Interview de M. Philippe de Villiers, président du Mouvement pour la France et candidat à l'élection présidentielle de 2007, à France 2 le 8 février 2007, sur sa stratégie et ses thèmes de campagne, "à cent pour cent anti-socialiste", l'islamisme et le communautarisme, et sur "le miracle vendéen".

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : France 2

Texte intégral


Q - Votre campagne repose sur cinq piliers : la France rurale, la famille, l'abandon des 35 heures, l'immigration, l'Europe des patries. Les grands problèmes comme le chômage, la dette de la France, la sécurité sociale ne sont-ils pas vos priorités ?
R - Pour le chômage, mon projet est de protéger à l'extérieur et de libérer à l'intérieur. A l'extérieur, il faut forcer l'UE à adopter une protection européenne dans l'esprit du Traité de Rome, et non dans celui du Traité de Maastricht. Il faut sauver l'outil de travail français et faire face à une véritable hémorragie de nos forces vives. Une hémorragie qui va du secteur primaire jusqu'aux laboratoires et aux centres d'appel.
A l'intérieur, il faut libérer le travail. D'abord symboliquement en abrogeant les 35 heures. Il ne s'agit pas de faire une réformette comme Sarkozy qui aurait pu déjà décider une abrogation et ne l'a pas fait quand il en avait le pouvoir. Aujourd'hui, la durée du temps de travail est fixée par l'Etat. Demain, elle devra l'être au niveau des entreprises et des branches professionnelles. Il faudra aussi libérer l'âge de la retraite, et ne pas en rester au niveau du couperet des 60 ans.
Gérer le travail, c'est aussi renverser la charge de la paperasserie, comme cela a été fait en Vendée. Ce n'est pas à une PME de remplir les formulaires de l'administration qui la contrôle. C'est l'inverse qui doit se produire. Sur 30 papiers, il n'y en a qu'un d'utile.
Q - Comment le savez-vous ?
R - Je le tiens de ma propre expérience vendéenne. J'évoque le problème du travail. Je pourrais aussi parler du pouvoir d'achat. Dans ce domaine, il faut lutter contre la pieuvre fiscale. A cette fin, il faut entreprendre une baisse drastique des impôts, supprimer celui sur les successions et baisser de 50 % les charges et les taxes sur les PME.
Q - Vous évoquez fréquemment votre expérience de président du Conseil général de Vendée. Mais l'expérience à la tête d'un département de 550.000 habitants vaut-elle pour un pays de plus de 60 millions de citoyens ?
R - Pas dans tous les domaines, mais dans beaucoup, oui. Regardez : je viens de recevoir le sujet pour le concours externe des adjoints de préfecture, émanant du ministère de l'Intérieur. Titre du sujet : "le miracle vendéen" !
Ce département est le premier département pour la création d'entreprises et d'emplois : depuis 10 ans, il s'y est créé deux fois plus d'entreprises et d'emplois que la moyenne nationale. Pour l'apprentissage, par exemple, on compte en Vendée deux fois plus d'apprentis qu'au niveau national : un pour 80 habitants, contre un pour 160 dans le reste de l'Hexagone. L'Education nationale présente trop souvent l'apprentissage comme une filière de l'échec. En Vendée, c'est une filière de l'excellence. La preuve : le Conseil général a créé à la Roche-sur-Yon une école d'ingénieurs à bac + 5 par apprentissage. Aujourd'hui, 300 ingénieurs y sont en formation.
L'approche de la mondialisation des élites mondialisés, c'est adapter l'homme à la mondialisation. Alors que pour moi, c'est adapter la mondialisation à l'homme. Regardez ce qui se passe en Vendée : nous avons 40 PME numéros un mondiaux dans leurs domaines respectifs.
Q - En 2006, vous avez écrit un livre, "Les Mosquées de Roissy" où vous vous présentez comme "le dernier défenseur de la République contre le communautarisme". Vous affirmez notamment que "l'islam est le terreau de l'islamisme, et l'islamisme celui du terrorisme". Ne faites-vous pas des amalgames et n'utilisez-vous pas des peurs irrationnelles à des fins partisanes ?
R - Je fais exactement le contraire ! La description de réseaux de bagagistes islamistes, que j'ai faite dans ce livre, s'est avérée parfaitement exacte. La presse s'en est d'ailleurs fait l'écho. J'ai posé un vrai problème. Et ce problème, c'est le choix entre la République et le communautarisme.
Q - N'est-ce pas un peu réducteur ?
R - Réducteur ? Un exemple : la République recule tous les jours dans l'espace public. Selon l'INSEE, on compte en France 120.000 familles polygames, 70.000 mariages forcés, dont 30.000 en Ile-de-France. Regardez ce qui se passe dans les quartiers. Je rappelle le cri d'alarme poussé par le préfet de Seine-Saint-Denis dans une lettre adressée au cabinet du ministre de l'Intérieur. Il y expliquait qu'il n'avait plus le contrôle des quartiers, passés sous le contrôle des barbus.
