou expérimentaux, ou trop peu qualifiés, comme j'en défends l'idée depuis longtemps, j'aurais applaudi des deux mains.
Mais que l'Etat prélève des milliards d'impôts pour charger son administration d'ouvrir et d'instruire plus de 9 millions de dossiers, faire plus de 9 millions de chèques à plus de 9 millions de Français et recevoir le contentieux de toutes ces opérations, cela me paraît la plus extraordinaire usine à gaz, la plus extraordinaire source de déperdition et d'effort public qu'on ait jamais inventée.
On pousse ainsi vers une idée de l'Etat qui n'est pas la nôtre, une idée de l'assistance généralisée, de l'Etat qui au moment de Noël distribuera dans sa hotte, comme un Père Noël, les chèques de l'assistance aux salariés français. Et je crains beaucoup que le chèque Jospin, dans bien des cas, permette de faire passer à l'as des augmentations de salaires qui auraient été normales.
Je trouve que nous avions bien raison dans cette famille de plaider pour une solution plus simple : baisse des charges sociales et augmentation du salaire direct, directement de l'employeur au salarié, sans passer par l'usine à gaz de l'Etat.
Lisibilité, simplicité. C'est vrai aussi pour les collectivités locales. Aujourd'hui l'écheveau est absolument inextricable, y compris pour les élus eux-mêmes, qui sont incapables de définir clairement aux yeux des citoyens ce que seront par exemple les rapports entre les intercommunalités, les pays et les départements.
Nous proposons, et je remarque que cette idée commence à avoir quelque fortune même si elle n'est pas toujours rapportée à leurs auteurs, que l'on simplifie drastiquement la vie de la démocratie française en clarifiant aux yeux des citoyens les niveaux de compétence. Pour nous, ces niveaux sont au nombre de trois et de trois seuls.
Il y a la proximité. Ce niveau réunit les fédérations de communes au sein des intercommunalités. Il y a un deuxième niveau qui est celui de l'aménagement des territoires. La proposition que nous faisons, c'est que les régions fédèrent les départements, que ce soient les mêmes élus qui administrent les régions et les départements, et peut-être la même administration. Naturellement, les compétences de l'Etat seront exercées par les Etats-nations fédérés en Europe pour celles qu'ils ne peuvent pas exercer tout seuls.
Trois niveaux, trois fédérations. Les communes dans les intercommunalités, les départements dans les régions, les Etats-nations dans l'Union européenne. Et pour les trois les mêmes règles, dont la principale consiste à ce que les niveaux de compétence fédérées ou partagées doivent avoir leurs élus directs au suffrage universel. Nous souhaitons ainsi que les intercommunalités aient leurs élus, que les présidents de régions soient élus au suffrage universel et qu'un jour les dirigeants européens procèdent aussi du suffrage des citoyens.
Voilà rapidement dessinée une série de vux pour l'année où la France préparera le changement. Je veux dire simplement au terme de ces vux pour la France que le plus important à exprimer pour moi aujourd'hui, ce sont des vux pour chacun d'entre vous.
Je sais très bien que nous sommes ici pour la plupart d'entre nous dans nos responsabilités, dans nos fonctions, mais derrière ces responsabilités et ces fonctions il y a des femmes et des hommes qui ont des enthousiasmes et des succès et quelques fois aussi des soucis et des angoisses. Permettez-moi au moment de ces derniers vux de 2001 de dire que c'est à cette femme et à cet homme que nous songeons, qu'il est normal et légitime que nous partagions des vux pour que personnellement cette année soit une bonne année.
Je vous remercie.
(Source http://www.udf.org, le 14 mars 2001).
Vous aurez noté qu'il y a au moins une originalité pour les vux de l'UDF : ils sont les derniers de 2001. Si nous avons choisi une date avancée pour ces vux, c'est que j'ai souhaité les faire coïncider avec la première réunion de notre nouveau bureau politique et l'annonce de notre nouvel exécutif national.
