Déclaration de M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, sur les mesures prises pour favoriser le développement du marché du très haut débit, Saint-Etienne le 7 février 2007.

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Circonstance : 1er Forum du très Haut débit de Saint-Etienne le 7 février 2007

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Je tiens à vous remercier pour votre invitation. C'est avec un très grand plaisir que je viens ce soir clôturer la première journée de vos travaux. Ce 1er Forum du très haut débit est déjà un succès. J'ai pu apprécier la qualité des exposants et des intervenants présents aujourd'hui.
Cette initiative à Saint-Etienne, au coeur du département de la Loire montre l'engagement du département pour les technologies de l'information et de la communication.
J'ai ainsi souhaité tout à l'heure rendre visite à l'entreprise LOTIM Télécom et à sa tête de réseau à Saint-Etienne. Le projet mené par le Conseil Général permettra de relier 114 zones d'activité et 36 répartiteurs France Télécom en fibre optique. L'objectif est de permettre à 20 000 entreprises du département d'accéder à ce qui se fait de mieux en matière de télécommunications !
La Loire est ainsi exemplaire du succès de la France depuis 2002 en matière de haut débit.
I/ Le dynamisme du marché du haut débit est très favorable pour la France
Il y a aujourd'hui plus de 11,8 millions d'abonnés à l'Internet à haut débit, le seuil des 10 millions d'abonnés ayant été franchi au premier semestre 2006 avec un an et demi d'avance sur l'objectif fixé en 2002, date à laquelle, il n'y avait que 600 000 abonnés au haut débit.
On comptait 3,5 millions de lignes dégroupées au troisième trimestre 2006. La croissance du parc d'accès dégroupés concerne maintenant essentiellement le dégroupage total, qui permet au client de ne plus payer d'abonnement téléphonique à France Télécom. Avec plus d'un million et demi d'accès, le dégroupage total représente aujourd'hui 45 % du parc de lignes dégroupées, contre 7 % début 2005.
Cette tendance de fond est en grande partie tirée par les « box » qui, rappelons-le, ont été inventées en France et les offres « multiple play » (accès Internet, téléphonie illimitée et TV sur ADSL) proposées par les opérateurs.
D'autre part, les usages se multiplient :
- 54 % des foyers sont désormais équipés d'un ordinateur ;
- un internaute sur deux a déjà réalisé des achats en ligne. Le chiffre d'affaires du commerce électronique approche désormais les 15 milliards d'euros par an. Il était de 700 millions d'euros en 2000 et de 1,7 milliard d'euros en 2002.
- Les trois quarts des internautes français se connectent à Internet au moins une fois par jour, et près de 20 % d'entre eux ont un blog.
Pour ce qui est de l'administration électronique :
- le service « changement-adresse.gouv.fr » a été utilisé par 30 % des personnes ayant déménagé ;
- 70 % des certificats de non-gage ont été délivrés en ligne par le service « telec@artes grise » ;
- 5,7 millions de déclarations d'impôt ont été effectuées par Internet en 2006 (contre 3,7 en 2005), représentant 17 % des contribuables ;
- enfin, un nouveau site administration24h24.gouv.fr permet désormais aux internautes français d'effectuer 600 démarches administratives en ligne (Consultation des remboursements d'assurance maladie, demande d'extrait d'acte de naissance, etc.) et il continuera à s'enrichir au cours de l'année 2007.
Grâce aux efforts importants consentis depuis quatre ans, la France figure désormais dans le Top 5 des pays européens les plus avancés en matière d'administration électronique.
Toutes ces données sont connues de vous. Elles montrent en quelques années l'évolution sans précédent du secteur des technologies de l'information et de la communication. Elles traduisent des transformations considérables de notre économie et de notre société ainsi qu'une action déterminée des pouvoirs publics
II/ Il nous faut dès maintenant préparer l'avenir : le très haut débit
En effet, pour accompagner la montée des débits nécessaires aux usages des entreprises et des foyers, consommateurs de vidéo, de multimédia ou de jeux en ligne, les opérateurs doivent investir dans de nouvelles infrastructures en déployant des réseaux en fibre optique.
