Point de presse de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, sur le soutien de la France au projet de statut pour le Kosovo élaboré par Martti Ahtisaari, émissaire spécial de l'ONU, Pristina le 22 mars 2007.

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Circonstance : Voyage de Ph. Douste-Blazy dans les Balkans les 22 et 23 mars 2007 : point de presse à Pristina le 22

Texte intégral

Je suis heureux d'être de nouveau présent au Kosovo, où j'étais déjà venu en décembre 2005, alors que s'engageaient les négociations sur le futur Statut.
Je regrette que les négociations menées depuis février 2006 n'aient pas abouti à un accord entre Belgrade et Pristina, mais le projet de statut élaboré par Martti Ahtisaari, prenant en compte les positions exprimées par les deux parties tout au long des négociations, constitue, en l'absence d'une solution négociée, la meilleure des solutions possibles.
La France soutient pleinement ce projet de statut. Il présente une opportunité unique d'assurer la stabilité du Kosovo et de la région. Il constitue une solution équilibrée, conciliant les aspirations de la majorité de la population du Kosovo avec des garanties sérieuses offertes à la communauté serbe et aux minorités. La présence civile et militaire internationale qui accompagnera les autorités du Kosovo dans la mise en oeuvre de ce statut représente également une garantie forte pour l'adhésion de toutes les communautés à cette solution.
J'ai indiqué au Premier ministre Ceku et aux membres de l'équipe kosovare de négociation, que nous avions apprécié leur attitude constructive durant les négociations ainsi que leur soutien au projet de l'Envoyé spécial. Je les ai encouragés à demeurer unis face à l'étape cruciale qui va s'ouvrir à New York.
J'ai également appelé les autorités kosovares à travailler dès maintenant à la mise en oeuvre du projet de M. Ahtisaari, notamment pour tout ce qui touche aux droits des communautés non albanaises. Je leur ai indiqué que la France et la communauté internationale seraient à leurs côtés pour les aider à construire un Etat moderne, respectant les normes européennes et contribuant à la stabilité de la région.
J'ai aussi rencontré des responsables de la communauté serbe du Kosovo. Je leur ai expliqué pourquoi nous soutenions le projet Ahtisaari, qui leur offre un statut très protecteur et qui leur permettra de disposer de leurs propres municipalités, avec des compétences étendues, garanties par une forte présence internationale. Je les ai appelés à faire preuve de réalisme et à saisir l'opportunité qui leur était offerte. Leurs droits seront clairs. La plus importante mission de police et de justice jamais menée par l'Union européenne sera là pour les faire respecter.
Je les ai mis en garde contre les mauvaises solutions, qui n'ont apporté aux Serbes que le malheur et la guerre. La communauté internationale n'acceptera ni la partition du Kosovo, ni la violation du nouveau statut, que ce soit de la part des Albanais ou des Serbes.
J'ai enfin rencontré les responsables de la KFOR et de la MINUK. Je les ai remerciés pour leur formidable travail et encouragés à poursuivre leurs tâches, cruciales en cette période, et à garantir la stabilité, la paix et la sécurité du Kosovo.
Q - Je comprends que la MINUK ne parle plus de la mise en oeuvre des standards, mais comment un pays comme la France, avec toutes ses valeurs, a pu changer de position et renoncer elle aussi à défendre la mise en oeuvre des standards, au moins d'après ce que montrent certaines études d'instituts de recherche indépendants ?
R - La France n'a jamais varié. Il est nécessaire de comprendre aujourd'hui que nous défendons le droit international et le multilatéralisme, et, donc, par l'Organisation des Nations unies. L'ancien Secrétaire général, Kofi Annan, avait demandé à l'Envoyé spécial de s'occuper de ce sujet très délicat.
Je vous rappelle que c'est le dernier dossier sensible des Balkans et que nous avons ici 2.000 hommes, 2.000 jeunes Français qui, au risque de leur vie, sont là aussi au nom des valeurs universelles de la France. Vous comprendrez qu'il est important pour nous de suivre aussi ce que l'Envoyé spécial des Nations unies propose. Je pense que le projet de statut du Kosovo proposé par M. Martti Ahtisaari est au rendez-vous du respect des minorités et du souhait de la plupart des Kosovars.
L'intérêt général doit prévaloir. Je sais que c'est très difficile, très délicat et très dur, de part et d'autre. Je pense cependant que l'histoire des Balkans montre qu'il est important d'élever le débat et de considérer cette région dans une perspective européenne. Il me semble que c'est cela l'essentiel. Voilà ce que pense la France.
Q - Comment commentez-vous les déclarations de l'ambassadeur russe au Conseil de sécurité des Nations unies ? Est-ce que vous considérez la Russie comme un problème sur cette question et sur l'adoption d'une nouvelle résolution sur le statut du Kosovo ?
R - En qualité de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, la France estime essentiel pour une résolution qu'elle soit adoptée à l'unanimité. Je peux vous dire que M. Martti Ahtisaari conduit cette négociation depuis plus d'un an. Toutes les parties ont par conséquent eu largement le temps de s'exprimer et d'envoyer leurs propositions. L'Envoyé des Nations unies a bâti ses propositions sur le résultat de ces consultations.
Actuellement, on ne voit pas ce qui pourrait faire évoluer le dossier et je parle en particulier à ceux qui voudraient de nouvelles négociations. Je crois qu'il est également important de faire comprendre aux Russes que le Kosovo est un cas spécifique, que le droit international est respecté, qu'il n'y a pas de précédent, et qu'il convient de concevoir des mesures susceptibles de permettre aux uns comme aux autres de trouver leur place au Kosovo, tout en faisant en sorte que les pays de la région n'aient pas à redouter un tel statut.
Nous sommes en discussion avec tous les membres du Conseil de sécurité des Nations unies, permanent et non permanents, afin d'obtenir un consensus.
Q - Il y a des informations selon lesquelles la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont déjà entamé la rédaction d'une résolution, qui doit être adoptée par le Conseil de sécurité. Est-ce que vous pouvez confirmer cela ?
R - A partir du moment où nous soutenons le projet de M. Martti Ahtisaari, nous souhaitons évidemment agir rapidement, en respectant les positions respectives des membres du Conseil de sécurité de l'ONU. C'est d'ailleurs toujours ce que nous faisons.
Il faut bien comprendre qu'il convient de saisir l'opportunité qui se présente aujourd'hui. Je crois donc que nous devons poursuivre nos efforts de persuasion. C'est ce que nous avons commencé à faire en rencontrant différents pays. Par ailleurs, il serait préférable d'obtenir une position commune de l'Union européenne. Nous y travaillons actuellement.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 mars 2007