J'ai donc à mes côtés pour cette rencontre Hervé de Charette, président délégué, Anne-Marie Idrac notre nouvelle secrétaire générale, Jean-Louis Borloo, notre nouveau porte-parole, les vice-présidents, présents dans cette salle, parmi lesquels vous me permettrez de saluer particulièrement Nicole Fontaine, présidente du Parlement européen, qui a accepté cette responsabilité.
C'est donc une équipe de personnalités majeures qui va assumer des fonctions, dans la perspective des dix-huit mois qui viennent, de travail et de construction d'un projet.
S'agissant des vux pour 2001, je voudrais souligner de manière forte que ces vux se portent d'abord sur les élections municipales. Je vois beaucoup de débats, j'entends beaucoup d'agitation, quelques fois de confusion, autour de projets dont il est visible qu'ils enjambent les municipales, et même, pour certains d'entre eux, qui sont construits sur la perspective d'un échec aux municipales. Ce n'est pas dans cette perspective que je me place, et si j'ose le dire, il me semble que tous les responsables de l'opposition devraient au contraire se placer dans la perspective du succès aux municipales, d'un succès à construire.
Naturellement, les augures, comme presque chaque fois, multiplient les signes néfastes. Et puis, quand on regarde la réalité de près, on s'aperçoit que ce n'est pas exactement ce que les Français disent.
Je ne prendrai comme exemple que le sondage que le Progrès a publié ce matin à Lyon. Si vous lisez ce qu'était la tonalité de la presse ces derniers jours et que vous regardez les chiffres du sondage, vous mesurez que la situation est complètement différente. A Lyon elle se résume en deux phrases : premièrement l'opposition peut gagner Lyon, elle est même probablement en situation de le faire si les chiffres de ce sondage sont exacts ; et deuxièmement il n'y a évidemment qu'une seule tête de liste qui puisse gagner Lyon, c'est Michel Mercier, qui distance assez nettement les autres concurrents de son camp. Vous voyez bien que la situation n'est pas exactement celle qu'on disait. J'attire en particulier votre attention sur les chiffres publiés du deuxième tour. Dans le cas où Michel Mercier est au deuxième tour, c'est 50 / 50, si c'était Charles Millon, la différence serait de dix-huit points, 41 contre 59.
Je veux dire simplement que pour nous, quels que soient les augures, l'ordre du jour est à la mobilisation pour ces élections locales, municipales, et cantonales je ne l'oublie pas, je suis président de conseil général pour encore quelques semaines.
Nous regardons non seulement les grandes villes françaises, mais nous regardons un certain nombre d'autres très grands pôles régionaux qui nous paraissent à portée de la victoire. Par exemple à Strasbourg, à Tours, à Angers, à Rennes, les notations de terrain sont des notations positives et encourageantes.
S'il y avait un premier message, ce serait celui-ci : que l'opposition se focalise sur les combats qu'elle a à conduire aujourd'hui au lieu de se diviser sur les perspectives de demain.
Ce qu'a noté ce matin au bureau politique l'immense majorité des intervenants qui sont des candidats aux élections locales, c'est que ces agitations ressenties comme parisiennes font perdre du terrain, représentent du trouble qui menacent les élections locales alors qu'ils sentent au contraire, dans le débat qu'ils ont avec les citoyens sur les enjeux locaux, qu'il y a un courant porteur.
C'était le premier point. Deuxième vu, que 2001 soit l'année où la France se prépare au changement.
La France n'est pas bien gouvernée. C'est depuis très longtemps le diagnostic que nous faisons, la cohabitation, les impasses, les enlisements, le refus de traiter les problèmes apparaissent aux yeux de tous. Elle n'est pas bien gouvernée et elle va avoir le choix, dans les dix-huit mois qui viennent, de ses orientations majeures.
