Texte intégral
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je suis heureux d'être avec vous et très honoré de remplacer le président Lula pour lequel j'ai beaucoup d'estime et d'amitié.
Les enjeux qui nous réunissent aujourd'hui sont centraux : la mondialisation est volontiers brocardée tant elle produit de dégâts parmi les populations du monde entier. Les entreprises, à tort ou à raison, sont facilement accusées de tous les maux.
Votre initiative, le "Global Compact", mérite donc d'être saluée et je suis admiratif des principes qui guident votre action.
Une initiative à encourager et à développer.
La crise que nous connaissons naît de l'inadéquation entre les problèmes qui se posent et les outils à notre disposition. Epidémies, réchauffement climatique, urbanisation sauvage, immigration mal contrôlée et impossible à stopper, crises financières, inégalités sociales, fracture numérique : les problèmes sont mondiaux, les outils sont trop souvent encore nationaux et administratifs.
Il nous faut inventer de nouveaux outils, de nouvelles solutions, qui s'affranchiront nécessairement des frontières des Etats, même si les Etats, cadre de l'expression démocratique, doivent continuer à intervenir.
Tout le monde n'est pas égal devant la mondialisation.
Ces outils sont à chercher à deux niveaux : en haut, par la réforme, la modernisation et l'ajustement des organisations internationales ; en bas, par une meilleure implication de la société et de ses forces vives, en particulier les entreprises que vous êtes.
S'il faut impliquer la société et ses acteurs, il appartient évidemment aux acteurs politiques de créer les conditions matérielles et intellectuelles qui permettront à chacun de se sentir concerné par des problèmes qu'aucune frontière ne pourra plus contenir. Il faut que chaque citoyen de la planète se sente concerné.
Tous ensemble, acteurs politiques, institutions, entreprises, ONG, nous devons inventer un nouveau projet de société fondé sur une responsabilité commune face à des problèmes partagés. Notre responsabilité, c'est de gérer les biens publics mondiaux.
Cela passe par le dialogue, l'écoute, la compréhension des intérêts parfois divergents mais souvent liés les uns aux autres. C'est pourquoi je suis heureux de soutenir aujourd'hui l'initiative du "Global Compact", une initiative de dialogue nécessaire.
La responsabilité des entreprises.
Le développement durable, la préservation de nos ressources, sont non seulement des enjeux politiques, sanitaires, sociaux, humanitaires, mais aussi, tout simplement, des enjeux économiques. C'est ce que vous avez compris.
Pour l'environnement comme pour la santé, le coût de l'inaction, si difficile à évaluer, est souvent sans commune mesure avec celui de la réforme, d'une réforme partagée et intelligente.
Mais les intérêts des entreprises sont aussi dans une société pacifiée, stable, confiante, tournée vers l'avenir. C'est le sens du programme de Heiligendamm pour la croissance et la stabilité qui invite, je cite, "les entreprises des pays du G8, des économies émergentes et des pays en développement à participer activement au Pacte mondial et à soutenir la diffusion de cette initiative à l'échelle mondiale ".
C'est ce que vous avez compris, et je souhaite que cette intelligence soit mieux partagée, que votre réseau s'étende à d'autres entreprises.
Pour cela, la visibilité de vos actions est déterminante. L'initiative d'aujourd'hui est nécessaire, mais elle n'est pas suffisante. Il faut ouvrir encore davantage vos travaux, aller à la rencontre des entreprises qui ne vous ont pas encore rejoints, et aussi des citoyens qui demeurent, je le disais, méfiants.
Le "Global Compact" offre pour cela un cadre tout à fait pertinent, mais dont le fonctionnement et les modalités demandent sans doute à être repensés.
Quel rôle, quel avenir pour le "Global Compact" ?
La première question qui se pose pour votre groupe est celle des limites de l'engagement volontaire. Si celui-ci est heureux, nécessaire, salutaire, il comporte également ses limites.
Alors que les Etats multiplient enfin les normes contraignantes, visant à faire de la responsabilité écologique un impératif juridiquement défini, la Responsabilité sociale et environnementale (RSE) des entreprises peut-elle se limiter à un code de bonne conduite auto défini ?
Autre question : comment articuler l'encouragement nécessaire des entreprises qui font la démarche volontaire d'intégrer ces problématiques, et la mobilisation, éventuellement coercitive, de celles qui s'en détournent ?
La question se pose également au niveau mondial : les entreprises, contrairement aux Etats et même aux organisations internationales, ont un champ d'action quasiment universel : comment concilier respect d'une concurrence - la concurrence n'est pas un but mais une fin en soi - non faussée et respect des impératifs de développement durable ?
La réponse à ces questions nous appartient collectivement.
A nous, pouvoirs publics, de savoir répondre à vos demandes, encourager vos pratiques responsables, vérifier la pertinence des conditions économiques nationales et internationales dont nous sommes responsables, et édicter éventuellement les normes qui permettront de les généraliser.
A vous, entreprises ouvertes sur le monde, de faire campagne auprès de vos partenaires et de vos concurrents pour que vos préoccupations, aujourd'hui pionnières, soient de plus en plus partagées.
Aux citoyens et à la société civile, enfin et surtout, de poursuivre une tâche nécessaire d'aiguillon exigeant, qui nous permettra de demeurer attentifs à ces enjeux cruciaux.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 juillet 2007