Les annonces se sont récemment multipliées. On peut citer :
- l'opérateur historique qui a lancé en janvier 2006 une expérimentation de fibre à l'abonné sur 6 arrondissements de Paris et 6 communes des Hauts de Seine. Il a raccordé 500 clients et entre dans une phase de généralisation sur les 10 plus grandes agglomérations françaises en 2007 avec une cible fin 2008 de 200 000 abonnés sur une couverture de 1M de foyers ;
- Free qui a annoncé, en septembre 2006, un investissement de 1Mdseuros d'ici 2012 pour le raccordement de 600 000 abonnés puis a racheté l'opérateur parisien CiteFibre ;
- Numéricâble-Noos qui vient de lancer une offre à 100Mbits auprès de 450 000 foyers déjà couverts par son réseau. L'objectif de l'opérateur est ainsi de couvrir 2,5M de foyer raccordables en fibre optique d'ici fin 2007 ;
- Neuf-Cegetel qui a racheté l'opérateur palois Médiafibre à Pau puis remporté la première délégation de service public pour développer un réseau résidentiel FTTH (Fiber to the home) sur 13 communes de la région parisienne représentant 500 000 habitants.
Afin de tirer les leçons des expériences étrangères et de mieux évaluer les enjeux sociaux, économiques et financiers du très haut débit, j'ai confié à l'IDATE en septembre 2005 une réflexion sur la situation de la France en matière de déploiement de réseau d'accès à très haut débit (THD), et sur les options susceptibles d'être examinées pour un soutien des pouvoirs publics. L'IDATE a notamment mis en exergue que :
- Le bon fonctionnement du marché de l'Internet haut débit pourrait servir de tremplin à l'émergence d'un marché du très haut débit ;
- la France, et plus largement l'Europe, n'a pas pris de retard en terme de déploiement de réseaux très haut débit ;
- du côté de la demande, l'augmentation des débits semble inéluctable, avec les applications multimédia et la progression des consommations simultanées dans les foyers ;
- le déploiement du très haut débit sur le territoire nécessite des investissements considérables, sans commune mesure avec le haut débit actuel ; l'Idate estime l'investissement nécessaire en France à 10 milliards d'euros pour couvrir les 40 % de la population des zones urbaines et à près de 30 milliards d'euros pour couvrir également les 60 % restants.
J'ai également organisé une consultation publique pour recueillir les avis de tous les acteurs sur les conclusions de cette étude. Cette consultation a montré l'intérêt quasi unanime des acteurs pour une implication des pouvoirs publics, afin de favoriser le développement du très haut débit et de faire bénéficier la France des retombées industrielles, économiques et sociétales de cette technologie.
J'ai ainsi institué, le 27 novembre dernier, le Forum du très haut débit et proposé un plan d'actions ambitieux comprenant 15 mesures précises, qui visent à établir un cadre favorable à l'investissement des opérateurs dans les réseaux à très haut débit et soutenir le développement de nouveaux services qui constitue un atout pour notre compétitivité, la croissance et l'emploi.
Le forum, composé des opérateurs, des équipementiers, des collectivités locales, de l'ARCEP et des différentes administrations, se veut un lieu d'échanges de bonnes pratiques, une force de proposition aux pouvoirs publics et un observatoire des déploiements des réseaux très haut débit.
III/ Mon objectif est d'atteindre 4 millions d'abonnés raccordés au très haut débit en 2012.
Les principales actions en cours :
- Rendre possibles des offres de location des fourreaux.
France Télécom propose déjà une telle offre de location en zones d'activités. Il convient que ce type d'offre soit étendue sur tout le territoire et généralisée aux autres propriétaires de fourreaux. L'ARCEP conduit une étude en ce sens. J'attache une très grande importance à ce type d'offres de locations, qui permettront de développer des réseaux fibre optique à moindre coût.
- Faciliter l'accès au génie civil existant (gaz, électricité, télécoms, réseaux d'assainissement)
Un accès au génie civil existant semble en effet l'approche la plus efficace en terme de diminution des barrières à l'entrée sur le très haut débit (le génie civil représente l'essentiel du coût) et est cohérent avec le développement d'une concurrence sur les infrastructures. J'ai pu apprécier l'intérêt de solutions innovantes de câblage, en particulier dans les égouts non visitables, dont certaines vous ont été présentées lors du Forum. Je souhaite faciliter l'utilisation de ce type de solution en incitant les gestionnaires des réseaux d'eau à donner un accès pour la pose de fibre.
- Permettre une approche locale (différenciant les zones), lors de l'analyse des marchés relatifs au très haut débit
Sans préjuger à ce stade de la nécessité de réguler les nouvelles infrastructures à très haut débit, nous ne pouvons exclure une intervention en cas de défaillance du marché qui aboutirait à la reconstitution de monopoles. En revanche, la garantie d'une rémunération adéquate prenant en compte les risques consentis par les opérateurs est essentielle.