Nous pensons que les Français ont le droit d'avoir le choix. Pour notre part, nous voulons offrir un choix nouveau à la France, un choix différent.
Naturellement, nous apercevons bien que tout est fait pour enfoncer dans la tête des Français l'idée qu'ils ne devraient avoir le choix qu'entre les deux acteurs majeurs de la cohabitation, dont les partis respectifs ont déjà exercé le pouvoir trois fois chacun dans les vingt dernières années. Et chaque fois, les Français ont dit : ce n'est pas ce que nous voulons.
Notre certitude, c'est que les Français attendent autre chose. Ils veulent des choses très simples.
Ils veulent une vie politique honnête. Ils veulent que les affaires n'encombrent plus le débat public. Ils veulent que les élus respectent pour eux-mêmes la loi qu'ils votent pour les autres.
Ils veulent de l'imagination au pouvoir. Dans tous les domaines et sur tous les sujets, ils ont l'impression que l'on ressasse toujours les mêmes mots, auxquels personne ne comprend rien. Ils veulent qu'on leur propose des solutions nouvelles et qu'ils puissent enfin y voir clair.
Ils veulent de la clarté. La manière dont notre démocratie est organisée, personne n'y comprend plus rien. La démocratie locale, cinq ou six ou sept niveaux de décision. La démocratie nationale, rendue illisible en particulier par les circonstances nées de la dissolution de 1997. Et l'Europe issue du traité de Nice, qui pourrait l'expliquer à ses enfants ?
Ils veulent du courage, enfin. Ils sentent bien que sur la plupart des sujets, on élude, on fuit, on retarde les décisions nécessaires.
Une démocratie nouvelle, honnête, imaginative, claire, juste et courageuse, c'est ce que nous avons l'intention de soutenir en 2001 et de proposer aux Français.
Je n'ai pas jusqu'à maintenant consacré beaucoup de commentaires à la floraison des appels au parti unique. D'abord parce que deux partis uniques par semaine, cela finit par faire beaucoup. Et ensuite parce que tout cela est au fond relativement transparent : est-ce que le parti unique c'est fait pour changer, pour ouvrir une voie nouvelle, pour donner aux Français une autre solution que celles qu'ils ont aujourd'hui ou bien est-ce que c'est fait pour verrouiller le débat et présenter les mêmes ?
Poser la question, c'est y répondre. C'est fait pour verrouiller, non pas pour changer les approches, les visages et les équipes, mais pour empêcher de changer ! Une tentative désespérée pour essayer que surtout, rien ne change !
L'union, comme on dit, ce n'est pas affaire d'organisation. J'ai rappelé ce qui se passe sur le terrain. Permettez-moi de rappeler, parce que ce n'est jamais dit, que la division, à Paris par exemple, ne vient pas de rivalités entre partis différents, c'est une rivalité entre hommes ou entre clans à l'intérieur du même parti !
Dès lors, présenter ce genre de division comme étant une conséquence de l'organisation pluraliste de l'opposition, c'est au moins se tromper de diagnostic !
Et bien nous, nous avons choisi le changement. Nous avons choisi de porter et de proposer le changement.
Et ce changement, une fois que l'inversion du calendrier aura été adoptée, et nous y sommes pour quelque chose, c'est aux élections présidentielles qu'il va se jouer. C'est aux élections présidentielles que les Français choisiront leur nouveau chemin.
Pour nous, l'immédiat, l'urgent, ce qui réclame et requiert la mobilisation des Français, ce sont les municipales. Et puis ce qui s'ouvre après, c'est la période des élections présidentielles. Celles où les Français vont réellement avoir le choix. Non pas un choix enfermé entre deux pôles rivaux et complices mais un choix réel où la cohérence des visions va se proposer à eux.
Et c'est au deuxième tour de l'élection présidentielle qu'une majorité nouvelle se constitue pour l'avenir de la France. Ce sont les Français qui, dans le grand choix national qui s'annonce, dessineront cette majorité nouvelle et aussi, par la force des choses, leur nouvelle opposition.