Chaque semaine, dans les hôpitaux, un médecin est frappé par un islamiste. Et à l'école, il y a un enseignement selon les catégories religieuses du halal [ce qui est autorisé, NDLR] et du haram [ce qui est interdit, NDLR], comme le signale, à sa page 25, le rapport de l'inspecteur d'académie Jean-Pierre Obin [sur les "signes et manifestations d'appartenance religieuse dans les établissements scolaires", NDLR].
Aujourd'hui, la République recule dans les esprits. A tel point que l'on s'interroge pour savoir si on a le droit de critiquer l'islam. De ce point de vue, le procès qui frappe "Charlie Hebdo", journal dont je ne partage pas le point de vue comme vous vous en doutez, est une affaire hautement symbolique. Dalil Boubakeur, le président du Conseil français du culte musulman, utilise l'expression d'"islamophobie". Le danger, derrière cela, c'est la tentative de limiter le périmètre de la liberté d'expression. C'est de faire passer pour raciste, et donc hautement soupçonnable, quiconque émet une critique sur l'islam.
Q - Personnellement, où vous situez-vous sur l'échelle politique ?
R - J'appartiens à la droite patriotique de gouvernement. Je suis de droite car je ne veux pas le retour de la gauche, qui serait catastrophique pour notre pays. Droite patriotique car hors de la souveraineté populaire et nationale, on ne peut pas redresser notre pays. En cela, je m'oppose à Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal qui, en tant qu'euromondialistes, éprouvent des difficultés à parler des délocalisations. J'appartiens aussi à une droite de gouvernement, et pas seulement de protestation. L'indignation et la colère sont des choses nécessaires. Mais comme je pense que mes idées sont majoritaires, je veux qu'elles s'incarnent au pouvoir.
Il y a en fait deux droites de gouvernement. La mienne. Et une droite américaine, euromondialiste et communautariste. Celle-ci propose la discrimination positive, le financement public des mosquées, le droit de vote des étrangers, la suppression de l'impôt sur le revenu pour les revenus des migrants. Elle a réalisé l'abolition de la double peine.
Moi, je suis à 100 % anti-socialiste. Nicolas Sarkozy l'est à 50 %. Regardez le droit opposable au logement. Lui y est favorable, moi, j'y suis opposé. Pour résumer, je suis la garantie que la droite est à droite. J'en ai marre qu'on promette une politique de droite et qu'on fasse une politique de gauche. Je dirais que Sarkozy, c'est Chirac en numérique.
Q - Vous attaquez beaucoup Nicolas Sarkozy. Vous désisterez-vous pour lui au second tour ?
R - On peut aussi se trouver dans une situation inverse : moi qualifié pour le second tour, Sarkozy éliminé au premier. Ne volons par aux Français leur choix. Je pense pouvoir figurer au second tour. On peut comparer la campagne électorale au tour de France, que j'aime beaucoup. Aujourd'hui, on est dans les épreuves de plat. Demain viendront celles de montagne. Le 20 mars, on sera au pied de l'Izoar. D'ici là, il peut se passer beaucoup de choses !
Le 20 mars, on saura qui est candidat. L'égalité des temps de parole sera enfin instituée. Tenez, en deux ans, savez-vous combien j'ai fait de 20 heures ?
Q - Pas vraiment. Quatre, cinq ?
R - J'en ai fait zéro ! Et quand j'interviens à la télévision, je passe à l'aube ou au journal de 23 heures.
Q - Vous disiez à l'instant que d'ici mars, il pouvait encore se passer beaucoup de choses. Avez-vous vos 500 signatures ?
R - Ca, c'est le code nucléaire.
Q - Vous ne direz donc rien ?
R - Je répondrai simplement que je suis vigilant, confiant et optimiste.
Q - Une dernière question : appréciez-vous votre marionnette des Guignols de l'info ?
R - Les humoristes me font rire. Nicolas Canteloup et Laurent Gerra, je les trouve drôlissimes. J'adore l'humour des Deschiens. Quant à Gérald Dahan, je regrette qu'il n'ait jamais cherché à me piéger. Je lui adresse un message par votre intermédiaire !
Les Guignols, eux, ne me font pas rire. Ils éditorialisent dans un sens caricatural et injurieux. Il n'y a qu'à voir la manière dont ils se sont comportés avec d'autres personnes comme Madame Chirac ou François Bayrou. Les poursuivre en justice ne sert à rien, ils sont protégés par la loi. Je n'en dirai pas plus... source http://www.pourlafrance.fr, le 2 mars 2007