La concurrence ne sera vraisemblablement effective que sur les zones les plus denses. Une approche locale de l'analyse des marchés, tenant compte de la présence ou non d'infrastructures alternatives, pourrait donc être encouragée. Cette question est abordée au niveau communautaire afin d'adopter une approche cohérente en Europe.
- Mutualiser le câblage interne des immeubles entre opérateurs.
L'ARCEP a été chargée de définir avec les opérateurs les modalités de partage des réseaux internes aux immeubles afin de minimiser les interventions des opérateurs dans ces derniers et sans créer de charges supplémentaires pour les gestionnaires.
L'ouverture du réseau de fibre optique du premier opérateur arrivé dans les immeubles à ses concurrents est indispensable si l'on souhaite éviter que de nouvelles barrières à la concurrence ne s'installent.
- Pré-câbler les logements neufs dans le cadre du label « logement multimédia ».
Afin de préparer la demande des ménages en très haut débit et de réduire structurellement les coûts de création de réseaux, j'ai souhaité sensibilisé les promoteurs immobiliers sur l'intérêt d'inclure dans leur projet des accès pour des réseaux très haut débit, notamment grâce à l'instauration d'un label « logement multimédia ». Compte tenu de la durée de vie d'un immeuble et du caractère inéluctable du très haut débit, une obligation de pré-câblage des logements neufs, au-delà de la labellisation en cours d'élaboration, permettrait des économies substantielles sur le long terme. Des amendements au projet de loi « TV du futur » ont été débattus sur le pré-câblage des immeubles neufs et pourraient être repris par la Commission mixte paritaire qui se réunit la semaine prochaine.
- Evaluer l'intérêt de réutiliser les câblages aériens électriques ou téléphoniques préexistants, faciliter la pose de fourreaux lors des actions de voirie et encourager la réalisation de travaux de génie civil allégés.
Dans les zones où les lignes d'abonnés électriques ou téléphoniques sont encore aériennes (essentiellement les zones rurales), le câblage en aérien est susceptible de grandement réduire les coûts de déploiement de la fibre. D'autre part, les modalités de publicité des autorisations de voirie semblent pouvoir être améliorés afin de mieux répondre aux besoins des opérateurs en terme de génie civil.
Je viens ainsi de confier une mission au Conseil général des technologies de l'information et au Conseil général des ponts et chaussées une mission d'études sur ces sujets. Ces derniers devraient ainsi prochainement auditionner les acteurs concernés, opérateurs télécoms et distributeurs d'électricité notamment.
- promouvoir le très haut débit pour les entreprises dans le cadre du label « zones d'activité très haut débit ».
Ce label doit donner une visibilité satisfaisante en matière d'accessibilité au très haut débit aux entreprises lors de leur décision d'implantation : il pourrait ainsi sanctionner le pré-équipement en fibre des zones d'activité. J'ai mandaté l'ARCEP pour définir les critères d'éligibilité à un label « zone d'activité très haut débit » en concertation avec mes services, le ministère de l'équipement, les représentants de collectivités locales et les opérateurs.
Alors que les aménageurs ont la charge de l'équipement des zones d'activité en infrastructures de génie civil (tranchées, fourreaux), la création d'un tel label stimulerait la concurrence entre zones d'activité et la prise en compte du très haut débit comme facteur différenciant, réduisant d'autant le besoin de financement public ou d'investissement des opérateurs télécoms. Le groupe de travail de l'ARCEP en charge de l'élaboration de ce label devrait me remettre ses propositions pour la fin du mois.
- Soutenir l'action des collectivités territoriales en défendant un recours aux fonds structurels pour le financement des infrastructures très haut débit
Cette proposition fait partie du Mémorandum français pour une Europe numérique que j'ai présenté à nos partenaires européens l'été dernier. Elle vise à multiplier le financement des expérimentations à grande échelle menées par les collectivités locales (comme celle lancée à Pau ou celle prévue par le Conseil Général des Hauts-de-Seine).
Telles sont les principales actions en cours en faveur du très haut débit auxquelles je vous invite à vous associer activement. Elles permettront à la France, qui est dans le peloton de tête du haut débit de prendre le virage du très haut débit dans les meilleures conditions.
Le potentiel formidable des TIC, nous devons le mettre à profit pour notre économie et plus largement celle de l'Europe, dans le cadre de la stratégie de Lisbonne. C'est un gisement de croissance et une source de créations d'emplois que nous devons exploiter.
Je sais pouvoir compter sur l'action déterminée de l'ensemble des acteurs économiques dans les évolutions permanentes de votre secteur.
Vous pouvez compter sur mon entier soutien. Je vous remercie.
Source http://www.industrie.gouv.fr, le 13 février 2007