Pour une fois, ce sont les Français qui tiendront le crayon et non pas les caciques autour des tables nocturnes ou vespérales. Et je vous le dis de toute ma conviction, celle que nous exprimons dans cette famille : ils choisiront le changement.
Et puisqu'il s'agit de vux, je voudrais émettre quelques souhaits pour le changement.
Que l'Europe que nous construisons ne soit plus jamais celle du traité de Nice. J'aperçois bien que le traité de Nice, c'est l'uvre commune du Président de la République et du Premier ministre. Et donc je sais que ce traité sera ratifié à une majorité écrasante. Mais pour ma part, et je crois que nous serons nombreux dans cette famille, je ne l'approuverai pas. Même si nous sommes minoritaires, même si j'étais seul à voter contre, je n'approuverai pas ce traité qui porte en lui les germes de l'impuissance européenne.
Je ne retiens pas l'argument de l'élargissement, qu'on utilise souvent, selon lequel si l'on ne ratifie pas le traité de Nice, c'est que l'on ne reçoit pas les pays d'Europe centrale et orientale qui veulent adhérer. Nos pays frères d'Europe centrale et orientale ont leur place dans l'Union. A mes yeux ils sont l'Europe autant que nous. Mais l'Union après Nice, elle est plus illisible et plus impuissante, plus intergouvernementale et moins communautaire, que l'Union d'avant Nice. Je préfèrerais l'élargissement dans l'Union d'avant Nice que dans l'Union d'après Nice. Jean-Louis Bourlanges l'a clairement montré: il suffit de replacer les pays adhérents dans le cadre de l'Union d'avant Nice avec les distributions de voix et de commissaires précédentes.
L'Europe qui a été décidée à Nice est une Europe incompréhensible par les citoyens. C'est le triomphe de l'Europe des initiés, des négociations de couloir. C'est une Europe que les citoyens ne comprendront jamais et donc qu'ils rejetteront. Or, dans le train de l'intergouvernemental, il n'y a pas de ticket de retour. Lorsqu'on commence à construire uniquement entre diplomates et dans les rapports de force, un compromis européen, on perd complètement l'énergie et la dynamique qui seraient nées d'une vraie démocratie européenne. Pour moi, ce n'est pas la voie à prendre.
2002, ce sera le moment de proposer à la France une grande, claire et simple ambition européenne. Non pas l'Europe des couloirs mais l'Europe au grand jour ! Avec une constitution lisible, avec des dirigeants élus, pour que la voix des citoyens soit la voix des dirigeants, et que les décisions ne se prennent pas dans leur dos !
Je voudrais émettre un deuxième vu, c'est que l'opposition retrouve l'inspiration sociale. Et dans le social aussi, on a un besoin immense de retrouver la lisibilité qui fait le pouvoir du citoyen.
Songez qu'il a fallu l'actuelle crise sur les retraites pour découvrir que les 45 milliards de cotisations dites ASF destinées à équilibrer la retraite à 60 ans, étaient prélevées et gérées par une association loi de 1901, sans agrément, et collectées en son nom, on se demande bien pourquoi, par l'UNEDIC !
Si cette crise juridique débouche sur une épreuve de force sociale, c'est parce que le problème des retraites n'est pas traité en France, depuis des années ! Le gouvernement actuel en porte une part essentielle de responsabilité.
La lisibilité et la simplicité, on ne peut pas dire qu'elles soient le lot du chèque emploi, ou impôt négatif. Je m'avance avec prudence parce que cette idée mirobolante est soutenue unanimement d'un bout à l'autre de l'échiquier politique. C'est Jacques Chirac qui l'a demandée, Lionel Jospin qui l'a réalisée et Alain Madelin qui l'a, paraît-il, inspirée. Et je n'ignore pas que beaucoup des nôtres l'ont dans un premier temps approuvée. Alors disons que je suis le seul à ne pas comprendre toutes les vertus de cette mirobolante entreprise.
S'il s'était agi de compléter pour les amener jusqu'au niveau du Smic les salaires des emplois débutants ou expérimentaux, ou trop peu qualifiés, comme j'en défends l'idée depuis longtemps, j'aurais applaudi des deux mains.
Mais que l'Etat prélève des milliards d'impôts pour charger son administration d'ouvrir et d'instruire plus de 9 millions de dossiers, faire plus de 9 millions de chèques à plus de 9 millions de Français et recevoir le contentieux de toutes ces opérations, cela me paraît la plus extraordinaire usine à gaz, la plus extraordinaire source de déperdition et d'effort public qu'on ait jamais inventée.
On pousse ainsi vers une idée de l'Etat qui n'est pas la nôtre, une idée de l'assistance généralisée, de l'Etat qui au moment de Noël distribuera dans sa hotte, comme un Père Noël, les chèques de l'assistance aux salariés français. Et je crains beaucoup que le chèque Jospin, dans bien des cas, permette de faire passer à l'as des augmentations de salaires qui auraient été normales.
Je trouve que nous avions bien raison dans cette famille de plaider pour une solution plus simple : baisse des charges sociales et augmentation du salaire direct, directement de l'employeur au salarié, sans passer par l'usine à gaz de l'Etat.
Lisibilité, simplicité. C'est vrai aussi pour les collectivités locales. Aujourd'hui l'écheveau est absolument inextricable, y compris pour les élus eux-mêmes, qui sont incapables de définir clairement aux yeux des citoyens ce que seront par exemple les rapports entre les intercommunalités, les pays et les départements.
Nous proposons, et je remarque que cette idée commence à avoir quelque fortune même si elle n'est pas toujours rapportée à leurs auteurs, que l'on simplifie drastiquement la vie de la démocratie française en clarifiant aux yeux des citoyens les niveaux de compétence. Pour nous, ces niveaux sont au nombre de trois et de trois seuls.
Il y a la proximité. Ce niveau réunit les fédérations de communes au sein des intercommunalités. Il y a un deuxième niveau qui est celui de l'aménagement des territoires. La proposition que nous faisons, c'est que les régions fédèrent les départements, que ce soient les mêmes élus qui administrent les régions et les départements, et peut-être la même administration. Naturellement, les compétences de l'Etat seront exercées par les Etats-nations fédérés en Europe pour celles qu'ils ne peuvent pas exercer tout seuls.
Trois niveaux, trois fédérations. Les communes dans les intercommunalités, les départements dans les régions, les Etats-nations dans l'Union européenne. Et pour les trois les mêmes règles, dont la principale consiste à ce que les niveaux de compétence fédérées ou partagées doivent avoir leurs élus directs au suffrage universel. Nous souhaitons ainsi que les intercommunalités aient leurs élus, que les présidents de régions soient élus au suffrage universel et qu'un jour les dirigeants européens procèdent aussi du suffrage des citoyens.
Voilà rapidement dessinée une série de vux pour l'année où la France préparera le changement. Je veux dire simplement au terme de ces vux pour la France que le plus important à exprimer pour moi aujourd'hui, ce sont des vux pour chacun d'entre vous.
Je sais très bien que nous sommes ici pour la plupart d'entre nous dans nos responsabilités, dans nos fonctions, mais derrière ces responsabilités et ces fonctions il y a des femmes et des hommes qui ont des enthousiasmes et des succès et quelques fois aussi des soucis et des angoisses. Permettez-moi au moment de ces derniers vux de 2001 de dire que c'est à cette femme et à cet homme que nous songeons, qu'il est normal et légitime que nous partagions des vux pour que personnellement cette année soit une bonne année.
Je vous remercie.
(Source http://www.udf.org, le 14 mars 2001).